FLIM - Flaubert et le pouvoir des images

FLIM - Flaubert et le pouvoir des images


Glossaire technique du projet (A-M)

Glossaire réalisé par Guillaume Jaehnert, juin 2016

Aquarelle (n. f.)

Type de peinture qui désigne à la fois une technique picturale et son résultat. Elle s'obtient en appliquant une solution aqueuse colorée et translucide à base de pigments finement divisés, de liant (souvent de la gomme arabique), ainsi que d’anticoagulants (miel ou sucre). Présentée en godets, elle est étendue avec des pinceaux aux poils de grande qualité, et laisse apparent le support papier aux tonalités généralement claires. Sa principale caractéristique est de suggérer un jeu entre la couleur et la lumière ; elle se différencie de la gouache par sa qualité de transparence.

Le terme aquarelle provient de l’italien acquarella qui permet, selon Cennino Cennini, d’éclaircir les tonalités sombres des zones d’un dessin fait à l’encre. Utilisée dès l’Égypte ancienne, puis au Moyen Âge occidental (enluminures, paysages d’Italie de Dürer vers 1490), elle est abandonnée par les peintres du siècle classique, qui préfèrent la technique à l’huile mise au point par les frères Van Eyck. Elle est réintroduite en Europe au XVIIIe siècle par le védutisme (courant pictural italien basé sur la représentation en perspective de paysages urbains), et reconnue à l’Académie par Louis XVI. En Angleterre, elle joue un rôle majeur dans l'éclosion du romantisme jusqu'en 1820 (création de la Royal Water Color Society en 1804). Turner, puis les précurseurs de l’impressionnisme l'adoptent, parce qu’elle permet de saisir sur le vif les sensibilités d'une contemplation de paysages et de ciels, et qu’elle restitue toutes les variations de la couleur. Lors de l'Exposition Universelle de 1855, Théophile Gautier établit un compte rendu élogieux de la participation des aquarellistes anglais.

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Aquatinte (n. f.)

Type d'estampe qui permet d'imiter les irrégularités et les transparences chromatiques d'un dessin au lavis dans la gravure en taille-douce.

La graphie actuelle retenue pour l’aquatinte provient de l’italien acquatinta, qui signifie eau colorée. Utilisée depuis la seconde moitié du XVIIe siècle hollandais, elle est surtout appréciée, à la fin du XVIIIe siècle français, par les artistes et les industriels pour sa capacité à « graver dans la manière qui imite le lavis » (François-Philippe Charpentier (1734-1817), L’Avant-Coureur, 10 juillet 1762). Au XIXe siècle, elle connaît un fort développement en raison de sa capacité à reproduire avec précision le cliché photographique, dans le cadre des essais techniques pour dupliquer les tirages photographiques sur papier.

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Bas-relief (n. m.)

Type de sculpture à partie(s) saillante(s) dont l'épaisseur ne dépasse pas celle du fond. Le bas-relief s'obtient par ajout ou suppression de matière, de trois façons : un « relief écrasé » (à très faible saillie), un « relief méplat » (aux figures inégalement plastiques se détachant du fond par évidement), et un « semi-méplat » (aux contours modelés).

La forme et la signification retenues pour le bas-relief proviennent directement de l’italien bassorilievo, attestée au XVIe siècle. Durant l’Antiquité, le bas-relief revêt plusieurs appellations (anaglyphum, typos ou encore toreuma lorsqu’il est effectué sur un support de métal) ; il est employé dans la taille de pierre des sarcophages pour saluer la mémoire du défunt. Dans l’historiographie du XIXe siècle, on le considère parfois supérieur à la sculpture en ronde-bosse (sculpture dont on peut faire le tour) pour son aspect pittoresque et le jeu des ombres qu’il produit. Au XIXe siècle, il est un médium fréquent dans les monuments commémoratifs et funéraires (Antoine Étex, Monument à Ingres, 1868) ou encore civiques (Léopold Morice, Piédestal du monument de la République, Paris). Le bas-relief représente alors une alliance des arts en ce qu'il restitue des caractères picturaux (la surface tend à abandonner son aspect lisse) et sculpturaux (composition à la narrativité se rapprochant de celle de la peinture). À la fin du du XIXe siècle et au début du XXe, le bas-relief en béton évolue au sein des programmes architecturaux du Bauhaus, du Corbusier, et plus largement dans les édifices des années 1930.

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Bistre (n. m.)

Type de dessin qui désigne à la fois une technique graphique et son résultat. Le bistre s'obtient en mélangeant un filtrat de suie à une eau en ébullition qui contient de la gomme arabique. Les particules très fines de suie issues du filtrat restent en suspension dans une proportion qui garantit à la solution liquide une couleur plus claire que le noir. La coloration obtenue propose une gamme chromatique comprise entre l’ocre et le brun.

Utilisé depuis l’époque médiévale dans le traitement des ombres de certaines enluminures, le bistre est apprécié par Rembrandt (XVIIe siècle) pour sa stabilité, grâce au carbone qu’il contient, afin d'exécuter en lavis des esquisses préparatoires. Au XIXe siècle, il s'emploie massivement en lavis sur papier pour sa transparence et ses effets contrastés et, avant la sépia, pour l’aquatinte ; on en donne aussi une recette à base de tabac. On en apprécie alors certains modèles dans la galerie d’Apollon du musée du Louvre.

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Carte postale (n. f.)

Une carte postale est un ouvrage plan en carton au format généralement rectangulaire et de taille modeste, et dont le recto présente une image (estampe, photogravure, dessin, etc.) et le verso deux encarts, l’un pour la correspondance et l’autre pour l’adresse du destinataire.

À la fin du XIXe siècle, et à la suite du succès des expositions universelles, la carte postale devient un support de souvenir pour témoigner de son expérience. Aisément reproductible, elle connaît une large diffusion au XXe siècle en raison de son faible coût et de sa facilité d’emploi. Avant l’apparition des réseaux numériques, elle est une forme majeure de représentation du réel, et atteste du développement du tourisme en Europe.

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Craie (n. f.)

La principale caractéristique de la craie est de rehausser des tons foncés par ses couleurs variées aux tonalités claires. Elle s'obtient par mélange de calcite de carbonate de calcium et d’huile ; plus ou moins grasse (comme le pastel) ou sèche, elle se présente sous forme de bâtonnets.

Le terme craie provient du latin creta, qui désigne un matériau issu de l’argile blanche. Durant l’Antiquité, la craie est utilisée pour rendre davantage visible les bornes des jeux du cirque. Au Moyen Âge, on l'emploie dans la taille des pierres pour marquer les limites des découpes. À partir du XVe siècle, l’École du nord s'en sert en peinture et en dessin comme pigment principal pour obtenir un blanc indiquant les reliefs. Associée à la pierre noire et à la sanguine, elle produit un dessin « aux trois crayons » (Watteau). Au XIXe siècle, les œuvres graphiques accordent une place de choix à la craie, notamment dans les dessins académiques (Prud’hon). Sous l’appellation de craie de Briançon, elle est employée par les tailleurs pour délimiter la coupe des étoffes.

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Crayon (n. m.)

Type de minerai (principalement du graphite) de nature et de coloration variables, et par métonymie le bâtonnet de bois que l'on taille au fur et à mesure pour obtenir une pointe affûtée, et le porte-mine. L’aspect extérieur du crayon est souvent cylindrique ou parallélépipédique. Les mines non grasses sont propres à l'aquarelle.

Dès le Moyen Âge, on trouve des tiges pour écrire, faites de plomb glissées dans des étuis en cuir (celui du roi est appelé « créon » en 1526). Mais c’est à partir du XIXe siècle que le crayon est généralisé, grâce à la commercialisation en 1794 du crayon Conté à la mine artificielle de plombagine. On l’apprécie de couleur rouge pour les modifications des plans d’architecture, et sinon pour sa facilité à être effacé. On distingue plusieurs types de crayons : noir (composé de noir de fumée), grossier (pour les charpentiers et les tailleurs de pierre), ou encore lithographique (composé de cire, de suif et de savon). Le terme crayonner (au XIXe siècle, on trouve crayonnage) désigne la réalisation d’une œuvre au crayon, et plus largement l’esquisse d’une œuvre.

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Daguerréotype (n. m.)

Le daguerréotype est un type de photographie qui s'obtient en sept étapes : 1- polissage d'une plaque d'argent à l'aide d'abrasifs ; 2- sensibilisation de la plaque par l'exposition successive à différentes vapeurs ; 3- exposition en chambre (de trois à huit secondes) ; 4- développement par exposition à une vapeur de mercure chauffé à 90° C (moins de trois minutes) ; 5- fixage par immersion de la plaque dans une solution de thiosulfate de sodium et rinçage ; 6- virage à l'or ; 7- lavage et séchage. Louis-Jacques Mandé Daguerre (1787-1851) utilise généralement des plaques de 16,5 x 21,5 cm, puis le commerce retient des dimensions plus modestes (7 x 8 cm).

Depuis 1816, Nicéphore Niépce travaille sur des procédés nommés plus tard héliographiques, il diffuse une note sur son propre procédé en 1827 en Angleterre, il meurt en 1833. Son invention est reprise et améliorée par Daguerre, puis présentée publiquement comme le procédé daguerréotypique par Arago le 19 août 1839 à l'Académie des Sciences de Paris. Daguerre continue de perfectionner son procédé qui fait l'objet d'un commerce important en Europe et aux États-Unis durant la première moitié du XIXe siècle (sept millions de plaques exportées par la France en 1851).

Procédé très couteux, le daguerréotype est réservé aux classes riches et bourgeoises. Positif direct, donc non reproductible, il possède un statut d'œuvre, objet de collection aujourd'hui. En raison de son coût et de sa non reproductibilité, il est remplacé progressivement par des procédés bénéficiant de négatifs. Le daguerréotype est un procédé utilisé longtemps par les spécialistes pour la précision de l'image.

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Dessin (n. m.)

Tout en constituant un domaine à part entière des arts graphiques, le dessin est un terme générique qui désigne tout ce qui concerne le tracé graphique à l'état naissant (ébauche, croquis, composition, étude, esquisse, etc.) quel que soit le domaine de création (architecture, sculpture, peinture, etc.). Les principaux instruments graphiques propres au dessin sont le pastel, l'encre, le graphite, le crayon, la craie, la sanguine, etc.

La pratique du dessin existe depuis la Préhistoire, mais c'est à partir du XVe siècle en Italie que le disegno est considéré comme trace du primo pensiero et s'apprécie pour sa valeur conceptuelle et mentale. Pour Vasari, c'est un « procédé de l’intellect » (Vite, livre I, chapitre 1) qui désigne aussi bien la pensée d’un artiste que sa matérialisation, d’où l'emploi concurrent en français de la graphie dessein jusqu’au XVIIIe siècle. Commercialisé dès 1794, le crayon Conté popularise le dessin chez les artistes, les académies et les amateurs. Au XIXe siècle, une querelle oppose le néoclassicisme au romantisme : le premier, adepte d’une facture lisse (Jacques-Louis David), estime que le dessin conditionne l'œuvre, le second, partisan de la couleur (Eugène Delacroix), ne pense pas que la fonction du dessin soit de délimiter la couleur. Avant la photographie, il n'existe pas d'autres moyens pour représenter le réel. Le dessin fait partie de tout enseignement académique ; on en distingue plusieurs phases : la réalisation de figures géométriques à mains nues, puis des contours de l’anatomie d’après l’antique, et enfin copie d’après nature avec couleur et clair-obscur.

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Détrempe (n. f.)

L'appellation détrempe désigne à la fois une technique de peinture et son résultat. La détrempe s'obtient en mélangeant des pigments broyés dans de l’eau avec un liant à la colle de peau ou au stuc végétal. Dans le cas d’une application sur un mur, le support (plâtre ou équivalent) doit être encore humide (a fresco). En raison de sa faible résistance à l’humidité et à la chaleur, la détrempe une fois séchée doit être protégée par un fixatif.

Le terme détrempe est issu du latin (temperare « mélanger dans de justes proportions »), transformé en ancien français en destrempe (infusion délayée). La détrempe ne doit pas être confondue avec la tempera (dont le seul liant est l’œuf). On utilise la détrempe depuis l’Antiquité dans les grands décors muraux, puis au Moyen Âge dans certaines enluminures. À partir du XVe siècle, elle est concurrencée par la peinture à l’huile (surtout chez les Flamands) pour sa facilité d’emploi. Au XIXe siècle, on l'apprécie pour sa capacité couvrante, principalement dans les décorations des plafonds et des décors de théâtre. Les artistes préraphaélites en Angleterre et les nabis en France en tirent également parti.

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Diptyque (n. m.)

Le diptyque est une réalisation peinte ou sculptée, parfois mixte, présentée sur deux supports, généralement reliés et de dimensions modestes.

Durant l’Antiquité, l’appellation diptyque désigne tout ce qui est susceptible de présenter une composition double, et plus particulièrement les tablettes de cire sur lesquelles sont inscrites les noms et les portraits des magistrats. Au Moyen Âge, il est utilisé dans un contexte de dévotion privée : on le nomme parfois livret en raison de sa bipartition. Il oppose généralement une scène mariale au portrait du commanditaire, qui l'apprécie lors de ses déplacements militaires parce qu'il exalte la mémoire de l'être aimé. La Renaissance instaure jusqu'au XVIIIe siècle une tradition de représentation des époux (Piero della Francesca, Triomphe de la Chasteté, 1460-1470, Florence, Offices). À partir du XIXe siècle, son usage décline, des artistes comme Salvador Dalí (1904-1989) l'apprécient plus pour sa dimension conceptuelle que dévotionnelle (Couple aux têtes pleines de nuages, 1936, Rotterdam, museum van Boymans van Beuningen). L’appréciation du diptyque et de sa capacité narrative est rendue par la fréquente association d’inscriptions dans le registre inférieur, appelé prédelle.

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Eau-forte (n. f.)

Type d'estampe et de technique de réalisation appartenant au domaine de la gravure en creux, par opposition à la gravure en relief et l'impression à plat. L'eau-forte reproduit des images d'une plus grande liberté d’exécution et dans une plus vaste gamme de tonalités que l’estampe au burin. Elle s'obtient en cinq étapes : 1- une couche de vernis protecteur est appliquée sur une plaque de métal ; 2- un motif à la pointe d’acier y est exécuté ; 3- la plaque est plongée dans un bain d’acide qui attaque les parties non protégées par le vernis ; 4- la plaque est retirée du bain ; 5- elle est dénudée de son vernis, puis encrée.

On utilise l’eau-forte avec certitude depuis 1513, date de sa théorisation par Urs Graf. Mais c’est au XVIIe siècle qu'elle est adoptée largement par des artistes non spécialistes. Le graveur Jacques Callot développe un vernis dur qui assure à l’incision une plus grande précision. Après avoir été écartée durant la première moitié du XIXe siècle qui lui préfère la lithographie, l’eau-forte intéresse les impressionnistes et les paysagistes, à tel point que des artistes comme Édouard Manet ou Eugène Boudin font partie de la société des aquafortistes créée en 1862. L’eau-forte, dans la singularité de chacun des exemplaires qu’elle permet, questionne alors la dimension de reproductibilité technique de l’estampe.

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Ébauche (n. f.)

Dans son acception générale, l'ébauche renvoie à une étape précise de la création artistique, comprise entre l'esquisse et la réalisation. Une ébauche s'obtient selon le même procédé d'exécution que l'œuvre finale, et sur le même support. Elle se différencie de l'esquisse qui, elle, se réalise sur une surface indépendante de l'œuvre ; elle diffère également du non finito, qui désigne une œuvre laissant volontairement apparents certains traits de genèse.

Le terme ébauche provient de l’ancien français esbosquier (dégrossir des poutres), et de la forme esbochier (tailler la vigne). L'ébauche est souvent utilisée depuis la fin du XVe siècle, mais c'est à partir du XVIIIe siècle que son intérêt plastique est attesté. Au XIXe siècle, l'ébauche sculptée remporte un grand succès au Salon, elle peut être réalisée avec un ébauchoir en bois ou en métal. En tant que maquette, elle est fort utile pour présenter projets urbains et ensembles architecturaux.

Encre (n. f.)

L'encre est un matériau utilisé dans le dessin et l’écriture, de manière manuelle ou mécanique, généralement sur un support papier ; sa fonction est de produire des marques de couleurs variées. L'encre est un mélange de pigments et de liants. Il en existe deux types : l'encre au carbone et l’encre métallo-tannique. Les pigments d’une encre au carbone sont souvent issus du noir de fumée, et ceux de l’encre métallo-tannique des végétaux. Les liants, généralement à base d’huile, sont sélectionnés selon leur pouvoir d’accrochage sur le support.

Le mot encre provient du grec enkaustôn qui désigne l’encre rouge avec laquelle signaient les souverains : on l’utilise alors pour la calligraphie, puis au Moyen Âge en complément des enluminures. La création de l'imprimerie (fin XVe siècle) a favorisé les recherches sur les encres d’impression (travaux sur leur pouvoir colorant, leur répartition, leur coloration durable). Au XIXe siècle, les artistes s’intéressent, pour le dessin, aussi bien à l’encre au carbone (popularisée par les estampes japonaises), qu’aux encres métallo-tanniques dont la couleur claire après séchage rappelle celle des manuscrits médiévaux (effet recherché par Victor Hugo dans ses dessins). En 1856, est découverte l’encre à l’alizarine, qui assure une coloration plus durable grâce à sa teneur en indigo. Durant la seconde moitié du XIXe siècle, l'encre de Chine et les encres colorées à base de produits de synthèse (toutes deux difficiles à mettre en œuvre dans le cas d’une détrempe) intéressent les plasticiens pour les aquarelles. Le développement de la lithographie promeut une nouvelle encre dite synthétique, composée de cire, de suif et de résine, et appréciée pour sa résistance. L’encre sympathique, quant à elle, faite principalement de jus, présente la caractéristique de ne devenir visible qu'au moyen d'un procédé de révélation (source de chaleur, révélateur chimique). La poste s’est servie de l’encre oléique, enrichie en huile, pour coller les timbres.

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Enluminure (n. f.)

L'enluminure est une réalisation bidimensionnelle, généralement sur support papier, faite pour illustrer un texte auquel elle se réfère. Du latin illuminare, on lui accorde trois fonctions : éclairer, animer et scander le texte. Une enluminure s'obtient de deux manières différentes : ou bien on effectue un dessin sur une surface indépendante à l’aide d’un poncif (pochoir troué selon les contours principaux d’un dessin préalable), ou bien on dessine directement une esquisse, souvent à la mine de plomb, dans une zone délimitée par le scriptor. Après cette première étape, chaque enlumineur spécialiste d’un répertoire de formes différentes applique en peinture la couleur de la composition. Selon les sources, on peut également appeler enluminure une estampe qui a été frottée au vernis de térébenthine, puis enduite d’une huile choisie pour sa couleur : c’est alors l’effet de brillance qui prime. Le terme d’enluminure est impropre pour qualifier des œuvres postérieures au XVIIe siècle, qui lui préfère l’appellation de planches ou de figures, sauf dans le cas d’œuvres du XIXe siècle dont l’objectif est d’imiter les ouvrages médiévaux.

On emploie l’enluminure depuis l’Antiquité égyptienne, notamment dans le décor de papyrus liés à l’histoire des défunts. C’est durant la période médiévale que cette forme d’art se développe et culmine dans les livres, et plus largement dans les réalisations graphiques variées (documents d’archives, chartes, etc.) ; les enlumineurs sont généralement informés de la théorie présentée dans le De Arti illuminandi de la fin du XIVe siècle (Naples, Bibliothèque municipale). Entre les XVe et XVIIIe siècles, l’enluminure manuscrite cède la place aux décors issus de l’imprimerie, et annonce un perfectionnement de l’instruction par l’apprentissage visuel dans les livres de classe. Au XIXe siècle, les artistes préraphaélites anglais réunis sous l’appellation PRB (« confrérie préraphaélite ») ressuscitent l’art de l’enluminure dans le vœu commun de revenir à une forme d’art médiéval. On réserve alors le terme enluminure pour les peintures où les couleurs ne sont pas harmonieuses.

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Esquisse (n. f.)

Le terme esquisse provient de l’italien schizzare (jaillir), transformé en vieux français en esquicher, mot attesté au XVIe siècle en architecture pour présenter des plans. L'esquisse est un type de peinture ou de sculpture qui désigne le premier jet dans la conception d'une œuvre : elle en donne les grands traits, la composition d'ensemble. Elle s'obtient en exécutant, sur une surface plus petite que l'œuvre définitive, un schéma narratif davantage synthétique, et de facture plus libre.

On utilise l’esquisse avec certitude depuis la Renaissance (Léonard de Vinci, école maniériste). Entre la fin du XVe siècle et la fin du XVIIIe siècle, l’esquisse est très appréciée des commanditaires et des artistes, qui l’empruntent pour effectuer des recherches préalables aux cartons. Dès la fin du XVIIe siècle, lorsqu’une esquisse correspond à l’état définitif de l’œuvre future, elle s’inscrit dans un marché de l’art qui en est friand. Au XIXe siècle, le phénomène s'amplifie grâce aux nombreuses commandes passées par la bourgeoisie. Certains romantiques considèrent leurs esquisses comme partie intégrante de l'œuvre (Delacroix, La Mort de Sardanapale, 1827, Paris, musée du Louvre). Quant aux impressionnistes, ils bannissent l’esquisse et les artifices de l’atelier pour peindre directement sur le motif. L'esquisse représente un jalon fondamental dans l'enseignement artistique.

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Estampe (n. f.)

Issue de l’italien stampare (imprimer), l'estampe est une réalisation bidimensionnelle sur support papier dont la principale caractéristique est de permettre une forte reproductibilité technique d’une œuvre. On obtient une estampe en pressant une matrice incisée et encrée sur une feuille de papier. On distingue trois types d’estampe : en relief (taille d’épargne) lorsque la matrice supporte le dessin en relief, en creux (taille-douce) lorsque la matrice supporte le dessin gravé, et en plan lorsque le dessin est la surface de la matrice.

On utilise l’estampe dès le XVe siècle allemand et italien, puis durant les Temps modernes où elle est appréciée pour la reproduction des effets de la peinture et du dessin. Jusqu’au XVIIIe siècle, l'estampe de reproduction domine à des fins scientifiques principalement. Au XIXe siècle, face à la diffusion du procédé photographique, l’estampe évolue et son programme iconographique tend à s’affranchir du mimétisme de la reproduction pour représenter les créations originales. Cependant, la période napoléonienne favorise pour le siècle entier l’estampe caricaturale politique et sociale. De plus, si la lithographie perfectionnée par les imprimeurs Lasteyrie et Engelmann est populaire, l’eau-forte gagne le milieu impressionniste. C’est à partir du XIXe siècle que les estampes destinées au commerce sont numérotées en chiffres arabes, et les impressions spéciales (épreuves d'artistes, séries limitées) en chiffres romains.

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Étude (n. f.)

L'étude se réalise généralement d'après nature (études de paysage) ou d'après modèle (études de nu), dans le cadre d'un apprentissage ou d'une maîtrise technique. C'est une réalisation qui, lors de recherches techniques ou esthétiques, permet à l'artiste de résoudre une difficulté, de fixer un motif intéressant qui pourrait servir à une œuvre future, ou simplement d'exercer sa main et son œil. C'est pourquoi les études concernent souvent des morceaux particulièrement difficiles : mains, visages, drapés, raccourcis, etc. Si certaines études anticipent une œuvre à venir ou en cours (appelée étude préparatoire), d'autres sont conçues comme parfaitement indépendantes, ce qui n'empêche pas l'artiste d'y puiser son inspiration ou de s'en servir comme matériau de référence a posteriori.

Suivant les cas et l'usage auxquels elles sont destinées, les études peuvent être très abouties, avec des relevés très précis de couleur ou de modelé. Du point de vue du style, l'étude peut présenter un caractère académique, l'artiste cherchant avant tout l'exactitude du regard. Pour autant, la maîtrise technique dont témoignent certaines études leur confère le statut d’œuvre à part entière.

Le terme étude provient de l’ancien français estudie (application et parfois zèle), transformé en français moderne en estude (charge de travail). À partir de la Renaissance, l'étude recouvre un sens polysémique : d'une part, elle devient une discipline pédagogique, et d'autre part elle permet aux artistes de transposer les modèles antiques dans leurs propres créations. Au XIXe siècle, l'étude est appréciée soit pour réaliser des œuvres à l'iconographie classique (prévalence du nu, de l'antique et du dessin), soit pour restituer des compositions aux motifs non nobles, comme les cadavres. On distingue alors l’étude singulière, qui constitue l’exercice de maîtrise artistique, des études qui désignent plus précisément des motifs utilisés dans la composition finale.

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Fresque (n. f.)

Issue de l’italien fresco (frais), une fresque est une réalisation bidimensionnelle sur support mural propre à exécuter un programme iconographique dans un temps de réalisation court. On obtient une fresque en superposant sur une paroi murale une première couche de mortier à la chaux (intonaco) sur une seconde couche talochée (arricio) : la première reçoit un tracé grossier (sinopia) de la composition, et la seconde le programme réalisé à partir de pigments liés à l’eau. L’artiste doit anticiper le temps de réalisation de chaque surface, et délimiter préalablement et verticalement ses journées de travail (giornate) équivalentes à la surface qu’il peut couvrir sans rafraîchir le mortier. L’ensemble des giornate correspond à la pontata, soit l’étendue totale de la fresque.

Dans l’Antiquité gréco-romaine, la fresque témoigne de la diffusion méditerranéenne des quatre styles pompéiens. La fresque est davantage théorisée dans l’Italie médiévale et renaissante (Cennino Cennini, Léonard de Vinci), et au XVIIe siècle des historiens d’art tel Félibien la qualifient de « fraisque », en dérivé du terme français frais. Au XIXe siècle, l’art de la fresque fait l’objet d’un regain d’intérêt en regard d’un XVIIIe siècle l’ayant ponctuellement délaissée, notamment à travers l’entreprise des nazaréens allemands à Rome et du groupe « ingriste » en France, parmi lesquels Mottez qui traduit Cennini en 1858. Puvis de Chavannes participe à l’intérêt porté à la fresque dans une vaste entreprise de programmes décoratifs (Panthéon, Paris).

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Fusain (n. m.)

Le fusain est un produit issu de la calcination du bois du même nom ou d’autres essences (tilleul et sauge majoritairement) ; il permet d'obtenir un tracé de couleur foncée dont le rendu visuel moelleux provoque des effets de relief. Pour dessiner au fusain, on trace généralement les contours en premier, puis les grandes lignes, et ensuite les modelés et les ombres. En raison de sa pulvérulence, il doit être employé à l’aide d’un fixatif aqueux ou végétal et sur un support granuleux. On connaît trois types de fusain : le petit buisson (3 mm), le moyen buisson (8 mm) et le gros buisson (entre 10 et 20 mm). De même, trois types de mines sont utilisées : HB, H et B, correspondant respectivement à un caractère du plus dur au plus tendre. Les artistes recourent à la mie de pain frottée pour effacer un tracé au fusain.

Le terme fusain provient du latin fusago, lui-même dérivé de fusus, et désigne un arbre dont on se sert pour fabriquer des fuseaux. Depuis l’Antiquité, le fusain est utilisé sous forme de poudre pour exécuter des fresques sur de grandes parois murales, dont peu nous sont parvenues en raison de leur non fixation. Ce n'est que dans les ateliers vénitiens du XVIe siècle que son fixatif est développé et utilisé sur les cartons de fresques, de tableaux et de tapisseries. Au XIXe siècle, le porte-mine facilite l’emploi du fusain dans les esquisses préparatoires (Courbet), et des artistes comme Prud’hon l’associent au pastel et à la couleur.

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Gouache (n. f.)

La gouache est un matériau issu du mélange de pigments broyés à l’eau avec une gomme végétale ; elle dispose d’un fort pouvoir couvrant et se distingue de l’aquarelle par sa plus forte opacité. Pour dessiner à la gouache, on commence par tracer une ébauche foncée, que l’on recouvre ensuite par des tons, du plus sombre au plus clair.

Le terme gouache provient de l’italien guazzo, attesté depuis l’époque de Dante pour désigner des marécages. Pendant l’Antiquité égyptienne, la gouache est utilisée sur les papyrus, puis au Moyen Âge dans les enluminures, aussi bien en Occident qu’en Orient. Au XVe siècle, elle remplace la craie dans les rehauts. Durant les Temps modernes, elle est appréciée pour réaliser les esquisses préparatoires. Jusqu’au XVIIIe siècle, elle favorise les peintures de dimensions modestes (Canaletto, Guardi), puis au XIXe siècle elle est utilisée pour des œuvres plus grandes (Burne-Jones), ainsi que pour l’ornement (éventails, paravents, etc.) Elle est popularisée au XIXe siècle par son conditionnement en tube, en raison de sa facilité d’emploi et de son coût modéré.

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Graphite (n. m.)

Le graphite est un matériau naturel ou artificiel, à coloration noirâtre, obtenu soit en l'exploitant directement à l'état naturel après extraction, soit artificiellement par cuisson avec de l’argile et du soufre. On le nomme également mine de plomb, plombagine ou encore fer carburé. Son tracé est à la fois moelleux et ferme, et il est facile à tailler.

Lorsqu'en 1794, le blocus économique met fin à l'importation du graphite pur exploité dans la mine anglaise de Borrowdale depuis 1654, Jacques-Nicolas Conté invente un crayon composé d'une mine issue d'un mélange cuit de graphite et d'argile, puis enfermé dans un cylindre de cèdre (brevet déposé en 1795). Le crayon Conté est adopté par les artistes néoclassiques pour leurs dessins préparatoires, et par les orientalistes pour leurs carnets de voyage. Des artistes comme Cézanne l’apprécient pour leurs paysages, et d’autres l’emploient en l’associant à l’aquarelle.

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Gravure (n. f.)

La gravure est une catégorie d'estampe qui s'obtient par l'encrage et le passage sous presse d'une planche incisée, souvent en métal, recouverte d'une feuille. On distingue deux procédés : en relief (dite en taille d'épargne, ou encore xylographie), et en creux (dite en taille-douce). La gravure en relief s'obtient en évidant, sur une matrice en bois, les contours de la composition. La gravure en creux est soit directe lorsque l'incision du motif est appliquée directement sur la planche, soit indirecte lorsque l’incision est effectuée sur la couche de vernis qui protège la planche de la morsure du bain d'acide.

Le terme gravure provient de l’ancien français graveure qui désigne une rainure faite par une arbalète. En Europe, on utilise la gravure en relief depuis le Moyen Âge, mais dès la Renaissance son usage décline face au procédé de la gravure en creux (Dürer, Mantegna). En effet, aux XVII et XVIIIe siècles, les ateliers de gravure d’après les maîtres (Rubens, Van Dyck, Boucher, Watteau) se multiplient, et produisent en abondance des estampes issues du procédé en creux appréciées sur le marché de l’art. Par ailleurs, certains artistes se distinguent par l’originalité de leurs œuvres (Claude Melland, William Hoghart). Dans la seconde moitié du XIXe siècle, la pratique de la gravure en creux (comme l’eau-forte) est concurrencée par celle de l'estampe à plat (comme la lithographie).

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Grisaille (n. f.)

La grisaille est une technique qui permet d'obtenir un traitement chromatique en camaïeu de gris, c'est-à-dire une alternance de tons clairs et foncés de gris. Dans une grisaille, les tons gris peuvent parfois être soutenus par des demi-teintes claires : bleues et violettes pour les ombres, roses et jaunes pour les reflets ou encore brunes pour les accents. Lorsqu’un programme iconographique est traité en grisaille dans plus de la moitié de sa surface, il est qualifié de demi-grisaille.

La grisaille est utilisée depuis le Moyen Âge dans les enluminures, mais aussi dans les arts décoratifs (vitraux, émaux). À partir du XVe siècle, on l'apprécie pour son aptitude à imiter les effets visuels de l’architecture et de la sculpture, (dessins d'Andrea Mantegna, estampe rococo). Au XIXe siècle, la grisaille est utilisée différemment par les artistes romantiques pour ressusciter le monde médiéval (manuscrits, décoration liturgique et privée) ; on la considère propre à l’esquisse et on la confond parfois – à tort – avec le clair-obscur des compositions classiques. On parle alors de grisaillé pour une œuvre « barbouillée » de gris.

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Haut-relief (n. m.)

Le haut-relief est un ouvrage de sculpture dont la saillie est comprise entre la moitié et les trois quarts de l'épaisseur de son fond.

Très utilisé durant l'Antiquité et le Moyen Âge dans les décors des édifices civils et cultuels, le haut-relief est repris à partir du XVe siècle pour évoquer l'antique, tant en sculpture qu'en peinture. Au XIXe siècle, la pratique du haut-relief est largement adoptée à Paris dans les grands chantiers urbains (Carpeaux à l'Opéra Garnier ; les Morice, place de la République), dans la sculpture funéraire (Albert Bartholomé, Monument aux morts, cimetière du Père Lachaise) et dans les recherches formelles (Rodin, certaines figures de la Porte de l'Enfer).

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Huile (peinture à l'huile) (n. f.)

Au sens large, une huile est un matériau issu d'un mélange de pigments et de liant lipidique obtenu par pression d’ingrédients végétaux (fréquemment noix et colza, plus rarement lin et pavot). Afin de prévenir le phénomène d'embu (assèchement de la couche picturale), son emploi sur la toile doit être précédé par l'application de couches de protection. Son séchage tardif permet une exécution lente.

L’invention de la technique de la peinture à l’huile attribuée aux frères van Eyck a été transmise dans le foyer italien par Antonello de Messine. À partir du XVe siècle, l'huile est appréciée pour ses glacis stratifiés qui évoquent les habitudes visuelles du vitrail (effets de lumière et translucidité du médium oléagineux) ; son usage est théorisé par Oudry dans Réflexions sur la pratique de la peinture. Au XIXe siècle, la pratique de l'huile se diversifie grâce à l'indépendance progressive des peintres vis-à-vis de l'enseignement académique. Tandis que Prud'hon s'essaye à des combinaisons mixtes, les impressionnistes tirent parti de la standardisation des couleurs en tube (qui contiennent conservateurs, épaississants et agents siccatifs), pour peindre directement sur le motif dès la décennie 1840.

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Icône (n. f.)

Une icône est une composition sacrée qui permet la diffusion du dogme orthodoxe aux populations illettrées par un dialogue visuel avec le fidèle. L'appellation est issue du grec eikôn signifiant « image ». Une icône se distingue d'une œuvre profane par des règles strictes concernant le matériau et le sujet représenté. Ainsi les artistes, souvent des moines à la double formation artistique et spirituelle, privilégient les fonds dorés et brossent le portrait des corps glorieux des saints personnages. Une icône porte une attention particulière au regard du protagoniste ainsi qu'à ses attributs, dont l'importance narrative est rehaussée par la schématisation des éléments secondaires. On obtient une icône peinte selon la technique de l'encaustique ou de la détrempe sur bois. Dans son acception générale, on considère comme icône une peinture sur panneau de bois, mais on peut éventuellement réserver cette qualification à des réalisations de sculpture ou d'orfèvrerie.

On utilise l'icône depuis le VIIe siècle, où son exécution s'inspire des représentations mortuaires de Fayoum en Égypte et des catacombes de l'Empire romain. Son usage a été controversé durant la période iconoclaste (726-843). À partir du XIVe siècle, on crée également des icônes illustrées sur les deux faces d'un même panneau pour les processions. C'est dans les ateliers russes de Moscou et de Kiev que s'exprime principalement la création d'icônes jusqu'au XVe siècle. À partir du XVIIe siècle, les compositions des icônes tendent à gagner en complexité : multiplication des personnages, variété des sujets. Au XIXe siècle, la pratique de l'icône investit le domaine des arts populaires : tableaux et estampes à grande diffusion. À partir du XXe siècle, son usage décroît et des artistes tels Kasimir Malevitch nient sa dimension sacrée dans des compositions abstraites.

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Illustration (n. f.)

Une illustration est une représentation graphique exécutée pour compléter ou renseigner un texte qui lui est immédiatement associé. Elle est réalisée soit manuellement (un dessin), soit mécaniquement (une estampe). Le terme est impropre à désigner une composition dont le sujet ne comporte pas de liens explicites avec le texte : on la considère alors comme un décor.

Dans l'Égypte ancienne, l'illustration est utilisée dans les papyrus liés à l'histoire des défunts, puis au Moyen Âge elle est employée pour les scènes marginales dans les manuscrits. C'est à partir du XVe siècle, avec la diffusion de l'imprimerie, que l'illustration connaît un développement considérable, porté par les principaux centres d'édition (Louvain, Lyon et Paris). Au XVIe siècle, l'imprimeur Plantin s'installe à Anvers et supplante les productions françaises. Au XVIIe siècle, les illustrateurs répondent au goût des lecteurs pour l'esthétique baroque en agrémentant les frontispices des livres (ornements chargés, grands formats). Au XVIIIe siècle, la gravure en taille-douce accompagne les publications de romans, de traités scientifiques, ou encore de livres d'archéologie ou de voyage (abbé Saint-Non, Voyage pittoresque, 1781-1786, illustré par Hubert Robert et Jean-Honoré Fragonard). Au XIXe siècle, la mécanisation et la presse favorisent la diffusion de l'illustration, autant celles qui sont issues de l'influence néoclassique (Daphnis et Chloé illustré par l'école davidienne) que celles du courant romantique (Faust avec lithographies de Delacroix, 1828). Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, les procédés photomécaniques abondent et popularisent l'image de texte (Sonnets et eaux-fortes imagés par Corot et Manet, édition Lemerre, 1869). L’illustration renforce les ventes des journaux (L’Illustration, La Gazette des Beaux-Arts, etc.), et permet de redécouvrir des classiques de la littérature française et européenne (illustrations de Gustave Doré). La diffusion des œuvres d’art s’effectue également par le biais du livre illustré (Edmond et Jules de Goncourt, L’Art du XVIIIe siècle). En Angleterre, les préraphaélites exaltent, entre autres, les valeurs issues de l'imaginaire médiéval par la production de livres illustrés et enluminés (Millais et Rossetti, The Music master, 1855).

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Lavis (n. m.)

Type d'œuvre graphique, souvent sur support papier, propre à produire un tracé translucide et coloré qui laisse visible le support. Le lavis s'obtient en appliquant un matériau coloré fortement dilué dans de l'eau à l'aide d'un pinceau, d'une brosse ou d'une plume. Le terme est impropre pour désigner un papier teinté dans la masse, dont la coloration obtenue par bain n'est pas issue d'une application manuelle.

Dans l'Antiquité méditerranéenne, le lavis est utilisé dans le décor des vases funéraires (lécythes), puis au Moyen Âge occidental dans la préparation des zones de manuscrits destinées à recevoir un décor. Aux XVe et XVIe siècles, les artistes de l'École du nord l'emploient en complément de la peinture à l'huile pour suggérer les effets de relief, et ailleurs en Europe pour traiter les ombres dans le dessin. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, parallèlement aux dessins d'architectes, des artistes comme Rembrandt puis Greuze font un usage différent du lavis : le premier lui préfère sa variété de tonalités au sein d'une même composition, le second sa singularité lorsqu'il est associé aux croquis de couleur. Au XIXe siècle, le lavis est le miroir de la génération romantique qui, dans le sillage de Rembrandt, y expose sa sensibilité par les variétés de contrastes et le dialogue qu'il établit avec l'estampe. On le pratique aussi sur pierre. Alors qu'Hugo, Manet et Degas préfèrent la plume, les préraphaélites anglais préfèrent le pinceau. Pour exécuter des ombres, l’artiste doit avoir une connaissance de la géométrie descriptive, c’est-à-dire du rapport de proportion entre l'objet et sa portée.

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Lithographie (chromolithographie) (n. f.)

Type d'estampe à plat par opposition à la gravure (en creux ou en relief) qui s'obtient en dessinant un motif à l'aide d'un corps gras sur une plaque de pierre poreuse (généralement calcaire). La pierre – qui fait office de matrice – est ensuite humidifiée et subit un encrage (corps gras) au rouleau : l'encre grasse s'attache aux contours du motif à reproduire, mais pas aux parties humides, laissées vides. La planche est alors prête pour l'impression sur feuille. On distingue quelques variantes de la lithographie telles que la zincographie (estampe à plat obtenue à partir d’une planche de zinc), ou la lithotypographie (qui permet notamment le report d’anciennes reproductions illustrées).

La graphie retenue pour la lithographie est attestée au XVIIe siècle pour désigner l’étude des pierres ; dès le XIXe siècle, la lithographie désigne le domaine de la reproduction artistique. La lithographie est une technique récente dont le brevet est déposé à Londres en 1800 par Aloys Senefelder pour reproduire avec facilité les partitions musicales et les œuvres littéraires. Elle remporte tout de suite un franc succès : Engelman et Lasteyrie ouvrent un atelier de lithographie à Paris en 1816, le baron Taylor recense les monuments français dans Voyages pittoresques en 1820, Goya poursuit ses recherches esthétiques dans Les Taureaux de Bordeaux en 1824. La lithographie élargit l'industrie du livre illustré. Le milieu impressionniste l'apprécie parce qu'elle restitue mieux les effets dilués de l'eau ou de l'air que les procédés d'estampe en taille-douce ou en relief. De nombreux artistes s'emparent de la lithographie (Daumier pour ses caricatures, Géricault, Delacroix, etc.). Autour de 1850, les artistes recourent à deux opérations : la réserve (traitement d'une zone non encrée pour recevoir une ornementation particulière après l'impression) et le report (application d'un dessin fait sur une feuille rugueuse par pression sur une matrice). À la fin du XIXe et au début du XXe siècle, autant les artistes nabis (Bonnard, Vuillard, Roussel), que Matisse et Picasso s'expriment par la lithographie en couleur, appelée chromolithographie, dont l'emploi nécessite la superposition successive de plusieurs matrices monochromes dans un ordre établi (bleu, jaune, rouge et noir). Bien que le brevet de la chromolithographie soit déposé par Engelman en 1837, ce n'est qu'autour de 1890 que son usage se répand dans l'affiche (Chéret, Mucha) et, à partir de la seconde moitié du XXe siècle, dans l'édition d'estampes contemporaines originales.

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Manière noire (n. f.)

La manière noire, dite aussi manière anglaise ou encore mezzotinte, est un type d'estampe correspondant à une technique directe de gravure en creux appréciée pour sa faculté à traduire le clair-obscur et à atténuer la tonalité du noir. On obtient une gravure en manière noire en réalisant de fines incisions sur l'intégralité de la planche au moyen d'un outil à la forme hémisphérique et aux dents aiguisées (berceau), puis en dessinant au burin les contours du motif et au brunissoir les parties claires : la matrice est prête pour accueillir une encre épaisse. Dans le cas d'une manière noire polychromée, chacune des matrices correspond à une couleur. En raison de la fragilité de la matrice, une manière noire ne permet pas un tirage très élevé (autour d'une vingtaine d'exemplaires).

La manière noire est probablement inventée par Ludwig von Siegen en 1642, et le berceau par Blooteling en 1672 ; aussitôt, son emploi fréquent en Europe, notamment outrEMANche, lui vaut son nom de manière anglaise. En 1720, Jakob Christoph le Blon dépose un brevet pour la manière noire en couleurs. Souvent associée à l'eau-forte, la manière noire est très prisée en Europe dans la copie des clairs-obscurs de la peinture dans les estampes ; Reynolds l'utilise beaucoup  dans ses portraits de l'aristocratie anglaise.

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Médaille (n. f.)

Type d'objet décoratif semblable à une pièce de monnaie de grande dimension, sans valeur monétaire. On distingue le médailleur (celui qui fabrique les médailles), du médailliste (celui qui en a le goût).

Utilisée depuis l'Antiquité comme effigie des rois déifiés, la médaille est reprise au Moyen Âge pour désigner les anciennes monnaies et représenter les emblèmes du christianisme. Dans le sillage de Pisanello, à qui l'on attribue la réalisation de la première médaille commémorative en 1439, elle devient à partir de la Renaissance un objet de collection employé dans l'imitation du modèle antique : portraits des empereurs, inscriptions grecques, etc. À partir du XVIIe siècle, se développent dans les cours européennes des cabinets de curiosités avec des médaillers, des meubles à multiples tiroirs. Au XIXe siècle, la médaille fait l'objet d'une fabrication intense, d'une part pour répondre aux divers prix et cérémonies instaurées par l'Empire et la République, et d'autre part pour saisir les recherches entre peinture et sculpture dans le bas-relief.

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Mine de plomb (n. f.)

La mine de plomb est un outil propre au dessin qui contient du graphite et non du plomb. L'erreur vient de la couleur foncée identique obtenue à la fois par le graphite et par la pointe de métal. Elle est faite de céruse brûlée et possède une couleur orange très foncée.

Le terme mine dérive de son sens utilisé dans l’ancien français pour désigner les cavités d'où l’on extrait les minéraux. La mine de plomb s'utilise en Allemagne dès le XVIe siècle suite au remplacement des pointes de métal, puis au XVIIe siècle dans les Flandres (associée à la pierre noire) et en France (associée au lavis à l'encre de Chine). Au XVIIIe siècle, on emploie la mine de plomb dans les portraits, parfois rehaussés à l'aquarelle. Le crayon Conté à base de plombagine artificielle, apparu en France dès 1794, est préféré par les artistes (David et Ingres) pour les esquisses et les études.

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