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Title
A name given to the resource
1849 ( 19 Juillet - 14 novembre ) : François de retour en France, analyste ou acteur politique ?
Creator
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Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
Guizot, François (1787-1874)
Subject
The topic of the resource
Absence
Politique
Parcours politique
Posture politique
Presse
Travail intellectuel
Histoire
France (1848-1852, 2e République)
Publisher
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Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1849-09
1849-12
Language
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Français
Anglais
Rights
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Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0.
Description
An account of the resource
<div style="text-align: justify;"><strong>Les préparatifs du retour de Guizot dans le réseau politique parisien</strong><br /><br />Le corpus s’ouvre sur la lettre que François rédige à son débarquement au Havre le 19 juillet 1849. Il revient de son exil en Angleterre causé par la révolution de 1848. (Voir les collections <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/39" target="_blank" rel="noopener">1848 (1er août -24 novembre) : Le silence de l'exil</a> et <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/37)." target="_blank" rel="noopener">1849 ( 1er janvier - 18 juillet) : De la Démocratie en France, Guizot reprend la parole</a>)<br /><br />De son côté Dorothée reste en Angleterre, et ne rentre à Paris que trois mois après, le 17 octobre 1849. Le corpus se termine lorsque Guizot retrouve Paris, un mois plus tard. Ainsi, les lettres de François qui constituent se corpus sont rédigées au Val-Richer et à Broglie, durant un séjour chez son ami le duc Victor de Broglie (Voir la notice Le duc <a href="https://www.guizot.com/fr/amities/le-duc-victor-de-broglie/" target="_blank" rel="noopener">Victor de Broglie</a>)<br /><br />La réception de Guizot tant dans la rue que dans les institutions publiques, et, la posture à adopter sur la scène politique sont les thématiques qui structurent le discours épistolaire des deux amants. Ainsi, le rôle de Dorothée dans l’existence sociale et politique de François apparaît alors qu’ils préparent ensemble son retour à Paris et la reprise du salon de la princesse diplomate.<br /><br />
<p>Voir les mots-clés : <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=politique&facet=tag%3A%22Politique+%28France%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Politique (France)</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=politique&facet=tag%3A%22Politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Politique</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=r%C3%A9ception&facet=tag%3A%22R%C3%A9ception+%28Guizot%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Réception (Guizot)</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=posture&facet=tag%3A%22Posture+politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Posture politique</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=relation&facet=tag%3A%22Relation+Fran%C3%A7ois-Doroth%C3%A9e+%28Politique%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Relation François-Dorothée (politique)</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=salon&facet=tag%3A%22Salon%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Salon</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=femme&facet=tag%3A%22Femme+%28politique%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Femme (politique)</a></p>
<p><strong><br /><br />Rentrer chez soi</strong></p>
<p>Il faut tout d’abord noter le plaisir de François Guizot lorsqu’il retrouve sa propriété du Val-Richer, il écrit le 20 juillet 1849 :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Ma maison et mon jardin sont en bon état, comme si j’en étais sorti hier. Des fleurs dans le salon, et dans la bibliothèque ; mes journaux sur mon bureau, les allées nettoyées, les parquets frottés. Cela m’a plu et déplu. Tant de choses m'ont rempli l'âme depuis que je ne suis venu ici ; je ne puis me figurer qu’elles n'aient laissé ici aucune trace. Et puis cette tranquillité tout autour de moi, cette non interruption du passé et de ses habitudes, cela me plaît, et même me touche, car je le dois aux soins affectueux de deux ou trois personnes, amis ou serviteurs, qui ont pris plaisir à tout conserver ou remettre en ordre, et qui m’attendaient à la porte. J’ai rencontré beaucoup d'affection en ma vie ; je voudrais en être assez reconnaissant.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3018" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a> </p>
<p>Dorothée est bien consciente du plaisir de Guizot à retrouver son bonheur domestique, son parc et son jardin entouré de sa famille, et répond deux jours plus tard :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous voilà donc en France ! Que c'est loin de moi. Je suis charmée de connaître le Val Richer. Je saurai où vous chercher. Vous aurez un grand plaisir à vous retrouver là, à retrouver vos arbres, votre pelouse, vos sentiers. Tout cela reposera votre âme. Vous avez là tout le contentement intérieur, de la famille, de la propriété. Je vous manquerai c'est vrai, et je crois que je vous manquerai beaucoup, mais vous avez mille plaisirs que je n’ai pas. Et certes dans cette séparation je suis plus à plaindre que vous. Vous le sentez. Je voudrais me mieux porter et j'y prendrai de la peine, pour vous faire plaisir.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3016" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p><strong><br /><br />Se séparer</strong></p>
<p>Ce retour détermine une séparation et un éloignement. (Sur le quotidien de François et Dorothée en Angleterre voir la collection 1<a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/39" target="_blank" rel="noopener">848 ( 1er août -24 novembre) : Le silence de l'exil</a>) Dorothée évoque avec nostalgie les habitudes prises en Angleterre, telles que leurs conversations intimes.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je bavarderais bien cependant si je vous avais là dans ce fauteuil, si bien placé pour un entretien intime, comme je regarde ce fauteuil avec tendresse et tristesse !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3020" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>L’évocation de leur conversation se fait à partir du fauteuil que Guizot utilisait. Le lendemain le dimanche 22 juillet 1850, elle l’évoque encore :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Toujours ce fauteuil devant moi et vide. Comme c’est plus triste de rester que de partir.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3022" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>C’est dans une lettre du 27 juillet que François l’évoque à son tour, en exprimant nettement la coordination des pratiques de conversation et de correspondance :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je cause comme si j'étais dans mon fauteuil du Royal Hotel. Pauvre illusion !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3031" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>François est bien décidé à continuer ses échanges avec Dorothée sans craindre qu’ils puissent être lus. Il écrit le 20 juillet le lendemain de son arrivée :</p>
<p style="padding-left: 40px;">On me dit qu’il faut prendre garde au nouveau directeur de la poste de Lisieux. Je n'y prendrai point garde. On lira mes lettres si on veut. On y trouvera peut-être quelque amusement, peut-être même quelque profit. On n’y trouvera rien que je sois bien fâché qu’on ait lu. Si j’avais quelque chose à vous dire que je tinsse vraiment à cacher, je saurais bien vous le faire arriver autrement que par la poste. Faites comme moi. Ne nous gênons pas en nous écrivant. Nous n'avons aucune raison pour nous gêner, et nous avons assez d’esprit pour nous ingénier, si nous en avions besoin. Les gens d’esprit sont toujours infiniment plus francs et plus cachés que ne croient les sots.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3018" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a> </p>
<p><strong><br /><br />Réception de Guizot à son retour en France </strong></p>
<p>Le retour de Guizot en France ne se fait pas sans une certaine inquiétude. Il est attendu au Havre par quelques amis, politiques, diplomates et journalistes. Il cherche à rassurer Dorothée dès son arrivée le 19 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J’ai trouvé sur le port le duc de Broglie, MM. Piscatory, Plichon, Herbet, Mallac, Léon Pillet<a href="#_ftn1" name="_ftnref1"><sup>[1]</sup></a>, et assez de foule. Pas un mot agréable, ni désagréable. Des regards curieux ; beaucoup de chapeaux levés. De la déférence dans l’indifférence. Il reste assez de personnes devant l'hôtel de l’Amirauté où je suis logé. Leur attitude me convient.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3017" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a> </p>
<p>Dorothée n’a pas encore reçu de nouvelles de Guizot mais elle suit son retour en France dans la presse et écrit le 21 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J'attends aujourd’hui une lettre du Havre. Le Times ce matin dit que vous y êtes arrivé, et que votre réception a été des huées. Cela fait bien de l'honneur à vos compatriotes !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3020" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>En effet, Guizot complète le récit de son arrivée sur le sol Français le 20 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je me suis vanté trop tôt hier en vous disant que je n’avais rencontré dans l’accueil du Havre rien d’agréable, ni de désagréable, de la déférence dans l’indifférence. Cela a un peu changé deux heures après. Cinquante ou soixante gamins se sont réunis sous les fenêtres de l’auberge où je dînais, et se sont mis à crier : « à bas Guizot ! » et à siffler. Cinquante à soixante curieux, ou plutôt curieuses, se sont attroupés autour d’eux. Pas l’ombre de colère ni de menace ; une curiosité mécontente de ce que je ne paraissais pas entendre les cris, et une petite démonstration malveillante organisée par le journal rouge de la ville qui l’avait annoncée le matin en annonçant mon arrivée. J'ai dîné tranquillement au bruit de ce concert, et je suis descendu dans la rue pour monter dans la voiture qui devait me reconduire à l’auberge où je couchais. J’ai trouvé autour de la voiture une douzaine de gentlemen qui en écartant les gamins, l’un m’a dit d’un très bon air : « M. Guizot, nous serions désolés que vous prissiez ce tapage pour le sentiment de la population de notre ville ; ce sont des polissons ameutés par quelques coquins. Non seulement nous vous respectons tous ; mais nous sommes charmés de vous voir de retour et nous espérons bien vous revoir bientôt où vous devez être. » […]. Cela n’avait pas la moindre gravité en soi, beaucoup comme symptôme. Rien n’est changé et je ne suis point oublié. Ce matin, sur le bateau du Havre à Honfleur, les gentlemen étaient en grande majorité et m'ont fait fête. […] Ce pays-ci est bien animé, et bien prompt à saisir les occasions de le montrer. Je n’en suis que plus décidé à rester bien tranquille chez moi. Il n’y a absolument rien de bon à faire, et ma position est bonne pour attendre.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3018" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>La réception chahutée de Guizot au Havre le conforte dans sa décision de rester en retrait au Val Richer, même si en réaction il reçoit des témoignages de sympathie en soulignant son retour sur le sol français comme un événement. Il écrit le 25 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">La petite scène du Havre a bien tourné. De bons juges m’écrivent de Paris : « Tout compté et bien compté, ce n'est point à regretter. Puisqu'il n’y a rien eu de grave autant vaut au risque de quelques embarras et de quelques inquiétudes, que vos éternels adversaires vos ennemis naturels aient fait la faute de provoquer ce qui a houleusement échoué. Il ne faut pas regretter l'éclat qu’ils ont donné à votre rentrée. Votre retour en France est un fait considérable. Il est considérable pour vos amis comme pour vous-même, en raison de votre passé et probablement aussi en raison de votre avenir. On l’a compris on le comprend, et l'on n'a pas su dissimuler sa mauvaise humeur. Encore une fois, tant mieux. »<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3438" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot reprend ses marques en évaluant la place et le rôle qui lui sont attribués par ses amis politiques. François commence par écouter les membres de son réseau. Il écrit le 23 juillet, quatre jours après son arrivée en France :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J’ai passé ma matinée hier à recevoir des visites. Dix-neuf. Mon impression reste la même. Rien n’est changé au fond, dans la situation générale, ni dans la mienne. Seulement tout a éclaté et s'est exaspéré. C’est toujours la même lutte entre les mêmes classes et les mêmes passions, et j'y tiens toujours la même place. Mais évidemment le moment n'est pas venu pour moi, quand je le pourrais, de la reprendre activement. Mes amis se troubleraient. Mes ennemis s’irriteraient. Et les uns et les autres saisiraient le premier prétexte pour rejeter sur moi seul la responsabilité du premier malheur. Et le public spectateur les croirait. Je n’ai qu'à attendre, si le temps, en s'en allant, n'emporte pas trop tôt ce qui me reste de forces, je puis avoir encore un grand moment. Si je m'en vais avant que ce moment n’arrive, j'ai lieu d'espérer aujourd’hui que justice sera faite à mon nom.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3023" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot comprend que la place qui lui est réservée le porterait sur le front de bataille. Il évoque un possible retour sur la scène politique tout en concluant que les conditions n’y sont pas encore favorables. Le 10 août 1849, Dorothée écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Restez comme vous êtes à l’écart, tranquille. Cela a très bon air. Profit tout clair. Soyez en sûr.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3057" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Le 15 septembre 1849, Dorothée lui fait part de sa conversation avec l’ancien diplomate Théobald Piscatory (1800-1870) qui poursuit sa carrière politique sous la deuxième République en tant que député monarchiste :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Voici votre lettre avec extrait de Piscatory. C’est un esprit [?] & qui est resté doctrinaire. Je vous en prie ne le redevenez pas.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3122" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>François y répond le 17 septembre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Les décadences me déplaisent toujours. Soyez tranquille ; je ne redeviendrai pas doctrinaire. Fatuité à part, je ne voudrais pas redevenir rien de ce que j’ai été. Je crois que ce serait déchoir. Redevenir jeune en restant ce que je suis à la bonne heure. Et si je ne me trompe, vous en diriez autant.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3125" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot se sent fort de son expérience et de son expertise. Il n’exprime jusqu’ici aucune nostalgie de ses succès de jeunesse.</p>
<p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1"><sup>[1]</sup></a> Théobald Piscatory (1800-1870), Ignace Plichon (1814-1888), Edmond Herbet (1813- ?), Léon Pillet (1803-1868)<strong><br /><br /><br /><br />Guizot s’impatiente au Val-Richer</strong></p>
<p>Plus d’un mois après, François commence à s’interroger sur la réception de son action publique. Ne sera-t-elle jamais reconnue ? Aussi, c’est en s’adressant à Dorothée qu’il s’autorise à comparer ce retour d’Angleterre avec un avenir incertain, à son retour de son ambassade à Londres en 1840 avec plus d'espoir :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous rappelez-vous bien le 29 octobre, il y a neuf ans mon arrivée à Paris le 26 et les trois jours qui précédèrent la formation du Cabinet ? Je suis décidé à ne pas croire que ce jour-là, et tout ce que j’ai fait du 29 octobre 1840 au 24 février 1848 m'ait été bon à rien. Mais aujourd’hui il n’y a que Dieu qui sache à qui cela a été et restera bon.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3209" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Il semble que Guizot tienne moins à reprendre sa place ou une place qu’à ce que son œuvre politique de 40 à 48 soit reconnue. Il faut noter que Guizot considère son action de cette période et non celle du début de la Monarchie de Juillet. Et c’est cette conscience de la tâche accomplie qui lui permet d’affirmer le 30 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J'ai dit à M. Moulin, ce que je pense comme je le dirai quand je serai à Paris. J'ai acquis le droit de tout dire. Ce qui ne veut pas dire que j'en serai toujours. Mais je ne me laisserai gêner par personne.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3211" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>La reprise du salon de Dorothée permet de multiplier les éléments pour évaluer les conditions du retour de François à Paris. Le 2 novembre, elle lui écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Attendez-vous à beaucoup d'ingratitude. Vous êtes le politique de la monarchie de juillet. Absurdité incrustée dans le gros du public. Il ne faut pas que vous disiez que vous n’avez jamais eu tort. Je lui ai répondu qu'il n'y a que les sots qui se croient infaillibles. Je vous répète que Ste Aulaire est excellent.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3216" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot répond le 3 novembre</p>
<p style="padding-left: 40px;">Merci, merci. Cela ne me paraît pas, à tout prendre, inquiétant pour le moment. Mes tendres amitiés à Sainte-Aulaire quand vous le reverrez. Je crois plus que personne qu’il n’y a que les sots d'infaillibles, mais je suis très décidé à ne pas me laisser affubler du moindre tort prétendu pour épargner à d'autres la honte de leurs gros péchés.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3219" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Il poursuit le 4 novembre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">La vérité est grosse comme une montagne, et moi, je ne suis pas encore mort. Il faudra bien qu’on y voie clair qu’on le veuille ou non. Et comme l’ingratitude ne me donnera point d'humeur, je prendrais mon temps et les bons moyens.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3221" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot comprend que chacun le dissuade de revenir, mais il suggère qu’il envisage de nouvelles modalités d’action publique et de présence politique. Le 5 novembre Guizot écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Ils me recommandent de ne pas arriver au milieu de la crise : " Quelque réservé quelque prudent que vous soyez, on commentera votre arrivée vos paroles, en vous fera parler quand vous n'aurez rien dit. Il ne vous est pas permis, de vous renfermer dans la vie privée ; vous serez, malgré vous malgré nous, traité en homme public. " Voilà leurs paroles. Ce qu’ils disent est vrai. Je n’y vois pas autant d’inconvénients qu'eux ; et ces inconvénients, s'ils existent, existeront à peu près toujours, A quelque moment que j’arrive, il m’arrivera ce qu’ils disent. Pourtant, je crois que pour ce moment-ci, ils ont raison, et qu’il vaut mieux ne pas fixer de jour précis. Quel ennui, et quel prélude, d'ennemis ! Je suis dans une veine de tristesse profonde, pour vous, pour moi. Si j'étais là, je serais bien moins triste, bien moins inquiet. Votre inquiétude à vous me désole au-delà de ce que je puis dire. J’espère qu'elle est exagérée ; mais je la trouve bien naturelle. Si j'étais là, vous seriez moins inquiète et moi probablement pas inquiet du tout. Ah, que le monde est mal arrangé !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3223" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Dans cette lettre, Guizot semble un peu atteint par ses perspectives pessimistes sur son retour diffusées par son réseau politique. Il semble pris dans une tension entre la volonté de revenir et de reprendre la parole et la prudence. Il ne veut pas précipiter son retour. Le 7 novembre, il écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je ne veux pas retourner étourdiment à Paris. Je ne veux pas tarder inutilement à y retourner. Ce qui est inutile en ce genre serait inconvenant pour moi. Je ne me fais pas la moindre illusion sur ce qui m'attend à Paris. L’ingratitude ne me touche point ; il n'y en aura jamais plus que je n'en attends. Les stupidités populaires, les perfidies infatigables, et infiniment détournées, des rivaux d’autant plus acharnés qu’il sont un peu honteux, les froideurs embarrassées, des indifférents, les poltronneries, des amis, je compte sur tout cela. J'étais puissant avec grand combat. Je suis tombé avec grand bruit. Si j'étais mort, encore passe. Mais je reviens. La plupart s'étonnent, quelques uns craignent que je ne sois pas mort. Ma présence est pour les uns un reproche, pour les autres, une inquiétude, pour d’autres simples spectateurs, quelque chose d'inconnu, et par conséquent d'incommode. Tout cela me fait une situation délicate, et qui aura des difficultés. Je ne puis pas la changer. Je ne veux pas l’éluder. S’il y a un bon avenir, je surmonterai ces difficultés. S'il n'y a pas un bon avenir, peu m'importe tout cela.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3227" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>François ne conditionne pas son retour à Paris à une possible reprise de son action politique directe. Il explique comment tout bien considéré, chacun sera dérangé par son retour. Après près de quatre mois au Val-Richer, sa décision est prise. Bonne ou mauvais réception, François veut faire face et ne veut pas se condamner à l’isolement en France. Le 5 novembre, trois semaines après son arrivée, Dorothée rouvre son salon parisien et fait part à François de ce qu’elle a pu sonder parmi ses visiteurs. Dorothée apparaît comme la personne avec laquelle il peut réfléchir ouvertement à son retour politique. Dorothée n’est pas seulement une oreille attentive, depuis son retour à Paris, elle est au plus près pour recueillir des informations nécessaires à l’analyse de François :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Tout le monde entrait chez moi hier en riant, une sorte de plaisir de retrouver du vieux. Cela m’a plu, le commencement m’a plu ; à la fin de la soirée, j’ai dit à Montebello, avec amertume « personne n’a prononcé le nom de M. Guizot. » Cela m’a choquée. Voilà les hommes. Voilà le temps. Montebello m’a cité une exception, le Prince Wittgenstein. Je lui en saurai gré. [..]Que vous écrit-on sur vous ? Adieu. deux choses à relever. Molé ne croit pas à l’Empire. Et en fait d'avenir, il ne croit plus qu'une Monarchie constitutionnelle soit possible autre part qu’en Angleterre.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3222" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Et François répond le 11 novembre à ce que lui rapporte Dorothée quelques jours plus tôt le 5 novembre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je dis comme vous pour ce qui touche ma situation personnelle en reparaissant. Nous verrons. Nous devons avoir ce qu’il faudra d'habileté et de bon sens. Le silence qui vous choque ne m’étonne pas. C'est de l’embarras et de la platitude, faute d’esprit et faute de cœur. Deux choses, si je ne me trompe, mettront à l'aise, autant qu’ils peuvent être à l'aise, les poltrons et les sots ; d'abord ma manière, et bientôt ma situation même. [...] Je ne vois absolument aucune raison d'hésiter, et je suis décidé. Il n’y a que deux espèces de personnes qui me conseillent de ne pas revenir ; celles qui s'en iraient volontiers elles-mêmes, et celles qui ont envie que je ne revienne pas du tout.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3235" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Le 10 novembre, Dorothée fait part à Guizot d’une réception positive de la part d’Achille Fould, Ministre des Finances entre 1849 et 1867 :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Achille Fould m’a abordée, il m’a parlé avec tristesse de la situation qu'il a acceptée, & puis tout de suite il a passé à me demander de vos nouvelles quand vous reviendrez. J’ai dit que j’espérais dans 8 ou 10 jours. Et puis, que pense M. Guizot ? - M. Guizot pense qu’il faut soutenir l’autorité tant qu’elle donne des gages d’ordre & de force. - M. Guizot a un trop bon esprit pour ne pas penser cela.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3232" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=posture&facet=tag%3A%22Posture+politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">les lettres</a> sur la posture politique à adopter par Guizot <span><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=posture&facet=tag%3A%22Posture+politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22"></a></span></p>
<p>Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=r%C3%A9ception&facet=tag%3A%22R%C3%A9ception+%28Guizot%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">les lettres</a> sur la réception de Guizot <br /><br /><br /><br /><br /></p>
<p><strong>Préparer le retour de Guizot à Paris : rouvrir le salon parisien de Dorothée<br /><br /></strong>Voir les lettres <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=relation&facet=tag%3A%22Relation+Fran%C3%A7ois-Doroth%C3%A9e+%28Politique%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Relation François-Dorothée (Politique)</a><br /><br /></p>
<p>Le retour de Dorothée à Paris à l’automne alors que François Guizot est encore au Val Richer conduit à la reprise de leur relation épistolaire politique. Guizot s’y prépare, il écrit le 16 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Quand vous m'écrirez de Paris, vous m'enverrez les faits, je vous renverrai mes réflexions. En attendant que faits et réflexions nous soient communs.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3183" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Ce corpus met en lumière le fonctionnement du duo politique. Au travers de ses correspondances et conversations, Dorothée doit rassembler des faits sur la situation politique à Paris. Elle constitue un matériau pour l’élaboration d’une analyse par Guizot. Le 25 octobre, il exprime nettement la dynamique de leur relation et comment il pratique à deux l’analyse des faits politiques :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Quel ennui d'être loin et de ne pas avoir avec vous, sur ce point-là encore plus que sur tout autre, ces conversations infinies où à force de se tout dire, on finit par atteindre ensemble à la vérité et pas s'y reposer ! Enfin dans trois semaines nous en serons là.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3201" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Dans une lettre du 18 octobre à propos de la politique étrangère menée par l’Angleterre, Guizot donne un exemple de conclusion établie à deux :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Les questions du Cabinet anglais ne se décident pas par la politique étrangère. Nous nous le sommes dit cent fois, et nous l’oublions toujours.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3186" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Lorsque Dorothée rentre à Paris, François décrit comment constituer un salon où l’on puisse prendre des informations mais aussi en diffuser. D’un côté François garde encore ses distances avec la vie politique parisienne, de l’autre, Dorothée sonde et prépare le terrain en reprenant ses activités sociales et politiques parisiennes. Il écrit le 19 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous avez toute raison ; arrangez votre vie ; faites-y entrer comme il vous convient, les personnes qui sont à la fois indifférentes et importantes. Que chacun vienne et prenne place. Cela se fera plus aisément et plus sûrement moi n’y étant pas. Je viendrai quand ce sera fait et nous en jouirons ensemble. On ne sait pas combien on peut lever de difficultés et concilier d'avantages avec un peu d'esprit, et de bon sens, en se laissant mutuellement l’espace et la liberté nécessaires pour agir, et pour réussir. Chacun pour soi, et pour soi seul, c'est l’égoïsme, la solitude dans la glace ; chacun par soi- même et selon sa propre situation, c’est la dignité et le succès ce qui ne nuit en rien à l'affection. Je reviens à mon désir du moment. Je suis bien curieux de votre impression sur Paris et sur la situation actuelle.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3188" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Afin que le salon de Dorothée n’apparaisse pas au service de la reprise de la vie politique de Guizot, ils agissent séparément. L’autonomie de Dorothée est manifeste, et c’est d’ailleurs ainsi qu’elle peut lui être le plus utile. Guizot n’est plus ministre des Affaires étrangères. Mais Dorothée reste une princesse russe, diplomate, anglophile et installée en France en rayonnant encore sur la diplomatie et les monarques européens. Dans la même lettre, il cite un autre exemple de femme qui mène une pratique d’action politique et diplomatique dans son salon.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous ai-je dit, ou savez-vous que lord Normanby<a href="#_ftn1" name="_ftnref1"><span>[1]</span></a> est très assidu chez Madame Howard ; et que c’est surtout par elle qu’il agit sur le Président ?<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3188" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Guizot note les visites de l’ambassadeur d’Angleterre en France chez Madame Howard, la maîtresse de Louis Napoléon en soulignant que c’est elle qui « agit sur » le président de la République. Dans la lettre suivante, du 20 octobre, Guizot précise les personnes importantes à convier au milieu des indifférents.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Dans l’arrangement de votre vie, indépendamment des anciennes connaissances qu’il faut reprendre, peut-être y en a-t-il aussi quelques nouvelles qu’il vous convient de faire, soit à cause de leur value personnelle, soit à cause de l’importance qu'elles ont prise dans ces derniers temps. Montalembert, Falloux (s’il vit), Bussierre, d’Haussonville, Piscatory<a href="#_ftn2" name="_ftnref2"><span>[2]</span></a>. Je ne crois pas qu’il faille étendre votre cercle, et les étrangers en sont, et doivent en être, toujours le fond. Mais vous aurez des vides. Du reste, vous jugerez mieux de cela après quelques jours de séjour que moi d’ici. J’avais pensé à M. de Tocqueville, s'il se recherchait comme de raison. Il est homme d’esprit, de bonne compagnie et sûr je crois. Mais il ne serait pas sans inconvénients. Je vous dis ce qui me passe par l’esprit.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3190" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
Guizot réfléchit à la composition du salon de Dorothée et en éclaire les caractéristiques. La première est sa nature internationale. Son salon est l’espace des relations diplomatiques. La seconde est d’introduire de nouvelles personnalités politiques. Après la révolution de 1848 et l’avènement de la République, Dorothée doit actualiser la composition de son salon. Neuf jours plus tôt, Guizot mentionne déjà Tocqueville en dressant un portrait positif notamment grâce à un point commun qu’ils partagent : une action coordonnée à une œuvre intellectuelle.<br />
<p style="padding-left: 40px;">M. de Tocqueville a été, jusqu'ici, un homme d’esprit dans son Cabinet et dans ses livres. Il est possible qu’il ait de quoi être un homme d’esprit dans l'action et gouvernement. Nous verrons. Je le souhaite. C’est un honnête homme et un gentleman<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3172" target="_blank" rel="noopener">lettre</a></p>
<p>Deux semaines plus tard, Dorothée rend compte à François. Les deux personnes qui restent toujours importantes en 1849 sont Molé et Thiers, les deux personnalités avec qui Guizot a dû naviguer au cours de la Monarchie de Juillet.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Mon salon hier était comme il y a deux ans, excepté vous de moins, et M. Molé & Berryer<a href="#_ftn3" name="_ftnref3"><span>[3]</span></a> de plus, & quelques légitimistes. La diplomatie au complet moins l'Angleterre. […] Voici le vrai de la situation. Les ministres changent, mais deux hommes restent immuables, importants, sont Molé et Thiers. La diplomatie se tient à eux. On leur parle comme à des Ministres & on leur montre souvent plus qu'aux ministres.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3222" target="_blank" rel="noopener">lettre</a><br /><span><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3222"></a></span></p>
Dans une lettre du 31 octobre, le fonctionnement du couple apparait avec son usage de l’art de converser de Dorothée
<p style="padding-left: 40px;">Puisque M. Hübner est enfin venu vous voir, ce dont je suis bien aise, causez un peu à fond avec lui de la Hongrie. Ce pays-là est entré dans l’Europe. On regardera fort désormais à ses affaires. Est-ce sage la résolution qu'on vient de prendre à Vienne de maintenir, quant à la Hongrie, la Constitution centralisante de mars 1849, et de considérer son ancienne constitution comme abolie, au lieu de la modifier ? Je n’ai pas d'opinion ; je ne sais pas assez bien les faits ; mais je suis curieux de m'en faire une. Puisque M. Hübner est un homme d’esprit il vous reviendra souvent.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3213" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
Une fois que le comte de Hübner, l’ambassadeur d’Autriche à Paris, devient un membre du salon de Dorothée, François indique à Dorothée les questions à lui poser et vers quoi orienter la conversation.
<p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1"><span>[1]</span></a><span> Normanby, Constantine Henry (1797-1863 ; Marquess of) </span></p>
<p><a href="#_ftnref2" name="_ftn2"><span>[2]</span></a> Il s’agit d’hommes politiques attachés à une droite libérale. Charles Forbes René, comte de Montalembert (1810-1870), Alfred de Falloux (1811-1886) ministre de l’instruction publique jusqu’en octobre 1849, Alfred Renouard de Bussière (1804-1887), Joseph Othenin Bernard de Cléron, comte d'Haussonville (1809-1884).</p>
<p><a href="#_ftnref3" name="_ftn3"><span>[3]</span></a> Berryer, Pierre Antoine (1790-1868), journaliste, avocat et député des Bouches-du-Rhône à partir de 1848.</p>
<p><br /><br /></p>
<p><strong>L’art de converser de Dorothée </strong></p>
<p>Alors que Dorothée a repris sa vie parisienne depuis trois semaines et qu’elle en fait le compte-rendu à François, la qualité de sa correspondance fait écrire à François :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous êtes la plus excellente et fidèle glace (miroir est trop petit) qui se puisse voir. Vous me renvoyez toutes les hésitations, fluctuations alternatives du public qui vous entoure. Hier, l'Empire infaillible ; aujourd’hui, impossible. Les brusques revirements d'inquiétude et de confiance d’abattement et d’entrain, ces oublis frivoles et ces préventions entêtées, ce mouvement perpétuel qui avance si peu, ce je ne sais quoi d'immobile, je devrais dire d’incorrigible qui persiste sous ce besoin insatiable de changement et de nouveauté, tout cela, qui est la France, et surtout Paris dans la France, tout cela est dans vos lettres. Tantôt vous le peignez parce que vous l'avez observé ; tantôt vous le reproduisez sans vous en douter. Ce qui, pour vous, est spectacle devient à l’instant tableau dès que vous en parlez. Cela est rare et charmant.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3227" target="_blank" rel="noopener">lettre</a><span> </span></p>
<p>Alors que la question de l’établissement d’un nouveau régime politique, et de la transformation du Président en Empereur, François souligne avec enthousiasme la maîtrise de Dorothée dans l’art de transcrire les tendances et les fluctuations politiques mais aussi de les saisir au travers d’une analyse fine des détails. (Sur la pratique épistolaire de Dorothée voir aussi la collection<br /><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/16)" target="_blank" rel="noopener">1837 (1<sup>er</sup> juillet- 6 août) : Les premières semaines de la relation et de la correspondance entre les deux amants</a> )</p>
<p>Dans ce corpus de correspondance, un autre écho se laisse entendre. Alors que Chateaubriand meurt en juillet 1848, la publication posthume des Mémoires d’Outre-tombe se fait en feuilleton dans <em>La Presse</em> à partir du 21 octobre 1848 (Voir le <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4311597/f1.image.zoom" target="_blank" rel="noopener">numéro</a>), Dorothée craint une critique de ses pratiques diplomatiques et politiques. En effet, la princesse de Lieven et Chateaubriand ont fait partie du même réseau diplomatique en Angleterre. Le 2 octobre Dorothée demande à François :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Et à propos encore, avez-vous lu ce que M de Chateaubriand dit de moi dans son Outre tombe.<br /><span>Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3155" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </span></p>
<p>Le 4 octobre, Guizot répond :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je ne lis pas les Mémoires d’Outre-tombe. C’est vous qui me faisiez lire ces frivolités-là, Outre-tombe, Raphael. Quand je ne vous ai pas, je ne me doute pas qu'elles paraissent. Je vais demander les passages où il est question de vous.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3159" target="_blank" rel="noopener">lettre </a></p>
<p>C’est douze jours plus tard, le 16 octobre, que Guizot répond à Dorothée après s’être renseigné, vraisemblablement auprès d’Armand Bertin<a href="#_ftn1" name="_ftnref1"><span>[1]</span></a> du Journal des Débats qui a été au service de Chateaubriand lors de son ambassade à Londres en 1822.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Armand Bertin était attaché à l'Ambassade de M. de Châteaubriand. Un soir en rentrant M. de Châteaubriand lui dit : « Madame de Lieven me traite bien mal. Elle ne sait pas à qui elle a affaire ni quels sont mes moyens de me venger. Certainement je me vengerai ? » Votre article d’Outre-tombe a été écrit alors de verve de vengeance. Il y a ajoute depuis ce qui me regarde. Je vous dis ce qu’on vient de me dire. Je ne l’ai pas lu.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3183" target="_blank" rel="noopener">lettre </a></p>
<p>Dorothée a quelques raisons de craindre la parution des Mémoires de Chateaubriand. L’auteur consacre un portrait à Dorothée et lui retire d’emblée ce qui lui est reconnu : son esprit et son expertise dans les pratiques de cour. Chateaubriand écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Comme elle était hardie et passait pour être bien en cour, elle était devenue extrêmement fashionable. On lui croyait de l'esprit, parce qu'on supposait que son mari n'en avait pas; ce qui n'était pas vrai : M. de Lieven était fort supérieur à. madame. Madame de Lieven, au visage aigu et mésavenant, est une femme commune, fatigante, aride, qui n'a qu'un seul genre de conversation, la politique vulgaire ; du reste, elle ne sait rien, et elle cache la disette de ses idées sous l'abondance de ses paroles.<br />Chateaubriand, F.-R. de, <em>Mémoires d’outre-tombe</em>, Tome 4 ; Edmond Biré (ed.), (1899-1900) p. <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9660797n/f267.item.r=m%C3%A9moires%20d'outre%20tombe" target="_blank" rel="noopener">249</a> </p>
<p>C’est à Londres que Dorothée prend sa carrure diplomatique, sans se cantonner au rôle d’une femme d’ambassadeur. Elle devient diplomate.. En quelque sorte, Chateaubriand la remet à sa place, et une fois qu’il lui a ôté ses qualités intellectuelles et politiques, il lui retire ce qui peut alors donner plaisir à fréquenter une femme : sa beauté. Mais c’est sur son esprit et sur l’intérêt de ses conversations et de ses correspondances qu’il insiste et à la vulgarité, il ajoute la puérilité de ses pratiques diplomatiques.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Quand elle se trouve avec des gens de mérite, sa stérilité se tait ; elle revêt sa nullité d'un air supérieur d'ennui, comme si elle avait le droit d'être ennuyée ; tombée par l'effet du temps, et ne pouvant s'empêcher de se mêler de quelque chose, la douairière des congrès est venue de Vérone donner à Paris, avec la permission de MM. les magistrats de Pétersbourg, une représentation des puérilités diplomatiques d'autrefois.</p>
<p>Le portrait continue sur la description du contenu de son discours épistolaire. Sa politique et sa diplomatie semble restreinte à organiser des mariages. Encore une fois, Chateaubriand la ramène à sa condition de femme.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Elle entretient des correspondances privées, et elle a paru très forte en mariages manqués. Nos novices se sont précipités dans ses salons pour apprendre le beau monde et l'art des secrets ; ils lui confient les leurs, qui, répandus par madame de Lieven, se changent en sourds cancans. Les ministres, et ceux qui aspirent à le devenir, sont tout fiers d'être protégés par une dame qui a eu l'honneur de voir M. de Metternich aux heures où le grand homme, pour se délasser du poids des affaires, s'amuse à effiloquer de la soie. Le ridicule attendait à Paris madame de Lieven. Un doctrinaire grave est tombé aux pieds d'Omphale : « Amour, tu perdis Troie. »<br />Chateaubriand, F.-R. de, Mémoires d’outre-tombe, Tome 4 ; Edmond Biré (ed.), (1899-1900) p. <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9660797n/f267.item.r=m%C3%A9moires%20d'outre%20tombe" target="_blank" rel="noopener">250</a> </p>
<p>Chateaubriand ne manque pas de terminer sur les relations de la princesse avec des grands hommes en ne soulignant que leur caractère sexuel et frivole. Le point d’orgue est atteint lorsqu’il évoque la relation entre Dorothée et François avec ironie. Le portrait est si acide qu’Edmond Biré l’éditeur de 1898 se sent obligé d’annoter ce passage en citant un témoignage d’un autre secrétaire d’ambassade de Chateaubriand :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Elle avait épousé Christophe Andréiëvitch, prince de Lieven, général dans l'armée russe, gouverneur du tsar Alexandre II et pendant vingt-deux ans ambassadeur à Londres. Le portrait qu'en trace ici Chateaubriand est trop poussé au noir. « Bien qu'étrangère, dit M. de Marcellus<a href="#_ftn2" name="_ftnref2"><sup>[2]</sup></a>, elle dominait les filles d'Albion par une in- contestable supériorité d'attitude et 'de manières. Elle savait causer de tout ; elle avait été fort jolie, et sa taille gardait encore beaucoup plus tard une grande élégance ; elle possédait une merveilleuse aptitude pour la musique ; sa mémoire lui rappelait des opéras entiers qu'elle exécutait à ravir sur le piano. » Justement réputée par son esprit et sa rare intelligence des affaires publiques, elle a été liée avec tout ce que son temps comptait de personnages éminents, dans tous les partis et dans toutes les nationalités. Castlereagh et Canning ont été particulièrement de ses amis, ainsi que le prince de Metternich ; lord Grey lui écrivait chaque matin de son lit un billet demi-politique, demi-galant. On lui a attribué une liaison avec George IV. A Paris, où elle s'était fixée après la mort de son mari, elle a été l'Egérie de M. Guizot qui passait toutes ses soirées chez elle.<br />Chateaubriand, F.-R. de, Mémoires d’outre-tombe, Tome 4 ; Edmond Biré (ed.), (1899-1900) pp. <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9660797n/f267.item.r=m%C3%A9moires%20d'outre%20tombe" target="_blank" rel="noopener">249-250</a> </p>
<p>Voir encore sur ce sujet la collection <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/16" target="_blank" rel="noopener">1837 (1<sup>er</sup> juillet- 6 août) : Les premières semaines de la relation et de la correspondance entre les deux amants </a></p>
<p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1"><span>[1]</span></a> Armand Bertin (1801-1854)</p>
<p><a href="#_ftnref2" name="_ftn2"><span>[2]</span></a> Marcellus, Marie Louis Auguste de Martin du Tyrac (1776-1841 ; comte de)<br /><br /><br /></p>
<p><strong>Politique et histoire</strong></p>
<p>François rentre en France, mais au Val Richer et non à Paris. Cette distance géographique de la scène politique permet à François de réfléchir aux modalités de son activité en France. Comme en 1837, lors de ses vacances gouvernementales (voir les collections <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/33" target="_blank" rel="noopener">1837-1839 : Vacances gouvernementales</a> et <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/14" target="_blank" rel="noopener">1838 : Réflexion politique et élaboration historique</a>) et en 1849 en exil (voir la collection <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/39" target="_blank" rel="noopener">1849 : De la Démocratie en France : Guizot reprend la parole</a>), le travail historique permet à Guizot de prendre une posture légitime d’expert. Dans sa retraite au Val-Richer, il décrit l’emploi de son temps :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Le beau temps a disparu. La pluie revient dix fois par jour. Je me promène pourtant. Les bons intervalles ne manquent pas. Je me lève de bonne heure. J’écris ; ma toilette, la prière. Nous déjeunerons à 11 heures. Promenade. Je fais mes affaires de maison et de jardin. Je remonte dans mon cabinet à une heure. J'y reste, sauf les visites. Nous dînons à 7 heures. Je me couche à 10. Quand le flot des visites se sera ralenti, j'aurai assez de temps pour travailler. Je veux faire beaucoup de choses. <br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3438" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Il exprime dès son arrivée sa volonté de s’engager dans son travail historique et de profiter de ce temps au Val-Richer pour écrire :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Samedi. 4 août. 7 heures<br />Je vous dis bonjour en me levant. Je vais travailler. Il faut que j'aie fait deux choses d'ici à la fin de l'automne. Pour les grandes et pour les petites maisons. Le temps est superbe. Je vous aime mille fois mieux que le soleil. Adieu. Adieu. Je dors bien mais toujours en rêvant. Décidément la révolution de Février m’a enlevé le calme de mes nuits, bien plus que celui de mes jours.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3045" target="_blank" rel="noopener">lettre </a><span><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3045"></a></span></p>
<p>Guizot est le premier à établir des liens entre ses études historiques et les principes de sa position politique. Il exprime ce va-et-vient entre l’histoire et l’actualité. Alors que la question du régime politique de la France et son système constitutionnel est en discussion, il reprend son point de vue depuis l’histoire d’Angleterre et la réussite d’une monarchie constitutionnelle.</p>
<p style="padding-left: 40px;">C'est, je vous assure, une singulière impression que de vivre en même temps au milieu de tout cela, et au milieu du long Parlement, de Cromwell, de Richard Cromwell des Républicains, des Stuart & & & C'est une perpétuelle confusion de ressemblances et de différences, et de curiosités et de conjectures, qui tombent pêle-mêle sur la France et sur l’Angleterre, sur le passé et sur l'avenir. Je ne dirai pas cependant que je m’y perde. Mon impression est plutôt qu’il rejaillit bien de la lumière d'un pays et d’un temps sur l'autre. Mais soyez tranquille ; j'ai assez de bon sens pour ne pas me fier à mon impression et pour savoir que je n’y vois pas aussi clair que par moments, je le crois.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3219" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>C’est en 1850, qu’est publié le <em><a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bd6t5368009n/f11.item" target="_blank" rel="noopener">Discours sur l'histoire de la révolution d'Angleterre : pourquoi la révolution d'Angleterre a-t-elle réussi</a>.</em> Comme pour son essai <em>De la Démocratie en France</em>, publié un an plus tôt, Guizot vise une publication simultanée en France et en Angleterre. Ainsi Mad Austin vient d’Angleterre pour travailler avec Guizot au Val-Richer sur la traduction du manuscrit. Il écrit le 13 octobre 1849 :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Mad. Austin m’arrive le 19 au Val Richer, pour traduire, mon ouvrage sous mes yeux. Il me faut 36 heures pour la mettre en train. Je ne puis partir que le dimanche 21 pour vous voir lundi 22. Je ne pourrai rester à Paris que deux jours. Il faudra que je revienne ici pour achever, mon travail et surveiller la traduction. Je comptais rester au Val Richer, jusqu'à la fin de Novembre, et quelques jours employés à une course à Paris me mettront en retard, par conséquent dans l'impossibilité d'y revenir plutôt. Si au contraire, je ne me détourne pas de mon travail, le 21 Octobre, je pourrai avancer mon retour définitif à Paris. J'y reviendrai alors décidément, le 15 ou le 16 novembre. Je prends le choix des deux jours à cause de l’incertitude des diligences où il me faut beaucoup de places. Il me semble que cela vaut mieux. Si vous étiez revenue à Paris vers le milieu de septembre, selon votre premier projet, il n’y avait pas à hésiter ; notre réunion définitive était trop loin ; j’allais vous voir sur le champ, ne fût-ce que pour deux jours. Vous ne revenez que le 18 octobre. Je puis, en ne m'interrompant pas dans mes affaires d’ici, travail et traduction, retourner définitivement à Paris, le 15 novembre. Ne vaut-il pas mieux faire cela que nous donner deux jours le 22 octobre pour retarder ensuite de quinze jours ou trois semaines notre réunion définitive ? Point de mauvais sentiment, point d'injuste méfiance, je vous en conjure. Le bonheur de vous retrouver de reprendre nos douces habitudes est ma première, ma constante pensée. <br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3176" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>François écrit finalement le 28 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px; text-align: left;">J’arriverai à Paris sans avoir fini mon travail. Il sera très près de sa fin, mais pas fini. Il me plaît, et je crois qu’il m'importe. Je ne veux le publier que bien et vraiment achevé. J'aurai besoin, chaque jour, pendant trois ou quatre semaines de quelques heures de solitude. Je les prendrai le matin, en me levant. C'est mon meilleur temps. Je ne recevrai personne avant 11 heures. On me dit que j'aurai bien de la peine à me défendre, qu’on viendra beaucoup me voir. Amis et curieux, tous oisifs. Je me défendrai pourtant. Je veux garder pleinement mon attitude tranquille et en dehors. Je n'ai rien à faire que de dire, quelquefois et sérieusement, mon avis.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3207" target="_blank" rel="noopener">lettre</a><br /><br />Marie Dupond (Octobre 2022)<br /><br /><br /><br /></p>
</div>
Correspondance
Notice pour une lettre ou toute correspondance
Destinataire
Format à utiliser : Nom, Prénom
Hormis la majuscule à la première lettre, ne pas utiliser la majuscule.
Vous pouvez mettre les dates de naissance et de mort, entre parenthèses après le nom de l’auteur si ce n'est pas l'auteur décrit dans la collection
Si la lettre a plusieurs destinataires, mettre un nom par entrée.
Si l'identification d'un éventuel surnom ou pseudonyme n'a pas été possible, on l'indiquera dans le champ DC « Description »
Guizot, François (1787-1874)
Lieu de destination
Format : Ville (Pays), puis Adresse complète si possible.
Val-Richer
Date précise de la lettre
Vendredi soir 24 août 1849
Heure
7 heures
Nature du document
Propositions non exhaustives :
Manuscrit, tapuscrit, copie dactylographiée, etc.
Lettre, carte postale, photo, etc. (correspondance)
Photographie, diapositive, etc. (iconographie)
Passeport, carte d'identité, répertoire, agenda, etc. (dossier biographique)
Journal, magazine, revue, etc. (presse)
Lettre autographe
Support
Support physique (codicologie). Propositions non exhaustives :
Papier, carnet, feuillet
Carte plastifiée (dossier biographique), négatif, etc. (iconographie)
Autre support : enregistrement sonore, vidéo, etc.
copie numérisée de microfilm
Etat général
Pour tout commentaire sur l'état du document (présence de ratures, etc.), il faut mieux l'indiquer dans la rubrique « état génétique ».
Bon
Localisation
Localisation géographique du document.
Indiquer où est hébergé le document et le nom du fonds, avec l’adresse précise si possible.
Archives Nationales (Paris)
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Source
A related resource from which the described resource is derived
AN : 163 MI 42 AP Papiers Guizot Bobine Opérateur 11
Title
A name given to the resource
Richmond, Vendredi 24 août 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Richmond (Angleterre)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1849-08-24
Language
A language of the resource
Français
Type
The nature or genre of the resource
Correspondance
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0.
Subject
The topic of the resource
Conditions matérielles de la correspondance
Réseau social et politique
Politique (Russie)
Politique (Irlande)
Conversation
Politique (Hongrie)
Description
An account of the resource
<div style="text-align: justify;">Richmond vendredi soir 24 août 7 heures<br /><br />J’ai été à la poste moi-même et j'ai eu l'air si misérable qu'il m’a semblé que les gens là ne pouvaient pas se dispenser de me fabriquer une lettre du Val Richer. J'ai eu raison, j’ai eu ma lettre. Pourquoi pas plutôt c’est ce que je ne conçois pas. Mais la voilà et me voilà contente. Mais quelle drôle de chose que dans cette lettre vous vous plaignez du même accident pas de lettre de moi ! Faites comme moi, allez mendier, et on vous donnera bien longue visite de Milnes, impayable, amusant, enragé hongrois. Proclamant à son de trompe l'humiliation de l'Autriche, le triomphe de la Russie, des barbares, disant mille absurdités. Au bout de tout cela, il me plait assez, bon enfant écoutant tout sans se fâcher, & je lui en ai dit dans ma couleur sans en gêner le moins du monde. Il a souvent des lettres de M. de Tocqueville. Les dernières étaient pleines de soucis. A propos des affaires de Rome. Il est resté chez moi deux heures ; je m'imagine que je l’ai diverti à mon tour Je l’ai mené chez Lady John Russell. Nous avons rencontré chemin faisant Madame de Metternich, elle a traité Milnes très mal, moi pas très bien, vu que j'étais une mauvaise compagnie.<br /><br />Samedi 25 août<br />Lady Palmerston écrit à son frère des lettres fort aigres. Elle s'amuse de se laisser mener par moi comme un petit garçon, de n'être plus un Anglais, d’être devenu Russe. Enfin elle est bien contrariée de l'affaire de la Hongrie. Plus j'y pense moi, plus j'en suis contente. L'effet est immense. Je remarque que les rapports autrichiens éludent, quand il s'agit de dire à qui Georgy et son armée se sont rendus. C’est petit il faut dire la vérité. Il est bien naturel que les Hongrois préfèrent se rendre aux Russes. Les Russes rendent ensuite à l’Empereur d’Autriche, il fera comme il voudra. Nous ne lui passerons rien. Milnes veut qu’on ne condamne personne. Je lui demande pourquoi O'Brien avait dû être pendu. Il répond que quand les insurrections sont sur une grande échelle comme en Hongrie, ce n’est pas comme en Irlande. c-à-d. Que parce que le mouvement d'O'Brien na pas fait tuer des milliers d’hommes, il faut le pendre et attendre que Kossuth en a sacrifié 100 mille peut- être et ruiné son pays. Il faut [...]</div>
Conditions matérielles de la correspondance
Conversation
Politique (Hongrie)
Politique (Irlande)
Politique (Russie)
Réseau social et politique
-
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Title
A name given to the resource
1849 ( 19 Juillet - 14 novembre ) : François de retour en France, analyste ou acteur politique ?
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
Guizot, François (1787-1874)
Subject
The topic of the resource
Absence
Politique
Parcours politique
Posture politique
Presse
Travail intellectuel
Histoire
France (1848-1852, 2e République)
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1849-09
1849-12
Language
A language of the resource
Français
Anglais
Rights
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Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0.
Description
An account of the resource
<div style="text-align: justify;"><strong>Les préparatifs du retour de Guizot dans le réseau politique parisien</strong><br /><br />Le corpus s’ouvre sur la lettre que François rédige à son débarquement au Havre le 19 juillet 1849. Il revient de son exil en Angleterre causé par la révolution de 1848. (Voir les collections <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/39" target="_blank" rel="noopener">1848 (1er août -24 novembre) : Le silence de l'exil</a> et <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/37)." target="_blank" rel="noopener">1849 ( 1er janvier - 18 juillet) : De la Démocratie en France, Guizot reprend la parole</a>)<br /><br />De son côté Dorothée reste en Angleterre, et ne rentre à Paris que trois mois après, le 17 octobre 1849. Le corpus se termine lorsque Guizot retrouve Paris, un mois plus tard. Ainsi, les lettres de François qui constituent se corpus sont rédigées au Val-Richer et à Broglie, durant un séjour chez son ami le duc Victor de Broglie (Voir la notice Le duc <a href="https://www.guizot.com/fr/amities/le-duc-victor-de-broglie/" target="_blank" rel="noopener">Victor de Broglie</a>)<br /><br />La réception de Guizot tant dans la rue que dans les institutions publiques, et, la posture à adopter sur la scène politique sont les thématiques qui structurent le discours épistolaire des deux amants. Ainsi, le rôle de Dorothée dans l’existence sociale et politique de François apparaît alors qu’ils préparent ensemble son retour à Paris et la reprise du salon de la princesse diplomate.<br /><br />
<p>Voir les mots-clés : <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=politique&facet=tag%3A%22Politique+%28France%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Politique (France)</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=politique&facet=tag%3A%22Politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Politique</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=r%C3%A9ception&facet=tag%3A%22R%C3%A9ception+%28Guizot%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Réception (Guizot)</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=posture&facet=tag%3A%22Posture+politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Posture politique</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=relation&facet=tag%3A%22Relation+Fran%C3%A7ois-Doroth%C3%A9e+%28Politique%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Relation François-Dorothée (politique)</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=salon&facet=tag%3A%22Salon%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Salon</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=femme&facet=tag%3A%22Femme+%28politique%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Femme (politique)</a></p>
<p><strong><br /><br />Rentrer chez soi</strong></p>
<p>Il faut tout d’abord noter le plaisir de François Guizot lorsqu’il retrouve sa propriété du Val-Richer, il écrit le 20 juillet 1849 :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Ma maison et mon jardin sont en bon état, comme si j’en étais sorti hier. Des fleurs dans le salon, et dans la bibliothèque ; mes journaux sur mon bureau, les allées nettoyées, les parquets frottés. Cela m’a plu et déplu. Tant de choses m'ont rempli l'âme depuis que je ne suis venu ici ; je ne puis me figurer qu’elles n'aient laissé ici aucune trace. Et puis cette tranquillité tout autour de moi, cette non interruption du passé et de ses habitudes, cela me plaît, et même me touche, car je le dois aux soins affectueux de deux ou trois personnes, amis ou serviteurs, qui ont pris plaisir à tout conserver ou remettre en ordre, et qui m’attendaient à la porte. J’ai rencontré beaucoup d'affection en ma vie ; je voudrais en être assez reconnaissant.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3018" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a> </p>
<p>Dorothée est bien consciente du plaisir de Guizot à retrouver son bonheur domestique, son parc et son jardin entouré de sa famille, et répond deux jours plus tard :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous voilà donc en France ! Que c'est loin de moi. Je suis charmée de connaître le Val Richer. Je saurai où vous chercher. Vous aurez un grand plaisir à vous retrouver là, à retrouver vos arbres, votre pelouse, vos sentiers. Tout cela reposera votre âme. Vous avez là tout le contentement intérieur, de la famille, de la propriété. Je vous manquerai c'est vrai, et je crois que je vous manquerai beaucoup, mais vous avez mille plaisirs que je n’ai pas. Et certes dans cette séparation je suis plus à plaindre que vous. Vous le sentez. Je voudrais me mieux porter et j'y prendrai de la peine, pour vous faire plaisir.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3016" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p><strong><br /><br />Se séparer</strong></p>
<p>Ce retour détermine une séparation et un éloignement. (Sur le quotidien de François et Dorothée en Angleterre voir la collection 1<a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/39" target="_blank" rel="noopener">848 ( 1er août -24 novembre) : Le silence de l'exil</a>) Dorothée évoque avec nostalgie les habitudes prises en Angleterre, telles que leurs conversations intimes.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je bavarderais bien cependant si je vous avais là dans ce fauteuil, si bien placé pour un entretien intime, comme je regarde ce fauteuil avec tendresse et tristesse !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3020" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>L’évocation de leur conversation se fait à partir du fauteuil que Guizot utilisait. Le lendemain le dimanche 22 juillet 1850, elle l’évoque encore :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Toujours ce fauteuil devant moi et vide. Comme c’est plus triste de rester que de partir.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3022" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>C’est dans une lettre du 27 juillet que François l’évoque à son tour, en exprimant nettement la coordination des pratiques de conversation et de correspondance :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je cause comme si j'étais dans mon fauteuil du Royal Hotel. Pauvre illusion !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3031" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>François est bien décidé à continuer ses échanges avec Dorothée sans craindre qu’ils puissent être lus. Il écrit le 20 juillet le lendemain de son arrivée :</p>
<p style="padding-left: 40px;">On me dit qu’il faut prendre garde au nouveau directeur de la poste de Lisieux. Je n'y prendrai point garde. On lira mes lettres si on veut. On y trouvera peut-être quelque amusement, peut-être même quelque profit. On n’y trouvera rien que je sois bien fâché qu’on ait lu. Si j’avais quelque chose à vous dire que je tinsse vraiment à cacher, je saurais bien vous le faire arriver autrement que par la poste. Faites comme moi. Ne nous gênons pas en nous écrivant. Nous n'avons aucune raison pour nous gêner, et nous avons assez d’esprit pour nous ingénier, si nous en avions besoin. Les gens d’esprit sont toujours infiniment plus francs et plus cachés que ne croient les sots.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3018" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a> </p>
<p><strong><br /><br />Réception de Guizot à son retour en France </strong></p>
<p>Le retour de Guizot en France ne se fait pas sans une certaine inquiétude. Il est attendu au Havre par quelques amis, politiques, diplomates et journalistes. Il cherche à rassurer Dorothée dès son arrivée le 19 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J’ai trouvé sur le port le duc de Broglie, MM. Piscatory, Plichon, Herbet, Mallac, Léon Pillet<a href="#_ftn1" name="_ftnref1"><sup>[1]</sup></a>, et assez de foule. Pas un mot agréable, ni désagréable. Des regards curieux ; beaucoup de chapeaux levés. De la déférence dans l’indifférence. Il reste assez de personnes devant l'hôtel de l’Amirauté où je suis logé. Leur attitude me convient.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3017" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a> </p>
<p>Dorothée n’a pas encore reçu de nouvelles de Guizot mais elle suit son retour en France dans la presse et écrit le 21 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J'attends aujourd’hui une lettre du Havre. Le Times ce matin dit que vous y êtes arrivé, et que votre réception a été des huées. Cela fait bien de l'honneur à vos compatriotes !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3020" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>En effet, Guizot complète le récit de son arrivée sur le sol Français le 20 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je me suis vanté trop tôt hier en vous disant que je n’avais rencontré dans l’accueil du Havre rien d’agréable, ni de désagréable, de la déférence dans l’indifférence. Cela a un peu changé deux heures après. Cinquante ou soixante gamins se sont réunis sous les fenêtres de l’auberge où je dînais, et se sont mis à crier : « à bas Guizot ! » et à siffler. Cinquante à soixante curieux, ou plutôt curieuses, se sont attroupés autour d’eux. Pas l’ombre de colère ni de menace ; une curiosité mécontente de ce que je ne paraissais pas entendre les cris, et une petite démonstration malveillante organisée par le journal rouge de la ville qui l’avait annoncée le matin en annonçant mon arrivée. J'ai dîné tranquillement au bruit de ce concert, et je suis descendu dans la rue pour monter dans la voiture qui devait me reconduire à l’auberge où je couchais. J’ai trouvé autour de la voiture une douzaine de gentlemen qui en écartant les gamins, l’un m’a dit d’un très bon air : « M. Guizot, nous serions désolés que vous prissiez ce tapage pour le sentiment de la population de notre ville ; ce sont des polissons ameutés par quelques coquins. Non seulement nous vous respectons tous ; mais nous sommes charmés de vous voir de retour et nous espérons bien vous revoir bientôt où vous devez être. » […]. Cela n’avait pas la moindre gravité en soi, beaucoup comme symptôme. Rien n’est changé et je ne suis point oublié. Ce matin, sur le bateau du Havre à Honfleur, les gentlemen étaient en grande majorité et m'ont fait fête. […] Ce pays-ci est bien animé, et bien prompt à saisir les occasions de le montrer. Je n’en suis que plus décidé à rester bien tranquille chez moi. Il n’y a absolument rien de bon à faire, et ma position est bonne pour attendre.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3018" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>La réception chahutée de Guizot au Havre le conforte dans sa décision de rester en retrait au Val Richer, même si en réaction il reçoit des témoignages de sympathie en soulignant son retour sur le sol français comme un événement. Il écrit le 25 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">La petite scène du Havre a bien tourné. De bons juges m’écrivent de Paris : « Tout compté et bien compté, ce n'est point à regretter. Puisqu'il n’y a rien eu de grave autant vaut au risque de quelques embarras et de quelques inquiétudes, que vos éternels adversaires vos ennemis naturels aient fait la faute de provoquer ce qui a houleusement échoué. Il ne faut pas regretter l'éclat qu’ils ont donné à votre rentrée. Votre retour en France est un fait considérable. Il est considérable pour vos amis comme pour vous-même, en raison de votre passé et probablement aussi en raison de votre avenir. On l’a compris on le comprend, et l'on n'a pas su dissimuler sa mauvaise humeur. Encore une fois, tant mieux. »<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3438" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot reprend ses marques en évaluant la place et le rôle qui lui sont attribués par ses amis politiques. François commence par écouter les membres de son réseau. Il écrit le 23 juillet, quatre jours après son arrivée en France :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J’ai passé ma matinée hier à recevoir des visites. Dix-neuf. Mon impression reste la même. Rien n’est changé au fond, dans la situation générale, ni dans la mienne. Seulement tout a éclaté et s'est exaspéré. C’est toujours la même lutte entre les mêmes classes et les mêmes passions, et j'y tiens toujours la même place. Mais évidemment le moment n'est pas venu pour moi, quand je le pourrais, de la reprendre activement. Mes amis se troubleraient. Mes ennemis s’irriteraient. Et les uns et les autres saisiraient le premier prétexte pour rejeter sur moi seul la responsabilité du premier malheur. Et le public spectateur les croirait. Je n’ai qu'à attendre, si le temps, en s'en allant, n'emporte pas trop tôt ce qui me reste de forces, je puis avoir encore un grand moment. Si je m'en vais avant que ce moment n’arrive, j'ai lieu d'espérer aujourd’hui que justice sera faite à mon nom.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3023" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot comprend que la place qui lui est réservée le porterait sur le front de bataille. Il évoque un possible retour sur la scène politique tout en concluant que les conditions n’y sont pas encore favorables. Le 10 août 1849, Dorothée écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Restez comme vous êtes à l’écart, tranquille. Cela a très bon air. Profit tout clair. Soyez en sûr.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3057" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Le 15 septembre 1849, Dorothée lui fait part de sa conversation avec l’ancien diplomate Théobald Piscatory (1800-1870) qui poursuit sa carrière politique sous la deuxième République en tant que député monarchiste :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Voici votre lettre avec extrait de Piscatory. C’est un esprit [?] & qui est resté doctrinaire. Je vous en prie ne le redevenez pas.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3122" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>François y répond le 17 septembre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Les décadences me déplaisent toujours. Soyez tranquille ; je ne redeviendrai pas doctrinaire. Fatuité à part, je ne voudrais pas redevenir rien de ce que j’ai été. Je crois que ce serait déchoir. Redevenir jeune en restant ce que je suis à la bonne heure. Et si je ne me trompe, vous en diriez autant.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3125" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot se sent fort de son expérience et de son expertise. Il n’exprime jusqu’ici aucune nostalgie de ses succès de jeunesse.</p>
<p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1"><sup>[1]</sup></a> Théobald Piscatory (1800-1870), Ignace Plichon (1814-1888), Edmond Herbet (1813- ?), Léon Pillet (1803-1868)<strong><br /><br /><br /><br />Guizot s’impatiente au Val-Richer</strong></p>
<p>Plus d’un mois après, François commence à s’interroger sur la réception de son action publique. Ne sera-t-elle jamais reconnue ? Aussi, c’est en s’adressant à Dorothée qu’il s’autorise à comparer ce retour d’Angleterre avec un avenir incertain, à son retour de son ambassade à Londres en 1840 avec plus d'espoir :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous rappelez-vous bien le 29 octobre, il y a neuf ans mon arrivée à Paris le 26 et les trois jours qui précédèrent la formation du Cabinet ? Je suis décidé à ne pas croire que ce jour-là, et tout ce que j’ai fait du 29 octobre 1840 au 24 février 1848 m'ait été bon à rien. Mais aujourd’hui il n’y a que Dieu qui sache à qui cela a été et restera bon.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3209" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Il semble que Guizot tienne moins à reprendre sa place ou une place qu’à ce que son œuvre politique de 40 à 48 soit reconnue. Il faut noter que Guizot considère son action de cette période et non celle du début de la Monarchie de Juillet. Et c’est cette conscience de la tâche accomplie qui lui permet d’affirmer le 30 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J'ai dit à M. Moulin, ce que je pense comme je le dirai quand je serai à Paris. J'ai acquis le droit de tout dire. Ce qui ne veut pas dire que j'en serai toujours. Mais je ne me laisserai gêner par personne.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3211" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>La reprise du salon de Dorothée permet de multiplier les éléments pour évaluer les conditions du retour de François à Paris. Le 2 novembre, elle lui écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Attendez-vous à beaucoup d'ingratitude. Vous êtes le politique de la monarchie de juillet. Absurdité incrustée dans le gros du public. Il ne faut pas que vous disiez que vous n’avez jamais eu tort. Je lui ai répondu qu'il n'y a que les sots qui se croient infaillibles. Je vous répète que Ste Aulaire est excellent.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3216" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot répond le 3 novembre</p>
<p style="padding-left: 40px;">Merci, merci. Cela ne me paraît pas, à tout prendre, inquiétant pour le moment. Mes tendres amitiés à Sainte-Aulaire quand vous le reverrez. Je crois plus que personne qu’il n’y a que les sots d'infaillibles, mais je suis très décidé à ne pas me laisser affubler du moindre tort prétendu pour épargner à d'autres la honte de leurs gros péchés.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3219" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Il poursuit le 4 novembre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">La vérité est grosse comme une montagne, et moi, je ne suis pas encore mort. Il faudra bien qu’on y voie clair qu’on le veuille ou non. Et comme l’ingratitude ne me donnera point d'humeur, je prendrais mon temps et les bons moyens.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3221" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot comprend que chacun le dissuade de revenir, mais il suggère qu’il envisage de nouvelles modalités d’action publique et de présence politique. Le 5 novembre Guizot écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Ils me recommandent de ne pas arriver au milieu de la crise : " Quelque réservé quelque prudent que vous soyez, on commentera votre arrivée vos paroles, en vous fera parler quand vous n'aurez rien dit. Il ne vous est pas permis, de vous renfermer dans la vie privée ; vous serez, malgré vous malgré nous, traité en homme public. " Voilà leurs paroles. Ce qu’ils disent est vrai. Je n’y vois pas autant d’inconvénients qu'eux ; et ces inconvénients, s'ils existent, existeront à peu près toujours, A quelque moment que j’arrive, il m’arrivera ce qu’ils disent. Pourtant, je crois que pour ce moment-ci, ils ont raison, et qu’il vaut mieux ne pas fixer de jour précis. Quel ennui, et quel prélude, d'ennemis ! Je suis dans une veine de tristesse profonde, pour vous, pour moi. Si j'étais là, je serais bien moins triste, bien moins inquiet. Votre inquiétude à vous me désole au-delà de ce que je puis dire. J’espère qu'elle est exagérée ; mais je la trouve bien naturelle. Si j'étais là, vous seriez moins inquiète et moi probablement pas inquiet du tout. Ah, que le monde est mal arrangé !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3223" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Dans cette lettre, Guizot semble un peu atteint par ses perspectives pessimistes sur son retour diffusées par son réseau politique. Il semble pris dans une tension entre la volonté de revenir et de reprendre la parole et la prudence. Il ne veut pas précipiter son retour. Le 7 novembre, il écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je ne veux pas retourner étourdiment à Paris. Je ne veux pas tarder inutilement à y retourner. Ce qui est inutile en ce genre serait inconvenant pour moi. Je ne me fais pas la moindre illusion sur ce qui m'attend à Paris. L’ingratitude ne me touche point ; il n'y en aura jamais plus que je n'en attends. Les stupidités populaires, les perfidies infatigables, et infiniment détournées, des rivaux d’autant plus acharnés qu’il sont un peu honteux, les froideurs embarrassées, des indifférents, les poltronneries, des amis, je compte sur tout cela. J'étais puissant avec grand combat. Je suis tombé avec grand bruit. Si j'étais mort, encore passe. Mais je reviens. La plupart s'étonnent, quelques uns craignent que je ne sois pas mort. Ma présence est pour les uns un reproche, pour les autres, une inquiétude, pour d’autres simples spectateurs, quelque chose d'inconnu, et par conséquent d'incommode. Tout cela me fait une situation délicate, et qui aura des difficultés. Je ne puis pas la changer. Je ne veux pas l’éluder. S’il y a un bon avenir, je surmonterai ces difficultés. S'il n'y a pas un bon avenir, peu m'importe tout cela.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3227" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>François ne conditionne pas son retour à Paris à une possible reprise de son action politique directe. Il explique comment tout bien considéré, chacun sera dérangé par son retour. Après près de quatre mois au Val-Richer, sa décision est prise. Bonne ou mauvais réception, François veut faire face et ne veut pas se condamner à l’isolement en France. Le 5 novembre, trois semaines après son arrivée, Dorothée rouvre son salon parisien et fait part à François de ce qu’elle a pu sonder parmi ses visiteurs. Dorothée apparaît comme la personne avec laquelle il peut réfléchir ouvertement à son retour politique. Dorothée n’est pas seulement une oreille attentive, depuis son retour à Paris, elle est au plus près pour recueillir des informations nécessaires à l’analyse de François :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Tout le monde entrait chez moi hier en riant, une sorte de plaisir de retrouver du vieux. Cela m’a plu, le commencement m’a plu ; à la fin de la soirée, j’ai dit à Montebello, avec amertume « personne n’a prononcé le nom de M. Guizot. » Cela m’a choquée. Voilà les hommes. Voilà le temps. Montebello m’a cité une exception, le Prince Wittgenstein. Je lui en saurai gré. [..]Que vous écrit-on sur vous ? Adieu. deux choses à relever. Molé ne croit pas à l’Empire. Et en fait d'avenir, il ne croit plus qu'une Monarchie constitutionnelle soit possible autre part qu’en Angleterre.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3222" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Et François répond le 11 novembre à ce que lui rapporte Dorothée quelques jours plus tôt le 5 novembre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je dis comme vous pour ce qui touche ma situation personnelle en reparaissant. Nous verrons. Nous devons avoir ce qu’il faudra d'habileté et de bon sens. Le silence qui vous choque ne m’étonne pas. C'est de l’embarras et de la platitude, faute d’esprit et faute de cœur. Deux choses, si je ne me trompe, mettront à l'aise, autant qu’ils peuvent être à l'aise, les poltrons et les sots ; d'abord ma manière, et bientôt ma situation même. [...] Je ne vois absolument aucune raison d'hésiter, et je suis décidé. Il n’y a que deux espèces de personnes qui me conseillent de ne pas revenir ; celles qui s'en iraient volontiers elles-mêmes, et celles qui ont envie que je ne revienne pas du tout.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3235" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Le 10 novembre, Dorothée fait part à Guizot d’une réception positive de la part d’Achille Fould, Ministre des Finances entre 1849 et 1867 :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Achille Fould m’a abordée, il m’a parlé avec tristesse de la situation qu'il a acceptée, & puis tout de suite il a passé à me demander de vos nouvelles quand vous reviendrez. J’ai dit que j’espérais dans 8 ou 10 jours. Et puis, que pense M. Guizot ? - M. Guizot pense qu’il faut soutenir l’autorité tant qu’elle donne des gages d’ordre & de force. - M. Guizot a un trop bon esprit pour ne pas penser cela.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3232" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=posture&facet=tag%3A%22Posture+politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">les lettres</a> sur la posture politique à adopter par Guizot <span><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=posture&facet=tag%3A%22Posture+politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22"></a></span></p>
<p>Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=r%C3%A9ception&facet=tag%3A%22R%C3%A9ception+%28Guizot%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">les lettres</a> sur la réception de Guizot <br /><br /><br /><br /><br /></p>
<p><strong>Préparer le retour de Guizot à Paris : rouvrir le salon parisien de Dorothée<br /><br /></strong>Voir les lettres <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=relation&facet=tag%3A%22Relation+Fran%C3%A7ois-Doroth%C3%A9e+%28Politique%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Relation François-Dorothée (Politique)</a><br /><br /></p>
<p>Le retour de Dorothée à Paris à l’automne alors que François Guizot est encore au Val Richer conduit à la reprise de leur relation épistolaire politique. Guizot s’y prépare, il écrit le 16 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Quand vous m'écrirez de Paris, vous m'enverrez les faits, je vous renverrai mes réflexions. En attendant que faits et réflexions nous soient communs.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3183" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Ce corpus met en lumière le fonctionnement du duo politique. Au travers de ses correspondances et conversations, Dorothée doit rassembler des faits sur la situation politique à Paris. Elle constitue un matériau pour l’élaboration d’une analyse par Guizot. Le 25 octobre, il exprime nettement la dynamique de leur relation et comment il pratique à deux l’analyse des faits politiques :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Quel ennui d'être loin et de ne pas avoir avec vous, sur ce point-là encore plus que sur tout autre, ces conversations infinies où à force de se tout dire, on finit par atteindre ensemble à la vérité et pas s'y reposer ! Enfin dans trois semaines nous en serons là.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3201" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Dans une lettre du 18 octobre à propos de la politique étrangère menée par l’Angleterre, Guizot donne un exemple de conclusion établie à deux :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Les questions du Cabinet anglais ne se décident pas par la politique étrangère. Nous nous le sommes dit cent fois, et nous l’oublions toujours.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3186" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Lorsque Dorothée rentre à Paris, François décrit comment constituer un salon où l’on puisse prendre des informations mais aussi en diffuser. D’un côté François garde encore ses distances avec la vie politique parisienne, de l’autre, Dorothée sonde et prépare le terrain en reprenant ses activités sociales et politiques parisiennes. Il écrit le 19 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous avez toute raison ; arrangez votre vie ; faites-y entrer comme il vous convient, les personnes qui sont à la fois indifférentes et importantes. Que chacun vienne et prenne place. Cela se fera plus aisément et plus sûrement moi n’y étant pas. Je viendrai quand ce sera fait et nous en jouirons ensemble. On ne sait pas combien on peut lever de difficultés et concilier d'avantages avec un peu d'esprit, et de bon sens, en se laissant mutuellement l’espace et la liberté nécessaires pour agir, et pour réussir. Chacun pour soi, et pour soi seul, c'est l’égoïsme, la solitude dans la glace ; chacun par soi- même et selon sa propre situation, c’est la dignité et le succès ce qui ne nuit en rien à l'affection. Je reviens à mon désir du moment. Je suis bien curieux de votre impression sur Paris et sur la situation actuelle.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3188" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Afin que le salon de Dorothée n’apparaisse pas au service de la reprise de la vie politique de Guizot, ils agissent séparément. L’autonomie de Dorothée est manifeste, et c’est d’ailleurs ainsi qu’elle peut lui être le plus utile. Guizot n’est plus ministre des Affaires étrangères. Mais Dorothée reste une princesse russe, diplomate, anglophile et installée en France en rayonnant encore sur la diplomatie et les monarques européens. Dans la même lettre, il cite un autre exemple de femme qui mène une pratique d’action politique et diplomatique dans son salon.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous ai-je dit, ou savez-vous que lord Normanby<a href="#_ftn1" name="_ftnref1"><span>[1]</span></a> est très assidu chez Madame Howard ; et que c’est surtout par elle qu’il agit sur le Président ?<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3188" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Guizot note les visites de l’ambassadeur d’Angleterre en France chez Madame Howard, la maîtresse de Louis Napoléon en soulignant que c’est elle qui « agit sur » le président de la République. Dans la lettre suivante, du 20 octobre, Guizot précise les personnes importantes à convier au milieu des indifférents.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Dans l’arrangement de votre vie, indépendamment des anciennes connaissances qu’il faut reprendre, peut-être y en a-t-il aussi quelques nouvelles qu’il vous convient de faire, soit à cause de leur value personnelle, soit à cause de l’importance qu'elles ont prise dans ces derniers temps. Montalembert, Falloux (s’il vit), Bussierre, d’Haussonville, Piscatory<a href="#_ftn2" name="_ftnref2"><span>[2]</span></a>. Je ne crois pas qu’il faille étendre votre cercle, et les étrangers en sont, et doivent en être, toujours le fond. Mais vous aurez des vides. Du reste, vous jugerez mieux de cela après quelques jours de séjour que moi d’ici. J’avais pensé à M. de Tocqueville, s'il se recherchait comme de raison. Il est homme d’esprit, de bonne compagnie et sûr je crois. Mais il ne serait pas sans inconvénients. Je vous dis ce qui me passe par l’esprit.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3190" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
Guizot réfléchit à la composition du salon de Dorothée et en éclaire les caractéristiques. La première est sa nature internationale. Son salon est l’espace des relations diplomatiques. La seconde est d’introduire de nouvelles personnalités politiques. Après la révolution de 1848 et l’avènement de la République, Dorothée doit actualiser la composition de son salon. Neuf jours plus tôt, Guizot mentionne déjà Tocqueville en dressant un portrait positif notamment grâce à un point commun qu’ils partagent : une action coordonnée à une œuvre intellectuelle.<br />
<p style="padding-left: 40px;">M. de Tocqueville a été, jusqu'ici, un homme d’esprit dans son Cabinet et dans ses livres. Il est possible qu’il ait de quoi être un homme d’esprit dans l'action et gouvernement. Nous verrons. Je le souhaite. C’est un honnête homme et un gentleman<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3172" target="_blank" rel="noopener">lettre</a></p>
<p>Deux semaines plus tard, Dorothée rend compte à François. Les deux personnes qui restent toujours importantes en 1849 sont Molé et Thiers, les deux personnalités avec qui Guizot a dû naviguer au cours de la Monarchie de Juillet.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Mon salon hier était comme il y a deux ans, excepté vous de moins, et M. Molé & Berryer<a href="#_ftn3" name="_ftnref3"><span>[3]</span></a> de plus, & quelques légitimistes. La diplomatie au complet moins l'Angleterre. […] Voici le vrai de la situation. Les ministres changent, mais deux hommes restent immuables, importants, sont Molé et Thiers. La diplomatie se tient à eux. On leur parle comme à des Ministres & on leur montre souvent plus qu'aux ministres.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3222" target="_blank" rel="noopener">lettre</a><br /><span><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3222"></a></span></p>
Dans une lettre du 31 octobre, le fonctionnement du couple apparait avec son usage de l’art de converser de Dorothée
<p style="padding-left: 40px;">Puisque M. Hübner est enfin venu vous voir, ce dont je suis bien aise, causez un peu à fond avec lui de la Hongrie. Ce pays-là est entré dans l’Europe. On regardera fort désormais à ses affaires. Est-ce sage la résolution qu'on vient de prendre à Vienne de maintenir, quant à la Hongrie, la Constitution centralisante de mars 1849, et de considérer son ancienne constitution comme abolie, au lieu de la modifier ? Je n’ai pas d'opinion ; je ne sais pas assez bien les faits ; mais je suis curieux de m'en faire une. Puisque M. Hübner est un homme d’esprit il vous reviendra souvent.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3213" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
Une fois que le comte de Hübner, l’ambassadeur d’Autriche à Paris, devient un membre du salon de Dorothée, François indique à Dorothée les questions à lui poser et vers quoi orienter la conversation.
<p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1"><span>[1]</span></a><span> Normanby, Constantine Henry (1797-1863 ; Marquess of) </span></p>
<p><a href="#_ftnref2" name="_ftn2"><span>[2]</span></a> Il s’agit d’hommes politiques attachés à une droite libérale. Charles Forbes René, comte de Montalembert (1810-1870), Alfred de Falloux (1811-1886) ministre de l’instruction publique jusqu’en octobre 1849, Alfred Renouard de Bussière (1804-1887), Joseph Othenin Bernard de Cléron, comte d'Haussonville (1809-1884).</p>
<p><a href="#_ftnref3" name="_ftn3"><span>[3]</span></a> Berryer, Pierre Antoine (1790-1868), journaliste, avocat et député des Bouches-du-Rhône à partir de 1848.</p>
<p><br /><br /></p>
<p><strong>L’art de converser de Dorothée </strong></p>
<p>Alors que Dorothée a repris sa vie parisienne depuis trois semaines et qu’elle en fait le compte-rendu à François, la qualité de sa correspondance fait écrire à François :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous êtes la plus excellente et fidèle glace (miroir est trop petit) qui se puisse voir. Vous me renvoyez toutes les hésitations, fluctuations alternatives du public qui vous entoure. Hier, l'Empire infaillible ; aujourd’hui, impossible. Les brusques revirements d'inquiétude et de confiance d’abattement et d’entrain, ces oublis frivoles et ces préventions entêtées, ce mouvement perpétuel qui avance si peu, ce je ne sais quoi d'immobile, je devrais dire d’incorrigible qui persiste sous ce besoin insatiable de changement et de nouveauté, tout cela, qui est la France, et surtout Paris dans la France, tout cela est dans vos lettres. Tantôt vous le peignez parce que vous l'avez observé ; tantôt vous le reproduisez sans vous en douter. Ce qui, pour vous, est spectacle devient à l’instant tableau dès que vous en parlez. Cela est rare et charmant.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3227" target="_blank" rel="noopener">lettre</a><span> </span></p>
<p>Alors que la question de l’établissement d’un nouveau régime politique, et de la transformation du Président en Empereur, François souligne avec enthousiasme la maîtrise de Dorothée dans l’art de transcrire les tendances et les fluctuations politiques mais aussi de les saisir au travers d’une analyse fine des détails. (Sur la pratique épistolaire de Dorothée voir aussi la collection<br /><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/16)" target="_blank" rel="noopener">1837 (1<sup>er</sup> juillet- 6 août) : Les premières semaines de la relation et de la correspondance entre les deux amants</a> )</p>
<p>Dans ce corpus de correspondance, un autre écho se laisse entendre. Alors que Chateaubriand meurt en juillet 1848, la publication posthume des Mémoires d’Outre-tombe se fait en feuilleton dans <em>La Presse</em> à partir du 21 octobre 1848 (Voir le <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4311597/f1.image.zoom" target="_blank" rel="noopener">numéro</a>), Dorothée craint une critique de ses pratiques diplomatiques et politiques. En effet, la princesse de Lieven et Chateaubriand ont fait partie du même réseau diplomatique en Angleterre. Le 2 octobre Dorothée demande à François :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Et à propos encore, avez-vous lu ce que M de Chateaubriand dit de moi dans son Outre tombe.<br /><span>Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3155" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </span></p>
<p>Le 4 octobre, Guizot répond :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je ne lis pas les Mémoires d’Outre-tombe. C’est vous qui me faisiez lire ces frivolités-là, Outre-tombe, Raphael. Quand je ne vous ai pas, je ne me doute pas qu'elles paraissent. Je vais demander les passages où il est question de vous.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3159" target="_blank" rel="noopener">lettre </a></p>
<p>C’est douze jours plus tard, le 16 octobre, que Guizot répond à Dorothée après s’être renseigné, vraisemblablement auprès d’Armand Bertin<a href="#_ftn1" name="_ftnref1"><span>[1]</span></a> du Journal des Débats qui a été au service de Chateaubriand lors de son ambassade à Londres en 1822.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Armand Bertin était attaché à l'Ambassade de M. de Châteaubriand. Un soir en rentrant M. de Châteaubriand lui dit : « Madame de Lieven me traite bien mal. Elle ne sait pas à qui elle a affaire ni quels sont mes moyens de me venger. Certainement je me vengerai ? » Votre article d’Outre-tombe a été écrit alors de verve de vengeance. Il y a ajoute depuis ce qui me regarde. Je vous dis ce qu’on vient de me dire. Je ne l’ai pas lu.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3183" target="_blank" rel="noopener">lettre </a></p>
<p>Dorothée a quelques raisons de craindre la parution des Mémoires de Chateaubriand. L’auteur consacre un portrait à Dorothée et lui retire d’emblée ce qui lui est reconnu : son esprit et son expertise dans les pratiques de cour. Chateaubriand écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Comme elle était hardie et passait pour être bien en cour, elle était devenue extrêmement fashionable. On lui croyait de l'esprit, parce qu'on supposait que son mari n'en avait pas; ce qui n'était pas vrai : M. de Lieven était fort supérieur à. madame. Madame de Lieven, au visage aigu et mésavenant, est une femme commune, fatigante, aride, qui n'a qu'un seul genre de conversation, la politique vulgaire ; du reste, elle ne sait rien, et elle cache la disette de ses idées sous l'abondance de ses paroles.<br />Chateaubriand, F.-R. de, <em>Mémoires d’outre-tombe</em>, Tome 4 ; Edmond Biré (ed.), (1899-1900) p. <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9660797n/f267.item.r=m%C3%A9moires%20d'outre%20tombe" target="_blank" rel="noopener">249</a> </p>
<p>C’est à Londres que Dorothée prend sa carrure diplomatique, sans se cantonner au rôle d’une femme d’ambassadeur. Elle devient diplomate.. En quelque sorte, Chateaubriand la remet à sa place, et une fois qu’il lui a ôté ses qualités intellectuelles et politiques, il lui retire ce qui peut alors donner plaisir à fréquenter une femme : sa beauté. Mais c’est sur son esprit et sur l’intérêt de ses conversations et de ses correspondances qu’il insiste et à la vulgarité, il ajoute la puérilité de ses pratiques diplomatiques.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Quand elle se trouve avec des gens de mérite, sa stérilité se tait ; elle revêt sa nullité d'un air supérieur d'ennui, comme si elle avait le droit d'être ennuyée ; tombée par l'effet du temps, et ne pouvant s'empêcher de se mêler de quelque chose, la douairière des congrès est venue de Vérone donner à Paris, avec la permission de MM. les magistrats de Pétersbourg, une représentation des puérilités diplomatiques d'autrefois.</p>
<p>Le portrait continue sur la description du contenu de son discours épistolaire. Sa politique et sa diplomatie semble restreinte à organiser des mariages. Encore une fois, Chateaubriand la ramène à sa condition de femme.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Elle entretient des correspondances privées, et elle a paru très forte en mariages manqués. Nos novices se sont précipités dans ses salons pour apprendre le beau monde et l'art des secrets ; ils lui confient les leurs, qui, répandus par madame de Lieven, se changent en sourds cancans. Les ministres, et ceux qui aspirent à le devenir, sont tout fiers d'être protégés par une dame qui a eu l'honneur de voir M. de Metternich aux heures où le grand homme, pour se délasser du poids des affaires, s'amuse à effiloquer de la soie. Le ridicule attendait à Paris madame de Lieven. Un doctrinaire grave est tombé aux pieds d'Omphale : « Amour, tu perdis Troie. »<br />Chateaubriand, F.-R. de, Mémoires d’outre-tombe, Tome 4 ; Edmond Biré (ed.), (1899-1900) p. <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9660797n/f267.item.r=m%C3%A9moires%20d'outre%20tombe" target="_blank" rel="noopener">250</a> </p>
<p>Chateaubriand ne manque pas de terminer sur les relations de la princesse avec des grands hommes en ne soulignant que leur caractère sexuel et frivole. Le point d’orgue est atteint lorsqu’il évoque la relation entre Dorothée et François avec ironie. Le portrait est si acide qu’Edmond Biré l’éditeur de 1898 se sent obligé d’annoter ce passage en citant un témoignage d’un autre secrétaire d’ambassade de Chateaubriand :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Elle avait épousé Christophe Andréiëvitch, prince de Lieven, général dans l'armée russe, gouverneur du tsar Alexandre II et pendant vingt-deux ans ambassadeur à Londres. Le portrait qu'en trace ici Chateaubriand est trop poussé au noir. « Bien qu'étrangère, dit M. de Marcellus<a href="#_ftn2" name="_ftnref2"><sup>[2]</sup></a>, elle dominait les filles d'Albion par une in- contestable supériorité d'attitude et 'de manières. Elle savait causer de tout ; elle avait été fort jolie, et sa taille gardait encore beaucoup plus tard une grande élégance ; elle possédait une merveilleuse aptitude pour la musique ; sa mémoire lui rappelait des opéras entiers qu'elle exécutait à ravir sur le piano. » Justement réputée par son esprit et sa rare intelligence des affaires publiques, elle a été liée avec tout ce que son temps comptait de personnages éminents, dans tous les partis et dans toutes les nationalités. Castlereagh et Canning ont été particulièrement de ses amis, ainsi que le prince de Metternich ; lord Grey lui écrivait chaque matin de son lit un billet demi-politique, demi-galant. On lui a attribué une liaison avec George IV. A Paris, où elle s'était fixée après la mort de son mari, elle a été l'Egérie de M. Guizot qui passait toutes ses soirées chez elle.<br />Chateaubriand, F.-R. de, Mémoires d’outre-tombe, Tome 4 ; Edmond Biré (ed.), (1899-1900) pp. <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9660797n/f267.item.r=m%C3%A9moires%20d'outre%20tombe" target="_blank" rel="noopener">249-250</a> </p>
<p>Voir encore sur ce sujet la collection <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/16" target="_blank" rel="noopener">1837 (1<sup>er</sup> juillet- 6 août) : Les premières semaines de la relation et de la correspondance entre les deux amants </a></p>
<p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1"><span>[1]</span></a> Armand Bertin (1801-1854)</p>
<p><a href="#_ftnref2" name="_ftn2"><span>[2]</span></a> Marcellus, Marie Louis Auguste de Martin du Tyrac (1776-1841 ; comte de)<br /><br /><br /></p>
<p><strong>Politique et histoire</strong></p>
<p>François rentre en France, mais au Val Richer et non à Paris. Cette distance géographique de la scène politique permet à François de réfléchir aux modalités de son activité en France. Comme en 1837, lors de ses vacances gouvernementales (voir les collections <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/33" target="_blank" rel="noopener">1837-1839 : Vacances gouvernementales</a> et <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/14" target="_blank" rel="noopener">1838 : Réflexion politique et élaboration historique</a>) et en 1849 en exil (voir la collection <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/39" target="_blank" rel="noopener">1849 : De la Démocratie en France : Guizot reprend la parole</a>), le travail historique permet à Guizot de prendre une posture légitime d’expert. Dans sa retraite au Val-Richer, il décrit l’emploi de son temps :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Le beau temps a disparu. La pluie revient dix fois par jour. Je me promène pourtant. Les bons intervalles ne manquent pas. Je me lève de bonne heure. J’écris ; ma toilette, la prière. Nous déjeunerons à 11 heures. Promenade. Je fais mes affaires de maison et de jardin. Je remonte dans mon cabinet à une heure. J'y reste, sauf les visites. Nous dînons à 7 heures. Je me couche à 10. Quand le flot des visites se sera ralenti, j'aurai assez de temps pour travailler. Je veux faire beaucoup de choses. <br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3438" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Il exprime dès son arrivée sa volonté de s’engager dans son travail historique et de profiter de ce temps au Val-Richer pour écrire :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Samedi. 4 août. 7 heures<br />Je vous dis bonjour en me levant. Je vais travailler. Il faut que j'aie fait deux choses d'ici à la fin de l'automne. Pour les grandes et pour les petites maisons. Le temps est superbe. Je vous aime mille fois mieux que le soleil. Adieu. Adieu. Je dors bien mais toujours en rêvant. Décidément la révolution de Février m’a enlevé le calme de mes nuits, bien plus que celui de mes jours.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3045" target="_blank" rel="noopener">lettre </a><span><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3045"></a></span></p>
<p>Guizot est le premier à établir des liens entre ses études historiques et les principes de sa position politique. Il exprime ce va-et-vient entre l’histoire et l’actualité. Alors que la question du régime politique de la France et son système constitutionnel est en discussion, il reprend son point de vue depuis l’histoire d’Angleterre et la réussite d’une monarchie constitutionnelle.</p>
<p style="padding-left: 40px;">C'est, je vous assure, une singulière impression que de vivre en même temps au milieu de tout cela, et au milieu du long Parlement, de Cromwell, de Richard Cromwell des Républicains, des Stuart & & & C'est une perpétuelle confusion de ressemblances et de différences, et de curiosités et de conjectures, qui tombent pêle-mêle sur la France et sur l’Angleterre, sur le passé et sur l'avenir. Je ne dirai pas cependant que je m’y perde. Mon impression est plutôt qu’il rejaillit bien de la lumière d'un pays et d’un temps sur l'autre. Mais soyez tranquille ; j'ai assez de bon sens pour ne pas me fier à mon impression et pour savoir que je n’y vois pas aussi clair que par moments, je le crois.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3219" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>C’est en 1850, qu’est publié le <em><a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bd6t5368009n/f11.item" target="_blank" rel="noopener">Discours sur l'histoire de la révolution d'Angleterre : pourquoi la révolution d'Angleterre a-t-elle réussi</a>.</em> Comme pour son essai <em>De la Démocratie en France</em>, publié un an plus tôt, Guizot vise une publication simultanée en France et en Angleterre. Ainsi Mad Austin vient d’Angleterre pour travailler avec Guizot au Val-Richer sur la traduction du manuscrit. Il écrit le 13 octobre 1849 :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Mad. Austin m’arrive le 19 au Val Richer, pour traduire, mon ouvrage sous mes yeux. Il me faut 36 heures pour la mettre en train. Je ne puis partir que le dimanche 21 pour vous voir lundi 22. Je ne pourrai rester à Paris que deux jours. Il faudra que je revienne ici pour achever, mon travail et surveiller la traduction. Je comptais rester au Val Richer, jusqu'à la fin de Novembre, et quelques jours employés à une course à Paris me mettront en retard, par conséquent dans l'impossibilité d'y revenir plutôt. Si au contraire, je ne me détourne pas de mon travail, le 21 Octobre, je pourrai avancer mon retour définitif à Paris. J'y reviendrai alors décidément, le 15 ou le 16 novembre. Je prends le choix des deux jours à cause de l’incertitude des diligences où il me faut beaucoup de places. Il me semble que cela vaut mieux. Si vous étiez revenue à Paris vers le milieu de septembre, selon votre premier projet, il n’y avait pas à hésiter ; notre réunion définitive était trop loin ; j’allais vous voir sur le champ, ne fût-ce que pour deux jours. Vous ne revenez que le 18 octobre. Je puis, en ne m'interrompant pas dans mes affaires d’ici, travail et traduction, retourner définitivement à Paris, le 15 novembre. Ne vaut-il pas mieux faire cela que nous donner deux jours le 22 octobre pour retarder ensuite de quinze jours ou trois semaines notre réunion définitive ? Point de mauvais sentiment, point d'injuste méfiance, je vous en conjure. Le bonheur de vous retrouver de reprendre nos douces habitudes est ma première, ma constante pensée. <br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3176" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>François écrit finalement le 28 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px; text-align: left;">J’arriverai à Paris sans avoir fini mon travail. Il sera très près de sa fin, mais pas fini. Il me plaît, et je crois qu’il m'importe. Je ne veux le publier que bien et vraiment achevé. J'aurai besoin, chaque jour, pendant trois ou quatre semaines de quelques heures de solitude. Je les prendrai le matin, en me levant. C'est mon meilleur temps. Je ne recevrai personne avant 11 heures. On me dit que j'aurai bien de la peine à me défendre, qu’on viendra beaucoup me voir. Amis et curieux, tous oisifs. Je me défendrai pourtant. Je veux garder pleinement mon attitude tranquille et en dehors. Je n'ai rien à faire que de dire, quelquefois et sérieusement, mon avis.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3207" target="_blank" rel="noopener">lettre</a><br /><br />Marie Dupond (Octobre 2022)<br /><br /><br /><br /></p>
</div>
Correspondance
Notice pour une lettre ou toute correspondance
Destinataire
Format à utiliser : Nom, Prénom
Hormis la majuscule à la première lettre, ne pas utiliser la majuscule.
Vous pouvez mettre les dates de naissance et de mort, entre parenthèses après le nom de l’auteur si ce n'est pas l'auteur décrit dans la collection
Si la lettre a plusieurs destinataires, mettre un nom par entrée.
Si l'identification d'un éventuel surnom ou pseudonyme n'a pas été possible, on l'indiquera dans le champ DC « Description »
Guizot, François (1787-1874)
Lieu de destination
Format : Ville (Pays), puis Adresse complète si possible.
Val-Richer
Date précise de la lettre
Samedi le 18 août 1849
Nature du document
Propositions non exhaustives :
Manuscrit, tapuscrit, copie dactylographiée, etc.
Lettre, carte postale, photo, etc. (correspondance)
Photographie, diapositive, etc. (iconographie)
Passeport, carte d'identité, répertoire, agenda, etc. (dossier biographique)
Journal, magazine, revue, etc. (presse)
Lettre autographe
Support
Support physique (codicologie). Propositions non exhaustives :
Papier, carnet, feuillet
Carte plastifiée (dossier biographique), négatif, etc. (iconographie)
Autre support : enregistrement sonore, vidéo, etc.
copie numérisée de microfilm
Etat général
Pour tout commentaire sur l'état du document (présence de ratures, etc.), il faut mieux l'indiquer dans la rubrique « état génétique ».
Bon
Localisation
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Archives Nationales (Paris)
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Source
A related resource from which the described resource is derived
AN : 163 MI 42 AP Papiers Guizot Bobine Opérateur 11
Title
A name given to the resource
Richmond, Samedi 18 août 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Richmond (Angleterre)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1849-08-18
Language
A language of the resource
Français
Type
The nature or genre of the resource
Correspondance
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0.
Subject
The topic of the resource
Réseau social et politique
Politique (France)
Diplomatie (Russie)
Politique (Angleterre)
Politique (Irlande)
Relation François-Dorothée (Politique)
Femme (politique)
Conversation
Santé (Dorothée)
Politique (Hongrie)
Description
An account of the resource
<div style="text-align: justify;">Richmond Samedi le 18 août 1849<br /><br />J’aime bien la lettre de M. Cousin. C'est un brave homme Piscatory est un peu noir. Savez-vous que vos affaires me déplaisent. Metternich me disait hier qu'il a la pleine conviction d’une nouvelle catastrophe à Paris. Ah mon Dieu, cela serait-il possible ! Car, si cela était possible, tout serait fini pour les honnêtes gens. Mais cependant les éléments de résistance sont là. Je ne sais que penser mais je suis inquiète. Dans un mois je songe aller à Paris, mais j'y veux de la sécurité. Qui me répond que j’en aurai ?<br />J’ai vu hier matin Lady Palmerston, Sabine, Beauvale, les Metternich. Sabine est amusante. Elle a vu tout le monde à Paris, dîner chez le président et passé beaucoup de soirées chez lui. Elle en parle très bien. Elle gémit de la désunion dans le parti modéré, elle aime les vieux légitimistes, elle parle bien des jeunes. Elle vante Changarnier, sans savoir à qui il appartient. C’est égal tout le monde l’adore. Elle croit Molé tout-à-fait au Président. Beauvale va hélas quitter Richmond bientôt, ce sera pour moi une grande perte. Je le vois tous les jours et ordinaire ment deux fois. Je crois que lui me regrettera aussi. Metternich est fâché de l’exécution du prêtre à Bologne, Il appelle cela du mauvais zèle. Il se plaint que son gouvernement au lieu d’adoucir, envenime la querelle avec la Prusse. J’ai dîné hier chez lord John Russell. Il y avait lord Lansdown racontant vraiment des merveilles de cette Irlande. Je remarque que ce qui fait le plus de plaisir n’est pas tant l’enthousiasme irlandais pour la Reine, que la découverte, que la reine est susceptible d’en ressentir de son côté. Elle passe pour froide & fière. Elle a oublié tout cela en Irlande. Il y avait à ce dîner trois Anglais inconnus à moi de nom & de visage. L'un grand ami de Mackaulay & bavard comme lui, je serais curieuse de savoir lequel des deux se tait quand ils sont ensemble. Je n’ai rien à vous raconter de mon dîner, la conversation a toujours été générale. Je me suis un peu ennuyée, car on n’a parlé que royaumes unis. Attendu que j’ai dîné tard je me sens un peu incommodée aujourd’hui. Misérable santé. Prenez-vous encore les eaux de Vichy.<br />L’autre jour en parlant du sentiment public Hongrois ici, je dis " malheureusement, le Ministre des affaires étrangères donne l’exemple." à quoi Brunnow dit que je me trompe et qu'il sait que malgré de mauvaises apparences le fond de la pensée est bon. Je reporte " êtes-vous donc le bon dieu pour lire au fond des cœurs ? " Le duc de Lenchtemberg écoutait. en riant. Et bien tout ceci a été redit à lord Palmerston par Brünnow en ajoutant que j’avais voulu donner au prince une idée défavorable du ministre. Je me dispense des commentaires. Adieu. Adieu, mille fois adieu.</div>
Conversation
Diplomatie (Russie)
Femme (politique)
Politique (Angleterre)
Politique (France)
Politique (Hongrie)
Politique (Irlande)
Relation François-Dorothée (Politique)
Réseau social et politique
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Title
A name given to the resource
1849 ( 19 Juillet - 14 novembre ) : François de retour en France, analyste ou acteur politique ?
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
Guizot, François (1787-1874)
Subject
The topic of the resource
Absence
Politique
Parcours politique
Posture politique
Presse
Travail intellectuel
Histoire
France (1848-1852, 2e République)
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1849-09
1849-12
Language
A language of the resource
Français
Anglais
Rights
Information about rights held in and over the resource
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0.
Description
An account of the resource
<div style="text-align: justify;"><strong>Les préparatifs du retour de Guizot dans le réseau politique parisien</strong><br /><br />Le corpus s’ouvre sur la lettre que François rédige à son débarquement au Havre le 19 juillet 1849. Il revient de son exil en Angleterre causé par la révolution de 1848. (Voir les collections <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/39" target="_blank" rel="noopener">1848 (1er août -24 novembre) : Le silence de l'exil</a> et <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/37)." target="_blank" rel="noopener">1849 ( 1er janvier - 18 juillet) : De la Démocratie en France, Guizot reprend la parole</a>)<br /><br />De son côté Dorothée reste en Angleterre, et ne rentre à Paris que trois mois après, le 17 octobre 1849. Le corpus se termine lorsque Guizot retrouve Paris, un mois plus tard. Ainsi, les lettres de François qui constituent se corpus sont rédigées au Val-Richer et à Broglie, durant un séjour chez son ami le duc Victor de Broglie (Voir la notice Le duc <a href="https://www.guizot.com/fr/amities/le-duc-victor-de-broglie/" target="_blank" rel="noopener">Victor de Broglie</a>)<br /><br />La réception de Guizot tant dans la rue que dans les institutions publiques, et, la posture à adopter sur la scène politique sont les thématiques qui structurent le discours épistolaire des deux amants. Ainsi, le rôle de Dorothée dans l’existence sociale et politique de François apparaît alors qu’ils préparent ensemble son retour à Paris et la reprise du salon de la princesse diplomate.<br /><br />
<p>Voir les mots-clés : <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=politique&facet=tag%3A%22Politique+%28France%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Politique (France)</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=politique&facet=tag%3A%22Politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Politique</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=r%C3%A9ception&facet=tag%3A%22R%C3%A9ception+%28Guizot%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Réception (Guizot)</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=posture&facet=tag%3A%22Posture+politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Posture politique</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=relation&facet=tag%3A%22Relation+Fran%C3%A7ois-Doroth%C3%A9e+%28Politique%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Relation François-Dorothée (politique)</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=salon&facet=tag%3A%22Salon%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Salon</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=femme&facet=tag%3A%22Femme+%28politique%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Femme (politique)</a></p>
<p><strong><br /><br />Rentrer chez soi</strong></p>
<p>Il faut tout d’abord noter le plaisir de François Guizot lorsqu’il retrouve sa propriété du Val-Richer, il écrit le 20 juillet 1849 :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Ma maison et mon jardin sont en bon état, comme si j’en étais sorti hier. Des fleurs dans le salon, et dans la bibliothèque ; mes journaux sur mon bureau, les allées nettoyées, les parquets frottés. Cela m’a plu et déplu. Tant de choses m'ont rempli l'âme depuis que je ne suis venu ici ; je ne puis me figurer qu’elles n'aient laissé ici aucune trace. Et puis cette tranquillité tout autour de moi, cette non interruption du passé et de ses habitudes, cela me plaît, et même me touche, car je le dois aux soins affectueux de deux ou trois personnes, amis ou serviteurs, qui ont pris plaisir à tout conserver ou remettre en ordre, et qui m’attendaient à la porte. J’ai rencontré beaucoup d'affection en ma vie ; je voudrais en être assez reconnaissant.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3018" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a> </p>
<p>Dorothée est bien consciente du plaisir de Guizot à retrouver son bonheur domestique, son parc et son jardin entouré de sa famille, et répond deux jours plus tard :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous voilà donc en France ! Que c'est loin de moi. Je suis charmée de connaître le Val Richer. Je saurai où vous chercher. Vous aurez un grand plaisir à vous retrouver là, à retrouver vos arbres, votre pelouse, vos sentiers. Tout cela reposera votre âme. Vous avez là tout le contentement intérieur, de la famille, de la propriété. Je vous manquerai c'est vrai, et je crois que je vous manquerai beaucoup, mais vous avez mille plaisirs que je n’ai pas. Et certes dans cette séparation je suis plus à plaindre que vous. Vous le sentez. Je voudrais me mieux porter et j'y prendrai de la peine, pour vous faire plaisir.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3016" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p><strong><br /><br />Se séparer</strong></p>
<p>Ce retour détermine une séparation et un éloignement. (Sur le quotidien de François et Dorothée en Angleterre voir la collection 1<a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/39" target="_blank" rel="noopener">848 ( 1er août -24 novembre) : Le silence de l'exil</a>) Dorothée évoque avec nostalgie les habitudes prises en Angleterre, telles que leurs conversations intimes.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je bavarderais bien cependant si je vous avais là dans ce fauteuil, si bien placé pour un entretien intime, comme je regarde ce fauteuil avec tendresse et tristesse !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3020" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>L’évocation de leur conversation se fait à partir du fauteuil que Guizot utilisait. Le lendemain le dimanche 22 juillet 1850, elle l’évoque encore :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Toujours ce fauteuil devant moi et vide. Comme c’est plus triste de rester que de partir.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3022" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>C’est dans une lettre du 27 juillet que François l’évoque à son tour, en exprimant nettement la coordination des pratiques de conversation et de correspondance :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je cause comme si j'étais dans mon fauteuil du Royal Hotel. Pauvre illusion !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3031" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>François est bien décidé à continuer ses échanges avec Dorothée sans craindre qu’ils puissent être lus. Il écrit le 20 juillet le lendemain de son arrivée :</p>
<p style="padding-left: 40px;">On me dit qu’il faut prendre garde au nouveau directeur de la poste de Lisieux. Je n'y prendrai point garde. On lira mes lettres si on veut. On y trouvera peut-être quelque amusement, peut-être même quelque profit. On n’y trouvera rien que je sois bien fâché qu’on ait lu. Si j’avais quelque chose à vous dire que je tinsse vraiment à cacher, je saurais bien vous le faire arriver autrement que par la poste. Faites comme moi. Ne nous gênons pas en nous écrivant. Nous n'avons aucune raison pour nous gêner, et nous avons assez d’esprit pour nous ingénier, si nous en avions besoin. Les gens d’esprit sont toujours infiniment plus francs et plus cachés que ne croient les sots.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3018" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a> </p>
<p><strong><br /><br />Réception de Guizot à son retour en France </strong></p>
<p>Le retour de Guizot en France ne se fait pas sans une certaine inquiétude. Il est attendu au Havre par quelques amis, politiques, diplomates et journalistes. Il cherche à rassurer Dorothée dès son arrivée le 19 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J’ai trouvé sur le port le duc de Broglie, MM. Piscatory, Plichon, Herbet, Mallac, Léon Pillet<a href="#_ftn1" name="_ftnref1"><sup>[1]</sup></a>, et assez de foule. Pas un mot agréable, ni désagréable. Des regards curieux ; beaucoup de chapeaux levés. De la déférence dans l’indifférence. Il reste assez de personnes devant l'hôtel de l’Amirauté où je suis logé. Leur attitude me convient.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3017" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a> </p>
<p>Dorothée n’a pas encore reçu de nouvelles de Guizot mais elle suit son retour en France dans la presse et écrit le 21 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J'attends aujourd’hui une lettre du Havre. Le Times ce matin dit que vous y êtes arrivé, et que votre réception a été des huées. Cela fait bien de l'honneur à vos compatriotes !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3020" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>En effet, Guizot complète le récit de son arrivée sur le sol Français le 20 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je me suis vanté trop tôt hier en vous disant que je n’avais rencontré dans l’accueil du Havre rien d’agréable, ni de désagréable, de la déférence dans l’indifférence. Cela a un peu changé deux heures après. Cinquante ou soixante gamins se sont réunis sous les fenêtres de l’auberge où je dînais, et se sont mis à crier : « à bas Guizot ! » et à siffler. Cinquante à soixante curieux, ou plutôt curieuses, se sont attroupés autour d’eux. Pas l’ombre de colère ni de menace ; une curiosité mécontente de ce que je ne paraissais pas entendre les cris, et une petite démonstration malveillante organisée par le journal rouge de la ville qui l’avait annoncée le matin en annonçant mon arrivée. J'ai dîné tranquillement au bruit de ce concert, et je suis descendu dans la rue pour monter dans la voiture qui devait me reconduire à l’auberge où je couchais. J’ai trouvé autour de la voiture une douzaine de gentlemen qui en écartant les gamins, l’un m’a dit d’un très bon air : « M. Guizot, nous serions désolés que vous prissiez ce tapage pour le sentiment de la population de notre ville ; ce sont des polissons ameutés par quelques coquins. Non seulement nous vous respectons tous ; mais nous sommes charmés de vous voir de retour et nous espérons bien vous revoir bientôt où vous devez être. » […]. Cela n’avait pas la moindre gravité en soi, beaucoup comme symptôme. Rien n’est changé et je ne suis point oublié. Ce matin, sur le bateau du Havre à Honfleur, les gentlemen étaient en grande majorité et m'ont fait fête. […] Ce pays-ci est bien animé, et bien prompt à saisir les occasions de le montrer. Je n’en suis que plus décidé à rester bien tranquille chez moi. Il n’y a absolument rien de bon à faire, et ma position est bonne pour attendre.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3018" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>La réception chahutée de Guizot au Havre le conforte dans sa décision de rester en retrait au Val Richer, même si en réaction il reçoit des témoignages de sympathie en soulignant son retour sur le sol français comme un événement. Il écrit le 25 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">La petite scène du Havre a bien tourné. De bons juges m’écrivent de Paris : « Tout compté et bien compté, ce n'est point à regretter. Puisqu'il n’y a rien eu de grave autant vaut au risque de quelques embarras et de quelques inquiétudes, que vos éternels adversaires vos ennemis naturels aient fait la faute de provoquer ce qui a houleusement échoué. Il ne faut pas regretter l'éclat qu’ils ont donné à votre rentrée. Votre retour en France est un fait considérable. Il est considérable pour vos amis comme pour vous-même, en raison de votre passé et probablement aussi en raison de votre avenir. On l’a compris on le comprend, et l'on n'a pas su dissimuler sa mauvaise humeur. Encore une fois, tant mieux. »<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3438" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot reprend ses marques en évaluant la place et le rôle qui lui sont attribués par ses amis politiques. François commence par écouter les membres de son réseau. Il écrit le 23 juillet, quatre jours après son arrivée en France :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J’ai passé ma matinée hier à recevoir des visites. Dix-neuf. Mon impression reste la même. Rien n’est changé au fond, dans la situation générale, ni dans la mienne. Seulement tout a éclaté et s'est exaspéré. C’est toujours la même lutte entre les mêmes classes et les mêmes passions, et j'y tiens toujours la même place. Mais évidemment le moment n'est pas venu pour moi, quand je le pourrais, de la reprendre activement. Mes amis se troubleraient. Mes ennemis s’irriteraient. Et les uns et les autres saisiraient le premier prétexte pour rejeter sur moi seul la responsabilité du premier malheur. Et le public spectateur les croirait. Je n’ai qu'à attendre, si le temps, en s'en allant, n'emporte pas trop tôt ce qui me reste de forces, je puis avoir encore un grand moment. Si je m'en vais avant que ce moment n’arrive, j'ai lieu d'espérer aujourd’hui que justice sera faite à mon nom.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3023" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot comprend que la place qui lui est réservée le porterait sur le front de bataille. Il évoque un possible retour sur la scène politique tout en concluant que les conditions n’y sont pas encore favorables. Le 10 août 1849, Dorothée écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Restez comme vous êtes à l’écart, tranquille. Cela a très bon air. Profit tout clair. Soyez en sûr.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3057" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Le 15 septembre 1849, Dorothée lui fait part de sa conversation avec l’ancien diplomate Théobald Piscatory (1800-1870) qui poursuit sa carrière politique sous la deuxième République en tant que député monarchiste :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Voici votre lettre avec extrait de Piscatory. C’est un esprit [?] & qui est resté doctrinaire. Je vous en prie ne le redevenez pas.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3122" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>François y répond le 17 septembre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Les décadences me déplaisent toujours. Soyez tranquille ; je ne redeviendrai pas doctrinaire. Fatuité à part, je ne voudrais pas redevenir rien de ce que j’ai été. Je crois que ce serait déchoir. Redevenir jeune en restant ce que je suis à la bonne heure. Et si je ne me trompe, vous en diriez autant.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3125" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot se sent fort de son expérience et de son expertise. Il n’exprime jusqu’ici aucune nostalgie de ses succès de jeunesse.</p>
<p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1"><sup>[1]</sup></a> Théobald Piscatory (1800-1870), Ignace Plichon (1814-1888), Edmond Herbet (1813- ?), Léon Pillet (1803-1868)<strong><br /><br /><br /><br />Guizot s’impatiente au Val-Richer</strong></p>
<p>Plus d’un mois après, François commence à s’interroger sur la réception de son action publique. Ne sera-t-elle jamais reconnue ? Aussi, c’est en s’adressant à Dorothée qu’il s’autorise à comparer ce retour d’Angleterre avec un avenir incertain, à son retour de son ambassade à Londres en 1840 avec plus d'espoir :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous rappelez-vous bien le 29 octobre, il y a neuf ans mon arrivée à Paris le 26 et les trois jours qui précédèrent la formation du Cabinet ? Je suis décidé à ne pas croire que ce jour-là, et tout ce que j’ai fait du 29 octobre 1840 au 24 février 1848 m'ait été bon à rien. Mais aujourd’hui il n’y a que Dieu qui sache à qui cela a été et restera bon.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3209" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Il semble que Guizot tienne moins à reprendre sa place ou une place qu’à ce que son œuvre politique de 40 à 48 soit reconnue. Il faut noter que Guizot considère son action de cette période et non celle du début de la Monarchie de Juillet. Et c’est cette conscience de la tâche accomplie qui lui permet d’affirmer le 30 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J'ai dit à M. Moulin, ce que je pense comme je le dirai quand je serai à Paris. J'ai acquis le droit de tout dire. Ce qui ne veut pas dire que j'en serai toujours. Mais je ne me laisserai gêner par personne.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3211" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>La reprise du salon de Dorothée permet de multiplier les éléments pour évaluer les conditions du retour de François à Paris. Le 2 novembre, elle lui écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Attendez-vous à beaucoup d'ingratitude. Vous êtes le politique de la monarchie de juillet. Absurdité incrustée dans le gros du public. Il ne faut pas que vous disiez que vous n’avez jamais eu tort. Je lui ai répondu qu'il n'y a que les sots qui se croient infaillibles. Je vous répète que Ste Aulaire est excellent.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3216" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot répond le 3 novembre</p>
<p style="padding-left: 40px;">Merci, merci. Cela ne me paraît pas, à tout prendre, inquiétant pour le moment. Mes tendres amitiés à Sainte-Aulaire quand vous le reverrez. Je crois plus que personne qu’il n’y a que les sots d'infaillibles, mais je suis très décidé à ne pas me laisser affubler du moindre tort prétendu pour épargner à d'autres la honte de leurs gros péchés.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3219" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Il poursuit le 4 novembre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">La vérité est grosse comme une montagne, et moi, je ne suis pas encore mort. Il faudra bien qu’on y voie clair qu’on le veuille ou non. Et comme l’ingratitude ne me donnera point d'humeur, je prendrais mon temps et les bons moyens.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3221" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot comprend que chacun le dissuade de revenir, mais il suggère qu’il envisage de nouvelles modalités d’action publique et de présence politique. Le 5 novembre Guizot écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Ils me recommandent de ne pas arriver au milieu de la crise : " Quelque réservé quelque prudent que vous soyez, on commentera votre arrivée vos paroles, en vous fera parler quand vous n'aurez rien dit. Il ne vous est pas permis, de vous renfermer dans la vie privée ; vous serez, malgré vous malgré nous, traité en homme public. " Voilà leurs paroles. Ce qu’ils disent est vrai. Je n’y vois pas autant d’inconvénients qu'eux ; et ces inconvénients, s'ils existent, existeront à peu près toujours, A quelque moment que j’arrive, il m’arrivera ce qu’ils disent. Pourtant, je crois que pour ce moment-ci, ils ont raison, et qu’il vaut mieux ne pas fixer de jour précis. Quel ennui, et quel prélude, d'ennemis ! Je suis dans une veine de tristesse profonde, pour vous, pour moi. Si j'étais là, je serais bien moins triste, bien moins inquiet. Votre inquiétude à vous me désole au-delà de ce que je puis dire. J’espère qu'elle est exagérée ; mais je la trouve bien naturelle. Si j'étais là, vous seriez moins inquiète et moi probablement pas inquiet du tout. Ah, que le monde est mal arrangé !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3223" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Dans cette lettre, Guizot semble un peu atteint par ses perspectives pessimistes sur son retour diffusées par son réseau politique. Il semble pris dans une tension entre la volonté de revenir et de reprendre la parole et la prudence. Il ne veut pas précipiter son retour. Le 7 novembre, il écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je ne veux pas retourner étourdiment à Paris. Je ne veux pas tarder inutilement à y retourner. Ce qui est inutile en ce genre serait inconvenant pour moi. Je ne me fais pas la moindre illusion sur ce qui m'attend à Paris. L’ingratitude ne me touche point ; il n'y en aura jamais plus que je n'en attends. Les stupidités populaires, les perfidies infatigables, et infiniment détournées, des rivaux d’autant plus acharnés qu’il sont un peu honteux, les froideurs embarrassées, des indifférents, les poltronneries, des amis, je compte sur tout cela. J'étais puissant avec grand combat. Je suis tombé avec grand bruit. Si j'étais mort, encore passe. Mais je reviens. La plupart s'étonnent, quelques uns craignent que je ne sois pas mort. Ma présence est pour les uns un reproche, pour les autres, une inquiétude, pour d’autres simples spectateurs, quelque chose d'inconnu, et par conséquent d'incommode. Tout cela me fait une situation délicate, et qui aura des difficultés. Je ne puis pas la changer. Je ne veux pas l’éluder. S’il y a un bon avenir, je surmonterai ces difficultés. S'il n'y a pas un bon avenir, peu m'importe tout cela.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3227" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>François ne conditionne pas son retour à Paris à une possible reprise de son action politique directe. Il explique comment tout bien considéré, chacun sera dérangé par son retour. Après près de quatre mois au Val-Richer, sa décision est prise. Bonne ou mauvais réception, François veut faire face et ne veut pas se condamner à l’isolement en France. Le 5 novembre, trois semaines après son arrivée, Dorothée rouvre son salon parisien et fait part à François de ce qu’elle a pu sonder parmi ses visiteurs. Dorothée apparaît comme la personne avec laquelle il peut réfléchir ouvertement à son retour politique. Dorothée n’est pas seulement une oreille attentive, depuis son retour à Paris, elle est au plus près pour recueillir des informations nécessaires à l’analyse de François :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Tout le monde entrait chez moi hier en riant, une sorte de plaisir de retrouver du vieux. Cela m’a plu, le commencement m’a plu ; à la fin de la soirée, j’ai dit à Montebello, avec amertume « personne n’a prononcé le nom de M. Guizot. » Cela m’a choquée. Voilà les hommes. Voilà le temps. Montebello m’a cité une exception, le Prince Wittgenstein. Je lui en saurai gré. [..]Que vous écrit-on sur vous ? Adieu. deux choses à relever. Molé ne croit pas à l’Empire. Et en fait d'avenir, il ne croit plus qu'une Monarchie constitutionnelle soit possible autre part qu’en Angleterre.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3222" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Et François répond le 11 novembre à ce que lui rapporte Dorothée quelques jours plus tôt le 5 novembre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je dis comme vous pour ce qui touche ma situation personnelle en reparaissant. Nous verrons. Nous devons avoir ce qu’il faudra d'habileté et de bon sens. Le silence qui vous choque ne m’étonne pas. C'est de l’embarras et de la platitude, faute d’esprit et faute de cœur. Deux choses, si je ne me trompe, mettront à l'aise, autant qu’ils peuvent être à l'aise, les poltrons et les sots ; d'abord ma manière, et bientôt ma situation même. [...] Je ne vois absolument aucune raison d'hésiter, et je suis décidé. Il n’y a que deux espèces de personnes qui me conseillent de ne pas revenir ; celles qui s'en iraient volontiers elles-mêmes, et celles qui ont envie que je ne revienne pas du tout.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3235" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Le 10 novembre, Dorothée fait part à Guizot d’une réception positive de la part d’Achille Fould, Ministre des Finances entre 1849 et 1867 :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Achille Fould m’a abordée, il m’a parlé avec tristesse de la situation qu'il a acceptée, & puis tout de suite il a passé à me demander de vos nouvelles quand vous reviendrez. J’ai dit que j’espérais dans 8 ou 10 jours. Et puis, que pense M. Guizot ? - M. Guizot pense qu’il faut soutenir l’autorité tant qu’elle donne des gages d’ordre & de force. - M. Guizot a un trop bon esprit pour ne pas penser cela.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3232" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=posture&facet=tag%3A%22Posture+politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">les lettres</a> sur la posture politique à adopter par Guizot <span><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=posture&facet=tag%3A%22Posture+politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22"></a></span></p>
<p>Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=r%C3%A9ception&facet=tag%3A%22R%C3%A9ception+%28Guizot%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">les lettres</a> sur la réception de Guizot <br /><br /><br /><br /><br /></p>
<p><strong>Préparer le retour de Guizot à Paris : rouvrir le salon parisien de Dorothée<br /><br /></strong>Voir les lettres <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=relation&facet=tag%3A%22Relation+Fran%C3%A7ois-Doroth%C3%A9e+%28Politique%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Relation François-Dorothée (Politique)</a><br /><br /></p>
<p>Le retour de Dorothée à Paris à l’automne alors que François Guizot est encore au Val Richer conduit à la reprise de leur relation épistolaire politique. Guizot s’y prépare, il écrit le 16 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Quand vous m'écrirez de Paris, vous m'enverrez les faits, je vous renverrai mes réflexions. En attendant que faits et réflexions nous soient communs.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3183" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Ce corpus met en lumière le fonctionnement du duo politique. Au travers de ses correspondances et conversations, Dorothée doit rassembler des faits sur la situation politique à Paris. Elle constitue un matériau pour l’élaboration d’une analyse par Guizot. Le 25 octobre, il exprime nettement la dynamique de leur relation et comment il pratique à deux l’analyse des faits politiques :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Quel ennui d'être loin et de ne pas avoir avec vous, sur ce point-là encore plus que sur tout autre, ces conversations infinies où à force de se tout dire, on finit par atteindre ensemble à la vérité et pas s'y reposer ! Enfin dans trois semaines nous en serons là.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3201" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Dans une lettre du 18 octobre à propos de la politique étrangère menée par l’Angleterre, Guizot donne un exemple de conclusion établie à deux :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Les questions du Cabinet anglais ne se décident pas par la politique étrangère. Nous nous le sommes dit cent fois, et nous l’oublions toujours.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3186" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Lorsque Dorothée rentre à Paris, François décrit comment constituer un salon où l’on puisse prendre des informations mais aussi en diffuser. D’un côté François garde encore ses distances avec la vie politique parisienne, de l’autre, Dorothée sonde et prépare le terrain en reprenant ses activités sociales et politiques parisiennes. Il écrit le 19 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous avez toute raison ; arrangez votre vie ; faites-y entrer comme il vous convient, les personnes qui sont à la fois indifférentes et importantes. Que chacun vienne et prenne place. Cela se fera plus aisément et plus sûrement moi n’y étant pas. Je viendrai quand ce sera fait et nous en jouirons ensemble. On ne sait pas combien on peut lever de difficultés et concilier d'avantages avec un peu d'esprit, et de bon sens, en se laissant mutuellement l’espace et la liberté nécessaires pour agir, et pour réussir. Chacun pour soi, et pour soi seul, c'est l’égoïsme, la solitude dans la glace ; chacun par soi- même et selon sa propre situation, c’est la dignité et le succès ce qui ne nuit en rien à l'affection. Je reviens à mon désir du moment. Je suis bien curieux de votre impression sur Paris et sur la situation actuelle.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3188" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Afin que le salon de Dorothée n’apparaisse pas au service de la reprise de la vie politique de Guizot, ils agissent séparément. L’autonomie de Dorothée est manifeste, et c’est d’ailleurs ainsi qu’elle peut lui être le plus utile. Guizot n’est plus ministre des Affaires étrangères. Mais Dorothée reste une princesse russe, diplomate, anglophile et installée en France en rayonnant encore sur la diplomatie et les monarques européens. Dans la même lettre, il cite un autre exemple de femme qui mène une pratique d’action politique et diplomatique dans son salon.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous ai-je dit, ou savez-vous que lord Normanby<a href="#_ftn1" name="_ftnref1"><span>[1]</span></a> est très assidu chez Madame Howard ; et que c’est surtout par elle qu’il agit sur le Président ?<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3188" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Guizot note les visites de l’ambassadeur d’Angleterre en France chez Madame Howard, la maîtresse de Louis Napoléon en soulignant que c’est elle qui « agit sur » le président de la République. Dans la lettre suivante, du 20 octobre, Guizot précise les personnes importantes à convier au milieu des indifférents.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Dans l’arrangement de votre vie, indépendamment des anciennes connaissances qu’il faut reprendre, peut-être y en a-t-il aussi quelques nouvelles qu’il vous convient de faire, soit à cause de leur value personnelle, soit à cause de l’importance qu'elles ont prise dans ces derniers temps. Montalembert, Falloux (s’il vit), Bussierre, d’Haussonville, Piscatory<a href="#_ftn2" name="_ftnref2"><span>[2]</span></a>. Je ne crois pas qu’il faille étendre votre cercle, et les étrangers en sont, et doivent en être, toujours le fond. Mais vous aurez des vides. Du reste, vous jugerez mieux de cela après quelques jours de séjour que moi d’ici. J’avais pensé à M. de Tocqueville, s'il se recherchait comme de raison. Il est homme d’esprit, de bonne compagnie et sûr je crois. Mais il ne serait pas sans inconvénients. Je vous dis ce qui me passe par l’esprit.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3190" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
Guizot réfléchit à la composition du salon de Dorothée et en éclaire les caractéristiques. La première est sa nature internationale. Son salon est l’espace des relations diplomatiques. La seconde est d’introduire de nouvelles personnalités politiques. Après la révolution de 1848 et l’avènement de la République, Dorothée doit actualiser la composition de son salon. Neuf jours plus tôt, Guizot mentionne déjà Tocqueville en dressant un portrait positif notamment grâce à un point commun qu’ils partagent : une action coordonnée à une œuvre intellectuelle.<br />
<p style="padding-left: 40px;">M. de Tocqueville a été, jusqu'ici, un homme d’esprit dans son Cabinet et dans ses livres. Il est possible qu’il ait de quoi être un homme d’esprit dans l'action et gouvernement. Nous verrons. Je le souhaite. C’est un honnête homme et un gentleman<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3172" target="_blank" rel="noopener">lettre</a></p>
<p>Deux semaines plus tard, Dorothée rend compte à François. Les deux personnes qui restent toujours importantes en 1849 sont Molé et Thiers, les deux personnalités avec qui Guizot a dû naviguer au cours de la Monarchie de Juillet.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Mon salon hier était comme il y a deux ans, excepté vous de moins, et M. Molé & Berryer<a href="#_ftn3" name="_ftnref3"><span>[3]</span></a> de plus, & quelques légitimistes. La diplomatie au complet moins l'Angleterre. […] Voici le vrai de la situation. Les ministres changent, mais deux hommes restent immuables, importants, sont Molé et Thiers. La diplomatie se tient à eux. On leur parle comme à des Ministres & on leur montre souvent plus qu'aux ministres.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3222" target="_blank" rel="noopener">lettre</a><br /><span><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3222"></a></span></p>
Dans une lettre du 31 octobre, le fonctionnement du couple apparait avec son usage de l’art de converser de Dorothée
<p style="padding-left: 40px;">Puisque M. Hübner est enfin venu vous voir, ce dont je suis bien aise, causez un peu à fond avec lui de la Hongrie. Ce pays-là est entré dans l’Europe. On regardera fort désormais à ses affaires. Est-ce sage la résolution qu'on vient de prendre à Vienne de maintenir, quant à la Hongrie, la Constitution centralisante de mars 1849, et de considérer son ancienne constitution comme abolie, au lieu de la modifier ? Je n’ai pas d'opinion ; je ne sais pas assez bien les faits ; mais je suis curieux de m'en faire une. Puisque M. Hübner est un homme d’esprit il vous reviendra souvent.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3213" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
Une fois que le comte de Hübner, l’ambassadeur d’Autriche à Paris, devient un membre du salon de Dorothée, François indique à Dorothée les questions à lui poser et vers quoi orienter la conversation.
<p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1"><span>[1]</span></a><span> Normanby, Constantine Henry (1797-1863 ; Marquess of) </span></p>
<p><a href="#_ftnref2" name="_ftn2"><span>[2]</span></a> Il s’agit d’hommes politiques attachés à une droite libérale. Charles Forbes René, comte de Montalembert (1810-1870), Alfred de Falloux (1811-1886) ministre de l’instruction publique jusqu’en octobre 1849, Alfred Renouard de Bussière (1804-1887), Joseph Othenin Bernard de Cléron, comte d'Haussonville (1809-1884).</p>
<p><a href="#_ftnref3" name="_ftn3"><span>[3]</span></a> Berryer, Pierre Antoine (1790-1868), journaliste, avocat et député des Bouches-du-Rhône à partir de 1848.</p>
<p><br /><br /></p>
<p><strong>L’art de converser de Dorothée </strong></p>
<p>Alors que Dorothée a repris sa vie parisienne depuis trois semaines et qu’elle en fait le compte-rendu à François, la qualité de sa correspondance fait écrire à François :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous êtes la plus excellente et fidèle glace (miroir est trop petit) qui se puisse voir. Vous me renvoyez toutes les hésitations, fluctuations alternatives du public qui vous entoure. Hier, l'Empire infaillible ; aujourd’hui, impossible. Les brusques revirements d'inquiétude et de confiance d’abattement et d’entrain, ces oublis frivoles et ces préventions entêtées, ce mouvement perpétuel qui avance si peu, ce je ne sais quoi d'immobile, je devrais dire d’incorrigible qui persiste sous ce besoin insatiable de changement et de nouveauté, tout cela, qui est la France, et surtout Paris dans la France, tout cela est dans vos lettres. Tantôt vous le peignez parce que vous l'avez observé ; tantôt vous le reproduisez sans vous en douter. Ce qui, pour vous, est spectacle devient à l’instant tableau dès que vous en parlez. Cela est rare et charmant.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3227" target="_blank" rel="noopener">lettre</a><span> </span></p>
<p>Alors que la question de l’établissement d’un nouveau régime politique, et de la transformation du Président en Empereur, François souligne avec enthousiasme la maîtrise de Dorothée dans l’art de transcrire les tendances et les fluctuations politiques mais aussi de les saisir au travers d’une analyse fine des détails. (Sur la pratique épistolaire de Dorothée voir aussi la collection<br /><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/16)" target="_blank" rel="noopener">1837 (1<sup>er</sup> juillet- 6 août) : Les premières semaines de la relation et de la correspondance entre les deux amants</a> )</p>
<p>Dans ce corpus de correspondance, un autre écho se laisse entendre. Alors que Chateaubriand meurt en juillet 1848, la publication posthume des Mémoires d’Outre-tombe se fait en feuilleton dans <em>La Presse</em> à partir du 21 octobre 1848 (Voir le <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4311597/f1.image.zoom" target="_blank" rel="noopener">numéro</a>), Dorothée craint une critique de ses pratiques diplomatiques et politiques. En effet, la princesse de Lieven et Chateaubriand ont fait partie du même réseau diplomatique en Angleterre. Le 2 octobre Dorothée demande à François :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Et à propos encore, avez-vous lu ce que M de Chateaubriand dit de moi dans son Outre tombe.<br /><span>Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3155" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </span></p>
<p>Le 4 octobre, Guizot répond :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je ne lis pas les Mémoires d’Outre-tombe. C’est vous qui me faisiez lire ces frivolités-là, Outre-tombe, Raphael. Quand je ne vous ai pas, je ne me doute pas qu'elles paraissent. Je vais demander les passages où il est question de vous.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3159" target="_blank" rel="noopener">lettre </a></p>
<p>C’est douze jours plus tard, le 16 octobre, que Guizot répond à Dorothée après s’être renseigné, vraisemblablement auprès d’Armand Bertin<a href="#_ftn1" name="_ftnref1"><span>[1]</span></a> du Journal des Débats qui a été au service de Chateaubriand lors de son ambassade à Londres en 1822.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Armand Bertin était attaché à l'Ambassade de M. de Châteaubriand. Un soir en rentrant M. de Châteaubriand lui dit : « Madame de Lieven me traite bien mal. Elle ne sait pas à qui elle a affaire ni quels sont mes moyens de me venger. Certainement je me vengerai ? » Votre article d’Outre-tombe a été écrit alors de verve de vengeance. Il y a ajoute depuis ce qui me regarde. Je vous dis ce qu’on vient de me dire. Je ne l’ai pas lu.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3183" target="_blank" rel="noopener">lettre </a></p>
<p>Dorothée a quelques raisons de craindre la parution des Mémoires de Chateaubriand. L’auteur consacre un portrait à Dorothée et lui retire d’emblée ce qui lui est reconnu : son esprit et son expertise dans les pratiques de cour. Chateaubriand écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Comme elle était hardie et passait pour être bien en cour, elle était devenue extrêmement fashionable. On lui croyait de l'esprit, parce qu'on supposait que son mari n'en avait pas; ce qui n'était pas vrai : M. de Lieven était fort supérieur à. madame. Madame de Lieven, au visage aigu et mésavenant, est une femme commune, fatigante, aride, qui n'a qu'un seul genre de conversation, la politique vulgaire ; du reste, elle ne sait rien, et elle cache la disette de ses idées sous l'abondance de ses paroles.<br />Chateaubriand, F.-R. de, <em>Mémoires d’outre-tombe</em>, Tome 4 ; Edmond Biré (ed.), (1899-1900) p. <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9660797n/f267.item.r=m%C3%A9moires%20d'outre%20tombe" target="_blank" rel="noopener">249</a> </p>
<p>C’est à Londres que Dorothée prend sa carrure diplomatique, sans se cantonner au rôle d’une femme d’ambassadeur. Elle devient diplomate.. En quelque sorte, Chateaubriand la remet à sa place, et une fois qu’il lui a ôté ses qualités intellectuelles et politiques, il lui retire ce qui peut alors donner plaisir à fréquenter une femme : sa beauté. Mais c’est sur son esprit et sur l’intérêt de ses conversations et de ses correspondances qu’il insiste et à la vulgarité, il ajoute la puérilité de ses pratiques diplomatiques.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Quand elle se trouve avec des gens de mérite, sa stérilité se tait ; elle revêt sa nullité d'un air supérieur d'ennui, comme si elle avait le droit d'être ennuyée ; tombée par l'effet du temps, et ne pouvant s'empêcher de se mêler de quelque chose, la douairière des congrès est venue de Vérone donner à Paris, avec la permission de MM. les magistrats de Pétersbourg, une représentation des puérilités diplomatiques d'autrefois.</p>
<p>Le portrait continue sur la description du contenu de son discours épistolaire. Sa politique et sa diplomatie semble restreinte à organiser des mariages. Encore une fois, Chateaubriand la ramène à sa condition de femme.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Elle entretient des correspondances privées, et elle a paru très forte en mariages manqués. Nos novices se sont précipités dans ses salons pour apprendre le beau monde et l'art des secrets ; ils lui confient les leurs, qui, répandus par madame de Lieven, se changent en sourds cancans. Les ministres, et ceux qui aspirent à le devenir, sont tout fiers d'être protégés par une dame qui a eu l'honneur de voir M. de Metternich aux heures où le grand homme, pour se délasser du poids des affaires, s'amuse à effiloquer de la soie. Le ridicule attendait à Paris madame de Lieven. Un doctrinaire grave est tombé aux pieds d'Omphale : « Amour, tu perdis Troie. »<br />Chateaubriand, F.-R. de, Mémoires d’outre-tombe, Tome 4 ; Edmond Biré (ed.), (1899-1900) p. <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9660797n/f267.item.r=m%C3%A9moires%20d'outre%20tombe" target="_blank" rel="noopener">250</a> </p>
<p>Chateaubriand ne manque pas de terminer sur les relations de la princesse avec des grands hommes en ne soulignant que leur caractère sexuel et frivole. Le point d’orgue est atteint lorsqu’il évoque la relation entre Dorothée et François avec ironie. Le portrait est si acide qu’Edmond Biré l’éditeur de 1898 se sent obligé d’annoter ce passage en citant un témoignage d’un autre secrétaire d’ambassade de Chateaubriand :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Elle avait épousé Christophe Andréiëvitch, prince de Lieven, général dans l'armée russe, gouverneur du tsar Alexandre II et pendant vingt-deux ans ambassadeur à Londres. Le portrait qu'en trace ici Chateaubriand est trop poussé au noir. « Bien qu'étrangère, dit M. de Marcellus<a href="#_ftn2" name="_ftnref2"><sup>[2]</sup></a>, elle dominait les filles d'Albion par une in- contestable supériorité d'attitude et 'de manières. Elle savait causer de tout ; elle avait été fort jolie, et sa taille gardait encore beaucoup plus tard une grande élégance ; elle possédait une merveilleuse aptitude pour la musique ; sa mémoire lui rappelait des opéras entiers qu'elle exécutait à ravir sur le piano. » Justement réputée par son esprit et sa rare intelligence des affaires publiques, elle a été liée avec tout ce que son temps comptait de personnages éminents, dans tous les partis et dans toutes les nationalités. Castlereagh et Canning ont été particulièrement de ses amis, ainsi que le prince de Metternich ; lord Grey lui écrivait chaque matin de son lit un billet demi-politique, demi-galant. On lui a attribué une liaison avec George IV. A Paris, où elle s'était fixée après la mort de son mari, elle a été l'Egérie de M. Guizot qui passait toutes ses soirées chez elle.<br />Chateaubriand, F.-R. de, Mémoires d’outre-tombe, Tome 4 ; Edmond Biré (ed.), (1899-1900) pp. <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9660797n/f267.item.r=m%C3%A9moires%20d'outre%20tombe" target="_blank" rel="noopener">249-250</a> </p>
<p>Voir encore sur ce sujet la collection <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/16" target="_blank" rel="noopener">1837 (1<sup>er</sup> juillet- 6 août) : Les premières semaines de la relation et de la correspondance entre les deux amants </a></p>
<p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1"><span>[1]</span></a> Armand Bertin (1801-1854)</p>
<p><a href="#_ftnref2" name="_ftn2"><span>[2]</span></a> Marcellus, Marie Louis Auguste de Martin du Tyrac (1776-1841 ; comte de)<br /><br /><br /></p>
<p><strong>Politique et histoire</strong></p>
<p>François rentre en France, mais au Val Richer et non à Paris. Cette distance géographique de la scène politique permet à François de réfléchir aux modalités de son activité en France. Comme en 1837, lors de ses vacances gouvernementales (voir les collections <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/33" target="_blank" rel="noopener">1837-1839 : Vacances gouvernementales</a> et <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/14" target="_blank" rel="noopener">1838 : Réflexion politique et élaboration historique</a>) et en 1849 en exil (voir la collection <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/39" target="_blank" rel="noopener">1849 : De la Démocratie en France : Guizot reprend la parole</a>), le travail historique permet à Guizot de prendre une posture légitime d’expert. Dans sa retraite au Val-Richer, il décrit l’emploi de son temps :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Le beau temps a disparu. La pluie revient dix fois par jour. Je me promène pourtant. Les bons intervalles ne manquent pas. Je me lève de bonne heure. J’écris ; ma toilette, la prière. Nous déjeunerons à 11 heures. Promenade. Je fais mes affaires de maison et de jardin. Je remonte dans mon cabinet à une heure. J'y reste, sauf les visites. Nous dînons à 7 heures. Je me couche à 10. Quand le flot des visites se sera ralenti, j'aurai assez de temps pour travailler. Je veux faire beaucoup de choses. <br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3438" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Il exprime dès son arrivée sa volonté de s’engager dans son travail historique et de profiter de ce temps au Val-Richer pour écrire :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Samedi. 4 août. 7 heures<br />Je vous dis bonjour en me levant. Je vais travailler. Il faut que j'aie fait deux choses d'ici à la fin de l'automne. Pour les grandes et pour les petites maisons. Le temps est superbe. Je vous aime mille fois mieux que le soleil. Adieu. Adieu. Je dors bien mais toujours en rêvant. Décidément la révolution de Février m’a enlevé le calme de mes nuits, bien plus que celui de mes jours.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3045" target="_blank" rel="noopener">lettre </a><span><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3045"></a></span></p>
<p>Guizot est le premier à établir des liens entre ses études historiques et les principes de sa position politique. Il exprime ce va-et-vient entre l’histoire et l’actualité. Alors que la question du régime politique de la France et son système constitutionnel est en discussion, il reprend son point de vue depuis l’histoire d’Angleterre et la réussite d’une monarchie constitutionnelle.</p>
<p style="padding-left: 40px;">C'est, je vous assure, une singulière impression que de vivre en même temps au milieu de tout cela, et au milieu du long Parlement, de Cromwell, de Richard Cromwell des Républicains, des Stuart & & & C'est une perpétuelle confusion de ressemblances et de différences, et de curiosités et de conjectures, qui tombent pêle-mêle sur la France et sur l’Angleterre, sur le passé et sur l'avenir. Je ne dirai pas cependant que je m’y perde. Mon impression est plutôt qu’il rejaillit bien de la lumière d'un pays et d’un temps sur l'autre. Mais soyez tranquille ; j'ai assez de bon sens pour ne pas me fier à mon impression et pour savoir que je n’y vois pas aussi clair que par moments, je le crois.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3219" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>C’est en 1850, qu’est publié le <em><a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bd6t5368009n/f11.item" target="_blank" rel="noopener">Discours sur l'histoire de la révolution d'Angleterre : pourquoi la révolution d'Angleterre a-t-elle réussi</a>.</em> Comme pour son essai <em>De la Démocratie en France</em>, publié un an plus tôt, Guizot vise une publication simultanée en France et en Angleterre. Ainsi Mad Austin vient d’Angleterre pour travailler avec Guizot au Val-Richer sur la traduction du manuscrit. Il écrit le 13 octobre 1849 :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Mad. Austin m’arrive le 19 au Val Richer, pour traduire, mon ouvrage sous mes yeux. Il me faut 36 heures pour la mettre en train. Je ne puis partir que le dimanche 21 pour vous voir lundi 22. Je ne pourrai rester à Paris que deux jours. Il faudra que je revienne ici pour achever, mon travail et surveiller la traduction. Je comptais rester au Val Richer, jusqu'à la fin de Novembre, et quelques jours employés à une course à Paris me mettront en retard, par conséquent dans l'impossibilité d'y revenir plutôt. Si au contraire, je ne me détourne pas de mon travail, le 21 Octobre, je pourrai avancer mon retour définitif à Paris. J'y reviendrai alors décidément, le 15 ou le 16 novembre. Je prends le choix des deux jours à cause de l’incertitude des diligences où il me faut beaucoup de places. Il me semble que cela vaut mieux. Si vous étiez revenue à Paris vers le milieu de septembre, selon votre premier projet, il n’y avait pas à hésiter ; notre réunion définitive était trop loin ; j’allais vous voir sur le champ, ne fût-ce que pour deux jours. Vous ne revenez que le 18 octobre. Je puis, en ne m'interrompant pas dans mes affaires d’ici, travail et traduction, retourner définitivement à Paris, le 15 novembre. Ne vaut-il pas mieux faire cela que nous donner deux jours le 22 octobre pour retarder ensuite de quinze jours ou trois semaines notre réunion définitive ? Point de mauvais sentiment, point d'injuste méfiance, je vous en conjure. Le bonheur de vous retrouver de reprendre nos douces habitudes est ma première, ma constante pensée. <br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3176" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>François écrit finalement le 28 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px; text-align: left;">J’arriverai à Paris sans avoir fini mon travail. Il sera très près de sa fin, mais pas fini. Il me plaît, et je crois qu’il m'importe. Je ne veux le publier que bien et vraiment achevé. J'aurai besoin, chaque jour, pendant trois ou quatre semaines de quelques heures de solitude. Je les prendrai le matin, en me levant. C'est mon meilleur temps. Je ne recevrai personne avant 11 heures. On me dit que j'aurai bien de la peine à me défendre, qu’on viendra beaucoup me voir. Amis et curieux, tous oisifs. Je me défendrai pourtant. Je veux garder pleinement mon attitude tranquille et en dehors. Je n'ai rien à faire que de dire, quelquefois et sérieusement, mon avis.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3207" target="_blank" rel="noopener">lettre</a><br /><br />Marie Dupond (Octobre 2022)<br /><br /><br /><br /></p>
</div>
Correspondance
Notice pour une lettre ou toute correspondance
Destinataire
Format à utiliser : Nom, Prénom
Hormis la majuscule à la première lettre, ne pas utiliser la majuscule.
Vous pouvez mettre les dates de naissance et de mort, entre parenthèses après le nom de l’auteur si ce n'est pas l'auteur décrit dans la collection
Si la lettre a plusieurs destinataires, mettre un nom par entrée.
Si l'identification d'un éventuel surnom ou pseudonyme n'a pas été possible, on l'indiquera dans le champ DC « Description »
Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
Lieu de destination
Format : Ville (Pays), puis Adresse complète si possible.
Richmond
Date précise de la lettre
Mercredi 15 août 1849
Heure
6 heures
Nature du document
Propositions non exhaustives :
Manuscrit, tapuscrit, copie dactylographiée, etc.
Lettre, carte postale, photo, etc. (correspondance)
Photographie, diapositive, etc. (iconographie)
Passeport, carte d'identité, répertoire, agenda, etc. (dossier biographique)
Journal, magazine, revue, etc. (presse)
Lettre autographe
Support
Support physique (codicologie). Propositions non exhaustives :
Papier, carnet, feuillet
Carte plastifiée (dossier biographique), négatif, etc. (iconographie)
Autre support : enregistrement sonore, vidéo, etc.
copie numérisée de microfilm
Etat général
Pour tout commentaire sur l'état du document (présence de ratures, etc.), il faut mieux l'indiquer dans la rubrique « état génétique ».
Bon
Localisation
Localisation géographique du document.
Indiquer où est hébergé le document et le nom du fonds, avec l’adresse précise si possible.
Archives Nationales (Paris)
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Val-Richer, Mercredi 15 août 1849, François Guizot à Dorothée de Lieven
Creator
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Guizot, François (1787-1874)
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Val-Richer (France)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1849-08-15
Language
A language of the resource
Français
Type
The nature or genre of the resource
Correspondance
Publisher
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Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
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Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0.
Subject
The topic of the resource
Politique (Irlande)
Circulation épistolaire
Réseau social et politique
Politique (France)
Posture politique
Réception (Guizot)
Politique
Description
An account of the resource
<div style="text-align: justify;">Val Richer, Mercredi 15 août 1849 6 heures Je vous envoie des nouvelles d'Irlande Croker y voyage en même temps que la Reine. Il m'écrit de Killarney : " We escaped from Dublin the day the Queen arrived. She vas received with some what less enthusiasm than O Connell used to be. Nothing in Ireland is real. Not the loyalty- not even the distress. We are here Amidst scenes of the most surprising beauty ; but the manners and condition of the people are deplorably savage. And I am more and more satisfied that the blood of the celts is prone to sloth and dirt. So far our harvest look well, a main consideration as to our internal tranquillity, and the potatoe crop is promising, a vital question in Ireland. Your revolution and our reform bill made the stability of government mainly dependant, on harvest. When people become, from any cause, even their own folly discontented with an administration, the agitators, have no other remedy than a change of the constitution. You are sufforing under it. We shall suffer, No country can be governed on these new principles. " Coker a beaucoup d’esprit et de bon sens. Il sait bien qu’elles sont les conditions éternelles de l’ordre dans la société. Il ne croit pas et ne se résigne pas assez aux changements de forme de de mesure de ces conditions quand la société elle-même change.<br />Tenir à ce qui doit durer en laissant tomber ce qui s'en va et en acceptant ce qui vient, c’est aujourd’hui plus que jamais, la grande difficulté, et le grand secret du gouvernement. C'est dommage que, sachant ce que je sais et pensant ce que je pense aujourd’hui, je ne sois pas jeune et inconnu.<br />Je vous fais lire mes lettres. Voici M. Cousin, arrivé hier : " Mon cher ami, j’arrive des eaux de Néris, et à peine rentré à la Sorbonne et dans mes tranquilles habitudes, je m'empresse de vous dire combien je suis charmé de votre retour. Puisse-t-il marquer une époque meilleure dans nos affaires ! Unissons-nous tous contre l’ennemi commun. Grace à Dieu, l'union entre nous est bien facile car elle n'a jamais été troublée que par des dissentiments aujourd’hui bien loin de nous. Dans nos démêlés politiques, nous sommes restés bons amis ; il nous est donc bien aisé de redevenir ce que nous n'avons jamais cesse d'être seulement le malheur commun accroîtra notre intimité, si vous le permettez. Quand vous viendrez à Paris, n'oubliez pas l’Hermite de la Sorbonne. En attendant que je vous serre la main, laissez-moi vous offrir cette 4e série de mes ouvrages qui parait en ce moment. "<br />C’est revenir de bonne grâce. Je ne sais si tout le monde en fera autant. Je ne crois pas. On m'assure que plusieurs en ont bien envie.<br />Encore une lettre. Piscatory m'écrit. " Je suis décidément une des oies du Capitole, et c’est aujourd’hui que je commence à garder le temple que personne, quoi qu'on en dise, n'a la pensée sérieuse de violer. Je ne crois pas à un changement de Cabinet dans l'absence de l'assemblée ; mais je crois qu’à son retour la majorité sera de mauvaise humeur, et qu’elle pourra bien chercher querelle à Dufaure sur la question, souvent reproduite à la réunion du quai d'Orsay, des fonctionnaires maintenus en dépit de toutes les remontrances. Je ne crois pas à l’efficacité d’un changement de Cabinet, à moins qu'il n’en résulte un ministre des finances capable et ce ministre là, je ne le devine pas. Benoist n’est rien, ou presque rien et Thiers est une grosse entreprise. Aujourd’hui, à titre de membres de la majorité nous défendons l’ordre avec désintéressement, avec abnégation, et sans être en quoi que ce soit responsables des actes du pouvoir. Le jour où Molé, Thiers, et autres seront ministres, les conditions et la composition de la majorité seront différentes. Vous avez lu ce qui s’est passé dans la Commission d'assistance. Tenez pour certain que c’est très sérieux. J’ai le droit de me vanter d'avoir fermé la plaie qu’on s'obstinait à ouvrir et à montrer ; mais la plaie n'en existe pas moins. Une partie des légitimistes et tous les catholiques sont fous. Thiers non plus n’est pas prudent, et je crains bien que dans la question de l’enseignement, nous ne lui voyions faire une nouvelle gambade. Quant au rapport dont il est chargé, s'il y met tout ce qu’il a dit, ce sera certainement très amusant, mais certes point fait pour calmer les esprits. Les caisses de retraite avec dépôt obligatoire, la colonisation, la direction des travaux réservés. (Vous ne comprendrez pas ceci, mais peu importe, je vous ennuierais si je vous expliquais Thiers et Piscatory sur toutes ces questions) tout cela, on a beau dire, est du socialisme. Si parce qu’il faut, à ce qu’on dit, faire quelque chose nous ferons des folies, nous sommes perdus. "<br />Les Copies valent mieux que les extraits, et n'ont pas besoin de commentaires.<br />M. Vitet est reparti. Les Lenormant me restent jusqu'à vendredi. J’ai eu hier aussi un ancien député conservateur, inconnu et sensé du même département que le duc de Noailles, et qui devait être nommé avec lui au mois de mai dernier s'ils avaient réussi. Les mêmes faits et les mêmes impressions viennent de toutes parts. Soyez tranquille ; je ne serai pas nommée au Conseil général. Adieu. Adieu. Adieu. Voilà votre lettre des 12 et 13. Adieu. G.</div>
Circulation épistolaire
Politique
Politique (France)
Politique (Irlande)
Posture politique
Réception (Guizot)
Réseau social et politique
-
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1849 ( 19 Juillet - 14 novembre ) : François de retour en France, analyste ou acteur politique ?
Creator
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Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
Guizot, François (1787-1874)
Subject
The topic of the resource
Absence
Politique
Parcours politique
Posture politique
Presse
Travail intellectuel
Histoire
France (1848-1852, 2e République)
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Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1849-09
1849-12
Language
A language of the resource
Français
Anglais
Rights
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Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0.
Description
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<div style="text-align: justify;"><strong>Les préparatifs du retour de Guizot dans le réseau politique parisien</strong><br /><br />Le corpus s’ouvre sur la lettre que François rédige à son débarquement au Havre le 19 juillet 1849. Il revient de son exil en Angleterre causé par la révolution de 1848. (Voir les collections <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/39" target="_blank" rel="noopener">1848 (1er août -24 novembre) : Le silence de l'exil</a> et <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/37)." target="_blank" rel="noopener">1849 ( 1er janvier - 18 juillet) : De la Démocratie en France, Guizot reprend la parole</a>)<br /><br />De son côté Dorothée reste en Angleterre, et ne rentre à Paris que trois mois après, le 17 octobre 1849. Le corpus se termine lorsque Guizot retrouve Paris, un mois plus tard. Ainsi, les lettres de François qui constituent se corpus sont rédigées au Val-Richer et à Broglie, durant un séjour chez son ami le duc Victor de Broglie (Voir la notice Le duc <a href="https://www.guizot.com/fr/amities/le-duc-victor-de-broglie/" target="_blank" rel="noopener">Victor de Broglie</a>)<br /><br />La réception de Guizot tant dans la rue que dans les institutions publiques, et, la posture à adopter sur la scène politique sont les thématiques qui structurent le discours épistolaire des deux amants. Ainsi, le rôle de Dorothée dans l’existence sociale et politique de François apparaît alors qu’ils préparent ensemble son retour à Paris et la reprise du salon de la princesse diplomate.<br /><br />
<p>Voir les mots-clés : <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=politique&facet=tag%3A%22Politique+%28France%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Politique (France)</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=politique&facet=tag%3A%22Politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Politique</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=r%C3%A9ception&facet=tag%3A%22R%C3%A9ception+%28Guizot%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Réception (Guizot)</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=posture&facet=tag%3A%22Posture+politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Posture politique</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=relation&facet=tag%3A%22Relation+Fran%C3%A7ois-Doroth%C3%A9e+%28Politique%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Relation François-Dorothée (politique)</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=salon&facet=tag%3A%22Salon%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Salon</a>, <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=femme&facet=tag%3A%22Femme+%28politique%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Femme (politique)</a></p>
<p><strong><br /><br />Rentrer chez soi</strong></p>
<p>Il faut tout d’abord noter le plaisir de François Guizot lorsqu’il retrouve sa propriété du Val-Richer, il écrit le 20 juillet 1849 :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Ma maison et mon jardin sont en bon état, comme si j’en étais sorti hier. Des fleurs dans le salon, et dans la bibliothèque ; mes journaux sur mon bureau, les allées nettoyées, les parquets frottés. Cela m’a plu et déplu. Tant de choses m'ont rempli l'âme depuis que je ne suis venu ici ; je ne puis me figurer qu’elles n'aient laissé ici aucune trace. Et puis cette tranquillité tout autour de moi, cette non interruption du passé et de ses habitudes, cela me plaît, et même me touche, car je le dois aux soins affectueux de deux ou trois personnes, amis ou serviteurs, qui ont pris plaisir à tout conserver ou remettre en ordre, et qui m’attendaient à la porte. J’ai rencontré beaucoup d'affection en ma vie ; je voudrais en être assez reconnaissant.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3018" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a> </p>
<p>Dorothée est bien consciente du plaisir de Guizot à retrouver son bonheur domestique, son parc et son jardin entouré de sa famille, et répond deux jours plus tard :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous voilà donc en France ! Que c'est loin de moi. Je suis charmée de connaître le Val Richer. Je saurai où vous chercher. Vous aurez un grand plaisir à vous retrouver là, à retrouver vos arbres, votre pelouse, vos sentiers. Tout cela reposera votre âme. Vous avez là tout le contentement intérieur, de la famille, de la propriété. Je vous manquerai c'est vrai, et je crois que je vous manquerai beaucoup, mais vous avez mille plaisirs que je n’ai pas. Et certes dans cette séparation je suis plus à plaindre que vous. Vous le sentez. Je voudrais me mieux porter et j'y prendrai de la peine, pour vous faire plaisir.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3016" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p><strong><br /><br />Se séparer</strong></p>
<p>Ce retour détermine une séparation et un éloignement. (Sur le quotidien de François et Dorothée en Angleterre voir la collection 1<a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/39" target="_blank" rel="noopener">848 ( 1er août -24 novembre) : Le silence de l'exil</a>) Dorothée évoque avec nostalgie les habitudes prises en Angleterre, telles que leurs conversations intimes.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je bavarderais bien cependant si je vous avais là dans ce fauteuil, si bien placé pour un entretien intime, comme je regarde ce fauteuil avec tendresse et tristesse !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3020" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>L’évocation de leur conversation se fait à partir du fauteuil que Guizot utilisait. Le lendemain le dimanche 22 juillet 1850, elle l’évoque encore :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Toujours ce fauteuil devant moi et vide. Comme c’est plus triste de rester que de partir.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3022" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>C’est dans une lettre du 27 juillet que François l’évoque à son tour, en exprimant nettement la coordination des pratiques de conversation et de correspondance :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je cause comme si j'étais dans mon fauteuil du Royal Hotel. Pauvre illusion !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3031" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>François est bien décidé à continuer ses échanges avec Dorothée sans craindre qu’ils puissent être lus. Il écrit le 20 juillet le lendemain de son arrivée :</p>
<p style="padding-left: 40px;">On me dit qu’il faut prendre garde au nouveau directeur de la poste de Lisieux. Je n'y prendrai point garde. On lira mes lettres si on veut. On y trouvera peut-être quelque amusement, peut-être même quelque profit. On n’y trouvera rien que je sois bien fâché qu’on ait lu. Si j’avais quelque chose à vous dire que je tinsse vraiment à cacher, je saurais bien vous le faire arriver autrement que par la poste. Faites comme moi. Ne nous gênons pas en nous écrivant. Nous n'avons aucune raison pour nous gêner, et nous avons assez d’esprit pour nous ingénier, si nous en avions besoin. Les gens d’esprit sont toujours infiniment plus francs et plus cachés que ne croient les sots.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3018" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a> </p>
<p><strong><br /><br />Réception de Guizot à son retour en France </strong></p>
<p>Le retour de Guizot en France ne se fait pas sans une certaine inquiétude. Il est attendu au Havre par quelques amis, politiques, diplomates et journalistes. Il cherche à rassurer Dorothée dès son arrivée le 19 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J’ai trouvé sur le port le duc de Broglie, MM. Piscatory, Plichon, Herbet, Mallac, Léon Pillet<a href="#_ftn1" name="_ftnref1"><sup>[1]</sup></a>, et assez de foule. Pas un mot agréable, ni désagréable. Des regards curieux ; beaucoup de chapeaux levés. De la déférence dans l’indifférence. Il reste assez de personnes devant l'hôtel de l’Amirauté où je suis logé. Leur attitude me convient.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3017" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a> </p>
<p>Dorothée n’a pas encore reçu de nouvelles de Guizot mais elle suit son retour en France dans la presse et écrit le 21 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J'attends aujourd’hui une lettre du Havre. Le Times ce matin dit que vous y êtes arrivé, et que votre réception a été des huées. Cela fait bien de l'honneur à vos compatriotes !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3020" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>En effet, Guizot complète le récit de son arrivée sur le sol Français le 20 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je me suis vanté trop tôt hier en vous disant que je n’avais rencontré dans l’accueil du Havre rien d’agréable, ni de désagréable, de la déférence dans l’indifférence. Cela a un peu changé deux heures après. Cinquante ou soixante gamins se sont réunis sous les fenêtres de l’auberge où je dînais, et se sont mis à crier : « à bas Guizot ! » et à siffler. Cinquante à soixante curieux, ou plutôt curieuses, se sont attroupés autour d’eux. Pas l’ombre de colère ni de menace ; une curiosité mécontente de ce que je ne paraissais pas entendre les cris, et une petite démonstration malveillante organisée par le journal rouge de la ville qui l’avait annoncée le matin en annonçant mon arrivée. J'ai dîné tranquillement au bruit de ce concert, et je suis descendu dans la rue pour monter dans la voiture qui devait me reconduire à l’auberge où je couchais. J’ai trouvé autour de la voiture une douzaine de gentlemen qui en écartant les gamins, l’un m’a dit d’un très bon air : « M. Guizot, nous serions désolés que vous prissiez ce tapage pour le sentiment de la population de notre ville ; ce sont des polissons ameutés par quelques coquins. Non seulement nous vous respectons tous ; mais nous sommes charmés de vous voir de retour et nous espérons bien vous revoir bientôt où vous devez être. » […]. Cela n’avait pas la moindre gravité en soi, beaucoup comme symptôme. Rien n’est changé et je ne suis point oublié. Ce matin, sur le bateau du Havre à Honfleur, les gentlemen étaient en grande majorité et m'ont fait fête. […] Ce pays-ci est bien animé, et bien prompt à saisir les occasions de le montrer. Je n’en suis que plus décidé à rester bien tranquille chez moi. Il n’y a absolument rien de bon à faire, et ma position est bonne pour attendre.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3018" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>La réception chahutée de Guizot au Havre le conforte dans sa décision de rester en retrait au Val Richer, même si en réaction il reçoit des témoignages de sympathie en soulignant son retour sur le sol français comme un événement. Il écrit le 25 juillet :</p>
<p style="padding-left: 40px;">La petite scène du Havre a bien tourné. De bons juges m’écrivent de Paris : « Tout compté et bien compté, ce n'est point à regretter. Puisqu'il n’y a rien eu de grave autant vaut au risque de quelques embarras et de quelques inquiétudes, que vos éternels adversaires vos ennemis naturels aient fait la faute de provoquer ce qui a houleusement échoué. Il ne faut pas regretter l'éclat qu’ils ont donné à votre rentrée. Votre retour en France est un fait considérable. Il est considérable pour vos amis comme pour vous-même, en raison de votre passé et probablement aussi en raison de votre avenir. On l’a compris on le comprend, et l'on n'a pas su dissimuler sa mauvaise humeur. Encore une fois, tant mieux. »<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3438" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot reprend ses marques en évaluant la place et le rôle qui lui sont attribués par ses amis politiques. François commence par écouter les membres de son réseau. Il écrit le 23 juillet, quatre jours après son arrivée en France :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J’ai passé ma matinée hier à recevoir des visites. Dix-neuf. Mon impression reste la même. Rien n’est changé au fond, dans la situation générale, ni dans la mienne. Seulement tout a éclaté et s'est exaspéré. C’est toujours la même lutte entre les mêmes classes et les mêmes passions, et j'y tiens toujours la même place. Mais évidemment le moment n'est pas venu pour moi, quand je le pourrais, de la reprendre activement. Mes amis se troubleraient. Mes ennemis s’irriteraient. Et les uns et les autres saisiraient le premier prétexte pour rejeter sur moi seul la responsabilité du premier malheur. Et le public spectateur les croirait. Je n’ai qu'à attendre, si le temps, en s'en allant, n'emporte pas trop tôt ce qui me reste de forces, je puis avoir encore un grand moment. Si je m'en vais avant que ce moment n’arrive, j'ai lieu d'espérer aujourd’hui que justice sera faite à mon nom.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3023" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot comprend que la place qui lui est réservée le porterait sur le front de bataille. Il évoque un possible retour sur la scène politique tout en concluant que les conditions n’y sont pas encore favorables. Le 10 août 1849, Dorothée écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Restez comme vous êtes à l’écart, tranquille. Cela a très bon air. Profit tout clair. Soyez en sûr.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3057" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Le 15 septembre 1849, Dorothée lui fait part de sa conversation avec l’ancien diplomate Théobald Piscatory (1800-1870) qui poursuit sa carrière politique sous la deuxième République en tant que député monarchiste :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Voici votre lettre avec extrait de Piscatory. C’est un esprit [?] & qui est resté doctrinaire. Je vous en prie ne le redevenez pas.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3122" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>François y répond le 17 septembre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Les décadences me déplaisent toujours. Soyez tranquille ; je ne redeviendrai pas doctrinaire. Fatuité à part, je ne voudrais pas redevenir rien de ce que j’ai été. Je crois que ce serait déchoir. Redevenir jeune en restant ce que je suis à la bonne heure. Et si je ne me trompe, vous en diriez autant.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3125" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot se sent fort de son expérience et de son expertise. Il n’exprime jusqu’ici aucune nostalgie de ses succès de jeunesse.</p>
<p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1"><sup>[1]</sup></a> Théobald Piscatory (1800-1870), Ignace Plichon (1814-1888), Edmond Herbet (1813- ?), Léon Pillet (1803-1868)<strong><br /><br /><br /><br />Guizot s’impatiente au Val-Richer</strong></p>
<p>Plus d’un mois après, François commence à s’interroger sur la réception de son action publique. Ne sera-t-elle jamais reconnue ? Aussi, c’est en s’adressant à Dorothée qu’il s’autorise à comparer ce retour d’Angleterre avec un avenir incertain, à son retour de son ambassade à Londres en 1840 avec plus d'espoir :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous rappelez-vous bien le 29 octobre, il y a neuf ans mon arrivée à Paris le 26 et les trois jours qui précédèrent la formation du Cabinet ? Je suis décidé à ne pas croire que ce jour-là, et tout ce que j’ai fait du 29 octobre 1840 au 24 février 1848 m'ait été bon à rien. Mais aujourd’hui il n’y a que Dieu qui sache à qui cela a été et restera bon.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3209" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Il semble que Guizot tienne moins à reprendre sa place ou une place qu’à ce que son œuvre politique de 40 à 48 soit reconnue. Il faut noter que Guizot considère son action de cette période et non celle du début de la Monarchie de Juillet. Et c’est cette conscience de la tâche accomplie qui lui permet d’affirmer le 30 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">J'ai dit à M. Moulin, ce que je pense comme je le dirai quand je serai à Paris. J'ai acquis le droit de tout dire. Ce qui ne veut pas dire que j'en serai toujours. Mais je ne me laisserai gêner par personne.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3211" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>La reprise du salon de Dorothée permet de multiplier les éléments pour évaluer les conditions du retour de François à Paris. Le 2 novembre, elle lui écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Attendez-vous à beaucoup d'ingratitude. Vous êtes le politique de la monarchie de juillet. Absurdité incrustée dans le gros du public. Il ne faut pas que vous disiez que vous n’avez jamais eu tort. Je lui ai répondu qu'il n'y a que les sots qui se croient infaillibles. Je vous répète que Ste Aulaire est excellent.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3216" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot répond le 3 novembre</p>
<p style="padding-left: 40px;">Merci, merci. Cela ne me paraît pas, à tout prendre, inquiétant pour le moment. Mes tendres amitiés à Sainte-Aulaire quand vous le reverrez. Je crois plus que personne qu’il n’y a que les sots d'infaillibles, mais je suis très décidé à ne pas me laisser affubler du moindre tort prétendu pour épargner à d'autres la honte de leurs gros péchés.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3219" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Il poursuit le 4 novembre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">La vérité est grosse comme une montagne, et moi, je ne suis pas encore mort. Il faudra bien qu’on y voie clair qu’on le veuille ou non. Et comme l’ingratitude ne me donnera point d'humeur, je prendrais mon temps et les bons moyens.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3221" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Guizot comprend que chacun le dissuade de revenir, mais il suggère qu’il envisage de nouvelles modalités d’action publique et de présence politique. Le 5 novembre Guizot écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Ils me recommandent de ne pas arriver au milieu de la crise : " Quelque réservé quelque prudent que vous soyez, on commentera votre arrivée vos paroles, en vous fera parler quand vous n'aurez rien dit. Il ne vous est pas permis, de vous renfermer dans la vie privée ; vous serez, malgré vous malgré nous, traité en homme public. " Voilà leurs paroles. Ce qu’ils disent est vrai. Je n’y vois pas autant d’inconvénients qu'eux ; et ces inconvénients, s'ils existent, existeront à peu près toujours, A quelque moment que j’arrive, il m’arrivera ce qu’ils disent. Pourtant, je crois que pour ce moment-ci, ils ont raison, et qu’il vaut mieux ne pas fixer de jour précis. Quel ennui, et quel prélude, d'ennemis ! Je suis dans une veine de tristesse profonde, pour vous, pour moi. Si j'étais là, je serais bien moins triste, bien moins inquiet. Votre inquiétude à vous me désole au-delà de ce que je puis dire. J’espère qu'elle est exagérée ; mais je la trouve bien naturelle. Si j'étais là, vous seriez moins inquiète et moi probablement pas inquiet du tout. Ah, que le monde est mal arrangé !<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3223" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Dans cette lettre, Guizot semble un peu atteint par ses perspectives pessimistes sur son retour diffusées par son réseau politique. Il semble pris dans une tension entre la volonté de revenir et de reprendre la parole et la prudence. Il ne veut pas précipiter son retour. Le 7 novembre, il écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je ne veux pas retourner étourdiment à Paris. Je ne veux pas tarder inutilement à y retourner. Ce qui est inutile en ce genre serait inconvenant pour moi. Je ne me fais pas la moindre illusion sur ce qui m'attend à Paris. L’ingratitude ne me touche point ; il n'y en aura jamais plus que je n'en attends. Les stupidités populaires, les perfidies infatigables, et infiniment détournées, des rivaux d’autant plus acharnés qu’il sont un peu honteux, les froideurs embarrassées, des indifférents, les poltronneries, des amis, je compte sur tout cela. J'étais puissant avec grand combat. Je suis tombé avec grand bruit. Si j'étais mort, encore passe. Mais je reviens. La plupart s'étonnent, quelques uns craignent que je ne sois pas mort. Ma présence est pour les uns un reproche, pour les autres, une inquiétude, pour d’autres simples spectateurs, quelque chose d'inconnu, et par conséquent d'incommode. Tout cela me fait une situation délicate, et qui aura des difficultés. Je ne puis pas la changer. Je ne veux pas l’éluder. S’il y a un bon avenir, je surmonterai ces difficultés. S'il n'y a pas un bon avenir, peu m'importe tout cela.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3227" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>François ne conditionne pas son retour à Paris à une possible reprise de son action politique directe. Il explique comment tout bien considéré, chacun sera dérangé par son retour. Après près de quatre mois au Val-Richer, sa décision est prise. Bonne ou mauvais réception, François veut faire face et ne veut pas se condamner à l’isolement en France. Le 5 novembre, trois semaines après son arrivée, Dorothée rouvre son salon parisien et fait part à François de ce qu’elle a pu sonder parmi ses visiteurs. Dorothée apparaît comme la personne avec laquelle il peut réfléchir ouvertement à son retour politique. Dorothée n’est pas seulement une oreille attentive, depuis son retour à Paris, elle est au plus près pour recueillir des informations nécessaires à l’analyse de François :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Tout le monde entrait chez moi hier en riant, une sorte de plaisir de retrouver du vieux. Cela m’a plu, le commencement m’a plu ; à la fin de la soirée, j’ai dit à Montebello, avec amertume « personne n’a prononcé le nom de M. Guizot. » Cela m’a choquée. Voilà les hommes. Voilà le temps. Montebello m’a cité une exception, le Prince Wittgenstein. Je lui en saurai gré. [..]Que vous écrit-on sur vous ? Adieu. deux choses à relever. Molé ne croit pas à l’Empire. Et en fait d'avenir, il ne croit plus qu'une Monarchie constitutionnelle soit possible autre part qu’en Angleterre.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3222" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Et François répond le 11 novembre à ce que lui rapporte Dorothée quelques jours plus tôt le 5 novembre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je dis comme vous pour ce qui touche ma situation personnelle en reparaissant. Nous verrons. Nous devons avoir ce qu’il faudra d'habileté et de bon sens. Le silence qui vous choque ne m’étonne pas. C'est de l’embarras et de la platitude, faute d’esprit et faute de cœur. Deux choses, si je ne me trompe, mettront à l'aise, autant qu’ils peuvent être à l'aise, les poltrons et les sots ; d'abord ma manière, et bientôt ma situation même. [...] Je ne vois absolument aucune raison d'hésiter, et je suis décidé. Il n’y a que deux espèces de personnes qui me conseillent de ne pas revenir ; celles qui s'en iraient volontiers elles-mêmes, et celles qui ont envie que je ne revienne pas du tout.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3235" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Le 10 novembre, Dorothée fait part à Guizot d’une réception positive de la part d’Achille Fould, Ministre des Finances entre 1849 et 1867 :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Achille Fould m’a abordée, il m’a parlé avec tristesse de la situation qu'il a acceptée, & puis tout de suite il a passé à me demander de vos nouvelles quand vous reviendrez. J’ai dit que j’espérais dans 8 ou 10 jours. Et puis, que pense M. Guizot ? - M. Guizot pense qu’il faut soutenir l’autorité tant qu’elle donne des gages d’ordre & de force. - M. Guizot a un trop bon esprit pour ne pas penser cela.<br />Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3232" target="_blank" rel="noopener">la lettre</a></p>
<p>Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=posture&facet=tag%3A%22Posture+politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">les lettres</a> sur la posture politique à adopter par Guizot <span><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=posture&facet=tag%3A%22Posture+politique%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22"></a></span></p>
<p>Voir <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=r%C3%A9ception&facet=tag%3A%22R%C3%A9ception+%28Guizot%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">les lettres</a> sur la réception de Guizot <br /><br /><br /><br /><br /></p>
<p><strong>Préparer le retour de Guizot à Paris : rouvrir le salon parisien de Dorothée<br /><br /></strong>Voir les lettres <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/solr-search?q=relation&facet=tag%3A%22Relation+Fran%C3%A7ois-Doroth%C3%A9e+%28Politique%29%22+AND+collection%3A%221849+%3A+Fran%C3%A7ois+de+retour+en+France%2C+analyste+ou+acteur+politique+%3F%22" target="_blank" rel="noopener">Relation François-Dorothée (Politique)</a><br /><br /></p>
<p>Le retour de Dorothée à Paris à l’automne alors que François Guizot est encore au Val Richer conduit à la reprise de leur relation épistolaire politique. Guizot s’y prépare, il écrit le 16 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Quand vous m'écrirez de Paris, vous m'enverrez les faits, je vous renverrai mes réflexions. En attendant que faits et réflexions nous soient communs.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3183" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Ce corpus met en lumière le fonctionnement du duo politique. Au travers de ses correspondances et conversations, Dorothée doit rassembler des faits sur la situation politique à Paris. Elle constitue un matériau pour l’élaboration d’une analyse par Guizot. Le 25 octobre, il exprime nettement la dynamique de leur relation et comment il pratique à deux l’analyse des faits politiques :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Quel ennui d'être loin et de ne pas avoir avec vous, sur ce point-là encore plus que sur tout autre, ces conversations infinies où à force de se tout dire, on finit par atteindre ensemble à la vérité et pas s'y reposer ! Enfin dans trois semaines nous en serons là.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3201" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Dans une lettre du 18 octobre à propos de la politique étrangère menée par l’Angleterre, Guizot donne un exemple de conclusion établie à deux :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Les questions du Cabinet anglais ne se décident pas par la politique étrangère. Nous nous le sommes dit cent fois, et nous l’oublions toujours.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3186" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Lorsque Dorothée rentre à Paris, François décrit comment constituer un salon où l’on puisse prendre des informations mais aussi en diffuser. D’un côté François garde encore ses distances avec la vie politique parisienne, de l’autre, Dorothée sonde et prépare le terrain en reprenant ses activités sociales et politiques parisiennes. Il écrit le 19 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous avez toute raison ; arrangez votre vie ; faites-y entrer comme il vous convient, les personnes qui sont à la fois indifférentes et importantes. Que chacun vienne et prenne place. Cela se fera plus aisément et plus sûrement moi n’y étant pas. Je viendrai quand ce sera fait et nous en jouirons ensemble. On ne sait pas combien on peut lever de difficultés et concilier d'avantages avec un peu d'esprit, et de bon sens, en se laissant mutuellement l’espace et la liberté nécessaires pour agir, et pour réussir. Chacun pour soi, et pour soi seul, c'est l’égoïsme, la solitude dans la glace ; chacun par soi- même et selon sa propre situation, c’est la dignité et le succès ce qui ne nuit en rien à l'affection. Je reviens à mon désir du moment. Je suis bien curieux de votre impression sur Paris et sur la situation actuelle.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3188" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Afin que le salon de Dorothée n’apparaisse pas au service de la reprise de la vie politique de Guizot, ils agissent séparément. L’autonomie de Dorothée est manifeste, et c’est d’ailleurs ainsi qu’elle peut lui être le plus utile. Guizot n’est plus ministre des Affaires étrangères. Mais Dorothée reste une princesse russe, diplomate, anglophile et installée en France en rayonnant encore sur la diplomatie et les monarques européens. Dans la même lettre, il cite un autre exemple de femme qui mène une pratique d’action politique et diplomatique dans son salon.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous ai-je dit, ou savez-vous que lord Normanby<a href="#_ftn1" name="_ftnref1"><span>[1]</span></a> est très assidu chez Madame Howard ; et que c’est surtout par elle qu’il agit sur le Président ?<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3188" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Guizot note les visites de l’ambassadeur d’Angleterre en France chez Madame Howard, la maîtresse de Louis Napoléon en soulignant que c’est elle qui « agit sur » le président de la République. Dans la lettre suivante, du 20 octobre, Guizot précise les personnes importantes à convier au milieu des indifférents.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Dans l’arrangement de votre vie, indépendamment des anciennes connaissances qu’il faut reprendre, peut-être y en a-t-il aussi quelques nouvelles qu’il vous convient de faire, soit à cause de leur value personnelle, soit à cause de l’importance qu'elles ont prise dans ces derniers temps. Montalembert, Falloux (s’il vit), Bussierre, d’Haussonville, Piscatory<a href="#_ftn2" name="_ftnref2"><span>[2]</span></a>. Je ne crois pas qu’il faille étendre votre cercle, et les étrangers en sont, et doivent en être, toujours le fond. Mais vous aurez des vides. Du reste, vous jugerez mieux de cela après quelques jours de séjour que moi d’ici. J’avais pensé à M. de Tocqueville, s'il se recherchait comme de raison. Il est homme d’esprit, de bonne compagnie et sûr je crois. Mais il ne serait pas sans inconvénients. Je vous dis ce qui me passe par l’esprit.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3190" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
Guizot réfléchit à la composition du salon de Dorothée et en éclaire les caractéristiques. La première est sa nature internationale. Son salon est l’espace des relations diplomatiques. La seconde est d’introduire de nouvelles personnalités politiques. Après la révolution de 1848 et l’avènement de la République, Dorothée doit actualiser la composition de son salon. Neuf jours plus tôt, Guizot mentionne déjà Tocqueville en dressant un portrait positif notamment grâce à un point commun qu’ils partagent : une action coordonnée à une œuvre intellectuelle.<br />
<p style="padding-left: 40px;">M. de Tocqueville a été, jusqu'ici, un homme d’esprit dans son Cabinet et dans ses livres. Il est possible qu’il ait de quoi être un homme d’esprit dans l'action et gouvernement. Nous verrons. Je le souhaite. C’est un honnête homme et un gentleman<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3172" target="_blank" rel="noopener">lettre</a></p>
<p>Deux semaines plus tard, Dorothée rend compte à François. Les deux personnes qui restent toujours importantes en 1849 sont Molé et Thiers, les deux personnalités avec qui Guizot a dû naviguer au cours de la Monarchie de Juillet.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Mon salon hier était comme il y a deux ans, excepté vous de moins, et M. Molé & Berryer<a href="#_ftn3" name="_ftnref3"><span>[3]</span></a> de plus, & quelques légitimistes. La diplomatie au complet moins l'Angleterre. […] Voici le vrai de la situation. Les ministres changent, mais deux hommes restent immuables, importants, sont Molé et Thiers. La diplomatie se tient à eux. On leur parle comme à des Ministres & on leur montre souvent plus qu'aux ministres.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3222" target="_blank" rel="noopener">lettre</a><br /><span><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3222"></a></span></p>
Dans une lettre du 31 octobre, le fonctionnement du couple apparait avec son usage de l’art de converser de Dorothée
<p style="padding-left: 40px;">Puisque M. Hübner est enfin venu vous voir, ce dont je suis bien aise, causez un peu à fond avec lui de la Hongrie. Ce pays-là est entré dans l’Europe. On regardera fort désormais à ses affaires. Est-ce sage la résolution qu'on vient de prendre à Vienne de maintenir, quant à la Hongrie, la Constitution centralisante de mars 1849, et de considérer son ancienne constitution comme abolie, au lieu de la modifier ? Je n’ai pas d'opinion ; je ne sais pas assez bien les faits ; mais je suis curieux de m'en faire une. Puisque M. Hübner est un homme d’esprit il vous reviendra souvent.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3213" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
Une fois que le comte de Hübner, l’ambassadeur d’Autriche à Paris, devient un membre du salon de Dorothée, François indique à Dorothée les questions à lui poser et vers quoi orienter la conversation.
<p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1"><span>[1]</span></a><span> Normanby, Constantine Henry (1797-1863 ; Marquess of) </span></p>
<p><a href="#_ftnref2" name="_ftn2"><span>[2]</span></a> Il s’agit d’hommes politiques attachés à une droite libérale. Charles Forbes René, comte de Montalembert (1810-1870), Alfred de Falloux (1811-1886) ministre de l’instruction publique jusqu’en octobre 1849, Alfred Renouard de Bussière (1804-1887), Joseph Othenin Bernard de Cléron, comte d'Haussonville (1809-1884).</p>
<p><a href="#_ftnref3" name="_ftn3"><span>[3]</span></a> Berryer, Pierre Antoine (1790-1868), journaliste, avocat et député des Bouches-du-Rhône à partir de 1848.</p>
<p><br /><br /></p>
<p><strong>L’art de converser de Dorothée </strong></p>
<p>Alors que Dorothée a repris sa vie parisienne depuis trois semaines et qu’elle en fait le compte-rendu à François, la qualité de sa correspondance fait écrire à François :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Vous êtes la plus excellente et fidèle glace (miroir est trop petit) qui se puisse voir. Vous me renvoyez toutes les hésitations, fluctuations alternatives du public qui vous entoure. Hier, l'Empire infaillible ; aujourd’hui, impossible. Les brusques revirements d'inquiétude et de confiance d’abattement et d’entrain, ces oublis frivoles et ces préventions entêtées, ce mouvement perpétuel qui avance si peu, ce je ne sais quoi d'immobile, je devrais dire d’incorrigible qui persiste sous ce besoin insatiable de changement et de nouveauté, tout cela, qui est la France, et surtout Paris dans la France, tout cela est dans vos lettres. Tantôt vous le peignez parce que vous l'avez observé ; tantôt vous le reproduisez sans vous en douter. Ce qui, pour vous, est spectacle devient à l’instant tableau dès que vous en parlez. Cela est rare et charmant.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3227" target="_blank" rel="noopener">lettre</a><span> </span></p>
<p>Alors que la question de l’établissement d’un nouveau régime politique, et de la transformation du Président en Empereur, François souligne avec enthousiasme la maîtrise de Dorothée dans l’art de transcrire les tendances et les fluctuations politiques mais aussi de les saisir au travers d’une analyse fine des détails. (Sur la pratique épistolaire de Dorothée voir aussi la collection<br /><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/16)" target="_blank" rel="noopener">1837 (1<sup>er</sup> juillet- 6 août) : Les premières semaines de la relation et de la correspondance entre les deux amants</a> )</p>
<p>Dans ce corpus de correspondance, un autre écho se laisse entendre. Alors que Chateaubriand meurt en juillet 1848, la publication posthume des Mémoires d’Outre-tombe se fait en feuilleton dans <em>La Presse</em> à partir du 21 octobre 1848 (Voir le <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4311597/f1.image.zoom" target="_blank" rel="noopener">numéro</a>), Dorothée craint une critique de ses pratiques diplomatiques et politiques. En effet, la princesse de Lieven et Chateaubriand ont fait partie du même réseau diplomatique en Angleterre. Le 2 octobre Dorothée demande à François :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Et à propos encore, avez-vous lu ce que M de Chateaubriand dit de moi dans son Outre tombe.<br /><span>Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3155" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </span></p>
<p>Le 4 octobre, Guizot répond :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Je ne lis pas les Mémoires d’Outre-tombe. C’est vous qui me faisiez lire ces frivolités-là, Outre-tombe, Raphael. Quand je ne vous ai pas, je ne me doute pas qu'elles paraissent. Je vais demander les passages où il est question de vous.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3159" target="_blank" rel="noopener">lettre </a></p>
<p>C’est douze jours plus tard, le 16 octobre, que Guizot répond à Dorothée après s’être renseigné, vraisemblablement auprès d’Armand Bertin<a href="#_ftn1" name="_ftnref1"><span>[1]</span></a> du Journal des Débats qui a été au service de Chateaubriand lors de son ambassade à Londres en 1822.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Armand Bertin était attaché à l'Ambassade de M. de Châteaubriand. Un soir en rentrant M. de Châteaubriand lui dit : « Madame de Lieven me traite bien mal. Elle ne sait pas à qui elle a affaire ni quels sont mes moyens de me venger. Certainement je me vengerai ? » Votre article d’Outre-tombe a été écrit alors de verve de vengeance. Il y a ajoute depuis ce qui me regarde. Je vous dis ce qu’on vient de me dire. Je ne l’ai pas lu.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3183" target="_blank" rel="noopener">lettre </a></p>
<p>Dorothée a quelques raisons de craindre la parution des Mémoires de Chateaubriand. L’auteur consacre un portrait à Dorothée et lui retire d’emblée ce qui lui est reconnu : son esprit et son expertise dans les pratiques de cour. Chateaubriand écrit :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Comme elle était hardie et passait pour être bien en cour, elle était devenue extrêmement fashionable. On lui croyait de l'esprit, parce qu'on supposait que son mari n'en avait pas; ce qui n'était pas vrai : M. de Lieven était fort supérieur à. madame. Madame de Lieven, au visage aigu et mésavenant, est une femme commune, fatigante, aride, qui n'a qu'un seul genre de conversation, la politique vulgaire ; du reste, elle ne sait rien, et elle cache la disette de ses idées sous l'abondance de ses paroles.<br />Chateaubriand, F.-R. de, <em>Mémoires d’outre-tombe</em>, Tome 4 ; Edmond Biré (ed.), (1899-1900) p. <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9660797n/f267.item.r=m%C3%A9moires%20d'outre%20tombe" target="_blank" rel="noopener">249</a> </p>
<p>C’est à Londres que Dorothée prend sa carrure diplomatique, sans se cantonner au rôle d’une femme d’ambassadeur. Elle devient diplomate.. En quelque sorte, Chateaubriand la remet à sa place, et une fois qu’il lui a ôté ses qualités intellectuelles et politiques, il lui retire ce qui peut alors donner plaisir à fréquenter une femme : sa beauté. Mais c’est sur son esprit et sur l’intérêt de ses conversations et de ses correspondances qu’il insiste et à la vulgarité, il ajoute la puérilité de ses pratiques diplomatiques.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Quand elle se trouve avec des gens de mérite, sa stérilité se tait ; elle revêt sa nullité d'un air supérieur d'ennui, comme si elle avait le droit d'être ennuyée ; tombée par l'effet du temps, et ne pouvant s'empêcher de se mêler de quelque chose, la douairière des congrès est venue de Vérone donner à Paris, avec la permission de MM. les magistrats de Pétersbourg, une représentation des puérilités diplomatiques d'autrefois.</p>
<p>Le portrait continue sur la description du contenu de son discours épistolaire. Sa politique et sa diplomatie semble restreinte à organiser des mariages. Encore une fois, Chateaubriand la ramène à sa condition de femme.</p>
<p style="padding-left: 40px;">Elle entretient des correspondances privées, et elle a paru très forte en mariages manqués. Nos novices se sont précipités dans ses salons pour apprendre le beau monde et l'art des secrets ; ils lui confient les leurs, qui, répandus par madame de Lieven, se changent en sourds cancans. Les ministres, et ceux qui aspirent à le devenir, sont tout fiers d'être protégés par une dame qui a eu l'honneur de voir M. de Metternich aux heures où le grand homme, pour se délasser du poids des affaires, s'amuse à effiloquer de la soie. Le ridicule attendait à Paris madame de Lieven. Un doctrinaire grave est tombé aux pieds d'Omphale : « Amour, tu perdis Troie. »<br />Chateaubriand, F.-R. de, Mémoires d’outre-tombe, Tome 4 ; Edmond Biré (ed.), (1899-1900) p. <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9660797n/f267.item.r=m%C3%A9moires%20d'outre%20tombe" target="_blank" rel="noopener">250</a> </p>
<p>Chateaubriand ne manque pas de terminer sur les relations de la princesse avec des grands hommes en ne soulignant que leur caractère sexuel et frivole. Le point d’orgue est atteint lorsqu’il évoque la relation entre Dorothée et François avec ironie. Le portrait est si acide qu’Edmond Biré l’éditeur de 1898 se sent obligé d’annoter ce passage en citant un témoignage d’un autre secrétaire d’ambassade de Chateaubriand :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Elle avait épousé Christophe Andréiëvitch, prince de Lieven, général dans l'armée russe, gouverneur du tsar Alexandre II et pendant vingt-deux ans ambassadeur à Londres. Le portrait qu'en trace ici Chateaubriand est trop poussé au noir. « Bien qu'étrangère, dit M. de Marcellus<a href="#_ftn2" name="_ftnref2"><sup>[2]</sup></a>, elle dominait les filles d'Albion par une in- contestable supériorité d'attitude et 'de manières. Elle savait causer de tout ; elle avait été fort jolie, et sa taille gardait encore beaucoup plus tard une grande élégance ; elle possédait une merveilleuse aptitude pour la musique ; sa mémoire lui rappelait des opéras entiers qu'elle exécutait à ravir sur le piano. » Justement réputée par son esprit et sa rare intelligence des affaires publiques, elle a été liée avec tout ce que son temps comptait de personnages éminents, dans tous les partis et dans toutes les nationalités. Castlereagh et Canning ont été particulièrement de ses amis, ainsi que le prince de Metternich ; lord Grey lui écrivait chaque matin de son lit un billet demi-politique, demi-galant. On lui a attribué une liaison avec George IV. A Paris, où elle s'était fixée après la mort de son mari, elle a été l'Egérie de M. Guizot qui passait toutes ses soirées chez elle.<br />Chateaubriand, F.-R. de, Mémoires d’outre-tombe, Tome 4 ; Edmond Biré (ed.), (1899-1900) pp. <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9660797n/f267.item.r=m%C3%A9moires%20d'outre%20tombe" target="_blank" rel="noopener">249-250</a> </p>
<p>Voir encore sur ce sujet la collection <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/16" target="_blank" rel="noopener">1837 (1<sup>er</sup> juillet- 6 août) : Les premières semaines de la relation et de la correspondance entre les deux amants </a></p>
<p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1"><span>[1]</span></a> Armand Bertin (1801-1854)</p>
<p><a href="#_ftnref2" name="_ftn2"><span>[2]</span></a> Marcellus, Marie Louis Auguste de Martin du Tyrac (1776-1841 ; comte de)<br /><br /><br /></p>
<p><strong>Politique et histoire</strong></p>
<p>François rentre en France, mais au Val Richer et non à Paris. Cette distance géographique de la scène politique permet à François de réfléchir aux modalités de son activité en France. Comme en 1837, lors de ses vacances gouvernementales (voir les collections <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/33" target="_blank" rel="noopener">1837-1839 : Vacances gouvernementales</a> et <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/14" target="_blank" rel="noopener">1838 : Réflexion politique et élaboration historique</a>) et en 1849 en exil (voir la collection <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/collections/show/39" target="_blank" rel="noopener">1849 : De la Démocratie en France : Guizot reprend la parole</a>), le travail historique permet à Guizot de prendre une posture légitime d’expert. Dans sa retraite au Val-Richer, il décrit l’emploi de son temps :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Le beau temps a disparu. La pluie revient dix fois par jour. Je me promène pourtant. Les bons intervalles ne manquent pas. Je me lève de bonne heure. J’écris ; ma toilette, la prière. Nous déjeunerons à 11 heures. Promenade. Je fais mes affaires de maison et de jardin. Je remonte dans mon cabinet à une heure. J'y reste, sauf les visites. Nous dînons à 7 heures. Je me couche à 10. Quand le flot des visites se sera ralenti, j'aurai assez de temps pour travailler. Je veux faire beaucoup de choses. <br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3438" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>Il exprime dès son arrivée sa volonté de s’engager dans son travail historique et de profiter de ce temps au Val-Richer pour écrire :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Samedi. 4 août. 7 heures<br />Je vous dis bonjour en me levant. Je vais travailler. Il faut que j'aie fait deux choses d'ici à la fin de l'automne. Pour les grandes et pour les petites maisons. Le temps est superbe. Je vous aime mille fois mieux que le soleil. Adieu. Adieu. Je dors bien mais toujours en rêvant. Décidément la révolution de Février m’a enlevé le calme de mes nuits, bien plus que celui de mes jours.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3045" target="_blank" rel="noopener">lettre </a><span><a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3045"></a></span></p>
<p>Guizot est le premier à établir des liens entre ses études historiques et les principes de sa position politique. Il exprime ce va-et-vient entre l’histoire et l’actualité. Alors que la question du régime politique de la France et son système constitutionnel est en discussion, il reprend son point de vue depuis l’histoire d’Angleterre et la réussite d’une monarchie constitutionnelle.</p>
<p style="padding-left: 40px;">C'est, je vous assure, une singulière impression que de vivre en même temps au milieu de tout cela, et au milieu du long Parlement, de Cromwell, de Richard Cromwell des Républicains, des Stuart & & & C'est une perpétuelle confusion de ressemblances et de différences, et de curiosités et de conjectures, qui tombent pêle-mêle sur la France et sur l’Angleterre, sur le passé et sur l'avenir. Je ne dirai pas cependant que je m’y perde. Mon impression est plutôt qu’il rejaillit bien de la lumière d'un pays et d’un temps sur l'autre. Mais soyez tranquille ; j'ai assez de bon sens pour ne pas me fier à mon impression et pour savoir que je n’y vois pas aussi clair que par moments, je le crois.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3219" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>C’est en 1850, qu’est publié le <em><a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bd6t5368009n/f11.item" target="_blank" rel="noopener">Discours sur l'histoire de la révolution d'Angleterre : pourquoi la révolution d'Angleterre a-t-elle réussi</a>.</em> Comme pour son essai <em>De la Démocratie en France</em>, publié un an plus tôt, Guizot vise une publication simultanée en France et en Angleterre. Ainsi Mad Austin vient d’Angleterre pour travailler avec Guizot au Val-Richer sur la traduction du manuscrit. Il écrit le 13 octobre 1849 :</p>
<p style="padding-left: 40px;">Mad. Austin m’arrive le 19 au Val Richer, pour traduire, mon ouvrage sous mes yeux. Il me faut 36 heures pour la mettre en train. Je ne puis partir que le dimanche 21 pour vous voir lundi 22. Je ne pourrai rester à Paris que deux jours. Il faudra que je revienne ici pour achever, mon travail et surveiller la traduction. Je comptais rester au Val Richer, jusqu'à la fin de Novembre, et quelques jours employés à une course à Paris me mettront en retard, par conséquent dans l'impossibilité d'y revenir plutôt. Si au contraire, je ne me détourne pas de mon travail, le 21 Octobre, je pourrai avancer mon retour définitif à Paris. J'y reviendrai alors décidément, le 15 ou le 16 novembre. Je prends le choix des deux jours à cause de l’incertitude des diligences où il me faut beaucoup de places. Il me semble que cela vaut mieux. Si vous étiez revenue à Paris vers le milieu de septembre, selon votre premier projet, il n’y avait pas à hésiter ; notre réunion définitive était trop loin ; j’allais vous voir sur le champ, ne fût-ce que pour deux jours. Vous ne revenez que le 18 octobre. Je puis, en ne m'interrompant pas dans mes affaires d’ici, travail et traduction, retourner définitivement à Paris, le 15 novembre. Ne vaut-il pas mieux faire cela que nous donner deux jours le 22 octobre pour retarder ensuite de quinze jours ou trois semaines notre réunion définitive ? Point de mauvais sentiment, point d'injuste méfiance, je vous en conjure. Le bonheur de vous retrouver de reprendre nos douces habitudes est ma première, ma constante pensée. <br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3176" target="_blank" rel="noopener">lettre</a> </p>
<p>François écrit finalement le 28 octobre :</p>
<p style="padding-left: 40px; text-align: left;">J’arriverai à Paris sans avoir fini mon travail. Il sera très près de sa fin, mais pas fini. Il me plaît, et je crois qu’il m'importe. Je ne veux le publier que bien et vraiment achevé. J'aurai besoin, chaque jour, pendant trois ou quatre semaines de quelques heures de solitude. Je les prendrai le matin, en me levant. C'est mon meilleur temps. Je ne recevrai personne avant 11 heures. On me dit que j'aurai bien de la peine à me défendre, qu’on viendra beaucoup me voir. Amis et curieux, tous oisifs. Je me défendrai pourtant. Je veux garder pleinement mon attitude tranquille et en dehors. Je n'ai rien à faire que de dire, quelquefois et sérieusement, mon avis.<br />Voir la <a href="https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/items/show/3207" target="_blank" rel="noopener">lettre</a><br /><br />Marie Dupond (Octobre 2022)<br /><br /><br /><br /></p>
</div>
Correspondance
Notice pour une lettre ou toute correspondance
Destinataire
Format à utiliser : Nom, Prénom
Hormis la majuscule à la première lettre, ne pas utiliser la majuscule.
Vous pouvez mettre les dates de naissance et de mort, entre parenthèses après le nom de l’auteur si ce n'est pas l'auteur décrit dans la collection
Si la lettre a plusieurs destinataires, mettre un nom par entrée.
Si l'identification d'un éventuel surnom ou pseudonyme n'a pas été possible, on l'indiquera dans le champ DC « Description »
Guizot, François (1787-1874)
Lieu de destination
Format : Ville (Pays), puis Adresse complète si possible.
Val-Richer
Date précise de la lettre
Mardi le 7 août 1849
Nature du document
Propositions non exhaustives :
Manuscrit, tapuscrit, copie dactylographiée, etc.
Lettre, carte postale, photo, etc. (correspondance)
Photographie, diapositive, etc. (iconographie)
Passeport, carte d'identité, répertoire, agenda, etc. (dossier biographique)
Journal, magazine, revue, etc. (presse)
Lettre autographe
Support
Support physique (codicologie). Propositions non exhaustives :
Papier, carnet, feuillet
Carte plastifiée (dossier biographique), négatif, etc. (iconographie)
Autre support : enregistrement sonore, vidéo, etc.
copie numérisée de microfilm
Etat général
Pour tout commentaire sur l'état du document (présence de ratures, etc.), il faut mieux l'indiquer dans la rubrique « état génétique ».
Bon
Localisation
Localisation géographique du document.
Indiquer où est hébergé le document et le nom du fonds, avec l’adresse précise si possible.
Archives Nationales (Paris)
Dublin Core
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Source
A related resource from which the described resource is derived
AN : 163 MI 42 AP Papiers Guizot Bobine Opérateur 11
Title
A name given to the resource
Richmond, Mardi 7 août 1849, Dorothée de Lieven à François Guizot
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Richmond (Angleterre)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1849-08-07
Language
A language of the resource
Français
Type
The nature or genre of the resource
Correspondance
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
Rights
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Subject
The topic of the resource
Conditions matérielles de la correspondance
Relation François-Dorothée
Diplomatie (Angleterre)
Politique (Irlande)
Réseau social et politique
Portrait
Circulation épistolaire
Politique (France)
Politique extérieure
Relation François-Dorothée (Diplomatie)
Conversation
Description
An account of the resource
<div style="text-align: justify;">Richmond Mardi le 7 août 1849<br /><br />Vos lettres sont des fêtes pour moi. Je lis & relis. Point de nouvelles. On va patienter chez vous et vivre pauvrement toujours avec la perspective d’un événement. Quel état ! Ici l’on ne parle que du voyage de La Reine en Irlande. L’enthousiasme le plus énorme. Heureux pays où ce sentiment se conserve ! Outre la Reine, les Irlandais auront cette année de bonnes pommes de terre. Ils sont donc enchantés.<br />Je n’ai vu hier que les habitants de Richmond. Lord Chelsea & les Delmas chez moi. Lord Beauvale chez lui. Il était fort amusé d’une petite [?]. Duchâtel a enlevé à Lord Faukerville une belle dame, demoiselle je crois, Miss Mayo nièce d'une Lady Guewood. Fort jolie et fort leste. Elle venait chez les Duchâtel souvent, elle vient de partir avec eux pour Spa et Paris, & peut être Bordeaux. Quelle bonne femme que Mad. Duchâtel.<br />J'ai eu une longue lettre de Lord Aberdeen. Il s’ennuie à périr en Ecosse, il me le dit. Je crois que nous lui manquons. Je lui avais raconté mon dialogue avec John Russel au sujet du discours de Palmerston. Cela lui a fait plaisir. Beauvale ne croit pas à nos revers en Hongrie. Moi je ne sais [?] que croire. Pourquoi n’y a-t-il pas de bulletin officiel ? Dans tous les cas l’affaire traine beaucoup.<br />M. de Mussy m’a interrompue. Il m’a dit qu'il avait une lettre de vous. Je ne lui ai pas dit que je le savais. Il est en redoublement de soucis ; je crois bien que c’est lui qui m'accompagnera à Paris ce serait excellent. Le duc de Lenchtenberg est attendu à Londres cette semaine. Les ministres ici s’étonnent beaucoup qu’au milieu des immenses difficultés de vos finances, on ne songe pas à une réduction de l’armée & de la Marine. John Russell & lord Palmerston m'en ont parlé tous deux. Ils disent que très certainement ils vous imiteraient tout de suite pour leur marine, & que vous leur ferez un grand plaisir. L’épouvantail de l'armée russe n’a pas le sens commun. Elle ne veut pas, elle ne peut pas, & personne ne permettrait qu'elle vous attaque. C’est des bêtises. Gardez amplement ce qu'il vous faut pour chez vous & [?] le reste. Adieu, Adieu, que je voudrais jaser, comme nous jaserions. Comme ce serait charmant. Adieu. Adieu dearest. Adieu.</div>
Circulation épistolaire
Conditions matérielles de la correspondance
Conversation
Diplomatie (Angleterre)
Politique (France)
Politique (Irlande)
Politique extérieure
Portrait
Relation François-Dorothée
Relation François-Dorothée (Diplomatie)
Réseau social et politique
-
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Title
A name given to the resource
1848 ( 1er août -24 novembre) : Le silence de l'exil
Creator
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Guizot, François (1787-1874)
Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
Publisher
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Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1848
Language
A language of the resource
Français
Anglais
Type
The nature or genre of the resource
Correspondance
Rights
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Correspondance
Notice pour une lettre ou toute correspondance
Destinataire
Format à utiliser : Nom, Prénom
Hormis la majuscule à la première lettre, ne pas utiliser la majuscule.
Vous pouvez mettre les dates de naissance et de mort, entre parenthèses après le nom de l’auteur si ce n'est pas l'auteur décrit dans la collection
Si la lettre a plusieurs destinataires, mettre un nom par entrée.
Si l'identification d'un éventuel surnom ou pseudonyme n'a pas été possible, on l'indiquera dans le champ DC « Description »
Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
Lieu de destination
Format : Ville (Pays), puis Adresse complète si possible.
Richmond
Date précise de la lettre
Mercredi 2 août 1848
Heure
Midi
Nature du document
Propositions non exhaustives :
Manuscrit, tapuscrit, copie dactylographiée, etc.
Lettre, carte postale, photo, etc. (correspondance)
Photographie, diapositive, etc. (iconographie)
Passeport, carte d'identité, répertoire, agenda, etc. (dossier biographique)
Journal, magazine, revue, etc. (presse)
Lettre autographe
Support
Support physique (codicologie). Propositions non exhaustives :
Papier, carnet, feuillet
Carte plastifiée (dossier biographique), négatif, etc. (iconographie)
Autre support : enregistrement sonore, vidéo, etc.
copie numérisée de microfilm
Etat général
Pour tout commentaire sur l'état du document (présence de ratures, etc.), il faut mieux l'indiquer dans la rubrique « état génétique ».
Bon
Localisation
Localisation géographique du document.
Indiquer où est hébergé le document et le nom du fonds, avec l’adresse précise si possible.
Archives Nationales (Paris)
Dublin Core
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Source
A related resource from which the described resource is derived
AN : 163 MI 42 AP Papiers Guizot Bobine Opérateur 10
Title
A name given to the resource
Ketteringham Park, Mercredi 2 août 1848, François Guizot à Dorothée de Lieven
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Guizot, François (1787-1874)
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ketteringham (Angleterre)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1848-08-02
Language
A language of the resource
Français
Type
The nature or genre of the resource
Correspondance
Rights
Information about rights held in and over the resource
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0.
Subject
The topic of the resource
Relation François-Dorothée (Dispute)
Discours du for intérieur
Voyage
Finances (François)
Portrait
Politique (Irlande)
Politique (Angleterre)
Politique (Autriche)
Politique (Italie)
Politique (France)
Conditions matérielles de la correspondance
Relation François-Dorothée (Politique)
Description
An account of the resource
<div style="text-align: justify;">Ketteringham Park Mercredi 2 août 1848<br />Midi<br /><br />J’ai eu votre lettre à 10 heures en sortant de la prière. Je m'afflige, mais je [ne] me plains pas de sa tristesse. Ni Montaigne, ni Pascal, ni La Bruyère, ni personne n'a dit la moitié de ce qu’il y a à dire sur les contradictions et les incohérences dont notre cœur est plein. Les livres sont toujours, si au-dessous des personnes, et les paroles des réalités. J'en reviens à ce que je vous disais hier matin ; si nous nous étions toujours tout dit, si nous nous disions toujours tout, nous éviterions bien des chagrins, et nous supporterions bien mieux, ceux que nous n'éviterions pas. Voulez-vous que nous essayions une fois de nous dire tout ? Cela se peut-il ? J’ai fait mon voyage sans accident. Sauf un peu de pluie qui pénétrait dans les glaces mal jointes des voitures de seconde classe du railway. Car je me suis mis dans une voiture de seconde, classe très passable d'ailleurs. J’ai trouvé que plus d’une livre, pour cinq personnes était une économie à faire. M. Hallam et sa fille qui venaient par le même train se sont un peu étonnés. Mais c’est un étonnement qui ne me nuit pas. Je suis ici dans une bonne et grande maison de Country gentleman. Sir John est parfaitement content de deux choses, de sa maison et de me la montrer. Orgueilleux d'être anglais. Orgueilleux de descendre d’un Français. Des souvenirs de France étalés avec une complaisance affectueuse au milieu des conforts d'Angleterre. Et au bout de la pièce d’eau qui orne le parc, un pavillon portant mon nom. Whig, et whig plus vif que je ne croyais, il me pardonne tout puisque je lui fais le plaisir d'être son cousin. Mais il veut me réconcilier avec Lord Palmerston. Il m’en a dit hier tout le bien imaginable.<br />Vous avez raison ; l'Angleterre est heureuse. Tout lui tourne bien. Mais elle a droit d'être heureuse, car elle se conduit bien. Je ne connais pas de justice plus complète que celle de Dieu envers l’Angleterre à propos de l'Irlande en ce moment. L'Angleterre fait honnêtement sensément, courageusement depuis 30 ans, tout ce qu'elle peut pour soulager les maux de l'Irlande, les maux qu’elle lui a faits depuis 300 ans. Elle n'y réussit guères. L'Irlande reste pour elle, un fardeau énorme, une plaie hideuse. Et en même temps que l’ancien crime est puis le bon vouloir actuel est récompensé. L'Irlande ne vient pas à bout de devenir, pour l'Angleterre un danger. La bêtise irlandaise vient en aide à l'impuissance de la sagesse anglaise. Le volcan gronde toujours et n'éclate jamais. Il faudra un temps immense à l'Angleterre bien intentionnée pour guérir le mal et se guérir elle-même du mal de l'Irlande. Mais elle y réussira, si elle en a le temps, et j'espère que Dieu le lui donnera, car elle le mérite. Plus je regarde cette société-ci, plus je lui porte d'estime, et lui veux de bien. Il y a dans la maison., M. Hallam, son fils et sa fille, un dean d'Ely et sa femme. On attend demain l’évêque de Norwich, et je ne sais combien de Stanley. Nous étions déjà 21 ce matin à déjeuner. J’écris à lord Fritz-William pour décliner son invitation. J'attends impatiemment des nouvelles d'Italie. Il est clair qu'entre Autrichiens et Piémontais la mêlée est vive, et qu'aux dernières nouvelles il n’y avait point de vainqueur. Je ne connais rien de plus ridicule que cet immense bruit que font partout les Italiens, laissant d'ailleurs le Roi de Sardaigne à peu près seul aux prises avec l’Autriche. Et si le vieux gouvernement Autrichien avait eu la moitié de l’énergie de son vieux maréchal Radetzky, il aurait certainement réprimé un mouvement si superficiel quoique si général. Je doute beaucoup que Cavaignac ait inventé et suive, dans cette affaire italienne la bonne politique que vous faisiez si bien l'autre jour. Adieu. Adieu. La poste part d’ici à 3 heures, après le luncheon, on ira se promener. Il ne pleut pas. Le pays n’est pas joli. Mais au dessus de beaucoup de navets, il y a beaucoup d'arbres. C’est bien Wymondham. Adieu. Adieu. On n'a pas encore ici le Times de ce matin. Tenez moi bien au courant de votre santé. Adieu. G.</div>
Publisher
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Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
Conditions matérielles de la correspondance
Discours du for intérieur
Finances (François)
Politique (Angleterre)
Politique (Autriche)
Politique (France)
Politique (Irlande)
Politique (Italie)
Portrait
Relation François-Dorothée (Dispute)
Relation François-Dorothée (Politique)
Voyage
-
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Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
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Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/files/original/2b68fe53de616e0bef4f02231355803b.jpg
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Title
A name given to the resource
1839 (27 février - 4 mars)
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Guizot, François (1787-1874)
Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1839-02-27
1839-03-04
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (France)
Lisieux (France)
Language
A language of the resource
Français
Type
The nature or genre of the resource
Correspondance
Rights
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Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0.
Subject
The topic of the resource
Mandat local
Elections (France)
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
Correspondance
Notice pour une lettre ou toute correspondance
Publication
Deux choix :
Inédit.
Nom, Prénom (de l’auteur), Titre de la publication, Lieu, Maison d’édition, Date.
Indiquer volume, tome ou collection si nécessaire….
Une entrée par édition
Lettres de François Guizot et de la princesse de Lieven (1836-1846), préface de Jean Schlumberger, Paris, Mercure de France, 1963-1964, vol. 1, n°210/230-231
Destinataire
Format à utiliser : Nom, Prénom
Hormis la majuscule à la première lettre, ne pas utiliser la majuscule.
Vous pouvez mettre les dates de naissance et de mort, entre parenthèses après le nom de l’auteur si ce n'est pas l'auteur décrit dans la collection
Si la lettre a plusieurs destinataires, mettre un nom par entrée.
Si l'identification d'un éventuel surnom ou pseudonyme n'a pas été possible, on l'indiquera dans le champ DC « Description »
Guizot, François (1787-1874)
Lieu de destination
Format : Ville (Pays), puis Adresse complète si possible.
Lisieux
Date précise de la lettre
Samedi 2 mars 1839
Nature du document
Propositions non exhaustives :
Manuscrit, tapuscrit, copie dactylographiée, etc.
Lettre, carte postale, photo, etc. (correspondance)
Photographie, diapositive, etc. (iconographie)
Passeport, carte d'identité, répertoire, agenda, etc. (dossier biographique)
Journal, magazine, revue, etc. (presse)
Lettre autographe
Support
Support physique (codicologie). Propositions non exhaustives :
Papier, carnet, feuillet
Carte plastifiée (dossier biographique), négatif, etc. (iconographie)
Autre support : enregistrement sonore, vidéo, etc.
copie numérisée de microfilm
Localisation
Localisation géographique du document.
Indiquer où est hébergé le document et le nom du fonds, avec l’adresse précise si possible.
Archives Nationales (Paris)
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Source
A related resource from which the described resource is derived
505, AN : 163 MI 42 AP Papiers Guizot Bobine Opérateur 3
Title
A name given to the resource
187. Paris, Samedi 2 Mars 1839, Dorothée de Lieven à François Guizot
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (France)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1839-03-02
Language
A language of the resource
Français
Type
The nature or genre of the resource
Correspondance
Subject
The topic of the resource
Diplomatie
Politique (Russie)
Enfants (Benckendorff)
Réseau social et politique
Relation François-Dorothée
Famille Benckendorff
Politique (Espagne)
Portrait
Politique (Irlande)
Récit
Santé (François)
Politique (France)
Description
An account of the resource
<div style="text-align: justify;">187 Samedi 2 mars 1839 <br /><br />Mercredi seulement. Que c’est long ! je m'afflige, mais je ne me plains pas. Je ne suis pas inquiète comme vous le dites. Mais cela me fait beaucoup de peine. Cela vous ne vous en plaindrez pas ? Oui le 4 ! C’est horrible, mais je ne puis ni en parler ni en écrire.<br />J’ai eu une lettre de Paul hier. L’Empereur a envoyé de suite à Londres le comte Strogonnoff pour remplacer mon fils pendant le voyage qu'il va faire en Russie. Il lui enjoint de venir de suite attendu qu’'il désire le voir. Paul ne veut pas aller dans ce moment, sa santé ne va pas à un voyage rapide dans la rude saison. Il ira dans quatre semaines on trouvera cela étrange, il fallait courir ventre à terre dès le lendemain ! Voilà comme on est chez nous. J’ai eu ma lettre de mon frère ce matin ; il avait reçu mes deux lettres. Celle de reproche et l’autre écrite après la mort de mon mari. La sienne contient que des hélas et des reproches sur ce que je ne veux pas vivre en Russie. Voici le lieu de lui dire une fois pour toutes pourquoi je n’y veux pas vivre et que je n’y retournerai jamais. Je vous montrerai cette lettre, je ne l’enverrai qu'après vous l’avoir lue.<br />J’ai vu hier matin chez moi la comtesse Appony. J’ai fait le plus agréable dîner possible chez Lady William Bentinck, elle, son mari et Lord Harry Vane, voilà tout. Très anglais, très confortable, j’ai eu presque de la gaieté. Le soir chez moi, mon ambassadeur, celui d’Autriche, Fagel, M. de Stackelberg & le Prince Waisensky. Don Carlos a retiré sa proclamation contre Maroto. Après l’avoir déclaré traître, il approuve tous ses actes, lui rend le commandement. Enfin, c’est une confusion plus grande que jamais, et mes ambassadeurs disent que ce qu'il y a de mieux à faire est d’abandonner complètement Don Carlos et le principe. Les princes gâtent le principe.<br />Lord Everington vient d'être nommé vice roi d’Irlande, c'est un très grand radical, un homme d’esprit, membre distingué de la chambre basse, et très grand seigneur quand son père Lord Forteseme mourra. Je vous conterai comment un jour il est resté caché pendant deux heures dans les rideaux de mon lit ! J’ajoute, puisque vous êtes si loin ; que c’est mon mari qui l'y avait caché. Vous feriez d’étranges spéculations si je ne vous disais pas cela. Et ce n’était pas cache cache.<br />Le petit copiste est venu. Il a commencé aujourd’hui. Cela va très bien. Les ambassadeurs avaient vu M. Molé hier. Les nouvelles sur les élections sont d’heure en heure meilleures pour les ministres. Vous avez bien fait de n'être pas allé à Rouen, mais vous faites très mal d'avoir du rhumatisme. Je vous le disais lorsque vous êtes parti, j’étais sure que vous alliez prendre froid. Faites-vous bien frotter au moins Adieu. Adieu, il faut donc encore écrire demain et lundi. What a bore ! Adieu. Adieu.</div>
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Enfants (Benckendorff)
Famille Benckendorff
Politique (Espagne)
Politique (France)
Politique (Irlande)
Politique (Russie)
Portrait
Récit
Relation François-Dorothée
Réseau social et politique
Santé (François)