La correspondance inédite du géomètre Gaspard Monge (1746-1818)

La correspondance inédite du géomètre Gaspard Monge (1746-1818)


106. Monge au Conseil de l'École polytechnique

Auteurs : Monge, Gaspard

Transcription & Analyse

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Rome, le 27 prairial de l'an V de la République française une et indivisible
 
Citoyens collègues[1],
 
Nous avons acheté ici trois collections des Œuvres de Piranesi qui forment en gravures le plus beau recueil des monuments d'architecture de l'ancienne Rome.[2] La première de ces collections est pour la Bibliothèque nationale, la seconde est pour celle de l'Institut, la troisième est pour la vôtre. Cette dernière est renfermée dans une caisse à votre adresse qui est actuellement en route pour le port de Livourne avec un des convois de statues et qui n'arrivera à Paris qu'avec le grand convoi de Rome.[3]
Un des cahiers de ce recueil étant plus grand que les autres, nous avons été obligés de faire faire la caisse un peu plus grande que le volume total ne l'aurait exigé, ce qui a laissé des vides. Nous avons garni ces vides de planches pour défendre les œuvres de Piranesi de toute avarie, et nous les avons remplis de plusieurs objets, ainsi qu'il suit :
1° Quelques fragments de plâtre de Rome dont le citoyen Berthollet[4] a désiré faire l'essai comparativement à celui de Paris ; je vous prie de lui faire conserver ces échantillons dont une partie entrera dans votre cabinet d'histoire naturelle.
2° Une collection assez nombreuse de plusieurs marbres et pierres que les Romains faisaient venir de très loin pour décorer leurs monuments ; autant que la rapidité nous l'a permis, nous avons fait mettre les étiquettes sur chaque objet.
3° Un petit paquet contenant environ 5 livres de précipité rouge[5] que je n'avais pas eu l'occasion de placer dans les autres envois.
Tout cela est pour votre Cabinet.
Mes collègues y ayant placé quelques petites choses pour eux, comme par exemple une ou deux boites de crayons d'Italie ; ces objets portent leurs adresses et je vous prierai à l'ouverture de les y faire parvenir.
J'y ai placé un exemplaire de Dante[6] en trois volumes que j'ai acheté ; je vous serais très obligé si vous aviez la complaisance de l'envoyer à ma femme.[7]
Le citoyen Alma, secrétaire du Conseil[8] m'a chargé de prendre des renseignements sur l'existence d'un de ses parents, volontaire à l'armée d'Italie. Sa lettre qui ne m'est parvenue que tard m'a trouvé ici où je suis très éloigné du quartier général. Je l'ai envoyée sur le champ au général Berthier, [9]  en le priant de faire faire la recherche, et d'adresser directement la réponse au citoyen Alma, j'espère que les occupations du général Berthier ne l'auront pas empêché de me rendre ce service.
Je me recommande, mes chers collègues, à votre bon souvenir et vous prie de compter sur mon tendre attachement.
Monge
 

[1] Le conseil est constitué des professeurs, alors appelés instituteurs, de leurs adjoints, du directeur, des sous directeurs et d’un secrétaire.

[2] Giovanni Battista PIRANESI (1720-1778), graveur et architecte. Antichita romane publié en 4 volumes en 1756 à Rome.

[3] Voir les lettres n°77 et 103.

[4] Claude-Louis BERTHOLLET (1748-1822)

[5] Oxyde de mercure. Voir lettre n°77.

[6] DANTE, La divine comédie. Le poète Dante (1265-1321) est apprécié par les savants, Condorcet dans son Esquisse le décrit « noble, précis, énergique »Condorcet (1795), p.183.

[7] Catherine HUART (1748-1847)

[8] Nicolas HALMA (1755-1828), alors secrétaire du Conseil de l'École polytechnique et dont Monge orthographie par erreur le nom en Alma.[R.T.]

[9] Louis-Alexandre BERTHIER (1753-1815), il est le chef de l’état-major général de l’armée d’Italie.

Relations entre les documents


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Notice créée par Marie Dupond Notice créée le 12/01/2018 Dernière modification le 11/02/2022