[1]Après la défaite navale d’Aboukir le 14 Thermidor an VI [1er août 1798], l’Angleterre reprend une position dominante en Méditerranée. Catherine reçoit cette lettre et la suivante du 29 vendémiaire (lettre n°193) en décembre 1798, elle y répond de Paris le 6 nivôse an VII [26 décembre 1798] : « Je viens enfin de recevoir de tes nouvelles, mon cher bon ami, des 28 et 29 vendémiaire dernier, je n’en ai pas eu une seule fois depuis ton arrivée en Égypte. ». Voir la lettre n°196.
[4] Jean-Simon CHAMPY (1778-1845) en 1800, il n’est plus seulement une connaissance ni un ami de la famille mais il en devient membre en épousant Marie-Élysabeth-Christine LEROY appelée Paméla, nièce de Catherine Huart (1783-1856). Nombreux sont les membres de la campagne et de l’expédition d’Égypte qui souffrent de problèmes ophtalmologiques. Cela fait d’ailleurs l’objet d’une « Notice sur l’Ophtalmie régnante », par le citoyen BRUANT, médecin ordinaire de l’Armée publiée en 1798 dans le premier volume de La Décade Égyptienne (pp. 58-63). Cette notice est tirée de la correspondance du médecin Bruant avec le médecin en chef de l’armée Desgenettes.
[5] La victoire du général Victor Emmanuel Leclerc (1772-1802) à El-Khanqah, près du Caire, le lendemain de la défaite d’Aboukir, le 15 thermidor an VI [2 août 1798] ; le 23 Thermidor [10 août 1798], un petit détachement français réussit une retraite héroïque à Mansourah (entre Le Caire et Damiette), face à plus de 3000 soldats
[8] Le 8 fructidor an VI [25 août 1798], Desaix commence la campagne en Haute-Égypte à la poursuite de Mourad-Bey après la bataille des Pyramides du 3 thermidor an VI [ 21 juillet 1798]. Desaix sort victorieux de son combat avec Mourad Bey à Sediman le 16 vendémiaire an VI [7 octobre 1798]. Voir les lettres n°193 et 197.
[9] IBRAHIM BEY (1735-1817) Mamelouk. L’arrivée impromptue des troupes napoléoniennes font fuir Ibrahim-Bey de la ville de Salahieh accompagné de son arrière-garde, composée d'environ mille mamelouks. Un escadron de cavalerie fonce sur les mamelouks qui se battent avec courage. Le 3e régiment de dragons venu en renfort force les mamelouks d'Ibrahim-Bey à s'enfoncer dans le désert. Ibrahim-Bey séjourne à Qatyeh puis Al-Arish pour arriver en Syrie.
[10] Le divan général tient sa première séance le 16 vendémiaire an VII [ 7 octobre 1798]. Monge a été chargé de rédiger une adresse au peuple d’Égypte. Cette adresse ne satisfait pas Bonaparte et fut remplacée par une autre que l’on fait voter le 18 octobre 1798. Bonaparte écrit à Monge et Berthollet en tant que commissaires près le divan général le 27 vendémiaire an VII [18 octobre 1798] : « J’ai reçu la réponse que m’a faite le divan aux différentes questions que je lui avais proposées. Remerciez le divan du zèle qu’il a mis dans ce travail. Dites au divan qu’il serait bon de faire un règlement pour déterminer, d’une manière invariable, les droits que les cadis et leurs subalternes doivent retirer des procès. Priez-le de nommer une commission pour proposer ce règlement. Faites-lui connaître que je désirerais qu’il fît une adresse aux habitants du pays, pour leur faire sentir combien il est essentiel qu’ils ne prêtent pas l’oreille à des propos vagues et semés à dessein par leurs ennemis sur l’arrivée des mamelouks ; cela ne sert qu’à irriter les Français et à causer la ruine des villages. Qu’il leur conseille de fermer l’oreille à ces bruits perfides et sans fondement ; qu’ils prêtent obéissance, vivent en bonne harmonie avec les Français, et réunissent tous leurs efforts aux leurs pour réprimer les Arabes voleurs et les empêcher de dévaster les campagnes et de vexer les malheureux Français. Qu’il leur dise aussi que nous sommes des gens justes ; que nous n’avons ne vue que le bien du pays et d’y mettre en vigueur le règne de la justice. Les deux secrétaires peuvent se charger de rédiger cette adresse et l’envoyer demain à l’assemblée ; si elle est adoptée, les membres du divan pourront retourner à leurs affaires. » (3488, CGNB).
Dans son brouillon, Monge décrit un projet égyptien déterminé par l’idée de progrès qui fait écho au projet présenté à son gendre Marey au début du Directoire. (Voir les lettres n°3, 4 et 5.) L’Égypte devient le terrain de mise en œuvre d’une politique de grands travaux d’irrigation qui visent à la fois le progrès des sciences et des arts et le bonheur du peuple égyptien (Sur les enjeux scientifiques des systèmes de canaux d’irrigation, voir la lettre n°17.) : « Peuples de l’Égypte, La terre que vous habitez à été le berceau des nations. L’univers est plein de la gloire de vos ancêtres. C’est à eux que l’Europe est redevable de sa civilisation, et de ses premières lois. Les arts, les sciences, la religion, tout jusqu’à l’écriture elle-même nous vient des sages de l’Égypte. Leurs vaisseaux couvraient la mer rouge et la Méditerranée, et la célèbre Memphis placée au milieu du canal par lequel communiquaient les deux mers, [arbitre du commerce du monde] distribuait aux sauvages du Nord les chefs d’œuvre de l’industrie de l’Inde, et rapportait aux nations civilisées des bords du Gange les métaux et les matières premières qu’elle avait reçues en échange. Devenus par leur industrie les maîtres du fleuve, [vos sages ancêtres] modéraient à leur gré [et rendaient utiles] les irrégularités même de ses crues [et en lui soumettant par d’[innombrables] canaux des terres nouvelles], ils avaient doublé leur territoire et quadruplé leur population. Trente siècles de barbarie n’ont pu entièrement détruire les merveilles dont leur terre était couverte et qui attestent encore aujourd’hui leur incroyable puissance. […] Tant d’éclat dut irriter l’ambition des conquérants du monde et la malheureuse Égypte [après avoir combattu longtemps pour son indépendance, ][devint] successivement l’esclave des Babyloniens, des Grecs, des Romains, des Arabes et des Mamelouks. Le commerce, enfant de la paix et de la liberté, s’exila de son pays natal, il [ ?] [fut forcé de se créer] des routes pénibles et incertaines. Les richesses qu’il avait amassées affermirent l’avarice des premiers conquérants et se renouvelèrent plus. Les arts et les sciences disparurent avec lui. Les établissements auxquels il avait dû sa prospérité [tombés] entre mains des maîtres avides et imprévoyants ont été détruits et effacés par le temps. [L’ignorance couvrit d’un voile épais les yeux des descendants des anciens sages]. Le désert menace cette belle terre d’une invasion rapide, et l’Égypte [pauvre et dépeuplée] est aujourd’hui le seul pays où l’on ne se souvient plus de son antique splendeur. Des plaies si profondes, des maux si invétérés ne sont cependant pas sans remède. Les Français en vous apportant la liberté, la paix et la sureté des propriétés, vont rappeler au milieu de vous le commerce qui après avoir successivement enrichi et rendu célèbre Persépolis, Palmyre, [et tant d’autres peuples] reprendra pour toujours sa route naturelle en rétablissant les canaux de Suez et d’Alexandrie, ils rendront au Caire les anciennes destinées de Memphis. L’Europe qui pendant le sommeil de l’Égypte est devenue consommatrice et industrieuse augmentera la prospérité du commerce en doublant son ancienne activité. […] Les arts et les sciences vont revenir en foule dans le pays qui leur donna naissance. Les irrigations vont se multiplier ; le désert va reculer devant vous et l’heureuse Égypte qui par sa position est le point de communication unique de l’ancien et du nouveau monde. Peuples de l’Égypte rendez-vous dignes de si belles destinées ; et n’essayez pas de rsuspendre un événement commandé par la nature des choses et que rien ne peut arrêter. […] Ce n’est pas la nature qui a produit les malheurs de l’Égypte ; le fleuve qui fertilisait autrefois cette belle vallée a encore aujourd’hui les mêmes crues et des eaux n’ont pas diminué de volume ; les deux mers qui donnaient des ailes à son commerce ne se sont pas éloignées, elles attendent encore ses vaisseaux ; ce sont les mauvais gouvernements auxquels elle a été successivement assujettie, [qui l’ont réduite à l’état de misère où elle est aujourd’hui] ; […] Les Français, après avoir terminé glorieusement une guerre atroce que leur faisait l’Europe entière, ont senti qu’il était digne de leur courage de détruire un gouvernement oppresseur ; ils ont vu qu’il était beau de ramener en Égypte la justice, le respect des propriétés, ses lumières et de rouvrir par là, pour un peuple digne d’intérêt les sources du bonheur. Ils ont cru qu’ils ajouteraient à leur gloire si en rétablissant la communication entre les deux mers ils devenaient encore les bienfaiteurs du monde. Députés des provinces, dites au peuple d’Égypte que ce sont des sentiments généreux qui ont amené les Français parmi vous ; [ dites lui qu’ils veulent être vos amis et vos protecteurs ; faites lui remarquez] que nulle conquête ne fut plus rapide, et ne s’opéra cependant pour des moyens plus doux. Demandez lui si l’armée s’est portée à quelque violence contre les habitants à moins qu’elle ne fut commandée par une légitime défense. Peignez lui le spectacle que vous présente aujourd’hui le Caire où la confiance commence à naître, où le numéraire circule avec une rapidité jusqu’alors inconnue où l’aisance se montre déjà d’une manière sensible dans les classes inférieures. Disposez le à un changement salutaire mais inévitable ; [ouvrez-lui les yeux sur ses propres intérêts, et faites sentir qu’] une lutte vaine et qui n’aurait d’autre effet que de retarder son bonheur.Députés des provinces, aucun de vous ne peut douter que la conquête ne soit faite et irrévocable. Le général en chef brûle du désir de mettre à fin ses vastes projets. Dès que la retraite du Nil le permettra les anciens canaux vont être couverts d’ouvriers occupés de les rétablir ; et dans peu l’eau repoussera le désert ; Alexandrie et Suez seront comme les portes d’une même ville, l’Éurope et l’Inde afflueront en Égypte et y apporteront l’activité et la richesse. Mais ce qu’il a le plus à cœur, c’est de faire le bonheur du peuple égyptien. Il veut en t lui donnant des lois protéger le pauvre contre les vexations du riche, et le riche contre les avarices d’un gouvernement arbitraire. Il veut que toutes les propriétés de l’Égypte soient entre les mains d’habitants dont les familles attachées au sol, aient intérêt à perfectionner la culture et à embellir leur séjour. Il veut qu’une sécurité parfaite, en permettant à tout le monde d’user à son gré de sa fortune, appelle l’industrie et augmente les jouissances. Il veut conquérir la reconnaissance du peuple égyptien et ne réserver pour lui que cette belle partie de sa conquête. En opérant d’aussi grands changements, il faut qu’il y a des usages qu’on doit respecter, et qu’il ne faut pas ôter au peuple toutes ses habitudes. C’est pour obtenir des lumières sur cet objet que de toutes les parties de l’Égypte il vous a appelés auprès de lui. Il vous interrogera, et vos réponses le mettront en état de choisir parmi toutes les manières dont il peut faire le bien celle qui convient le mieux aux circonstances. Vous vous pénétrerez de la dignité des fonctions auxquelles vous êtes appelés ; vous concourrez avec un zèle infatigable au bonheur de vos concitoyens, et vous mériterez aussi une part dans la reconnaissance nationale. » (Fonds Monge. É.P.) Le premier discours que Monge a effectué à la demande de Bonaparte au début de l’année 1797, lors de sa mission auprès de la République de Saint-Marin, ne contenait que deux discrètes références à l’idée de progrès. Il bénéficia d’une bien meilleure réception de la part du Général. Voir n°56.
[11] Comme à Rome, la religion est le plus puissant obstacle à l’accomplissement du projet déterminé par l’idée de progrès. Voir la lettre n°196. Bonaparte présente le même jugement au Directoire, il lui écrit du Caire le 16 vendémiaire an VII [7 octobre 1798] : « Les mœurs de ce pays sont si loin des nôtres, qu’il faudra bien du temps pour que ce peuple s’y accoutume ; cependant tous les jours il nous connaît davantage. » Sur l’évaluation des stratégies culturelles des Français en Égypte voir ORTEGA M.L. (1999), « La « régénération de l’Égypte : le discours confronté au terrain », in BRET P. (dir.) (1999), pp. 93-101 et RAYMOND A. (1999), « Les Égyptiens et les Lumières pendant l’expédition française », in BRET P. (dir.) (1999), pp. 103-118.
[12] Ce projet de colonisation ne figure pas dans les textes de Bonaparte. Par contre la même idée est développée par Eschassériaux. Voir les lettres n°177 et 196.
[13] Leur fille aînée Émilie MONGE (1778-1867), son mari Nicolas-Joseph MAREY (1760-1818) et leurs deux fils Guillaume-Stanislas MAREY-MONGE (1796-1863) et Gaspard-Louis MAREY-MONGE (1797-1821) et leur fille cadette Louise MONGE (1779-1874), son mari Joseph ESCHASSÉRIAUX (1753-1824) et leur fille dont Monge ne connaît pas encore l’existence, Lucile-Eugénie ESCHASSÉRIAUX (1798-1867). Voir la lettre n°196.
[1] Le départ de l’expédition s’effectue à partir des ports de Marseille, Toulon, Gênes et Civitavecchia. Napoléon BONAPARTE (1769-1821) écrit deux lettres à Desaix avant de s’embarquer de Toulon. Huit jours plus tard, le 29 floréal an VI [18 mai 1798] Bonaparte écrit à Desaix : « Nous sommes, depuis le 22, sur une ancre, mon cher général, et prêts à appareiller ; mais un vent d’est extrêmement fort nous en a empêchés. Aujourd’hui il fait calme plat. J’espère donc pouvoir appareiller demain matin, à moins que les vents ne reprennent à l’est. Une fois à la voile, les vents peuvent nous pousser très rapidement ; vous devez donc toujours vous tenir prêts à appareiller à six heures. […] Je vous recommande de nous envoyer un aviso entre l’île d’Elbe et la Corse ; il aura soin d’interroger tous les bâtiments qui viendraient du Levant ou d’Espagne, pour connaître les mouvements de la Méditerranée. Bien des choses à Monge. » (2492, CGNB).
[2] Monge a d’abord montré une légère résistance avant d’exprimer pleinement son plaisir et son enthousiasme à s’embarquer pour l’Égypte. Voir la lettre n°153.
[3] Monge exprime aussi clairement son enthousiasme à l’idée de s’embarquer pour l’expédition maritime et scientifique que la nature prestigieuse d’une telle entreprise. Sur la nature grandiose de l’expédition, voir les lettres n° 163, 171, 174 et 187. La perspective de Monge est déterminée par l’idée de progrès. C’est l’extension des domaines de la connaissance, extension à la fois géographique et intellectuelle qui devient le motif de la gloire nationale. Sur le caractère adéquat des sciences pour provoquer l’enthousiasme républicain, voir les lettres n° 4 et 5.
[4] Sur les convois des objets de Rome transportés à Livourne pour y être embarqués pour Marseille, voir les lettres n°92, 94, 98, 100, 102, 103, 109, 110, 111, 121 et 122.
[5] Les objets les plus lourds ne pouvaient pas être convoyés en France par terre. Voir les lettres n°102 et 110.
[6] « Athéna » dite la « Pallas de Velletri ». Le restaurateur Vincenzo Pacetti la découvre en 1797 dans les ruines d'une villa romaine située près de Velletri, une petite ville italienne. Cette statue est une œuvre romaine d’époque impériale (Ier siècle ap. J.-C.). Elle mesure plus de trois mètres et est en marbre de Paros. Elle est rachetée par les commissaires.
[7] L’ « Apollon du Belvédère » saisi au Vatican en 1797 par la commission des sciences et des arts.
[8] Monge accorde beaucoup d’importance à l’exposition immédiate des œuvres d’art saisies en Italie. Ainsi il ajoute que les objets sont encaissés de manière à veiller à leur protection, mais aussi de manière à les montrer sans délai. Voir la lettre n°48. Voir aussi LUBLINER-MATTATIA S. (2007), « Monge et les objets d’art d’Italie », Un savant en son temps : Gaspard Monge, Bulletin de la SABIX, 41, pp. 92-109.
Bibliothèque de l'Institut de France (Paris).
Bonaparte, Napoléon (1769-1821)
[1] Copie de la bibliothèque de l’Institut de France Ms 2192 sur laquelle est inscrit « Archives d’Alphonse Marey-Monge auquel Madame Monge l’a donnée. ». Une autre copie se trouve dans la B.E. T. III pp. 156-157.
[2] L’expédition d’Égypte est préparée dans le plus grand secret. C’est la première fois que Monge aborde le sujet avec sa femme alors que dès le 17 germinal an VI [6 avril 1798] . Voir infra et les lettres n° 131, 153, 154, 156, 157, 163, 164 et 177.
[3] Ce raisonnement de Monge donne beaucoup d’espoir à Catherine. Elle écrit de Paris le 16 floréal an VI [5 mai 1798] : « Que de plaisir ta lettre du 7 de ce mois, m’a fait mon cher bon ami. Je crois y entrevoir que tu reviendras près de nous quand tu sauras ta nomination au corps législatif, tu dois le savoir maintenant, tu as sûrement reçu ma lettre du 1er de ce mois, c’est un courrier extraordinaire qui te l’a portée il est parti la nuit du 1er au 2. Je te l’avais adressée à Rome, à tout hasard car je ne t’y croyais plus, mais comme ce courrier devait te voir quelque part que ce fut, j’espère que tu l’a eue, et que tu es en route pour revenir ; oh je ne te lâcherai plus j’ai frisé de trop près, une séparation qui pouvait être éternelle quelle situation ! aucun des voyageurs n’ont encore écrits, juge donc mon cher bon ami être des années sans savoir où tu serais ni ce que tu deviens quelle existence ! » Voir la lettre n°168.
[4] Claude-Louis BERTHOLLET (1748-1822). Voir la lettre n°174. Selon Catherine, Berthollet a plus de raison de s’embarquer pour l’Égypte que Monge. Sa participation à l’expédition semble plus déterminée par sa situation conjugale que par sa pratique scientifique. Elle écrit en réponse le 16 floréal an VI [5 mai 1798] : « […] tu n’as aucune raison de t’éloigner [de ta famille], si j’en juge d’après moi mon ami il me semble que tu ne dois pas être malheureux avec nous. » L’épouse du chimiste, Marie-Marguerite Baur, s’est confiée à Catherine et à Monge. Elle écrit à ce dernier le 30 germinal an VI [19 février 1798] : «J’ai sujet de croire, obligeant ami, d’après ce que vous avez bien voulu faire pour moi près de mon mari que vous ne serez point insensible à la nouvelle marque de confiance que je vous donne en vous faisant un récit succinct de notre existence respective. Il m’a quitté j’ai tout lieu de le croire plus occupé que jamais de l’adroite courtisane qui se fait donner de l’argent qu’elle doit toucher à volonté chez les [Donzonni] à Milan et autres galanteries à souhait que mon nigaud payera, je le crains, au dépend de dettes que nous venons de contracter de très bonne intelligence […], ayant emprunté à des personnes qui connaissent ses nouveaux goûts et qui s’apercevront que cela dérange l’ordre de mes finances si je ne rembourse pas promptement, ce qui sera infiniment humiliant pour tous deux, particulièrement pour moi ; il ne m’a laissé aucunement entrevoir que cela finirait, et j’ai bien sujet de craindre que cela ne nous mette pour la vie très mal à l’aise. Je n’ai point persisté dans le projet de séparation de bien, parce que je suis toujours première créancière, et que par là même je lui conserve ce qui nous reste, ce qui serait une faible ressource, mais un témoignage constant de l’attachement que je lui prouverai jusqu’à mon dernier moment. »
[5] Lors de sa première mission en Italie en tant que savant, menée au rythme des révolutions italiennes, des victoires et des stratégies diplomatiques du général Bonaparte. Les missions strictement politiques, administratives et institutionnelles ennuient Monge. Voir les lettres n°151, 160, 163, 168 et 182.
[6] Monge exprime à plusieurs reprises la différence entre ses lettres de la première mission en Italie et celles de cette dernière mission. Cela devient même un objet de la colère de Catherine dans ses deux lettres du 8 floréal an VI [27 avril 1798]. Voir les lettres n°163, 164 et 182.
[7] Monge emploie aussi le terme de « spectacle » lors du mouvement de révolutions stimulé dans les villes de la région de Modène. Voir la lettre n°35. Sur la nature grandiose de l’expédition voir les lettres n°131, 153, 163, 174, 176, 184 et 187.
[8] Le 16 floréal an VI [5 mai 1798], Catherine exprime en réponse une opinion bien différente sur l’expédition en utilisant la réflexion de Monge. Elle partage bien son avis selon lequel un tel projet s’adresse aux jeunes et cela lui permet de souligner que Monge n’a plus l’âge d’y participer. D’autre part elle semble aussi lui dire qu’elle a compris qu’il avait déjà participé à la conception et la préparation de ce projet et que cela devrait lui suffire : « […] je ne trouve rien de beau dans une chose que je ne connais pas, nous admirerons bien mieux ici ensemble les grandes et belles choses qui résulteront d’une expédition conçue par d’aussi grands génies, ce n’est pas à ton âge qu’on court tant de hasard surtout lorsque cela fait le malheur de sa famille […]. Voilà bientôt la 21e fois que les genets fleurissent depuis que j’ai le bonheur d’être avec toi il n’y a que tes absences qui m’ont paru longues le reste a passé comme un songe, viens finir le reste de notre carrière ensemble, nous ne nous apercevrons pas de la vieillesse qui arrive à grands pas… » Monge n’aime pas apprendre et découvrir seul et aime se faire accompagner d’un enfant lorsqu’il voyage. Cela apparaît à plusieurs reprises. Voir les lettres n°9, 20, 48 et 173. Il semble que pour « bien voir » Monge ait besoin de « faire voir ». L’acquisition et l’élaboration des connaissances sont étroitement liées à leur transmission. Après sa formation élémentaire en mathématiques chez les Oratoriens de Beaune et de Lyon, Monge poursuit son étude des mathématiques en même temps qu’il commence à les enseigner à Mézières à partir de 1766. Cette caractéristique de sa pratique de recherche permet de saisir la dynamique d’élaboration de son œuvre mathématique. C’est chez les Oratoriens de Lyon dès 1764 qu’il s’initie à cette pratique alors qu’encore élève il est chargé d’un enseignement de Physique. Elle est décrite clairement dans le « projet de Directoire à l’usage des jeunes régents » dont les copies ont été diffusées dans les collèges de 1720 à 1750 : « La congrégation de l’Oratoire emploie ordinairement ses élèves à étudier et enseigner les humanités [...] [parce qu’elle] est convaincue qu’en mêlant l’instruction à l’étude, on s’instruit mieux soi-même [...].» Cité dans COSTABEL P. (1986), « L’Oratoire de France et ses collèges », L’enseignement classique au XVIIIe siècle, Paris, Hermann, pp. 66-100, p. 72. (La copie citée appartient aux archives de l’Oratoire actuel à Montsoult (S.-etO.) Costabel indique en note qu’elle a appartenu à Michel Chasles et paraît dater de 1750.) On retrouve ce trait dès la fondation de l’École polytechnique en 1794 lorsque parmi les élèves les plus brillants sont choisis des « chefs de brigade » qui ont pour tâche de guider les autres élèves. TATON R. (1951), p. 39.
[9] Monge justifie son silence auprès de sa femme. Il n’en dit rien pour ne pas l’inquiéter mais c’est le contraire qui se produit : elle se montre particulièrement blessée par cette attitude. Voir les lettres n°163, 164 et 182.
[10] Les femmes des savants tout en connaissant les motifs qui déterminent l’action de leur mari expriment leur difficulté à se positionner comme eux dans ce temps accéléré et orienté vers le progrès et le bonheur futurs. Au sein de l’idée de progrès ce n’est pas le présent qui détermine le futur, mais le futur qui détermine le présent et le rythme. Les femmes revendiquent leur perception ancrée dans le présent qu’elles vivent. Elles en viennent même à penser que ce présent qu’elles subissent est déterminé par l’idée de progrès et les projets mis en œuvre pour les générations futures. Cela montre un décalage entre le temps de la science et le temps à dimension individuelle et personnelle. Marie-Marguerite Baur, la femme de Berthollet écrit à Monge le 30 germinal an VI (voir la lettre n°3) : « L’importance de l’expédition qui doit faire le bonheur de l’univers nous impose des sacrifices, et l’on dira je l’espère, que nous aussi nous avons bien mérité de la patrie. » Catherine à son tour de Paris le 20 brumaire an VII [10 novembre 1798], alors qu’elle ne reçoit pas de nouvelles de Monge, elle exprime son découragement en remettant en cause l’idée du bonheur collectif qui conduit à corrompre le bonheur individuel : « […] je ne sais si le bonheur que vous préparez à la génération future sera apprécié par elle ce qu’il aura couté de larmes et de chagrin à la présente, quant à moi et aux miens qui ne l’éprouverons jamais, je ne fais qu’un vœu c’est celui de te savoir heureux, il paraît qu’il ne sera pas exaucé et que je n’aurais jamais le bonheur de te revoir, encore si je recevais de tes nouvelles directes, je me trouverais heureuse mais je n’y compte plus. » Ainsi, Catherine refuse de partager l’enthousiasme de Monge pour un projet de conquête militaire et d’expédition scientifique Le 20 Prairial an VI [8 juin 1798], elle écrit : « Ces grandes choses sont au-dessus de ma sphère, les heureux résultats seront pour des gens qui ne sauront pas seulement si nous avons existé, ni combien ils auront coûté de larmes. » Elle tient tout de même à lui faire remarquer que c’est la première fois qu’elle est en désaccord avec son action en faisant valoir son bonheur personnel et qu’elle a non seulement soutenu son engagement révolutionnaire mais aussi partagé sa vision et son projet avant même 1789, elle écrit de Paris le 19 germinal an VI [8 avril 1798] « Jouissons du reste de vie que nous avons encore à parcourir, oublions ensemble tous les sacrifices que nous avons faits l’un et l’autre à notre patrie, que je suis prête à recommencer si les mêmes dangers existaient, car sur cela tu sais que nous n’eûmes jamais qu’un [avis], que mon amour pour la liberté a devancé la Révolution. Aujourd’hui que la République a triomphé de tous ces ennemis laisse à d’autres à agrandir ses ressources ne t’en mêle pas. ». Voir les lettres n°181 et 182.
[11] Louise MONGE (1779-1874) et son mari Joseph ESCHASSÉRIAUX (1753-1824) dit l’aîné afin de le différencier de son frère René ESCHASSÉRIAUX (1754-1831).
Bibliothèque de l'Institut de France (Paris).
[1] Voir la lettre n°110 et la réponse de Catherine du 14 thermidor an V [1er août 1797] en note.
[2] Selon Monge c’est le moyen de provoquer l’enthousiasme national. Voir les lettres n°4 et 5.
[3] En Avril 1797, les Royalistes gagnent les élections lors du renouvellement d’un tiers du conseil des Cinq-Cents. Ils sont alors en majorité au conseil des Cinq Cents. Monge n’en est pas tout de suite affecté, il compte sur les victoires de la république à l’extérieur de la France pour la renforcer à l’intérieur. Voir les lettres n°76, 89 et 90. Sur la montée es Royalistes et la réponse du Directoire avec le coup d’état du 18 fructidor, voir les lettres n° 110, 116, 118, 127, 131, 132 et 135.
[4] Godechot utilise notamment cette lettre de Monge pour compléter ce qui est exprimé par les adresses aux Armées des généraux et traiter du recours aux armées dans la gestion de la crise de Fructidor. « Si le Directoire avait ainsi lâché la bride aux généraux et surtout à ceux des armées d’Italie et de Sambre-et-Meuse qui passaient pour le plus nettement républicains, c’est qu’en retour ils attendaient d’eux des services particulièrement importants.[…] [Le Directoire] prévoyait […] qu’il aurait besoin de leur intervention dans la politique pour lutter contre les modérés. […] Le gouvernement était dûment averti par l’opposition. Néanmoins, il lui apparaissait impossible de lutter contre les modérés par des moyens constitutionnels. L’abrogation des lois des 3 et 4 Brumaire an IV, qui avaient exclu des assemblées électorales un certain nombre de citoyens, émigrés, déportés, auteurs ou provocateurs « de mesures séditieuses » ; l’abrogation d’une grande partie de la législation électorale contre les émigrés et leurs parents, la proposition d’abroger les lois contre les prêtres réfractaires, indiquaient à tous et d’une manière suffisamment nette les intentions des modérés : eux-mêmes pour compléter leur victoire, songeaient à faire appel à l’armée, ils comptaient sur Moreau. Le Directoire répandit habilement ces nouvelles dans les armées qui passaient encore pour très républicaines, celles de Bonaparte et de Hoche. Elles répondirent en envoyant des adresses aux armées. Bonaparte donna l’exemple […] le 14 juillet 1797 : « Soldats, s’écrie-t-il, je sais que vous êtes profondément affectés des malheurs qui menacent la Patrie, mais la Patrie ne peut courir de dangers réels. Les mêmes hommes qui l’ont fait triompher de l’Europe coalisée sont là. Des montagnes nous séparent de la France, vous les franchiriez avec la rapidité de l’aigle pour maintenir la Constitution, défendre la liberté, protéger le gouvernement et les républicains[…] ». Godechot complète en indiquant que les sentiments de l’armée d’Italie se manifestent aussi dans les correspondances privées en citant d’abord le général Dupuy et Monge, d’après DE LAUNAY L. (1933), p. 163. In GODECHOT J. (1941), pp. 660-662. Voir les lettres n°131, 132 et 135.
[5] Voir les lettres n°116 et 118.
[6] Monge se montre très attaché aux républicains de Rome. Voir la lettre n°113. Monge n’admet pas l’abandon des républicains italiens après les avoir utilisés au sein de stratégies diplomatiques, et il écrit à Bonaparte à ce sujet. La lettre ne figure pas dans le corpus mais Bonaparte en fait mention dans une lettre à son frère Joseph BONAPARTE (1768-1844) le 16 fructidor an V [2 septembre 1797] alors ambassadeur auprès de Pie VI « Vous trouverez ci-joint, citoyen ambassadeur, une lettre que m’avait écrite dans le temps le citoyen Monge ; je crois très essentiel pour la dignité de la République française, comme pour le bien de l’humanité que vous fassiez sentir à la cour de Rome la nécessité de ne pas sacrifier des hommes aussi universellement estimés que ceux dont il est question dans cette lettre. Il est indispensable ; je pense, que, tout en cherchant à maintenir une bonne amitié entre la République française et la cour de Rome ; vous deviez cependant freiner cette fureur, qui semble animer plusieurs ministres de cette cour, d’opprimer les hommes qui ont accueilli nos artistes ou servis nos ambassadeurs. » (1955, CGNB). Voir la lettre n°132.
[7] Monge exprime clairement dans quel projet il s’inscrit et que vise son action publique : transmission et progrès des sciences, perfectionnement de l’espèce humaine c’est à dire de l’esprit. Sur l’idée de progrès, voir les lettres n°3, 4 et 5.
[8] Voir la lettre n°113.
[9] Napoléon BONAPARTE (1769-1821)
[10] Sur le rassemblement à Livourne de tous les objets remis par le Pape à la France selon le Traité de Tolentino du 1er ventôse an V [19 février 1797], voir les lettres n°81, 92, 94, 95, 98, 102, 109, 110, 114 et 115.
[11] Jean-Guillaume MOITTE (1746-1810). Sur l’embarquement voir les lettres n°121 et 122.
[12] Claude-Joseph TROUVÉ (1768-1860). Il est le gendre du commissaire André THOÜIN (1747-1824). Secrétaire de légation à la cour de Naples.
[13] Jean-Simon BERTHÉLÉMY (1743-1811).
[14] Claude-Louis BERTHOLLET (1748-1822) est le dernier membre de la commission à quitter l’Italie fin novembre 1797. Voir la lettre n°138.
[15] MOINEAU ( ?- ?) domestique de Monge attaché à la commission.
[16] Fête de l’abolition de la royauté et de la naissance de la République.
[17] Charles-François DUPUIS (1742 -1809) auteur de l’ « hymne au soleil » et de l’Origine des religions. Voir les lettres n°39 et 104.
[18] Les préliminaires de Leoben signés le 29 germinal an V [13 avril 1797], prévoient que l’Autriche cède la Belgique et récupère la Vénétie. Et en effet, Monge, ancien ministre et examinateur de la Marine (voir la lettre n°118 et 132), voit juste lorsqu’il craint que l’Autriche ne devienne ainsi une puissance maritime dangereuse. Monge qui n’envisage pas encore le projet d’une expédition en Égypte ne comprend pas l’enjeu de la prise des îles de Corfou, Zante et Céphalonie en juin 1797 (voir les lettres n°90 et 110) ni même pourquoi la Vénétie révolutionnée (voir les lettres n°76, 84, 90, 93, 96 et 99) a pu constituer une monnaie d’échange avec l’Empereur, François II (1768-1835). Monge se montre alors ici sincèrement solidaire des révolutions en Italie et ne perçoit pas comme Bonaparte le mouvement italien de démocratisions comme un moyen de pression et un instrument de persuasion utilisable dans la guerre avec l’Empereur. Dès le 7 prairial an V [26 mai 1797], Bonaparte exprime au Directoire sa volonté de se saisir des îles ioniennes : « J’envoie le général Gentili avec 1500 hommes, 5 ou 600 Vénitiens et une partie de nos flottilles, pour s’emparer de Corfou, Zante et de Céphalonie. Pour Corfou je crois que nous devons irrévocablement le garder. » (1580, CGNB) Le même jour au général Gentili, il indique comment la France doit avancer masquée dans cette affaire : « Vous trouverez à Venise cinq frégates commandées par le citoyen Bourdé, et vous vous embarquerez avec vos troupes sur ces frégates er sur quelques autres bâtiments de transport, s’il est nécessaire, et vous partirez le plus promptement et le plus secrètement possible, pour vous rendre à Corfou et vous emparez de tous les établissements vénitiens au Levant. Vous aurez soin de n’agir que comme auxiliaire de la République de Venise et de concert avec les commissaires que le nouveau gouvernement aurait envoyés ; enfin, de faire l’impossible pour nous captiver les peuples, ayant besoin de vous maintenir le maître, afin que, quel que soit le parti que vous preniez pour ces îles, nous soyons dans le cas de l’exécuter. » (1582, CGNB). Enfin, Bonaparte exprime clairement au Directoire son projet d’une campagne en Égypte de Milan cinq jours plus tard, le 29 thermidor an V [16 août 1797] : « L’empereur paraît diriger toutes ses forces vers l’Italie ; les nombreuses recrues qu’il fait, jointes aux prisonniers qu’on lui a rendus, et qu’il a le temps d’exercer, le mettront dans le cas de m’opposer une armée formidable. […] Les îles de Corfou, Zante et Céphalonie sont plus intéressantes pour nous que toute l’Italie ensemble. Je crois que si nous étions obligés d’opter il vaudrait mieux restituer l’Italie à l’Empereur et garder les quatre îles, qui sont une source de richesse et de prospérité pour notre commerce. L’empire des Turcs s’écroule tous les jours ; la possession de ces îles nous mettra à même de le soutenir autant que cela sera possible, ou d’en prendre notre part. Les temps ne sont pas si éloignés où nous sentirons, que pour détruire véritablement l’Angleterre, il faut nous emparer de l’Égypte. Le vaste empire ottoman qui périt tous les jours, nous met dans l’obligation de penser de bonne heure à prendre des moyens pour conserver notre commerce du Levant. » (1908, CGNB) Sur ce même sujet, voir aussi les lettres du même jour à TALLEYRAND (1910 et 1911, CGNB). Voir la lettre n°131. Sur les différents projets d’une expédition en Égypte de la diplomatie française voir la préface de Fourier. FOURIER J. [1809] (1821) « Préface historique », Description de l’Égypte ou Recueil des observations et des recherches qui ont été faites en Égypte pendant l’expédition française, Paris, Pansckoucke, 1, i-clv. et HITZEL F. (1999) ; DUPOND M. (2014), “ The triangular relationship between science, politics and culture determined by the idea of progress and implemented through the Expedition to Egypt (1798-1799) ” in KATSIAMPOURA G. (2014), Scientific cosmopolitalism and local cultures ; Religions, ideologies, societies, Proceedings of 5th International conférence of the European society for the History of science, novembre 2012, Athens, N.H.R.F., pp. 409-417.
[19] La position de Monge est ici bien différente de celle défendue dans une lettre à Marey. Voir la lettre n°90.
[20] Monge quitte l’Italie dans la nuit du 26 vendémiaire an V [17 octobre 1797].
Bibliothèque de l'Institut de France (Paris).
Huart, Catherine (1748-1847)
[1] Lettre d’Émilie MONGE (1778-1867) et son mari Nicolas-Joseph MAREY (1760-1818) de Nuits, le 25 germinal an V [14 avril 1797] fonds Monge. Émilie annonce sa deuxième grossesse à son père :« […] maman ou (tatan) [Louise Monge] m’ont promis qu’elles viendraient vers ce temps pour assister à l’arrivée dans ce monde de ton second petit-fils, et il me serait bien agréable de vous posséder réunis pendant ce moment. […] On se trouve facilement heureux partout quand on a le bonheur de l’être dans son ménage, de ce côté tous mes souhaits sont remplis, mon mari est toujours le même à mon égard et par dessus tout cela, j’ai un enfant qui vient parfaitement qui court comme un petit homme voilà 3 semaines qu’il marche seul et il aura quatorze mois le 30 germinal. »
[2] Guillaume-Stanislas MAREY-MONGE (1796-1863).
[3] Voir la lettre n°93.
[4] Monge répond surtout à Marey. Dans sa lettre de Nuits, le 25 germinal an V [14 avril 1797], Émilie prévient son père de la nature de la lettre qui va suivre la sienne : « Mon mari va faire avec toi un grand cours de politique. Ce sujet peut s’étendre très loin, voilà pourquoi il faut que je te quitte, mon cher papa […] ». En effet Marey entame sans préliminaires : « J’ai besoin de m’entretenir avec vous de la chose publique, dans quelle âme verserais-je mes peines et mes alarmes si ce n’est dans celle du patriote zélé qui consacre toute son existence à la gloire et à l’utilité de sa patrie. 3 choses m’affectent ainsi que tous les Républicains de mon Département, les élections, l’esprit public et la composition des tribunaux. » Monge partage les inquiétudes de Marey et ce dernier sans le savoir répond précisément à la demande exprimée par Monge à Rome, le 5 floréal an V [24 avril 1797]. Voir la lettre n°85. Le 15 germinal an V [4 avril 1797], les Royalistes sont les vainqueurs des élections pour le renouvellement d’un tiers du Conseil des Cinq-Cents. Sur la montée des Royalistes et la réponse du Directoire avec le coup d’état du 18 fructidor , voir les lettres n°89, 110, 116, 118, 119, 127, 131, 132 et 135.
[5] Monge tient à rassurer d’emblée Marey alors qu’il émet des doutes sur la gloire de l’armée française en lui écrivant de Nuits, le 25 germinal an V [14 avril 1797] : « Mais nos pensées se reposaient du moins jusqu’à présent avec complaisance sur les armées. Fiers de leur gloire nous nous plaisions à vanter leurs exploits et surtout à louer leur républicanisme. Qu’avons nous vu au passage de la division de l’armée de Sambre et Meuse commandée par Bernadotte, des soldats sans contredit intrépides mais indisciplinés, battant, pillant les gens qui les logent, mettant à contribution les habitations écartées de la route, menaçant ceux qui les appellent citoyens, maudissant la république, préconisant la royauté ! Il y en avait de bons sans doute mais ce n’était pas le plus grand nombre. Je ne puis vous exprimer l’impression que cette disposition des esprits des soldats a fait sur les patriotes. Où est donc la République, se sont-ils dit, si elle n’est dans les armées ? Espérons que Buonaparte aura retrempé ces âmes inconstantes au foyer du civisme et de gloire qu’il entretient avec tant de zèle et d’habileté dans le sein de sa brave armée. » Voir la lettre n°89. Voir infra sur l’enjeu des victoires en Italie.
[6] De Nuits, le 25 germinal an V [14 avril 1797] Marey lui a écrit : « L’esprit public : Je ne vois partout que des trembleurs, des girouettes, et des royalistes, le peu de patriotes qui osent se prononcer, fussent-ils courageux, est honni, calomnié, et livré au couteau de l’aristocratie. La composition des tribunaux : partout l’on absout des royalistes tandis qu’on déploie la plus grande sévérité contre les républicains. Le croirez-vous Brottier Dunan, Lavilleurnois, conspirateurs avérés, pris en flagrant délit nantis de pouvoirs du soit disant Louis XVIII, avouant eux-mêmes leur crime, viennent l’un d’être condamné à 10 ans, l’autre à 4 et le dernier à 1 an de détention bien que l’embauchage ait été constaté d’une manière péremptoire. Comparer actuellement cette indulgence avec l’extrême sévérité déployée contre les malheureuses victimes de la plaine de Grenelles et juger de l’avenir par le présent ! » Charles-Honorine Berthelot de la Villeurnois. Maître des requêtes arrêté avec Malo et Brottier. Il a développé un plan pour le retour de la royauté et est arrêté en possession de divers documents qui prouvent son attachement à la monarchie et à Louis XVI. In BUCHEZ et ROUX (1838), Histoire parlementaire de la Révolution française, Paris, Paulin, p. 192. Marey développe ce sujet dans sa réponse de Nuits, le 15 prairial an V [3 juin 1797] : « Brottier, Laville-Heurnois, Dunan sont pris en flagrant délit de pouvoir du soit disant Louis XVIII. Ils conviennent de leur correspondance avec 3000 agents contre-révolutionnaires disséminés dans la France une commission choisie par le gouvernement les absout à peu près. Les Républicains exaltés d’un autre côté répandent des écrits bien criminels [mais qui paraissent être plutôt l’effet d’une imagination exaspérée et délirante que d’une (?) réfléchie.] [Samson] et Clarke, ils sont condamnés à mort. Je suis loin de désirer l’affusion de sang de qui que ce soit mais il me parait que l’on devrait pardonner aux coupables des deux partis ou les punir également. »
[7] Lorsqu’il s’adresse à son gendre, Monge prend soin de placer la France avant le perfectionnement de l’esprit en déterminant les motifs de son action. Dans la correspondance à sa femme, le perfectionnement de l’esprit est déterminé comme le but premier de son action. Voir la lettre n°3.
[8] Monge effectue une distinction entre son action révolutionnaire et celle de son gendre parlementaire. (Sur la grande différence entre le politique et le savant dans l’action publique voir infra.) Dans sa réponse de Nuits le 15 prairial an V [3 juin 1797] Marey souligne à son tour la spécificité de l’action de Monge déterminée à la fois par ses compétences et connaissances et par ses « principes », c’est-à-dire les principes sur lesquels l’idée de progrès est fondée que Monge lui a déjà longuement exposés (voir les lettres n°3, 4 et 5) : « Vous êtes appelés par vos talents, vos principes bien connus, et vos vertus à occuper quelques postes éminents d’où vous ferez jaillir quelques étincelles qui ranimeront peut-être un feu couvert d’une cendre bien épaisse. » Monge entame son action révolutionnaire par le ministère de la Marine (voir les lettres n°118, 127 et 132) et déjà les axes de son engagement dans la révolution sont les mêmes que ceux qui dirigent sa pratique scientifique et cela depuis plus de vingt ans. De la même façon, c’est l’objet et les résultats des recherches ainsi que la nature de la pratique des membres de la nouvelle communauté scientifique qui a permis la réalisation des grands ouvrages de l’œuvre révolutionnaire. L’organisation de la production de l’armement en 1794 a été possible grâce aux travaux menés par les savants autour de Lavoisier dès la fin des années 1770. (Voir les lettres n°3, 5, 46 et 108.) Catherine le souligne dans sa lettre du 19 germinal an VI [8 avril 1798] : « […] c’est alors que tes talents et ton activité ont été employés avec succès dans la plus profonde obscurité, il en est résulté des moyens de repousser nos ennemis qui nous cernaient de près […]. » La Géométrie descriptive de l’École normale et les Feuilles d’Analyse appliquée à la Géométrie de l’École polytechnique sont aussi des exemples d’élaboration qui précède la Révolution, publiée en 1795 leur élaboration a débuté dès 1765 à l’École du génie de Mézières. Voir la lettre n°1. Ces œuvres ne sont pas alors des « produits » de la Révolution, ni de ses conditions sociales, politiques, culturelles et institutionnelles. Les conditions spécifiques de la Révolution, notamment celles de la première phase, celles de la table rase ont été l’opportunité d’exposer dans le domaine public, de mettre en pratique et de réaliser les projets de réforme de la pratique scientifique et des institutions scientifiques en déterminant leurs nouveaux rapports avec les institutions de pouvoir. (Voir la lettre n°4.)
[9] Cela est même un principe de l’action publique de Monge, Catherine le cite dans sa lettre du 19 germinal an VI [8 avril 1798] : « Voilà pour l’intérêt général et pour te rassurer sur tes principes qu’il faut faire à son pays tout le bien dont on est capable sans s’attendre à la reconnaissance. »
[10] Marey répond à cette lettre de Nuits le 15 prairial an V [3 juin 1797] : « Vous avez la bonté obligeante de chercher à me consoler. C’est un soin superflu. Ce n’est pas moi qui ai besoin d’être rassuré. Familiarisé avec les calomnies, les peines, les dangers, les amertumes de toute espèce, je compte la vie pour peu de chose et la fortune pour rien. Il n’est aucun événement auquel je ne sois préparé de longue main. Quand mes ennemis m’ont déchiré comme ce vertueux romain, j’ai rendu grâce aux Dieux de ce qu’ils étaient obligés d’avoir recours au mensonge pour dire du mal de moi. Quand la fortune me tournera le dos, mes ressources sont assurées, je me surviendrai également à la fatigue du corps et à celle de l’esprit, Quand les lâches détracteurs des amis de la liberté m’attaqueront en face, je leur répondrai de la plume ou de l’épée, mon parti est pris là-dessus, peut-être même mes ennemis ont-ils acquis sur cela quelques notions positives, car j’entends à peine leurs vils bourdonnements et n’ai pas encore trouvé quelqu’un qui ait osé me faire le moindre reproche ouvert. Mais c’est, cher citoyen, les patriotes que je vois tous les jours qui me donnent de l’inquiétude autant sur leur sort futur que sur l’effet que pourrait produire un changement d’opinion amené par une habituelle persécution non réprimée par le gouvernement. Quand au bonheur domestique j’en jouis complètement. Personne n’est mieux partagé que moi. Tous les jours je me félicite de mon choix, et mon enfant sain, bien constitué et qui annonce d’heureuses dispositions vient encore ajouter à ma satisfaction tout ce que le sentiment de paternité pouvait lui prêter de charmes.»
[11] De son ministère jusqu’au sein même du Club des Jacobins, Monge a été inquiété et de tous les bords. La réaction thermidorienne comme les journées de Prairial (Voir la lettre n°1) ont été dangereuses pour Monge. DE LAUNAY L. (1933) p. 99 ; 124 ;135-136). Catherine évoque cette époque dans sa lettre de Paris le 19 germinal an VI [8 avril 1798] : « Les grandes crises sont arrivées, […] la mort planait sur toi, rappelle-toi l’intérieur de ton ménage pendant ces temps malheureux, […], ta persécution dans la réaction […]. »
[12] En restant sur sa position Marey répond à son tour de Nuits, le 15 prairial an V [3 juin 1797] : « […] un cœur sensible et vraiment attaché à sa patrie et à la liberté ne peut comprimer ses sentiments d’indignation et de pitié qui s’élèvent dans son âme à la vue de tant de vengeances exercées envers les fondateurs de la république sans que le gouvernement daigne opposer une digue aux projets homicides et contre-révolutionnaires des ennemis de la liberté. […] Lyon, Avignon sont des théâtres horribles de proscription tous les jours la terre est abreuvée du sang des patriotes, à tant d’atrocités le gouvernement n’oppose qu’un système d’inertie. De l’inertie grands dieux quand le sang coule ! Pour qu’elle occasion réserve-t-il donc son énergie ? Un bras de fer s’appesantit sur les patriotes à la moindre pécadille tandis que l’on promulgue l’indulgence plénière pour les crimes royalistes. […] Pardon cher citoyen de l’ennui que je vous donne par cette digression elle est amenée par la nouvelle que je viens d’apprendre de la condamnation à mort de Babeuf et Darthé qui tous deux sous les yeux de leurs juges se sont poignardés sans réussir à s’ôter la vie. Ils viennent d’être exécutés. Le jugement opposé à celui de Dunan Lavilleurnois etc. m’a fait naître des réflexions que je n’ai pas pu comprimer, il dit encore plus que je n’ai exprimé. Vous apprendrez avec plaisir que les Députés impliqués dans cette affaire et notamment Lindet sont déclarés innocents.»
[13] LYCURGUE (IXe siècle av. J.-C.), législateur de Spartes.
[14] SOLON (640 – 558 av. J.-C.) réformateur du système politique, fiscal et social athénien. Il s’exile sous la tyrannie de Pisistrate.
[15] En Chypre.
[16] Lucius Iunius BRUTUS (IVe siècle) neveu de Tarquin le Superbe, fondateur mythique de la République romaine.
[17] Monge n’envisage jamais de quitter son pays. Voir la lettre n°96. Et il prend soin après son ministère de mener son action publique au sein de commissions ; cela donne à son action une dimension collective, un objectif déterminé. Ainsi sans occuper un poste de pouvoir au sein de l’exécutif et tout en y étant directement relié afin d’assurer l’efficacité de son action et la réalisation rapide des projets. Marey répond à cela de Nuits le15 prairial an V [3 juin 1797] : « Lycurgue dîtes-vous fut obligé de quitter son pays. Il le fit volontairement et pour engager ses concitoyens à respecter ses lois ayant eu soin d’exiger d’eux qu’ils les observeraient jusqu’à son retour. Solon eut le chagrin de voir la tyrannie de Pisistrate s’établir sous ses yeux. [Zalicius] fut obligé de s’arracher un oeil, Charondas se donna la mort pour avoir violé involontairement la loi qu’il avait rendue. Romulus fut tué par ordre des Sénateurs. Chers malheureux bienfaiteurs de l’humanité tel est donc votre sort tandis que tant de tyrans et de despotes coquins meurent dans leur lit ? Je savais tout cela citoyen, et soyez sûr que je n’ai jamais compté en mon particulier que sur l’ingratitude toutes les fois que j’ai eu l’occasion de faire quelque bien. Il est cruel de le penser mais il n’est malheureusement que trop vrai que l’ingratitude est un vice nécessaire à une république. C’est la reconnaissance qui créa la tyrannie. Un général victorieux est chéri adoré, on le proclame roi. Bientôt il devient despote et tyran. Voilà les hommes. »
[18] Dans une lettre à Catherine, il les nomme « les vieux patrons de la Révolution ». (Voir la lettre n°127.) Monge insiste sur la nécessité d’un engagement durable. Voir supra. Marey au contraire après un mandat parlementaire, se désengage rapidement de l’action révolutionnaire. Après l’exécution de Louis XVI en 1793, il se retire en Bourgogne. (Voir la lettre n°3) De Nuits dans sa réponse, de Nuits le 15 prairial an V [3 juin 1797], Marey justifie l’éloignement des patriotes : « Cher citoyen, je ne puis me le dissimuler, une conséquence nécessaire de l’indulgence pour les royalistes est la sévérité la plus rigoureuse pour les patriotes ; une autre conséquence non moins juste de ce système sera l’audace des uns et le découragement total des autres. »
[19] De Nuits, le 25 germinal an V [14 avril 1797] Marey lui a écrit : « Quant à moi cher citoyen quelques soient les événements je veux suivre les destinés de la république, trop heureux de me sacrifier pour une si belle cause. Le soin que j’ai [ ?] d’éviter la vie molle et oisive me rend propre à figurer dans quelles circonstances il plaira à la providence de me placer. Par goût, je préfère la vie champêtre, et les occupations paisibles mais s’il faut défendre le palladium de la liberté, je me sens la force et le courage de le faire. Adieu cher citoyen. J’ai l’âme trop déchirée de tout ce que je vois pour pouvoir m’entretenir avec vous d’objets d’art et d’histoire. »
[20] La grande différence entre le politique et le savant dans l’action publique est la familiarité avec une pratique particulière : l’« application » des principes. Se confronter à la difficulté et la complexité que pose l’application d’un principe, c’est-à-dire sa mise en usage hors de son domaine d’origine et son perfectionnement n’est pas une situation inédite pour un savant de la deuxième moitié du XVIIIe siècle. Tout au contraire, c’est précisément dans ces conditions qu’il travaille. De même, c’est au moment les plus difficiles que Monge sort de la « spéculation » et s’engage dans l’action révolutionnaire alors que certains s’en détournent déjà. Catherine le lui rappelle dans sa lettre de Paris le 19 germinal an VI [8 avril 1798] : « Je parcours ta vie politique depuis 89. Les premières années de la révolution qui ont été les plus brillantes, se sont passées pour toi en spéculation sur le bonheur général et futur. Il y avait dans ces temps là trop d’hommes avides de gloire, pour que ta modestie et le soin de cacher tes talents mais non ton amour de la liberté te permissent de te mettre en avant, les grands dangers étant au comble, la plupart de ces hommes ont cessé de prendre part aux affaires, alors on t’a arraché de ton obscurité et à moi le bonheur dont nous jouissions si paisiblement depuis que nous avions celui d’être ensemble […]. »
[21] Il s’agit ici des Autrichiens et de l’Empereur François II.
[22] Selon les préliminaires de Leoben signé le 28 germinal an V [18 avril 1797], l’Autriche cède la Belgique et récupère la Vénétie( sauf Venise) en échange de la Lombardie. Voir les lettres n°119, 176 et 177.
[23] Voir la lettre n°84.
[24] Bonaparte écrit au Directoire de Triste le 11 floréal an V [30 avril 1797] : « Les Vénitiens se conduisent de plus en plus mal ; la guerre est ici déclarée de fait ; le massacre qu’ils viennent de faire du citoyen Laugier, commandant l’aviso le Libérateur de l’Italie est la chose la plus atroce du siècle. Le citoyen Laugier sortait de Trieste ; il fut rencontré par la flottille de l’Empereur […] ; il se battit une partie de la journée avec eux, après quoi il chercha à se réfugier sous le canon de Venise. Il y fut reçu par la mitraille du fort. Il ordonna à son équipage de se mettre à fond de cale, et lui, avec sa trompe demanda pourquoi on le traitait en ennemi ; mais, au même instant, il reçoit une balle qui le jette sur le tillac raide mort. […] Cet évènement n’est qu’un échantillon de ce qui se passe tous les jours dans la Terre ferme. Lorsque vous lirez cette lettre la terre ferme sera à nous. » (1521, CGNB) La mort de Laugier est un prétexte qui permet à la France d’attaquer Venise alors que quelques semaines auparavant les Français ne pouvaient pas ouvertement attaquer un état neutre et préféraient tenter d’obtenir la domination des territoires de l’État vénitien par la stratégie diplomatique. Voir la lettre n°76.
[25] Monge compte sur les nouvelles républiques italiennes pour renforcer la République en France.
[26] Selon Condorcet le luxe est « l’aiguillon de l’industrie ». CONDORCET [1795] (1988), p. 113.
[27] Tallien dans le Prospectus qui introduit le premier volume de la Décade égyptienne décrit d’une manière semblable l’usage de la presse par les acteurs politiques au cours de la Révolution : « Le règne de la liberté a multiplié en France le nombre des feuilles périodiques. La suite non interrompue des événements les plus extraordinaires, la discussion des plus grands intérêts, des questions les plus importantes durent nécessairement fixer l’attention, non seulement de la France, mais de l’Europe entière. Chacun voulait connaître jusqu’aux plus petits détails de cette révolution étonnante […]. Dans les premiers moments tous les papiers nouvelles étaient lus avec avidité : ensuite les factions, les partis s’emparèrent de ce puissant levier de l’opinion publique ; les journaux devinrent les échos de la calomnie, et n’offrirent bientôt plus qu’une arène où chacun se déchirait avec acharnement. », TALLIEN (1798), « Prospectus », La décade égyptienne, p. 5.
[28] Monge fonde son action révolutionnaire sur l’idée de progrès, idée qui détermine sa pratique scientifique depuis les années 1770. (Voir les lettres n°3, 4, 5.) Dans sa réponse de Nuits le 15 prairial an V [3 juin 1797], Marey donne un indice de l’engagement durable et inaltérable de Monge : « Si votre lettre m’était parvenue sans date je l’aurais crue écrite en 90. Elle respire ce saint enthousiasme qui animait alors les Français. Soyez respectable citoyen, la vestale de la révolution ! Conservez, conservez précieusement le feu sacré de la liberté. L’homme âgé embrasé de sa vive chaleur me représente l’Etna ce grand alambic de la nature rendant tous les éléments volcaniques sous les neiges éternelles qui couvrent sa cime. » Pourtant Monge à son tour perd un moment son enthousiasme avec la montée des royalistes en France. Voir la lettre n°119.
[29] 29 avril 1797.
[30] Voir supra. Sur les rapports entre Venise et la France voir les lettres n°40, 45, 84 ,93, 96 et 99.
[31] Ces deux îles ioniennes sont sous la domination de Venise. Bonaparte n’est pas autant attaché que Monge à la liberté que les peuples tentent d’obtenir. Voir la lettre n°119.
[32] François II (1768-1835). Le 29 germinal an V [18 avril 1797] signature des préliminaires de Loeben. Voir la lettre n°89.
[33] Voir la lettre n°66.
[34] Luigi BRASCHI ONESTI (1745-1816), neveu du Pape Pie VI, Giannangelo BRASCHI (1717-1799) et sa femme issue de la famille FALCONIERI.
[35] Famille du secrétaire d’état à Rome Giuseppe Maria DORIA PAMPHILI (1751-1816).
[36] Rodolphe KREUTZER (1766-1831). Il fait partie des adjoints de la commission nommés après le Traité de Tolentino signé le 1er ventôse an V [19 février 1797].
[1] Une discrète référence à l’idée de progrès en associant le régime républicain et progrès des sciences et des arts. Voir les lettres n°4 et 5.
[2] Deuxième référence à l’idée de progrès qui associe perfectionnement de l’esprit et bonheur de l’espèce humaine. Voir supra.
[3] L’Autriche, l’Angleterre et le Pape.
[4] L‘armée papale.
[5] Voir la lettre n°55.
[6] Napoléon BONPARTE (1769-1821). Voir la lettre n°57.
[7] Voir les lettres 57, 64 et 91.
[8] Voir le récit de sa mission à sa femme, lettre n°58.