Guizot épistolier

François Guizot épistolier :
Les correspondances académiques, politiques et diplomatiques d’un acteur du XIXe siècle


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Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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Paris, Mercredi 9 Juillet 1851
8 heures

Les journaux vous apportent le rapport de M. de Tocqueville. Tout a marché plus vite qu'on ne croyait. Il n’en sera probablement pas de même du débat. 55 orateurs inscrits, sans compter les incidents ! Le Président ne posera pas sa candidature à la présidence de la République plus clairement que M. Od. Barrot n'a posé la sienne à la Présidence du Conseil du Président réélu.
J’ai éprouvé tout à l'heure, en lisant ce rapport une singulière impression de surprise et de malaise. J'attendais toujours qu’il parlât des deux questions auxquelles le sort de ce pays est suspendu, la question socialiste et la question monarchique. Qui dominera dans notre société le haut ou le bas de la population ? Dans quel gouvernement s’arrêtera la France, la République ou la Monarchie ? Voilà de quoi il s’agit vraiment, et de cela presque pas un mot. Tout cela est renvoyé à l'assemblée constituante qui viendra, si elle vient. La crainte de la réélection inconstitutionnelle du Président et la mauvaise organisation constitutionnelle de la République, voilà les motifs dominants, et seuls développés de la révision ! Je ne connais pas de plus forte preuve de l'ineffable timidité et faiblesse des esprits et des cœurs. Il me paraît impossible que le débat public ne pousse pas plus avant. Qui sait pourtant ?
Voilà votre lettre de samedi. J'espère que nous avons ressaisi le fil et qu’il ne se rompra plus. L'absence est déjà beaucoup trop ; mais le silence dans l'absence est insupportable. Je suis content que vous soyez contente d'Ems. Et très content de ce qu'on vous a dit à Bruxelles. Cela confirme la lettre d'Aberdeen. Je n'espère que de ce côté-là un peu d'influence sur Claremont. Il se peut qu’on se soit trompé ici sur l'effet produit là par la lettre du comte de Chambord au moment du vote sur la proposition Créton, et c'est grand dommage. Pourtant, je doute beaucoup de ce qui serait arrivé, si le vote eût été autre. Les bonnes intentions auraient-elles suffi pour résister au courant ? Je n'ai rien de plus. Je suis resté chez moi avant-hier et hier soir, un peu souffrant. Cela passe. Moi aussi j'ai besoin de sortir de Paris et de changer d'air.
Dans son discours à Beauvais, le Président, en parlant de Jeanne d'Arc et de Jeanne Hachette, a dit, et trés vivement : " Elles marchaient en avant aux cris de vive le Roi ! Vive la France ! " Vous jugez de l'effet. Les Ministres ont retranché, cette phrase dans Le Moniteur. Adieu. Adieu. J’ai ce matin chez moi, à midi, le baptême des mes deux petites-filles. Je vais faire ma toilette. Adieu. G.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23014_00161.jpg
Schlangenbad Vendredi 8 août 1851

Ah la vilaine chose que l'absence & les postes allemandes. Rien, rien de vous hier. Je crois vraiment qu'on me vole vos lettres pour les garder et les publier un jour. Je fais du fracas à droite et à gauche. Enfin je vais demain moi-même à Francfort. Voyons comment cela me réussira. Tous les Metternich jeunes sont venus ici voir Marion. On ne parle que des inondations. Le Rhin a quadruplé. Le soir je m'en suis assurée, moi-même en conduisant Ellice jusqu’à Biberich où il a dû s'embarquer ce matin. A Bade il y a eu des dégâts effroyables. Le chemin de fer coupé. Les ponts emportés.
Duchâtel m'écrit de Paris. Il trouve tout bien gâté. Votre prince de Joinville a fait de la belle besogne et Changarnier aussi. Enfin si tout cela tourne au profit de la réélection du président je n’en serai pas fâchée. On serait bien avec une tête comme Joinville !!
La mienne me fait toujours mal, mais elle ne me fait pas faire de sottises encore. Adieu. Adieu. Constantin m'écrit qu'il a grand peur qu'on ne donne pas de passeport à mon pauvre Alexandre. Quelle tristesse cela va lui faire. Je suis bien troublée de cela. Je cherche le moyen de lui être utile. Adieu.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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63 Val Richer. Mercredi 10 Mai 1854

Le rapport du général Osten-Sacken est, au fond, d'accord avec ce qu’on nous a donné de celui de l'amiral Hamelin. Evidemment, les batteries du port de pratique d'Odessa ont été détruites, et les vaisseaux contenus dans ce port, ainsi que les magasins militaires incendiés. Je conclus aussi que la tentative de débarquement a peu réussi. A tout prendre, la flotte Anglo-française me paraît avoir fait ce qu’elle voulait. Je suppose que les journaux Anglais donneront plus de détails. Mais je n’ai ici que le Galignani qui ne répète que ce qu’on lui permet.
Vous ne penserez plus à ce premier incident de la guerre quand vous lirez ce que je vous en dis. Il sera arrivé depuis je ne sais quoi. Voilà l'absence. Nous aurions de quoi bien alimenter nos conversations du bois de la Cambre. Il fait très beau ce matin ; la promenade y serait charmante.
Voici un article de la Correspondance d'Havas qui vaut la peine d'être lu. C’est le sens que le gouvernement veut faire attacher aux deux camps qu’il vient de décréter 100 000 hommes sur la frontière du Nord ne peuvent être indifférents à la Prusse. Si la guerre se prolonge, les puissances Allemandes ne parviendront pas à rester neutres. On finira peut-être, à Vienne, par ne pas trouver Hübner trop anti-russe. Du reste Hübner à Vienne et Hübner à Paris, ce sont deux choses ; j’ai peine à croire qu’à Paris, il soit autre chose que ce que veut son gouvernement c’est-à-dire son Empereur. Mais quand les situations deviennent grandes et fortes elles n'admettent pas le double jeu. Adieu, adieu. On me dit que Paris devient désert. J'y retournerai. Mercredi prochain. Ecrivez-moi lundi 15 à la rue de la Ville L'évêque. J'y serai jusqu’au 26.

Midi
Je me suis déjà chagriné pour vous de ces deux jours sans lettres. L’ordre est rétabli aujourd’hui, et vous en aurez une tous les jours. Adieu. Adieu. G.

Auteur : Guizot, François (1787-1874)
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86 Val Richer. Lundi 3 Juin 1854

Je ne sais où je vous écris, ne sachant pas à quelle heure vous partez après demain de Bruxelles et si vous pouvez y recevoir encore cette lettre. L’absence a mille petits déplaisirs.
Quand vous serez établie à Ems, faites-vous lire, par Mlle du Cerini, Madame de Sablé de M. Cousin. Cela vous amusera, et elle avec vous. M. Cousin exploite un peu trop sa passion pour Mad. de Longueville ; il la débite en détails dans la Revue des deux monde, puis en gros dans de gros volumes. Mais peu vous importe. Je ne suppose pas que vous ayez lu Mad. de Sablé dans la Revue des deux mondes.
Les lettres du général Brown et de Lord Raglan démentent-elles ou confirment-elles ce qu’on vous a dit sur les mésintelligences qui se glissaient dans les armées à la suite des mésintelligences entre les ambassadeurs ?
Nos marins de la Baltique sont charmés, de l'accueil que leur font les Danois. Il y a encore là des souvenirs du bombardement de Copenhague. On est bien aise que la flotte Anglaise ne soit pas seule. Il me paraît que vous aurez bien à faire en Circassie ; tous les forts que vous aviez construits là, à chaque progrès que vous faisiez dans le pays sont ou détruits, ou au pouvoir des Circassiens.
Je vous écris là une sotte lettre. Je n’ai rien à vous dire. Je n'aurai point de journaux et matin. Il est pourtant sûr que, si nous étions ensemble, nous aurions des conversations intarissables.

Midi
Voilà votre lettre. Vous avez raison de vouloir 3, 6, 9 et Génie aurait dû y penser. Je trouve indispensable que Mlle de Cerini l’apprenne elle-même à lire haut en Français. Elle parle très bien ; il ne doit pas lui être difficile de lire. Adieu, Adieu. Le courrier ne m’apporte rien. Adieu. G.
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