Guizot épistolier

François Guizot épistolier :
Les correspondances académiques, politiques et diplomatiques d’un acteur du XIXe siècle


Votre recherche dans le corpus : 121 résultats dans 3296 notices du site.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00328.jpg
69 Paris le 5 octobre 1853

Nous voici au plus mal. Le Divan a décidé la guerre. la proclamation Le 26 7bre sa paraître, et les flottes seront entrées. Greville qui me mande cela ajoute que cela met à néant toutes les négociations.
La note autrichienne d'Olmentz était très acceptable. On en jugeait ainsi ici. Mais on se croyait sûr que l'Angleterre n'en voudrait pas, dès lors on ne se prononçait pas. Car le parti est pris de faire & dire comme l'Angleterre. Vous voyez les meetings et le ton. C’est devenu général. J’ai vu Morny, très bien toujours et parlant très bien de la dispo sition toujours pacifique de son Empereur. Je n’y crois plus beaucoup, il est dominé par l'Angleterre et ne fera que cette volonté !
Fould qui est venu hier est noir. Il se plaint de toute nos mauvais procédés, et [?] trouver qu’il n’y a plus de quoi nous ménager. Ainsi l'Emp. Nicolas a invité les officiers Français à venir à Varsovie. Je pense que c’est une politesse, on y a répondu par la défense de s’y rendre. Ceci me paraît un bien mauvais symptôme. Les ministres anglais vont délibérer toute la semaine, Lansdowne est parti d'ici détestable. J’imagine que Lord Aberdeen tombera, qu'on rassemblera le Parlement et qu'on nous déclarera la guerre. Tout cela peut être fait d'ici à 3 semaines au plus tard.
Si les Turcs nous attaquent et nous battent vous concevez que nous sommes obligés de prendre une revanche éclatante. Si nous les battons nous en serons plus exigeants. Ainsi là cela doit aller mal. Le conflit est possible malgré la saison & le désavantageux pour les attaquants. Mais on ne peut plus retenir les troupes asiatiques. Elles servent gratuitement, pas un soldat ne veut être payé, et le gouvernement turc ne paye plus un seul employé civil. Tout est consacré à la guerre sainte. Ils sont plus forts numériquement que nous. J’ai la tête abîmée de tout ce que j’entends, et de tout ce que je prévois.
Je suis toujours bien aise que vous ayez écrit à Aberdeen. Mais je crois le mal sans remède. L'Angleterre veut la guerre elle a fait son calcul, & elle y trouvera son profit en définitive. Je n'y vois pas le vôtre. Car la révolution vous dévorera comme elle va dévorer les voisins. Quelle fête pour tous les artisans de troubles, & que les sages de la terre sont fous ! Que d’injustices, que de fautes ! Et moi donc que vais je devenir ? Adieu. Adieu.
P.S. Le grand conseil ayant décidé la guerre abandonne aux ministres Turcs le moment & le mode de la proclamer. Ceci pourrait donner quelque répit. On tiendra un grand Cabinet conseil à Londres après demain vendredi et la reine revient le 18 seulement.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23017_00017.jpg
3 Bruxelles lundi 27 février 1854

Vos lettres sont ma seule joie. Continuez-les je vous en prie. Je n’ai pas bougé depuis mon arrivée, ma toux est beaucoup augmentée, mes yeux aussi me font mal. J’ai beaucoup de courants d'air dans mon appartement. Je ne parviens pas à m'en garer. On vient assez me voir, beaucoup même mais cela ne me plait pas. Montalembert seul me plait & il part ce soir. Van Praet est toujours ma préférence et est vraiment très agréable.
Les nouvelles Allemandes nous sont très défavorable, nous aurons tout le monde contre nous. Je crains qu’au lieu d’intimider cela n’aggrave l’obstination. Clarendon a fait un remar quable discours.
Mardi 28 Le duc de Saxe Cobourg arrive aujourd’hui. Il se rend à Paris où sa visite annoncée fait plaisir. Khiva est décidément pris. Et mon Empereur décidement bien en colère contre les Allemands. Je vous remercie de me dire l'emploi de vos journées. Je veux pour vous de la distraction mais point d'habitude. Mes soirées éparpillées. Ah que je pense à tout cela ! & si on me regrette, jugez comme je regrette à mon tour ! Avant hier je me suis pris à pleurer. J'en ai encore mal aux yeux. aujourd’hui. Quelle chute !
Pourquoi le journal des Débats me fait-il faire des visites à Chreptovich & Kisseleff ? Imaginez, débarquant & courant tout de suite ? Le fait est que je n’ai pas encore bougé de ma chambre et quand je bougerai ce sera pour prendre l’air. S'il y en a jamais de prenable. à Bruxelles, mais certainement je ne ferai visite à personne. Il fait très froid et tout a l’air si triste ! Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23017_00114.jpg
23 Bruxelles le 7 avril

Je vais vous quereller. Vous vous faites meilleur que moi en cas. Vous me dites : " Malgré ce qui me manque, je jouis de ce qui m’est donné. " Faites moi l’amitié de me dire ce qui m’est donné. Mais je sais que vous avez un home, des enfants, et des yeux.
Hier soir, Brunnow, Van Praet, Le prince de Ligne & Mad. Villers qui me raconte son dialogue à dîner avec le Maréchal Vaillant. La promenade au bois avec Hélène a été bien sérieuse. Je me suis fait lire la discussion. Chasseloup a bien parlé. Montalembert a été bien imprudent. Je conçois que tout ceci ait fort animé Paris pour un jour. Je n’ai pas un mot de Constantin. Je ne conçois pas cela. Brockausen attendait encore hier au soir le courrier de Berlin qui devait passer ici le 3. Des lettres de Pétersbourg disent que l’[Empereur] a dit à la table ronde chez sa femme. " Je puis très bien m’arranger avec les Turcs s'ils imaginent les Chrétiens, mais avec les Anglais c’est autre chose." Adieu. Adieu.
Je suis plus triste aujourd’hui qu'hier cela ira comme cela. Adieu & Je vous écris par le Pce de Ligne. Dites moi si vous avez reçu ce N°.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00054.jpg
11. Paris le 6 juin Lundi 1853

Rien de nouveau. Toute la diplomatie chez moi hier soir pas l'ombre de nouvelles nouvelles. On ne peut connaître qui jeudi le Pétersbourg décisif, la paix ou la guerre. L’attente & l’inquiétude sont énormes ce qui n’empêche pas qu'on n'aie bien ri chez moi hier, Heeckeren faisait les Frais.
2 heures
Grosses nouvelles. L’ordre est donné à la flotte de Malte d’aller aux Dardanelles. La vôtre la joindra. L'Empereur de Russie a dit aux [?] d'Angleterre qu'il insiste sur l’acceptation immédiate & sans condition de l’ultimatum de Menchikoff.. Voilà où nous en sommes venus. Croyez-vous encore à la paix ? Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00188.jpg
38 Schlangenbad le 28 juillet 1853

J'ai eu quelques surprises ces jours ci. Le Prince Emile est venu ici avant hier pour quelques heures. Nous avons beaucoup et agréablement. bavardé. Hier la reine des Pays-Bas pour deux heures seulement, elle est venue les passer presque en entier chez moi. Je n’avais pas l'honneur de la connaître. Elle n’est plus belle ; très réservée, donnant peu son opinion, mais curieuse, contant bien et me laissant d'elle une impression très agréable. Le peu qu’elle dit est très spirituel. On voit que son père l’adore. Et puis imaginez Mad. jeune Rothschild tombant. ici avec le [général] Changarnier, les vieux sont ici. Ils lui font visite pour quelques jours. Changarnier est venu me voir. Engraissé, tranquile, sensé, non seule ment aucune aigreur, mais des bonnes paroles, rendant justice. Fort occupé de la question d'Orient. Trouvant que son empereur se conduit bien là dedans. Blâmant un peu le mien. Nous n’avons pas parlé de la France.
Madame jeune ne se gène pas, qu’est-ce que dira le [Paron] ? Marion est très amusée. Elle est allé dîner chez eux pour avoir le plaisir de se disputer avec [Changarnier] mais il n'y a pas sur quoi, il est ou très discret, ou un peu converti. En tout cas très patient.
Lord Greville m'écrit très tristement. On s’impatiente en Angleterre. On veut un dénouement immédiat, ou bien la guerre. On commence à avoir de grands soupçons. Moi je reprends toutes mes inquiétudes. Au fait elles ne m'avaient jamais tout à fait quittée. Le temps est toujours orageux ma santé la même, je n'ai pas à m'en vanter. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00067.jpg
14. Paris le 9 juin 1853

L'Empereur donne encore à la porte huit jours de délais pour accepter les propositions du Prince M. Si elle refuse encore, nous entrons dans les principautés. Ceci est parti de Pétersbourg, il y a 6 jours. Tout compris il faut attendre trois semaines à Pétersbourg pour savoir la réponse de la porte. Voilà où j'en suis. Je suis mécontente de tout et tout le monde l'est.
Vous êtes sages ici. En Angleterre on ne l’est pas. Cela ira mal. Adieu je fais mes paquets, je m’agite. Je ne dors pas. Adressez encore à Paris. Je vous dirai demain le jour de mon départ. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23017_00099.jpg
19 Bruxelles le 26 mars 1854

Evidemment la nouvelle donnée à Hélène est fausse mais c’est étrange. Brunnow est venu chez moi à son débotté avant d’avoir vu aucun de ses collègues. Il se disait ignorant de l'objet de sa venue. Chreptovitch qui était à la chasse tenait les dépêches enfermées chez lui. Il sera plus édifié aujourd’hui. Le ministre d'Angleterre n’est pas inquiet. Il ne peut voir dans tout cela qu'une pensée de paix. Mais comment la concevoir aujourd’hui ? Lord Howard. a rencontré chez moi Brunnow, très bien ensemble. L'Anglais est très aimable pour moi. Je suis le dernier fil, car on ne va plus les uns chez les autres.
Vous trouverez votre chambre à Bellevue. C’est rempli mais je me suis assuré de ce qu’il vous faut. Que je serai aise de causer, d'entendre. du bon français d’abord ! N’allez pas vous ennuyer ici, cela n’est pas bouffon. Tout ce que vous me dites sur nos affaires & notre conduite. est admirable de vérité. Je vois bien que même les Russes. pensent comme vous là dessus, mais il n'osent pas se le dire. En attendant l'exaltation est énorme en Russie. L’Empereur en visitant Cronstadt a fait faire en sa présence l’essai d'un nouvelle invention épouvantable comme destruc tion. Cela a parfaitement réussi. Il a ôté son casque ici en disant : " Venez messieurs les Anglais, nous sommes prêts. " Voyez-vous tout cela je le trouve abominable. Décidément je ne suis plus bonne qu'au peace society.
Le temps est fort laid, froid ; mettez-vous chaudement. Au reste les voitures sont chauffées sur le chemin de fer. Vous me direz par quel convoi vous comptez partir. 7 du matin vous amène ici à 2. C’est le plus accéléré. Celui de 11 1/2 n’arrive qu'à 10 1/2. Ne prenez pas celui du soir vous seriez trop fatigué le lendemain. Vous l’étiez tant en venant du Val Richer. Adieu, quel plaisir de m’occuper du bout de la semaine.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23017_00087.jpg
17 Bruxelles le 22 mars 1854

Quel ennui que ce N°15 égaré ou retardé ! Je crois que j’y répondais à votre charmant projet de me me voir. J’accepte la date avec bonheur. Dites-moi quand vous aurez reçu cette lettre chanceuse. On est très vif ici à propos de la nouvelle de Constantinople. Certainement l'envoi des troupes dépendait des consentements de la porte à la demande d'émancipation des Chrétiens. Si cette émancipation est vraiment obtenue et on y croit, et si mon empereur à la bonne foi & le bon esprit de s'en tenir pour satisfait voilà la guerre évitée, mais c’est trop beau pour croire à ce facile dévouement.
Lord Holland & M. Barrot se sont rencontrés chez moi hier, bien contents & tous deux bien pacifiques. J’ai été très contente du langage de l'Anglais, un grand changement depuis huit jours. Le français avait toujours été convenable et bien. On annonce Brunnow pour aujourd’hui. Quelle curieuse correspondance que celle qu’on vient de produire au parlement. Pauvre dépêche que celle de lord John, mais quel entrain de mon empereur. Dites-moi je vous prie votre avis de tout cela. La publi cation ne me paraît pas une chose bien inventée, pourquoi avons-nous provoqué cela ? à tout instant je me sens le besoin de vous interroger, de vous entendre. Je n’ai pas encore lu cette correspondance jusqu'au bout. Mes yeux sont très capricieux. Je les croyais mieux, ils sont repris. Le temps est froid. Je serai charmée de vous savoir revenu à Paris.
Adieu. Adieu, je suis restée deux jours sans vous écrire à cause de votre absence. J'ai eu peut être tort, mais je croyais que mes lettres reposeraient à Paris. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23017_00077.jpg
15 Bruxelles le 18 mars 1854

Je vous ai écrit hier par une occasion. Au fond les occasions sont des bêtises c’est toujours plus incertain et plus lent que la poste, et comme je ne me compromets pas en disant ce que je pense, parce que je pense très bien, on me dit quelquefois trop bien, j'en resterai à l’ordinaire. Rien de nouveau. Mon neveu a reçu l’ordre de rester à Berlin, cela me fait plaisir. Il est évident que le rappel était de la bouderie pour la cour de Prusse, & que l’ordre contraire prouve que nous sommes content d’elle. L’Empereur est allé à Sveaborg. Je crois vous avoir dit cela. Une énorme activité dans nos préparatifs maritimes. Je crois qu'on se fait des illusions à l’Occident. Nous sommes & nous serons très forts et très persistants, et toujours plus forts à la longue. Ah mon Dieu qu’on fasse donc que cela soit court.
Pas de Brunnow encore ce qui est drôle. Votre empereur me disait " quelques coups de canons & tout sera fini." Que je voudrais qu’il eût dit vrai ! Van Praet tous les jours. Brouckère souvent. Tous les diplomates presque quotidiens, voilà mon régime. Pas de conversation comme était mon habitude, ah que je ferais des coquetteries à la moitié des derniers de ceux que je voyais tous les jours ! Je pense même à Chasseloup Laubat. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23017_00074.jpg
14. Bruxelles Vendredi le 14 Mars 185

Il se fait un grand travail pour disposer mon empereur à se reconnaître satisfait, le cas échéant de l'émancipation religieuse et civile des Chrétiens à laquelle la France & l'Angleterre travaillent activement à Constan tinople. Il serait fort utile que vous m'en disiez un mot dans votre prochaine lettre. De ces paroles qui frappent et comme vous seul savez les dire. Beau rôle à jouer que de rendre la paix au monde, et d’attester par là que ce n’est ni son ambition ni son amour propre dont il recherchait la satisfaction. S’il dit " Je suis content & je le prouve en sortant des principautés", tout est fini, tout le monde est heureux, & si l'Angleterre osait ne pas être satisfaite c'est contre elle qu'on se retournerait. Voilà l’opinion de mon long tête-à-tête l’autre jour. Le Roi a reçu une excellente lettre de mon empereur. Elle atteste son désir à présent, toujours de faire la paix. J'y vois ainsi une grande confiance dans les opinions du roi.
Je vous prie causez avec moi familièrement sur le texte que vous dis. Grand à propos. Voici votre lettre et vous me dites tout juste ce que je vous demande. Cependant je veux encore ; même familiarité de style, et puis du stimulant sans rien de blessant. J’ai envoyé votre N°16 qui était bon et utile, la critique de nos prières. Il faut que nous écoutions la vérité. S’il n’y avait pas des sifflets j'enverrai celle-ci aussi. Les autographes font toujours meilleur effet que les copies quand il n'y a rien de préparé, ainsi pas de princesse.
Votre projet de visite m'enchante ! Barrot vient me voir souvent, & me prie de vous offrir ses hommages. Vous le confondez avec son frère. Il n’a jamais été député. Il s'appelle Adolphe et a longtemps servi sous vos ordres, il parle de vous avec beaucoup de respect et de reconnaissance. Lord Howard vient beaucoup aussi, je suis très bien avec tous les deux. Ils ne voient plus du tout Chreptovitch & Kisseleff. Celui-ci a fini avec moi complètement ; c’est incroyable. Vely Pacha est ici logé sous le même toit que moi et toute la Russie car il y a K. Hélène, mon fils & deux autres familles Russes. Lady Palmerston m'écrit de bonnes lettres affectueuses. Ah que je vais me réjouir de vous recevoir. Comme je me sens triste du présent, de cet avenir si incertain si sombre, car je n'ose rien espérer, les proportions de cette guerre peuvent devenir énormes. Cela fait frissonner. Brunnow n’est pas arrivé encore. Dépêches et lettres s’attendent. Adieu. Adieu. Merci mille fois de Cromwell.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00090.jpg
18 Ems Samedi le 18 juin 1853

Je suis arrivée très fatiguée, et je ne me repose pas encore. Demain je commence les bains. Il n'y a à Ems personne, jolie perspective. Mon fils meurt d'ennui. Il y a de quoi, il me quittera demain probablement et je ne pourrai pas lui en vouloir.
Nous nous nourissons des journaux. Je ne sais que penser de la grande affaire. Où va-t-elle nous mener tous, l'Europe entière. Il est parfaitement clair que c'est au fond rien ou peu de chose & que Lord Redcliffe seul lui a donné le caractère & les proportions que nous voyons. Je suis comme vous, je ne crois pas à la guerre. & cependant je ne comprends pas comment on pourra se tirer de là sans y recourir. Marion est très shy avec Paul. C'est étonnant comme il lui impose, et il est cependant charmant, & gai & amical. Pas de nouvelles de Constantin.
La Reine Amélie ne viendra pas à Bruxelles pour le mariage du duc de Brabant Elle n'y vient pas non plus pour la confirmation de la princesse Charlotte. Je tiens tout ceci du roi, qui met le plus grand soin à éviter tout ce que pourrait donner ombrage ou déplaire, & qui regrette seulement qu'on se livre à son égard et à l’égard des autres aussi à des soupçons parfaitement injustes, car bien certainement il y a bienveillance pour le gouvernement de France actuel, à Bruxelles à Vienne, à Berlin, à Pétersbourg. Partout la méfiance est très mal placée. Et peut entraver le bien. Adieu. Adieu, envoyez moi des nouvelles et des commentaires.
(Greville me mande que Walewski montre la plus grande joie. Quoiqu’il arrive la bonne entente est rétablie entre la France & l'Angleterre. Les partis orléanistes et légitimistes se montrent très contrariés de cela. L'Emp. de Russie qui ne voyait pas ce rapprochement possible aura été très contrarié en l’apprenant. En [Angleterre]. personne ne croit à la guerre. Mais on trouve la situation de l'Emp. difficile & on cherchera à l’en faire sortir sans trop déroger. Adieu.)

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00095.jpg
19. Ems le 20 Juin Lundi 1853

Mon fils m’a quitté avant hier soir. Me voilà vraiment sans une âme. Je n’ai pas voulu le retenir. Il a été bien & charmant. Plus longtemps j'aurais trop vu l'ennui, je n’ai pas voulu abuser. Je n’attends personne. Quelle jolie perspective ! Je commence à m'alarmer vraiment. Les chances de la guerre sont grandes, car rien ne peut satisfaire mon empereur qu’une satisfaction directe, écla tante ; et le firman pour tous les cultes n'est pas cela.
Je me suis un peu orientée sur ce qui s’est passé chez nous. Au fond Nesselrode n'était pas d'opinion d'envoyer le Prince Menchikoff. C'est l'Empereur qui l’a voulu. Cet ambassadeur a été cassant, hautain. Redcliffe est venu brochant sur la mauvaise humeur des Turcs. Des querelles de visites ont aigri l’un contre l’autre les deux ambassadeurs. Menchikoff a été maladroit en toutes choses et lorsque enfin la place n’a plu été tenable, il a mis sur le compte des faiblesses de Nesselrode la décadence de notre influence auprès de la porte, ce qui avait préparé sa défaite. L’[Empereur] a reproché à Nesselrode tout le passé des dernières années. Et la scène a été vive dit-on. M. Le ministre a voulu racheter cela par une rédaction très insolent de sa note à Rechid Pacha. Nous allons en apprendre le résultat après-demain. Sans doute la porte nous répondra par un refus, nous entrerons dans les principautés. Je crois savoir que ce ne sera pas cas de guerre aux yeux de l'[Angleterre]. & de la France, à moins que cela n’ait changé depuis mon départ de Paris.
Voici une lettre de Greville qui vous intéressera. Nous sommes dans une position très embarrassée. Dans tous les cas notre bonne situation en Europe restera bien endommagée ; mais je le répète je crains plus que cela.
La mort du Nonce m’a vraiment beaucoup affligé. Marion en pleurs. C'était un brave homme. si tolérant, si doux, si facile & fin. Il pleut à verse aujourd’hui. Pas de promenade, pas une visite. J'ai commencé les bains. Nous verrons dans quelques jours comment ceci me convient. Adieu. Adieu.
Nous sommes bien loin. Vos lettres m'arrivent en quatre jours. Comment vont les miennes ? Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00121.jpg
24 Ems Jeudi 30 Juin 1853

Dans les grandes choses, votre esprit & votre jugement sont merveilleux. Vous voyez que je parle de la lettre où vous appréciez la dépêche Nesselrode. Je l’ai envoyée au correspondant que vous savez. Il en sera très frappé. Elle était trop grosse pour le quartier général, je crois cependant qu’elle y fera son chemin par ce détour. Évidemment on fait les derniers efforts pour négocier un arrangement, mais je ne comprends pas que mon Empereur puisse céder, car ce qu’il demande est après tout bien peu de chose. Je n’ai pas de lettre ici de Londres, ni de Vienne qui sont mes deux bonnes sources.
La pluie a cessé Dieu merci. J'ai pu recommencer les bains. Je vois chez moi le soir quelque fois le prince de Prusse, roi un jour. Il a 22 ans, agréable, et bon enfant. Voilà tout ce que j’ai pu attraper, il n'y a absolument personne. C'est à périr.
2 h. Une longue lettre de Greville, très noire pour nous. Il croit qu’on négociera entre Londres & Pétersbourg plutôt qu’à Constantinople. Mais là le sultan ne veut entendre à rien, c.a.d. que Redcliffe veut cela. Greville reconnaît que l’[Empereur] ne peut pas reculer. Quelle mauvaise affaire ! Je crois que si vous & mon correspondant de Vienne vous vous rencontrez, vous trouverez moyen de nous en faire sortir. Vous comprenez comme tout ici me tracasse.
M. de Budberg me mande de Berlin, que selon les lettres de Brunnow le Cabinet anglais a abdiqué ses pouvoirs entre les mains de Lord Redcliffe.
Adieu. Adieu, je ne pense et ne rêve qu'à ce maudit Orient, et à vous. Adieu

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23017_00038.jpg
6. Bruxelles samedi 4 mars 1854

Votre lettre d’hier reçu à mon réveil m’a fait du bien. Un coeur ami pense à moi aujourd’hui. Triste, triste jour, et lorsque tout est si triste ! Le vide autour de moi. Ce que vous me dites sur mon compte est bien vrai. Je suis surprise que vous m’aimiez puisque vous me connaissez si bien. Ah que je me sens malheureuse et aujourd’hui avec redoublement.
Je ne sais aucune nouvelle de l’extérieur, Van Praet n'en avait pas hier soir. Il est très soigneux de moi, et voudrait me distraire. Il m’a amené hier le général Charal. Belle figure, bonne tenue & bonne conversation. Je vous ai dit que Brokham le prussien est mon favori. Tous les autres le mien inclus sont bien peu de chose. Je suis prés de Paris voilà tout le mérite de Bruxelles.

4 heures. On m'annonce. une occasion Prussienne. Je voudrais avoir quelque chose à vous mander, mais il n’y a rien. Je ne sais si vos journaux donneront la lettre de mon empereur ; dans le doute je vous l'envoie. Elle me semble bien modérée, et attestant encore le dîner de la paix ; c'est beaucoup après le ton provocateur de la lettre de l'Emp. Napoléon.
M. Barrot est venu chez moi aussi, c’est le dernier diplomate qui me manquait. Il me plait parce que c’est un français. Ah que j'aime les Français ! mes yeux ne vont pas bien. Le roi Léopold voulait me voir chez lui au Palais. J’ai refusé, ce n’est pas dans nos mœurs. J’irai à Laken un matin. Dans ce moment il est dans son château des Ardennes. Il ne peut pas de son côté venir dans une auberge. Pourrez-vous me dire ce que vous pensez de la lettre de mon empereur ? Je la trouvé vraiment bien faite, mais j’en serai plus sûre si vous me le dites. Hélène vous dit mille souvenirs. Adieu. Voici aussi le manifeste.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23017_00032.jpg
5 Bruxelles le 3 mars 1854

Voilà votre N°6. Je la reçois au moment où il me faut envoyer celle-ci. Mes yeux allaient mieux hier, moins bien aujourd’hui. Le journal de St Pétersbourg. contient la réponse de mon empereur, vous allez la lire à Paris sans doute. Vous m'en direz votre avis. (sans prévention & vous savez bien que je n’en ai pas.) Moi, je la trouve très bien.
Van Praet m’a fait lecture hier soir du discours de l'Empereur Napoléon. J’ai toujours besoin de réflexion, et mes yeux m'ont empêché de le relire moi-même. Il me semble qu'il y a bien à éplucher. L’Allemagne bien engagée, l’intérêt français en relief. Le discours plaira aux masses. Le pain y joue un plus grand rôle que la guerre. Que ne suis-je à Paris pour vous entendre tous sur le discours, sur la lettre, sur toutes choses. Ah que le pluriel me manque ! Je vous laisse à penser si je regrette le singulier !
J’ai vu hier soir le prince de Ligne & M. de Brouckère m'ont empêché de le relire. Il a de l’esprit, et agréable. Van Praet est chez moi tous les soirs. Il me soigne et me plait bien. Le ministre de France est venu sans me trouver, j’ai pris l'air hier quoiqu'il fait bien froid. Lord Howard aime à venir causer avec moi, il est intime et facile. Le ministre de Prusse est ma meilleure pièce. Kisselef est celui de tous que je vois le moins. J'en reste très étonnée. Chreptovich très soigneux mais que d’heures de solitude et d'ennui & de soupirs. Adieu. Adieu. Ecrivez-moi je vous prie, je n’ai de plaisir que vos lettres vous le savez bien. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23017_00012.jpg
2. Bruxelles Dimanche 26 février 1854

Merci du triste N°1. Quel brave homme que le duc de Broglie ! Je vois bien que mon chagrin ira en grandissant. Je suis très entourée mais qu’est-ce que c’est ? Et puis si mal arrangée en comparaison de ce que j’étais. Le temps n’est pas froid et cependant ma toux a augmenté beaucoup quoique je ne sois pas sortis du tout depuis mon arrivée. Tout le monde vient, connus et inconnus. Tout le corps diplomatique moins le Français. Lord Howard était en doutes sur l'accueil. Je l'ai fait rassuré. Il est venu avec sa femme, une fille du duc de Portland, très bien & spirituelle, et grande dame. Elle m’a apporté une lettre de Lady Palmerston à moi, très sympathique et bonne. Les Chreptowitch sont toujours là, trop. Le Prussien est excellent. L’Autrichien point d’esprit. Van Praet ma grande ressource. Il veut m'amener M. de Brouckere & le général Chazal. On veut m'amuser. Montalembert a eu l’air bien content de me voir, nous avons causé. Demain il retourne à Paris hélas. Le prince d'Aremberg aussi. Les heureuses gens !
Les nouvelles ici sont que mon Empereur a reçu avec une grande colère les remontrances de l’Autriche & de la Prusse. Qu'à Paris & Londres on presse l’Autriche de telle sorte qu’elle sera obligée de se prononcer & tout de suite, & qu’elle agira. L’enthousiasme en Russie est réel et énorme. Tout le monde veut faire des sacrifices. Un marchand de Moscou nommé Alexis à envoyé à l’Emp. 25 millions la moitié de sa fortune. Hélène va lui donner 300 hommes pour commencer. On dit que nos armées sont immenses. Le 1er avril nous ferons parler de nous. Je ne vois pas ici d’apparence du voyage du duc de Brabant, en tous cas on doute que sa femme l’accompagne. Voilà votre petit billet d’hier continuez, je vous prie. Ce sera mon seul plaisir, mon grand plaisir, ma joie. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00039.jpg
8. Paris le 3 juin 1853

Heckern vient chez moi tous les soirs. Hier il était tout gros de nouvelles de Londres, selon les quelles, Clarendon va se trouver dans la nécessité de convenir qu'il a été trouvé par l’Emp. Nicolas. Le ministère sera culbuté. Palmerston en prendra la direction. On regarde cela comme infaillible aux affaires étrangères. Selon la lettre de Greville & le dire de Hubner on est en grand travail d’accomodement. Tout le monde s’y met. Mais mon Emp. ne peut pas reculer. C’est impossible le ton du Times du 1er juin est remarquable. On ne peut pas faire d’affaires avec la France. Après tout, il n’y a pas d'intérêt direct anglais. Les bouches du Danube cela regarde les allemands qu’ils s’en tirent. Il conclut à l'abstention. Point de nouvelles hier. [Drouin] de [Lhuys] fait un secret de la dépêche télégraphique dont je vous ai parlé hier. Elle est vraie cependant, c'est Cowley qui me l’a dit. J'ai remis mon départ à la semaine prochaine. Il fait trop laid. Lord Cowley m’a interrompue. Je n’ai plus un moment à moi. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
MF-G-L#017_00005.jpg
1 Bruxelles Vendredi 24 février 1854

Ah que j'ai de tristesse dans l'âme. Quel triste voyage ! Et quelle fatigue. Je ne suis arrivée qu’à 10 1/2 Chreptovitch était à la gare pour me recevoir. Je n'ai encore vu que lui. Je vous écris de bonne heure.
J’ai eu une lettre de Berlin. On a à peu près chassé Seymour sans vouloir le voir. Son collègue Castelbajac a été comblé et après avoir ici son audience, c’est l'Empereur lui même qui lui a remis ses passeports & lui a dit ensuite. Puisque vous n'êtes plus le représentant de la France, laissez-moi vous remercier de la conduite noble & chevaleresque que vous avez su tenir dans cette triste affaire. Il lui a remis lui- même alors les insignes de l'ordre de St Alexandre accompagnés d'un écrit de sa propre main. En disant adieu, le général a fondu en larmes.
Ecrivez-moi beaucoup. Chreptovitch dit qu'un on ne sait rien, absolument rien. Il ne fait pas froid & je suis assez bien logée. Adieu, donc & encore. Adieu, quel malheur de vous avoir quitté, d’avoir quitté tout !

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00415.jpg
89 Paris le 14 Novembre 1853

Certainement tout et au plus noir, & vous ne tenez pas vos promesses. La guerre. générale est inévitable. L’article du Moniteur a paru à tout le monde très provoquant. Il donne un démenti à l’Empe reur Nicolas et l’on s’attend généralement à ce que cela empêche [Kisseleff] d’aller à Fontainebleau. Je ne suis pas de cet avis du tout. Il faut qu'il aille. Il ne doit pas commencer la guerre.
On reste sans nouvelles. Je n'ai pas besoin de vous dire dans quelle agitation je vis. Je vous attends avec impatience, mais vous aurez de la peine à me remettre en équilibre. On est très à la paix à Londres à ce qu’on dit, mais qu’est-ce que cela signifie ?
L'Angleterre a épousé la France et fera sa volonté. Celle-ci a pris un élan belliqueux. Elle eût préférée peut-être la paix, mais la guerre aussi lui convient. Nous avons très bien fait vos affaires, celles de votre Empereur.
Adieu. Adieu, ma dernière lettre donc, à moins d'un gros événement.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00129.jpg
26. Ems Lundi le 4 juillet 1853

Bien mauvaise lettre de Greville. La guerre inévitable. L’Empereur dit qu’on peut lui brûler sa flotte de la mer noire, cela lui est égal. Il veut avoir raison des Turcs. Greville parle de nous détruire aussi dans la Baltique. Enfin cela n’est plus arrangeable selon lui, & selon tout le monde. Ah mon Dieu. Et vos pressentiments ? Tiennent-ils encore ? Que vais-je devenir ? Tout ceci, & le mauvais temps et l'isolement complet, me fait du mal. Je ne suis pas mieux qu’à Paris et aujourd’hui après cette mauvaise lettre, pire.
En Russie on parle de guerre sainte. En Turquie c’est la guerre sainte aussi, & chez les Grecs ditto. Comment espérer qu'on recule quand on est allé si loin ? La mission de Giulay ne produira rien.
La guerre de la révolution apparaîtra bientôt. Nous en verrons de belles ! Vous pouvez concevoir ma tristesse, & cela au milieu d'un total isolement.
Adieu. Adieu.
Brunnow avait annoncé le 1er Juillet à Clarendon que l’ordre d'entrer dans les principautés était parti. L'Angleterre et la France nous déclareront la guerre si les négociations ne nous forcent pas à nous retirer. Et nous ne nous retirons pas. Je vous ai dit qu'on a ordonné chez nous une nouvelle levée de 10 h sur 1000. C’est énorme.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00141.jpg
28. Ems le 8 juillet 1833

L'impératrice m'écrit en date du 2. " J’espère en Dieu qu'il bénira les intentions droites & simples de mon empereur, & que la guerre. sera évitée. " Bonnes paroles, les dernières.
Le manifeste va exalter le sentiment religieux, mais il laisse encore ouverture à la négociation. Nous allons savoir tout à l’heure si Constantinople regarde l’entrée dans les principautés comme cas de guerre.
Je suis inquiète de tous ces complots à Paris. Que Dieu nous préserve d'un malheur là. Le comte [?] est arrivé. De l’esprit, beaucoup de connaissances, pas trop versé dans la diplomatie. Fort disposé à causer. Cherchant à apprendre. Défendant notre cause très bien, mais ne me persuadant pas. Toujours en doute de l'Angleterre c.a.d. ne croyant pas qu’elle puisse en venir aux extrémités.
Quant à nous pas l'ombre d'un doute que nous aurons Constantinople, & que personne ne peut nous en empêcher. Des préparatifs sur la plus grande échelle et les Turcs impuissants & appauvris. Le temps est à la chaleur, mais excessive. Je suis fondue. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00366.jpg
Paris dimanche le 23 octobre 1853

J’ai des nouvelles de [Greville] enfin rien de remarquable. On travaille à une nouvelle note, et on attendait avec curiosité ce qu’aura dit l’[Empereur] de la déclaration de guerre des Turcs. (cela n’est pas inquiétant !) Les meeting en Angleterre sont a complete failure. Pas un homme considérable n’a voulu y prendre part.
La neutralité de l’Autriche et de la Prusse est due à la fermeté de M. de Manteuffel. Voilà toute la lettre, accompagnée d’assez de dégoût de toute cette affaire. Le Cabinet devait se réunir la semaine prochaine. On me mande de Berlin que nous resterons sur la défense tout l'hiver, et que nous accueillerons toute proposition venant de Constantinople ayant pour but de finir à l'amiable. Cela n’est pas fier! Quelle sotte affaire !
Je vous ferai réponse après demain sur M. Monod. Je ne sais point de nouvelle de Compiègne. Marie [Meiringen] y est. On passera quelques jours de la semaine à St Cloud, et puis Fontainebleau. Les Hatzfeld sont revenus contents & pas bavards. Hübner est toujours aigre. Dumon est réparti. Viel Castel aussi de sorte que je suis assez abandonnée. Adieu. Adieu.
Offrez je vous prie mille voeux de ma part à votre fille. J’espère que ce voyage réussira. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00358.jpg
76. Paris le 19 octobre 1853

Hübner est fort exalté & content. Son gouvernement reste neutre et le proclame, et fort de la promesse formelle que lui a donné l'Empereur Nicolas de respecter l’intégrité de l’Empire ottoman, l’Empereur d’Autriche réduit son armée du quart. Il fait sonner cela très haut. Ceci est la réponse aux soupçons qu’on avait conçus ici de la triple alliance à Varsovie. Cela me touche peu.
Je n’ai pas la moindre nouvelle de Londres, sauf une lettre spirituelle de la G. D. Marie où elle me dit qu’elle trouve nouveau et drôle d'habiter un pays ennemi.
Dumon m’a dit hier soir, que M. Bansky était très inquiet de la reine Amélie. C’est une pleurésie dont elle est atteinte. Marie Mensingue arrive avec la G. D. Stéphanie. Beaucoup de nouveaux diplomates sont priés à Compiègne, mais toujours Kisseleff & Hübner exclus. Est-ce à Broglie ou au Val Richer que je dois vous adresser ma lettre vendredi ? Il fait bien laid ici et froid. Viel Castel est parti pour 3 semaines. Grande perte pour moi. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00346.jpg
73 Paris le 13 octobre

Pas la moindres nouvelle à vous dire. La G. D. Marie m'écrit pour me prier beaucoup de venir la trouver à Bruges la semaine prochaine. J’en aurais bien envie, mais ce serait une folie. Mon [Empereur] est retourné droit de Potsdam à Pétersbourg où il arrivera demain. Je ne sais si on essaye rien de ce côté-ci pour un arrangement.
Je croirais que non, & que tout reste abandonné au hasard et à des escarmouches comme dit Antonini. Balabini est arrivé. Vous savez qu'il était à Constantinople. La seule nouveauté que j’ai apprise par lui c’est que Menchikoff loin d’être insolent a péché par trop de platitudes. Les Turcs ont cru qu'il avait peur, & ils ont tout osé. Voilà du neuf. Balabini a toutes ses preuves. Adieu. Adieu car je n’ai plus rien.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00143.jpg
29 Ems samedi le 9 juillet 1853

Une lettre extra pour vous dire que selon mes dernières nouvelles nous allons publier une dépêche explicative de Manifeste, où il sera dit : qu’aussitôt que la porte nous aura offert des garanties acceptables et que les escadres des puissances maritimes auront quitté les eaux de la Turquie, nos troupes de leur côté évacueront la Moldavie et la Valachie. Qu'en dites-vous ?
A propos M. de [Damis] est enfoncé dans les lectures que je lui fournis quoique nous nous voyons deux fois le jour il m'écrit à tout instant. Voici sur votre lettre. Il m’en a reparlé le soir, avec des admirations sans fin sur le style de votre lettre. Vous me querellez sur la distinction que j’ai l’air de faire de votre Génie pour les grandes & petites choses. Certainement vous valez mieux pour les premières, mais je vous prie de ne pas m’abandonner dans les autres.
Je suis d'une grande curiosité du débat de hier au Parlement. On commence à dire que Palmerston reprendra les affaires parce que si dans ce poste il ne nous fait pas la guerre, les Anglais verront qu’il n’y a pas de quoi la faire. Enfin ce serait drôle, mais tout est drôle, pourvu que cela ne reste que drôle. La chaleur est étouffante. Adieu. Adieu.
J'attends ce que vous me direz du Manifeste. [Damis] prétend que de même que l'[Empereur]. excite l’enthousiasme religieux, il saura le calmer. Il est le maître très puissant chez lui.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00323.jpg
68 Paris le 3 octobre 1853

Marion m’a dit que ses parents désiraient qu’elle passat Noël, avec eux ; j’ai trouvé naturel, j’ai dit tout ce que je m'étais proposé de dire sur mon remord du passé. J’ai été très affectueuse & résignée à cette séparation m'en remettant à elle de l'abréger. C’est tout en moi dont elle parle ! Je n’ai pas capitulé. Je remets à mes amis de faire comprendre que c’est bien long ! Vous y pourrez beaucoup. Il y a du temps jusqu'à l’événement. Merci de vous occuper de Monod. Les affaires se brouillent beaucoup. Je crois qu'il est venu une note austro prussienne adressée à Paris & à Londres. Elle a dû être remise hier. J’ignore encore l'accueil. Ici on ne fera que ce que voudra Londres, et là on est très monté & je crois décidé à la guerre. Les Anglais se croient trompés par nous & veulent se venger. Le pays tout entier est monté sur ce ton. Lansdowne d’abord très doux a changé de manière après avoir appris par Lord Cowley tout ce qui s’était passé.
J'espère encore que L'Empereur ici tâchera d'agir à Londres, il désire la paix vivement, mais il ne se séparera pas de l'Angleterre cela est certain, & si elle veut la guerre il la fera avec elle.
De notre côté nous ne comprenons pas cette nouvelle vivacité anglaise. Nous persistons dans notre dire, nos conditions pour évacuer les Principautés. Nous n’avons pas dit un mot encore des flottes à Constantinople.
Les trois souverains sont réunis à Varsovie, je crois du moins que le roi de Prusse y est allé aussi. L'entente est intime. Les Clauricarde sont venus me voir spontanément. Les anciennes relations très cordiales. ils sont très opposition au Ministère, ce qui fait qu'ils le sont moins à la Russie. Ils repartent pour Londres demain.
Mad. Kalerdgi est arrivée, elle m'explique un peu Pétersbourg. Au fond toute cette affaire est de l’invention de l’Empereur & pas du tout du goût de Nesselrode. C’est ce qui explique la marche boiteuse. Molé, Heeckeren , Noailles, beaucoup de monde hier soir. La rencontre de Kalerdgi & Molé touchante. C'était drôle. Tout le monde agité & croyant à la guerre. Savez-vous qu'une bonne lettre de vous à Lord Aberdeen ferait beaucoup d’effet dans ce moment de ces réflexions générales que vous savez rendre si frappantes. Lui aussi est ébranlé et penche pour la guerre, enfin je vous dis vrai, tout le monde y est en Angleterre & c’est imminent. Ecrivez, je n’ai pas revu Fould depuis la folie de son frère. Morny est de retour depuis hier. Il travaillera à St Cloud. Son Empereur est très sensé et très bon. Tous les autres détestables. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00317.jpg
67. Paris Samedi le 1er octobre 1853

Quel malheur que vous ne soyez pas pour un moment à Londres, ou pour deux mois à Paris. Aberdeen me paraît faire fausse route tout-à-fait. Il court à la guerre & tout de suite. Je m'étonne que vous n'ayez pas lu notre seconde dépêche même date que la première 7 sept. Intitulée examen des modifications turques, et qui donnait notre interprétation de la note de Vienne. On a trouvé à Londres & ici que cet examen ramenait la question à la proposition Menchikoff, et dès lors on a pris fin. Tout le monde même impartial ici on a porté le même jugement. C'était dans tous les journaux. C’est sur cela qu’est venu la recrudescence & l'impossibilité de s’entendre.
Le Cabinet Anglais est convoqué pour après demain le 3. On fait revenir la reine le 5. Ce sera pour la déclaration de guerre ou la convocation du Parlement. Les meetings vous se succéder. Tout le monde est à la guerre en Angleterre. Le mot d’ordre est que la Russie a voulu duper les Anglais. Lord Lansdowne tient le même langage. Il a vu hier l’Empereur, & part demain. Il était ici hier soir, monté contre nous, tout le monde est fou. Le ministère anglais est très uni, il n’est pas question de changement. Constantin m'écrit d'Olmentz grande intimité. Les trois cours dans la plus grande entente. Mon [Empereur] très poli pour les off. français. Il les a invités à Varsovie.
C’est dans le journal des Débats du 24 sept. que vous trouverez la pièce diplomatique qui fait aujourd’hui l'objet de la querelle. Benoist Fould est devenu subitement fou. On dit qu’Achille Fould va quitter le ministère pour prendre la direction de la maison. C'est à la bourse que se débite cette dernière nouvelle. La première (la folie) est positive. On parle d'envoyer 30 m. hommes occuper Constantinople comme on occupe Rome. Croyez- vous cela ? On ajoute que dans ce cas l'Angleterre irait occuper Alexandrie et le faire ! Strange times. Adieu. Adieu.
J’avais hier soir Molé, Lansdowne, Montebello, Kisseleff, d'autres diplomates. Mon salon se reforme. Il faudra quitter tout cela s'il y a guerre. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00312.jpg
66. Paris jeudi 29 septembre 1853

Marion est malade, & moi trop fatiguée pour copier Greville. Voici le résumé grande agitation, impuissance de découvrir un nouveau moyen de négociation. Nous avons tout gâté par notre seconde dépêche explicative qui veut dire que nous entendons la note de Vienne dans le sens de l’Ultimatum Menchikoff. Il ne fallait pas dire, il fallait ne rien dire. Mais enfin c’est fait & on ne sait plus à quel Saint se vouer. Il paraît donc qu'il ne reste que la guerre. cependant la saison fait obstacle aux coups. Mais encore une fois comment renouer ? Voulez-vous bien le dire. Vous vous ferez difficilement une idée de la consternation de Hubner, Hatzfeld & &. Ils nous envoient à tous les D. C’est naturel. Mais nous n'y allons pas. Constantin me mande du 24 que l’Empereur est de très bonne humeur. J’ai vu hier chez moi le soir Molé, Berryer, Brougham, & Fould. Celui-ci très gai. Je n’ai pas pu causer avec lui. Il a dit à Marion que cela s’arrangerait comment ?
L’Empereur revient aujourd’hui. Lansdowne qu'on avait convoqué pour un Cabinet conseil reste pour faire sa cour. Le voyage n’a pas été favorisé par le temps. La reine Amélie renonce à tout. La tempête l’a rejetée à Plymouth, elle est revenue à Clarmont malade. On dit que la Pcesse de Joinville l’est très sérieusement depuis longtemps & qu’elle mourra si elle ne retrouve par le soleil. Le duc de Noailles est venu aussi hier. Il a longuement. vu Fould l’autre jour que lui avait tenu le même langage qu'à moi. Belliqueux & révo lutionnaire par nécessité, parce qu’il ne voyait pas d’autre ressource. Olmentz a dû finir avant hier. Bual y a été mandé. Voilà Hubner plus tranquille au moins sur ce point. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00306.jpg
65 Paris le 27 septembre 1853

Voilà bien du bruit ici. De tous côtés on vient m'effrayer. Me rassurer, personne. M. Fould est enchanté de l’entrée des vaisseaux. " C’est plus net. La capitulation sera plus facile. (Joliment !) ou la guerre. plus tranchée, car ce sera. La guerre révolutionnaire. L’Autriche y perdra de suite l’Italie & la Hongrie. L’Allemagne ne demande pas mieux que d'appartenir à l'Emp. Napoléon. Il tient en mains les révolutionnaires de tous les pays, il peut les contenir où les cacher. Chez lui il n’a pas peur, ils sont soumis. Il peut donc bouleverser le monde sans courir lui-même le moindre danger." Lord Cowley est au plus noir ; il ne voit plus un moyen quelconque pour éviter la guerre générale, et des malheurs af freux. Cependant son instinct se révolte et il doute, en dépit de tous les raisonnements qui tous concluent à la guerre. Hübner est dans un état violent. Bual n’est pas à [Olmetz]. Cela l'offense avec quelque raison. C'est mon [Empereur] qui n’aurait pas voulu. Kisseleff conserve sa tranquillité apparente. Hatzfeld est à la campagne. Lord Lansdowne écoute, Brougham bavarde et rit, il n'a jamais été aussi en train et aussi agréable. Le premier revient de Suisse et retourne en Angleterre. Il attendra ici l’Empereur à moins d'une convocation du Cabinet. Son dire est comme celui de tout le monde avec les formes réservées & polies que vous lui connaissez. Mais la guerre est au bout. On dit ici aux aff. étrangères que le traité des détroits a toujours été respecté jusqu'au moment où la vie des Nationaux est menacée (Je me trompe c’est Cowley qui me dit cela mais qu'il n’y a pas de traité qui tienne devant le devoir de la sauver.) Drouin de Lhuys dit aux petits diplomates que c’est dans l’intérêt de la paix encore qu'on fait cela et pour donner au Sultan la force de négocier à Paris et à Londres on croit qu'avec la parité de situation, occupation pour occupation. Il sera plus aisé de les faire cesser simultanément. C'est un grand gâchis que tout cela. Et jamais on n’a été aussi près de la catastrophe.
Aberdeen est très ferme dit Cowley dans le parti qui vient d’être pris. Lansdowne ne croit pas du tout à la retraite. Midi. Dans ce moment, une lettre de Greville très longue, je vous en enverrai copie demain, très desponding, ne voyant pas jour à sortir de la difficulté et à éviter la guerre. Il désire bien connaître votre opinion, et si vous voyez une solution possible. Pensez-y. Il me demande déjà où j' irais. C’est jolie d’avoir à songer à cela. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00160.jpg
32 Ems le 14 juillet 1853

J’ai l’esprit troublé de notre circulaire, et je vois mille fois plus de raisons de m’alarmer que de me rassurer. Je commence à croire que l’Empereur veut la guerre. Tout est si mûr pour cela. Nos préparatifs sont immenses, & l’esprit public est bien excité chez nous & dans tous les pays grecs. Comment contenir cela ?
Je n’ai pas de quoi me distraire ici de ces pensées là. Le peu de société que je vois c’est très insignifiant. Les Princes de Prusse me soignent. Je m'occupe un peu de celui qui sera roi un jour. C’est une aimable nature, & qui pourra être quelque chose s'il est bien entouré.
2 h. Je reçois dans ce moment une lettre de Greville du 12. Meilleure. Un projet d’accomodement concerté avec la France venait d’être envoyé à Pétersbourg. si l’[Empereur]. ne veut pas la guerre il faut qu'il accueille cela. C'est la même chose que me signale Constantin. Nous verrons sous peu de jour. Il pleut bien fort ici, c'est ennuyeux. Adieu. Adieu.

Le 15. Hier n'était pas le jour, ce n’est qu’aujourd’hui que je vous envoie ceci. Je copie. " Nesselrode dit quelque mots à Budberg en réponse à la critique faite par M. Guizot de notre première circulaire sur l’affaire turque, la manière dont le comte y répond nous a prouvé à Budberg & à moi, que la critique avait porté très juste. Le Comte nous est très reconnaissant à tous deux de cette communication. " C’est Constantin qui m'écrit cela. Ses nouvelles du reste sont très bonnes. Radcliffe s'est joint à ses collègues de France, Autriche & Prusse pour faire adopter par la Turquie la proposition Bourqueney. Je pars demain pas très édifié des bains d’Ems, au fait rien. Nous verrons ce que fera Schlangenbad. Adieu encore. Je n'ai rien de vous depuis le 9.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00275.jpg
58. Paris le 6 septembre 1853

On attend toujours. Enfin aujourd’hui on doit apprendre les réponses de Pétersbourg, elles arrivent ce matin à Berlin de là le télégraphe.
J’ai vu hier Cowley longtemps. Il est inquiet. Il a fini Dieppe & va à Chantilly. Walensky a passé quelques jours auprès de l’Empereur. Il a refusé de voir D. de Luys. Cela n’a pas l'air de contrarier le maître. L’Empereur a l’air fatigué & changé. L'[Impératrice] a bonne mine elle n’est pas grosse.
Lord Normanby demande le poste de Florence ! Quelle chute ! Bulwer n’a pas envie d'y retourner.
Il n'y a personne à Paris et comme je me couche à 9 1/2 on ne vient pas le soir. (les seules qui puissent venir les diplomates) j’ai peur que vous ne vous ennuyez, mais moi je me réjouis bien de vous revoir.
Marion vous remercie de votre petite lettre, vous l'avez convertie. Au reste elle est bien mon ennemie et celle de Lord Aberdeen. Lord Harry Vane est ici, mais il ne sait rien. Lansdowne arrive ce soir, mais il ne fait que passer. Il va en Allemagne. On parle d'un voyage de Lord Palmerston (unichieff).
Je suis très divertie des Mémoires de Mme d'Oberkerich, de vieux souvenirs pour moi. Dumon est parti. Viel. Castel vient un peu causer avec moi. Conversation charmante. Adieu. Adieu.

P.S. Dans ce moment une lettre très intéressante de Greville. On craint en [Angleterre] que l’Empereur ne refuse. On croit à une révolution à Constantinople, le sultan déposé. Son frère à sa place. On est perplexe, on ne sait que faire de la flotte. Retirer. Honteux, [avancé], c’est violer le traité. Enfin tous les embarras du monde.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23017_00121.jpg
24 Bruxelles le 8 avril 1854

[Brockausen] n’a pas reçu son courrier encore. Cela prouve qu'on veut lui envoyer les choses faites. Ces choses sont un nouveau protocole à 4 plus obligatoire pour les Allemands que les précédents, mais sans aller encore jusqu'à l’action. On commence à douter tout-à-fait des propositions pacifique de mon Empereur. Hélas, que nous avons été enfants de nous réjouir !
Voici votre lettre, bonne longue, intéressante. Constantin m'écrit. Pas un mot des nouvelles propositions. Nous irons jusqu'au rempart de Trajan, pas au-delà. Nous démantelons ou détruisons toutes les places que nous ne pouvons défendre. Nous avons fait cela en Circassie. Nous le faisons dans la Baltique. Alaud ne sera pas défendu, les ouvrages ont été détruits. Que de sacrifices déjà !
Hier le bois de la Cambre. Le soir Brokham, [Chreptovitch], le fidèle Van [Praet], Dalabier. Une journée comme toutes les journées, pesant bien lourdement sur le coeur et sur l'esprit. Ce beau temps m'agace. Paris doit être si beau ! Je voudrais me figurer qu'il y pleut. Mettez donc comme je fais un petit morceau de papier dans l'enveloppe, entre le cachet & la lettre. La vôtre est toujours collée au cachet. Voilà une des choses intéressantes que j’ai oubliée de vous dire ici. Il y en a d’autres meilleures. Si l'on vous parle de Kisseleff et de moi, je vous prie de ne pas vous gêner et de dire la vérité. J’espère bien que vous n'avez pas parlé de ce qui m’a tant occupé les derniers jours. Tout devient clabaudage aujourd’hui. J’aime bien votre forme de gouvernement, le silence. Croyez-vous franchement qu’un français puisse s'empêcher d’être indiscret. Je n’ai presque pas vu mon fils depuis votre départ. Je ne sais ce qu’il devient. Constantin croit à la neutralité arrivée de toute l’Allemagne mais rien n'était signé encore. Adieu. Adieu. Et Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00058.jpg
12. Paris le 7 juin 1853

Je reste certainement bien troublée des nouvelles que je vous ai données hier. On les tient très secrètes, la Russie s’entend.
Le bavardage est infini. Jamais l’occasion ne fut plus belle. Quelle confusion ! Les Allemands sont très montés aussi contre nous. Hubner surtout, mais il me le dit dans le tuyau de l'oreille. Ma tête s'en va de tout ce que j’entends je suis devenue le confesseur général. On cherche à me retenir, mais il faut que je parte. Que puis-je à tout ceci ? Le Times d’aujourd’hui est catégorique. L’Empereur persiste, la flotte anglaise. part. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23017_00164.jpg
34 Bruxelles le 19 avril 1854

Vous vous trompez de N° ou bien j’aurai encore une lettre. Vous mettez 41. Lundi 17 et 43. Mardi 18. puis je n’ai absolument rien à vous dire. Vous savez sans doute que Richer a été appelé subitement à Vienne. Je ne sais s'il passe ou a passé par Bruxelles ou Strasbourg. Le beau temps s’obstine, et il fait si chaud dans mon salon que je serai obligée de décamper. J’espère trouver un coin au nord à Bellevue mais moins élégant que ceci qui ne l’est guère. C'est bien de l'ennui, petit ennui à côté du gros chagrin. Je ne sais ce qui fait dire de tous côtés que toute cette aventure sera courte. Ah si c'était possible.
Je suis très bien avec Brunnow. Je n’ai plus revu Kisseleff depuis les deux jours de suite qui étaient une commission dont on l’avait chargé. Je suis convaincue que je ne le reverrai plus du tout. Vous savez que le duc de Cambridge est parti hier pour Vienne, sans doute pour assister au mariage, politesse que mon Empereur aurait peut-être faite en personne. Si, j’ignore si la France y envoie quelqu’un de Berlin. Ce sera le Prince de Prusse. Je n’ai plus rien à vous dire. Tous les soirs Van Praet & Brockhausen, quelques fois Lebeau, souvent les autres diplomates qui ne sont pas très amusants. Tous les jours le bois de la Cambre. Ah que j’y pense à vous. Quand est-ce que je n'y pense pas ! Je sais bien que vous me plaignez. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23015_00150.jpg
38. Dieppe le 16 juillet 1852

Tout ce que l’Impératrice pourra faire pour moi, elle le fera. Cela elle me l’a dit & je crois tout ce qu’elle me dit. Je crois aussi qu'il y aura plus haut bienveillance pour moi. J'éprouve donc une certaine sécurité. Mais de promesse je n’ai pu en avoir aucune. Mais voici venir une autre aventure. L’Empereur a fait faire des avances à mon fils aîné, il désire le reprendre au service et lui donner un poste convenable. Voilà les premières paroles qu'il lui a fait dire après cela il faut se voir, s'entendre. Paul acceptera un poste diplomatique indépendant et je lui conseillerai de n'être pas difficile, mais il faut qu'on lui dise quoi, & Nesselrode cet absent, & Orloff aussi va l’être. Tout cela est remis à assez loin, en attendant j'aurai à soigner ces préliminaires et c'est assez difficile avec tous ces éparpillements.
La chaleur commence à devenir lourde ici aussi. Je vois les Delessert beaucoup. Lord Cowley tous les jours. Mais on ne se réunit pas et je ne suis pas bonne à cela maintenant car je vais me coucher à 9 heures vraiment avec les poules. Je n’ai pas la moindre nouvelle. Le comte de Chambord ne songe pas à venir à Wisbade, c'est ce que m’a dit le duc de Noailles. Pour Changarnier je crois bien qu'il va à Vienne, on le croyait à Bruxelles. Vous savez que M. Molé est à Trouville.
Adieu, nous n'aurons rien de bien intéressant à nous écrire. Moi je végèterai. Un ennuyeux été à traverser et sans profit pour ma santé. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
MF-G-L#017_00439.jpg
99. Ems le 15 juillet 1854

Je ne crois pas un mot de la lettre que vous me citez de mon empereur au roi de Prusse. Si une telle lettre pourrait exister, elle ne serait pas connue. On reste très curieux de ce que sera la réponse de Vienne. Certainement il y a hésitation je n’en vois hélas aucun à Londres & à Paris si j’en juge sur les journaux.
Hier l’Indépendance annonçait une rencontre entre votre Empereur & la Reine d'Angleterre. Si cela se confirme ce serait un fait bien grand et bien brillant pour l’Empereur. Je suis curieuse de la confirmation. Dans ce moment une lettre de Greville. L’Autriche n’avance pas, nous restons, et on s’attend à une grande bataille sur le Danube. Les alliés pourrait bien y prendre part. La Prusse lie les mains à l’Autriche. Il est évident qu’elle fait tout pour se détacher de l’alliance et se joindre à nous. Mais osera-t-elle provoquer l’inimitié de l’Occident. [?] which are in a considerable fix.” Voilà la lettre de mon correspondant. Il n'accuse pas l’Autriche. Son traité avec la Prusse lui interdit de rien faire sans se concerter avec elle. J’attends avec beaucoup d’impatience ou des coups, ou le débrouillement de la situation des Allemands. Je pars décidément pour Schlangenbad jeudi le 20. C'est là duché de Nassau que vous m’adresserez vos lettres. Adieu. Adieu.
Paul est arrivé hier.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23015_00032.jpg
7. Schlangenbad le 9 juin 1852

Je vous envoie l’épitaphe fait par Meyendorff sur le tombeau du D. Schwarzenberg. Cela vient à propos de votre discours sur celui de Morny. Les journaux ne nous le donnent pas encore dites-moi un mot sur ce que je vous envoie là.
Meyendorff est bien sensible à votre opinion. Je suis sûre qu’il vous plairait extrêmement si vous le connaissiez. A mon gré il est charmant seulement il sait trop de choses et moi je n’en sais qu’une c’est encore comme cela ! En faisant ma toilette hier soir pour aller chez l’Impératrice je me suis trouvée mal. Tout simplement une excessive fatigue. Au lieu de sortir, je me suis couchée. Je n’ai pas dormi ou très mal. J’ai l’esprit tracassé de deux choses mes fils, c’est la plus grosse et puis que devenir, où aller, avec qui ? Qui me ramènera à Paris ? Qui prendra pitié de moi jusque là ? Pour toute ressource Emilie, Jean & Auguste.
Pauvre femme d'esprit, comme je sais arranger mes affaires ! Et bien voyez-vous tout cela m'empêche de dormir. Je m'agite, & je crois fermement que je suis venue mourir à Schlangenbad. Ecoutez, à toute extrémité, si suis absolument privée de toute ressource pourrez-vous m'envoyer votre petit ami ? Vous comprenez les inconvénients, mais j’aime tout mieux que l’abandon total absolu et c'est là où je vais être plongée dans 18 jours. Ceci est un tourbillon, après le néant.
Je viens de causer avec quelqu’un qui a parlé avec l’Empereur il y a 3 jours à Varsovie. L’Empereur très content du Président souhaitant vivement qu'il continue comme il fait.

8 heures. J’ai été couchée tout le jour, quoique toujours en causeries. Je me relève pour aller chez l’Impératrice. J’espère ne pas tomber comme hier. Vos lettres m’arrivent bien, mais les nouvelles, vous n'en faites pas. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
MF-G-L#017_00416.jpg
94. Ems le 6 juillet 1854

J’ai vu ce matin une lettre de Pétersbourg expliquant nos mouvements. 250 m dans les principautés 150 m en Podolie & Pologne, prêtes à marcher sur Cracovie et Vienne. On a abandonné Silistrie & partir de la Valachie à cause de l'attitude de l’Autriche. Mais l'Autriche est-elle de bonne foi ? Le correspondant émet cette idée comme un doute. On dit toujours que nous voulons la paix. Certainement l’Autriche la désire. Qu’est-ce qui ressortira de tout cela. Rien n'est éclairci. Constantin me mande que le prince Gortchakoff avait eu son audience de congé le 27, mais qu’il ne partait que dans quelques jours. Sa lettre est du 29 depuis l’approche des flottes toutes les promenades de la cour se dirigent vers les points d’où on peut les apercevoir. C’est l'élégance. L'[Empereur] & l’[Impératrice] sont toujours de ces promenades-là. Le temps superbe, la mer calme. Les Anglais ont tiré un coup, une bombe sur le Vladimir. Le ton est toujours à la gaieté. Quel étrange spectacle. On doute beaucoup qu'ils attaquent Cronstadt, mais ils sont là et au complet.
Greville me mande que vous allez embarquer sur des vaisseaux Anglais des troupes destinées à une descente dans la Baltique. Brignoles est arrivé hier, cela va me faire une bonne causerie.
Le 7 Vendredi. J’ai des nouvelles sûres de Peterhof de quelqu'un ici qui a causé une heure avec l'Empereur il y a 10 jours. La réponse à l’Autriche n’a dû arriver que hier 6, celle pour la Prusse sera portée par Constantin. C’est à peu près ce que disent les journaux. Toujours le tête-à-tête avec la Turquie pour la question religieuse. Négociations avec tout le monde pour les autres. (qu’est ce que c'est que les autres ?) position prise sur le Sereth et attente. "
L’Empereur très bien portant, très calme, prenant les choses de haut. Aucune irritation contre l’Autriche ni contre la Prusse. Il ne sait pas ce qui se passe en France et en Angleterre.” Constantin me dit qu’on demande mes lettres à grands cris. Si ce sont là leurs seules nouvelles, je les plains. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
MF-G-L#017_00398.jpg
90. Ems le 30 juin 1854

Voici ce que je trouve dans mes vieux papiers.
" Lord Chatham disait en 1760 que quand il entendait quelqu’un soutenir que la question ottoman n'était pas pour l'Angleterre une question de vie et de mort, il ne parlait plus à cette personne."
Je tourne et retourne dans mon esprit, les nouvelles perspectives que nous ouvre notre reculade. Elle est si étonnante pour un homme du caractère de l’[Empereur] Nicolas, et pour l'orgueil & le fanatisme russe. Je prends Hélène pour type. On ne peut plus lui parler. Son caractère en est changé tout à fait. D’abord elle ne croit pas. Je regrette que Paul ne soit pas ici. Il saurait la mettre à la raison. Elle soutient que nous allons faire la guerre à l’Autriche ; son point de départ est une lettre de la Grande Duchesse Marie qui est parfaitement dans ce sens. Les journaux Allemands disent que notre armée manque de vivres. Quand on ne mange pas, on ne se bat pas. Cela pourrait bien expliquer ce que vous dites des pertes que nous éprouvons dans nos officiers supérieurs. Quelle opinion nous donnons de nous en Europe ! Quelle tappe sur la fatuité Russe. Je serai bien aise de ne pas ressembler beaucoup à mes compatriotes, je me sentirais bien humiliée. Vous figurez-vous le contentement de Hubner.

Midi. Voici une lettre de Constantin de Peterhof le 21 juin. " Au Danube notre position militaire change en présence de l'absence de sécurité que présente l’Autriche. Notre droite se trouvant exposée par la concentration de troupes en Transylvanie Silistrie n’a plus aucun prix pour nous, aussi allons nous, aussi allons nous en abandon ner le siège et nous concentrer sur le Sereth. C'est là qu'on est invité à nous parler pour le moment quitte à mieux sauter plus tard. La conclusion qui a atteint le Maréchal le met hors de combat pour quelques semaines. Il se rendra à Passy." Le reste de la lettre est du fanatisme superlatif. J’ai peine à tenir pour ne pas répondre par quelque sottise à tant d'exagération, d’adulation. Il reste encore. là heureux, si heureux qu'il dit qu’il en oublie sa femme et ses enfants. Voilà ce qu’on devient, voilà ce qu'était devenu mon mari. Que de réflexions à faire. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23015_00101.jpg
25 Schlangenbad Lundi le 28 juin 1852

Le dîner en plein air hier ne m’a pas réussi du tout. Je suis en plein rhume si ce n’est pire. Une toux violente. Je n'ose pas bouger, pas parler, c’est affreux. Je serais désolée de manquer Stolzenfels.
Dernière réponse de Clothall. Elles se sont un peu moqués de moi. Après m'avoir promis le Rhin, Aggy se refuse à y venir, elle viendrait à Paris. Je n'ose pas montrer tout ce que je pense de cela. Je le répète elles abusent du besoin que j'ai d'aller. Il résulte de tout ceci que je retournerais à Paris sans savoir ce que je pourrais faire de mon été. Je vous demande cependant une dernière faveur c’est de dire que comme c’est pour Aggy que je renonce à l’Allemagne elle me doit de ne pas me manquer de parole pour Paris. Je crois que ceci dit par vous avec amitié et un peu d’autorité ferait bon effet.
Voilà donc où j’en suis ; à moins de toucher sérieusement malade, et je suis un peu en train de cela, je pars avec l'Impératrice. Je me sépare d'elle à Cologne le 3, & je serai à Paris le 6 juillet. Il est possible que je change encore d'avis, mais aujourd'hui voilà le projet.
L'Empereur a fait une chute & s'est blessé à la hanche ; il a été couché deux jours. L’Impératrice ne s’inquiète pas mais Maudt s’en préoccupe. Point de nouvelles. Vous êtes arriéré au Val Richer. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23015_00114.jpg
28 Château Stolzenfels Vendredi 2 juillet 1852

Vous ne sauriez vous figurer la fatigue que j’éprouve. Je suis rendue. J’attrappe un moment pour vous dire deux mots.
Hier le roi est venu nous prendre à Eltville. Grand concours, grandes embrassades, belle navigation. Dîner à bord, marche lente pour jouir de la vue, des applaudissements de la foule, le canon incessant. Le temps fort beau. Une petite partition sur le pont pour l’Impératrice. Le roi, les Princes. Bonne conversation. J’étais de ce petit cercle. Le roi très agréable, spirituel. et gai. La soirée ici, décousue ; illumination de toute la contrée, toutes les ruines. Moi plus ruine que tout cela ; j'ai été chercher mon lit à dix heures. J’ai dormi et beaucoup aujourd’hui. Il faut que je mange.

1 heure. Je rentre d'une longue séance chez l'Impératrice. Votre lettre m’a été remise à mon réveil, celle où vous me parlez de mon empereur : je l'ai lu à l’Impératrice qui en a été charmée. Adieu. Adieu.
Demain à Brumath après-demain à Cologne. ou même Aix la Chapelle. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
MF-G-L#017_00369.jpg
83. Ems le 18 juin 1854 Dimanche

J'ai eu hier des nouvelles de Bruxelles on pense là que la réponse de mon Empereur à la demande de l'Autriche quand sortirez-vous des [Principautés] [?] sera quand finira la guerre que me font les 3 puissances.
Il y a bien une petite division en Allemagne, et les rois ne se soumettent pas trop aux deux grandes puissances.
J'ai eu hier une curieuse relation de Russie par un vieux général Offenberg aide de Camps général de l’Empereur, très bien venu de lui et qui vient encore de dîner avec lui il n’y a pas 15 jours. Il est malade, il se soigne afin de pouvoir rencontrer à cheval en août. Et bien il me dit que la tranquillité d'esprit chez le maître et les valets est complète. On rit des journaux français des rapports difficiles. On ne s’effraie de rien. On attend l'ennemi de pied ferme, on désire qu’il vienne. On défie l’Europe. La plus grande liberté de langage à la Cour. Dans le public un enthousiasme général, immense. On est très préparé à une guerre de 10 ans, préparé à tous les sacrifices, rien ne coûte volontiers.
On donne son argent & sa personne. Adoration pour l’Empereur. Rien ne peut se comparer à ce mouvement. Le [général Orloff] a fait la guerre de l'année 12. L'exaltation alors n'était rien à côté de ce que c'est à présent. Les provinces allemandes se distinguent & la Finlande est la plus affectionnée de toutes. Vous ne pouvez rien ici contre Cronstadt ni contre Sveaborg, pas mieux Sevastopol imprenable, une descente en Crimée impossible, nous sommes prêts partout. Vous ne pouvez prendre que ce que nous abandonnons. L’Empereur est plus puissant que jamais monarque russe ne l’a été. Il n'y a qu'une chose qu’il ne puisse pas faire la paix. Il y aurait un soulèvement général. Nous voulons la paix à Menchikoff. Je vous redis tout cela parce que à moi cela m’a fait une impression très vive et profonde. Cet homme me dit la vérité. C'est un allemand ce n’est pas un courtisan, pas beaucoup d’esprit, mais l’esprit droit, honnête. Je le connais depuis longtemps, il est fort respecté chez nous. Je crois parfaitement ce qu’il dit. Je m’étonne. Il dit ce qu'il croit & ce qu'il a vu.
Les Anglais honnis, les Français non. L’Empereur compte tout-à-fait sur le Roi de Prusse, moins sur l’Autriche, mais il ne renonce pas. Vous voilà au courant de la Russie. Cela ne me promet pas mon retour à Paris. Le temps est plus doux, et j'en souffre. Le froid m’allait mieux.
Le grand duc Constantin reste à Pétersbourg. Il est ministre de la marine et commande la flotte de la Baltique. Je m'étonne comme vous que les jeunes [Grands Ducs] ne soient pas en Turquie. L'ainé, l'héritier, commande toute l’armée du nord. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23017_00172.jpg
36 Bruxelles le 21 avril 1854
Vendredi

Je vous envoie l’article du journal de St Pétersbourg pour le cas où il ne paraîtrait pas à Paris. Vous m'en direz votre avis. à moi il me parait très bien, mais je suis sujette à me tromper. C’est la déclaration dont je suis contente. Je n’aime pas autant l’autre article sur les publications secrètes je n’ai lu celui-ci au reste que très en courant. Mais vraiment l’autre me plait et beaucoup. J’attendrai avec impatience ce que vous m'en direz Adieu.
Pas de réponse d’Andral encore. Je m’inquiète.

J'aurai une grande joie à revoir le duc de Noailles Lundi. Mais quelle différence avec l’autre joie ! On me dit qu'il y a eu une entrevue entre Bual & Meyendorff dans laquelle celui-ci aurait demandé quelles seraient les conditions auxquelles on voudrait traiter de la paix. Bual aurait répondu : " très dures, la mer noire & les bouche du Danube. "
Tout ceci prouve que nous sommes disposés à la paix mais également qu’elle est impossible encore. Si j'étais de l’Empereur je n'essaierai plus rien. Il me paraît que le fils de Montebello, ne courra guère de danger. Je ne vois pas comment on parviendra à se battre. Votre mot : les deux géants avec des épées trop courtes. On dit que la convention entre les deux Allemands est conclue. On dit aussi que Bunsen est rentré en grâces.
Avant de me décider à déménager il m’a semblé que je pouvais faire une tentative directe. Elle a deux buts, avoir l’[appartement] qui me convient & finir la tracasserie. Si cela échoue je n’en serai pas plus mal avec [Kisseleff] car nous ne nous voyons plus du tout. La question est de savoir si cela est digne, car il me semble qui c’est suffisamment marquer le dire de rapprochement est-ce que je l'embarrasse, ou le tire d'embarras ? Je ne ferai rien sans votre avis. Vous corrigerez, ou vous direz non, comme fait mon fils. Voyez comme je suis helpless je ne sais pas me mouvoir sans vous.
Je ne vous envoie que le premier article, le bon. Je n’ai pas l’autre sous la main. Adieu.

Je vous ai cru Monsieur quand vous m'avez dit que vous cherchiez un appartement dans le but de rendre possible, de me céder celui que vous occupez et que vous m'avez offert dans le premier moment avec beau coup de bonne grâce, je me semble qui c’est suffisamment trouve donc autorisée à vous prévenir qu'il y a à l'hôtel Bellevue même un apparte ment complet contenant plus même que le nombre de pièces que vous occupez et où la salle à manger à la quelle vous sembliez tenir surtout est plus grande et meilleure. Le seul motif qui me fait hésiter à le prendre moi même est l'obligation de monter l’escalier je ne puis pas douter qu'il ne vous convienne, et je ne veux pas douter qu’il ne vous soit agréable de me rendre un léger service. Ni vous ni moi ne pouvons renier le passé et j'aurai pour mon compte beaucoup de plaisir à reprendre des relations que je regrette d’avoir vue interrompue depuis notre exil commun.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23014_00137.jpg
Ems le 2 août Samedi. 1851 6 h. du matin

On m'emballe, et pendant ce temps je vous écris un mot. La comtesse Chreptovitz est arrivée de Londres hier. Elle me raconte à propos du nouvel oukaze pour les passeports, que Nesselrode & Orloff l'ont appris en même temps que le public. L’Empereur l'a fait promulguer d'une manière soudaine, ses ministres l’ignoraient. L’étonnement & le mécontentement ont été grands. J'essaye avec les Chreptovitz de parer le coup qui attend peut être mon pauvre Alexandre. si on lui refuse de sortir du pays, quelle triste affaire. On vient de refuser à une de ses cousines aussi une sœur du petit cousin.
J'ai eu la migraine hier tout le jour, & tout le monde est venu, beaucoup de monde. Je me suis couchée de très bonne heure. J’espère aller mieux à Schlangenbad. Je vous quitte. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23014_00409.jpg
Paris le 12 octobre 1851 Dimanche

Je n'ai absolument rien à vous dire sur la crise. Je n’ai vu personne hier qui put m'en donner des nouvelles en me rappelant ma dernière conversation avec [Fould]. Je suis portée à croire qu’il y aura modification à la loi, & modification dans le Ministère. Je ne crois pas à [?] tranchée.
J’ai passé 10 heures bien inutilement dans mon lit. Je n’ai pas dormi du tout. Ces insomnies accusent un bien mauvais état de nerfs. Je suis accablée aujourd’hui. J’essayerai de dormir en calèche. Je ne vaux rien pour ce soir, et cependant, il faudra ouvrir ma porte. Montebello est à Passy. Je ne l’ai pas vu encore. Il parait que sa femme n'était pas encore partie pour Tours. Adressez lui donc votre lettre à Paris 73 rue de Varennes. Je serai curieuse de causer avec lui.
Le pauvre Constantin a perdu son second fils âgé de 12 jours seulement. Il répète qu'Alexandre ne peut pas subir un pareil qu arrêt et que l’Empereur ne peut pas l’avoir ordonné. C’est le mot d’ordre, nous verrons. Si vous vous attendiez à des nouvelles, ma lettre va vous désappointer. Cela n’est pas ma faute. Adieu. Adieu

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23014_00426.jpg
Paris le 16 octobre 1851

M. Fould est venu avant le dîner. Très gai mais très décidé. Il doute que le Président trouve des Ministres, mais ceux-ci ne peuvent durer que jusqu’à la rentrée de l'Assemblée, car aucun d'eux ne signerait le projet de loi pour révoquer le 31 Mai. Ils voteront tous contre ce projet. La situation est très violente & le Président très content & très obstiné dans sa pensée. Il n’en reviendra pas. Si l’Assemblée se conduit bien, elle peut reprendre une grande autorité & popularité. Cela est très vrai, si elle est bien conduite. Mais où est le chef ?
Les nouvelles des départements sont mauvaises. Les paysans armés contre les châteaux. Quel moment pour un changement complet de Ministère & de politique. On persiste à dire cependant que ce Président veut rester fidèle à la politique conservatrice & qu’il en donnera des gages. Cela a l’air d’un puzzle !
[Helkerm] était chez moi hier soir. Il avait eu lundi un tête-à-tête de 2 heures avec le Président. Il prétend lui avoir dit toute la vérité & très fortement, & avoir complètement échoué. Le Président s’est plaint avec une grande amertume de Thiers & [?].
Il est 2 heures, je n’ai pas de lettres de vous. Qu’est-ce que cela veut dire ? Voilà Aberdeen que je vous enverrai demain. Constantin après avoir lu ma lettre à l’Empereur [?] mon procès gagné. Puisse-t-il avoir raison ! Cette affaire m'a bien détraquée. Je me sens vraiment malade. Oliffe me traite.
Je vois beaucoup de monde cela me fatigue, l’opinion est bien unanime que le Président a fait une grande faute. On dit qu’il restera à St Cloud. Il a là beaucoup de troupes. Adieu, j’ai donné mes lettres à votre fille, je l'ai manquée. Marion l’a vue & lui a trouvé bonne mine. Adieu.
Je viens de voir Vitet. La commission après avoir entendu les ministres a résolu de ne point convoquer encore l’Assemblée. Cette commission se réunira dimanche. Faucher avait dit qu’ils n'étaient en dissidence avec le Président que sur la loi du 31 Mai. Mais que cela ne lui avait pas permis de rester.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23015_00131.jpg
33. Paris le 9 juillet 1852 jeudi

Je n’ai pris à Schlangenbad qu’un seul bain. Je n’avais pas le temps. Voilà la vie de cour. Ils ont fait du bien à l’Impératrice. Je les aurais pris avec grand bénéfice après son départ pendant 15 jours, si Aggy était venue. Voici qu’elle s'annonce pour le 14 c’est encore bien long.
Paris est étouffant. Je vois tout le monde. Fould, Caumont, voilà pour la Cour. Toute la diplomatie. Duchatel, Dumon, Noailles les indépendants. L’Empire ne se fait pas encore, on n’en parle pas ; pas du tout. Il faut une femme, elle n'y est pas encore. Le Prince se porte à merveille & se repose à St Cloud. Il ira à Strasbourg le 17. 3 jours d'absence.
Je vous répète que j’ai beaucoup à vous raconter et rien à écrire. Je cause avec vos amis, je les écoute & je leur apprends. Je suis trop paresseuse pour aller à Champlatreux. Je n’ai pas eu une minute de solitude de puis mon arrivée. Je me lève à 7. Je me promène jusqu'à 8 1/2 alors je me renferme. Je dîne à 3, à 6 h. je sors pour rentrer à 8 1/2 & je me couche voilà ma journée.
De 10 à 6 on vient me voir. Kisseleff part demain pour Vichy. Hatzfeld est bon d’affaires. Hubner n'est pas revenu. L’Impératrice s’est bien trouvée de Schlangenbad, mais il eut fallu quinze jours encore & l’Empereur ne lui a pas accordé. Je n’ai pas encore eu le temps d'écrire un seul mot à l’Impératrice. Adieu. Adieu.
On me dit que je ne trouverai rien à Dieppe. C'est là que je veux aller, mais j’ignore si je réussirai. Je le saurai demain Adieu.
Drouin de Lhuys va avoir les aff. étrangères. On changera aussi M. Duruflé. Lord Mahon & Cardwell ont perdu leur élection.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23015_00353.jpg
Paris Dimanche le 26 Septembre

M. Fould est venu hier me raconter la découverte de la machine infernale à Marseille. Très préoccupé de cela. On a pris tout le monde. Il croit à des ramifications à Londres. [Brignoles] il est très monté contre les [gouvernements] libres. On le fera sentir. Sentir aux uns, dire à un autre. Mais ceci peut même loin. Il faut voir l'influence que cet événement de Marseille aura sur le reste du voyage, il y a trois semaines encore. Dimanche le 16, il rentre à Paris. Entrée solennelle. Molé est venu hier très frappé de l’événement et triste, Dumon triste aussi. On croyait les fusillés oubliés. Les proportions de ceci étaient affreuses. De centaines de personnes y périssaient. Du reste Molé content de la pensée qu'on va être affranchi en même temps de la République et du suffrage universel ; Fould ne disait hier encore qu’il sera brisé après l’Empire. Celui ci est bien décidé, je ne sais si l'événement de Marseille le rapproche. (Voici votre lettre. Comment vous ne comprenez pas pourquoi la Reine ne fait pas seule. Mais ce serait son argent, elle aime mieux que ce soit celui de Parlement parenthèse) Vous voyez que c’est Hardinge qui commande l’armée. Choix très convenable. On s'occupe beaucoup à Londres de l’idée d'une descente. Le duc de [Wellington] la croyait très possible. et le Times peut la rendre vraisemblable autant que le complot de Marseille. Quoi ? Si l'on demandait à l'Angleterre l’éloignement des exilés ? It will end by war, voilà ce que répète Ellice depuis 4 ans 1/2.
J'ai montré à M. Fould ce que vous m'avez dit du discours du Prince à Lyon, cela lui a fait plaisir, mais quant à la remarque sur ce que le [gouvernement] de [Lord Palmerston] a rendu des respects à la mémoire de Napoléon, il dit qu'il courait après la popularité et que l’ayant reconnu là, la statue et les cendres ensuite ont eu cela pour à l'Angleterre l’éloignement des exilés ? It will end by war, voilà ce que répète Ellice depuis 4 ans 1/2. J'ai montré à M. Fould ce que vous m'avez dit du discours du Prince à Lyon, cela lui a fait plaisir, mais quant à la remarque sur ce que le [gouvernement] de [Lord Palmerston] a rendu des respects à la mémoire de Napoléon, il dit qu'il courait après la popularité et que l’ayant reconnu là, la statue et les cendres ensuite ont eu cela pour mobile. Il n'y a rien à répliquer c’est vrai quant à la légitimité elle n’y avait rien à faire. Pardon du petit bout de papier, je suis avare. Adieu. Adieu.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23016_00193.jpg
39 Schlangenbad le 30 juillet 1853

Le silence de Meyendorff m'inquiète. Constantin en rentrant à Berlin a trouvé Budberg parfaitement ignorant. Il n’avait pas reçu une ligne cependant de tous côtés on croit à la paix. J’ai été assez frappée dans les deux dernières lettres de Greville de ce qu'il dit que l’obstination de Lord Aberdeen à crier la paix sur les toits a dû encourager mon Empereur, & qu’on trouve qu'[Aberdeen] en a fait & dit assez et trop dans ce sens. Malgré cela, il est évident que le pays aussi ne veut de la paix.
James Rothschild va venir ici compléter le congrés de famille. Je suis furieuse et tout le monde ici avec moi de la porte de ce petit endroit. Les lettres & journaux y viennent tard & une fois le jour seulement. On vient hier de faire un nouvel essai par d’autres routes, cela a si bien réussi qu’il n’est rien venu du tout. Il faut attendre ce soir.
J’ai tous les soirs quelque personnes que je renvoie à 9 heures. Rien d’intéressant et pas mal bigarré. Une comtesse Sacy charmante, jolie & spirituelle. Le prince de Croy bête. Le comte de Brie qui [?] les princes Belges fort distingués, un général autrichien Lochi, un peu bouffe italien. Ma nièce dîne toujours avec moi et y est le soir aussi. Marion dîne souvent chez les Rothschild, cela l’amuse. Le temps est toujours variable. Je fais peu de chose de la princesse Charles de Prusse. Elle m’invite chez elle, je n’y vais pas, elle est trop ennuyeuse. Sa cousine la reine de Hollande l’a complètement oubliée l’autre jour elle en est furieuse.
Adieu. Adieu, car je n’ai plus rien à dire.

Auteur : Benckendorf, Dorothée de (1785?-1857)
https://eman-archives.org/Guizot-Lieven/import/images/23015_00407.jpg
Paris lundi le 11 octobre 1852

Hier il n’y a pas eu moyen de vous écrire. Une matinée toute employée à empêcher Aggy de partir. Quel ouvrage, quelle fatigue pour moi. Marion me parait toucher un peu à la folie. Je vous envoie sa lettre, c’est une exaltation touchante, mais c'est trop. Evidemment ses relations avec ses parents sont bien mauvaises elle les prend en horreur. Qu'ils me l'envoient. Je suis convenue avec Aggy qu’elle attendra ici que ses parents lui permettent de revenir. S'ils la veulent je n’y peux plus rien mais j'ai écrit au Père et à Marion dans un sens très raisonnable, & qui devrait les faire persévérer à désirer qu'ils ne reviennent pas. Je vous remercie du travail que vous faites de votre côté.
Je vous ai fait dire un mot hier par votre petit ami. Cela me venait de Mad. de Contades qui avait lu la dépêche chez Persigny. Ce que dit le Moniteur aujourd’hui n’est pas si clair mais il l’indigne. Au surplus attendons le texte même des discours qui a été dans tous les cas très important. Je regrette que Fould ne soit pas venu.
Le comte [Nesselrode] m'écrit une bonne lettre sur Paul. Il causera avec lui et ne soumettra rien à l’Empereur que d’accord avec mon fils. Meyendorff est très monté contre la presse Belge, & veut qu’on en finisse. Il faut de lois de septembre & qu’elles s’exécutent, la protection de l’Europe est à ce prix. A Berlin on pense de même et qu'il faut forcer le Piémont aussi. La France a le droit de le faire. Cowley a peur de Stratford Canning. Il craint qu’on ne veuille accréditer un nouvel ambassadeur auprès du nouvel empire. Le nonce n'ex prime guère de doute sur l’arrivée du Pape. D’autres diplomates disent qu’il ne faut pas permettre que le Pape vienne. Je crois moi qu'il viendra. Je ne sais rien ce matin. Le Prince de Ligne qui retourne demain à Bruxelles a l'espoir d'être nommé ici, je le désire. Adieu. Adieu.
Formats de sortie

atom, dcmes-xml, json, omeka-xml, rss2