358. Londres, Dimanche 3 mai 1840, François Guizot à Dorothée de Lieven
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Aristocratie
Interculturalisme
<div style="text-align: justify;">358. Londres, Dimanche 3 mai 1840</div>
10 heures<br /><br />
<div style="text-align: justify;">Eh bien, on ne fait jamais que la moitié de ce qu’on veut. J’ai parlé français ; mais je n’ai pas parlé très briévement. Un speech de sept ou huit minutes, pas un simple remerciement. Cela m’a si bien réussi que j’en suis bien aise. J’ai vu à l’air des gens, que j’étais attendu que, si je me bornais à quelques phrases bien polies, il y aurait beaucoup de désappointement. La curiosité était bienveillante ; le désappointement ne l’eût pas été. Je crois que je me suis rassis au milieu de la curiosité satisfaite et de la bienveillance redoublée. Je vous envoie le speech, que je viens d’écrire pour vous. J’ai trouvé cette réunion assez frappante. Toute l’aristocratie de toute espèce, de toute opinion y était. Et les savants, les lettrés, les artistes, le barreau la cité & deux absences ont été remarquées ; Lord Aberdeen qui n’est pas encore revenu de la campagne, et M. de Brünnow qui n’est pas venu. Le Duc de Wellington a remercié du toast to the navy and the army. Je répète ce que je vous ai dit : Un aveugle qui cherche son chemin. Je devrais dire un aveugle apoplectique. J’ai été très touché de ce spectacle, la grandeur d’un côté, le respect de l’autre, et entre deux la décadence l’impuissance. Il y avait bien de la force d’âme dans le vieillard balbutiant et chancelant. Mais je ne suis pas sûr qu’arrivé à cet état physique, il n’y ait pas plus de dignité à se retirer du milieu des hommes et à finir sa vie, en présence de Dieu seul et de ses enfants. L’exposition ne vaut pas grand chose. Trois ou quatre bons tableaux ; de jolis paysages et des chiens admirables. Souvent beaucoup d’esprit et de sensibilité dans l’intention ; mais une ignorance et un mépris du dessin, et de la peinture qui sont étranges. Milton dictant le Paradis perdu à ses filles a beaucoup de succès. Le Milton est beau, bien grave, bien méditatif, bien inspiré. Les filles sont d’une gentillesse déplorable. On aime beaucoup la gentillesse ici. Un très bon portrait du Duc de Wellington expliquant ses dépêches au colonel Gurwood. Je ne sais pourquoi je vous dit tout cela qui ne vous fait rien.</div>
<br />4 heures
<div style="text-align: justify;">Ce que vous me mandez de Lord Aberdeen me plait beaucoup. J’espère et je crois qu’il dit vrai. Si je ne me trompe nous serons désormais fort à l’aise ensemble. Tout va bien avec les Anglais quand une fois la glace est enfoncée. J’ai dit hier à Lord Grey, que je desirais beaucoup avoir l’honneur d’être présenté à Lady Grey. Demain ou après-demain, j’irai lui faire une visite, à lui, et il me présentera lui-même. En général, je ne crains pas du tout de déroger. J’ai foi dans ma noblesse. Ma pente serait plutôt de ne pas me soucier des petites précautions de dignité convenue. J’y prends garde ici, à cause de l’officiel. Lord Grey, qui a été aimable pour moi, et a paru prendre plaisir à me voir, n’est pas venu chez moi, probablement par un peu de fierté timide et de mauvaise humeur. Mais vous avez raison. Pour Lady Grey ; il n’y a point de difficulté. L’avance est naturelle et Lord Grey y sera compris. M. de Brünnow sort de chez moi. Deux grandes heures. Eh bien, je ne retire rien de ce que j’ai dit mais je dis autre chose. C’est un esprit grossier et subalterne, dénué de ce tact qui tient à l’’élévation, à la finesse et à la</div>
<div style="text-align: justify;">promptitude des impressions, c’est un commis qui sert son maître, et qui le flatte encore plus qu’il ne le sert voulant d’abord se servir lui-même. Mais, malgré et sous tout cela, il a de l’intelligence de la capacité assez d’étendue et de rectitude dans le jugement, je crois même de la bonne</div>
<div style="text-align: justify;">intention, et de l’honnêteté. Nous nous sommes dit beaucoup de choses ; et le bien que je vous dis là, m’a apparu dans la conversation. Il ne sait pas s’y prendre pour servir la bonne politique, et il ne se cassera pas le cou pour elle. Mais en gros, il la comprend, et si je ne me</div>
<div style="text-align: justify;">trompe, au fond, il la préfère. M. de Nesselrode a raison de l’employer. Du reste, il professe presque autant d’admiration pour M. de Nesselrode que pour l’Empereur. Je conviens de l’impolitesse qui vous choque. Je l’ai vue souvent. Mais soyez sure qu’elle est bien générale. Je la rencontre ici comme ailleurs. Et j’ai le droit de le dire, car je suis encore ici à cet état de bête curieuse qui fait qu’elle ne tombe pas sur moi. L’esprit de cotérie domine dans le monde. Chacun reste avec ses familiers, dans ses habitudes, pour ne pas se gêner, par égoïsme et aussi par stérilité d’esprit. Cela est assez sot et fort ennuyeux. Il faut rompre hautainement avec ces mauvaises manières là, leur faire sentir qu’on les aperçoit et leur imposer plus d’égards et une autre conversation. Personne n’est plus propice que vous à leur donner une telle leçon. Mais probablement cela</div>
<div style="text-align: justify;">aussi, vous ennuierait.</div>
<br />Lundi une heure
<div style="text-align: justify;">Ce que vous me dites de M. Andral me contrarie beaucoup. Il se sera piqué que vous ne l’ayez pas reçu quand il est venu. Quel ennui que d’être loin et de ne pouvoir rien faire soi-même ! Je traiterais avec les susceptibilités. Mon petit médecin me dira quelque chose là dessus. Parlez-lui en quand vous le verrez. Et s’il n’y a pas moyen d’avoir</div>
<div style="text-align: justify;">M. Andral, voyez M. Chomel. Il est tout aussi habile. N’y mettez pas de fantaisie, je vous prie, ni de négligence. Demandez-lui son jour, son heure, et soyez là quand il viendra. Décidément, Norwood. Répondez-moi là dessus.</div>
<div style="text-align: justify;">Avez-vous écrit aux Sutherland ? Dès que vous aurez</div>
<div style="text-align: justify;">quelque chose de bien arrêté, dites-le moi. Je suppose que vous savez que Paul est parti Vendredi pour Pétersbourg. M. de Brünnnow m’a dit que sa conduite envers vous, lui avait fait le plus grand tort là. Et ici, Lady Palmerston me</div>
<div style="text-align: justify;">dit la même chose. Elle en pense bien mal.</div>
<br />2heures 1/2
<div style="text-align: justify;">J’ai été interrompu par Nouri Effoudi qui voulait causer avec moi, dit-il. Je m’y suis prêté de mon mieux, mais avec peu de succès. Quelle pitié ! Il faut que je sorte. J’ai une multitude de visites à faire. Adieu. Adieu. Ce discours fait un gros paquet. Adieu</div>
Guizot, François (1787-1874)
987-988-989, AN : 163 MI 42 AP Papiers Guizot Bobine Opérateur 5
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
1840-05-03
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Français
Correspondance
Londres (Angleterre)
Paris, le 27 mai 1848, Madame de Mirbel à François Guizot
France (1848-1852, 2e République)
Politique (France)
Exil
Amis et relations
Peinture
Discours du for intérieur
Archives (Guizot)
Conversation
Asssemblée nationale
Réception (Guizot)
Conditions matérielles de la correspondance
Mirbel, Lizinska Aimée Zoé de (1796-1849)
3, AN : 163 MI 42 AP 143 Papiers Guizot Bobine Opérateur 23
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
1848-05-27
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Français
Correspondance
Paris (France)
Paris, le 23 février 1849, Madame de Mirbel à François Guizot
France (1848-1852, 2e République)
Politique (France)
Réseau social et politique
Conversation
Bonaparte, Charles-Louis-Napoléon (1808-1873)
Salon
Femme (politique)
Finances
Economie
Jardin des plantes
Peinture
Mirbel, Lizinska Aimée Zoé de (1796-1849)
23, 23 suite, AN : 163 MI 42 AP 143 Papiers Guizot Bobine Opérateur 23
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
1849-02-23
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0.
Français
Correspondance
Paris (France)
Formentin, le 20 septembre 1854, Amable Floquet à François Guizot
France (1852-1870, Second Empire)
Décès
Peinture
Récit
Floquet, Amable (1797-1881)
14, AN : 163 MI 42 AP 147 Papiers Guizot Bobine Opérateur 23
Marie Dupond & Association François Guizot, projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle)
1854-09-20
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Français
Correspondance
Formentin (France)