Paris 31 octobre 1849
4 heures
Morny sort d'ici. Le ministère est changé de fond en comble. Vous verrez les noms. Je ne me rappelle que de Flavigny aux aff. étrangères. On y aurait mis Casimir Perrier si on ne s’était souvenu de la Russie. 1er Novembre. Interruption et impossibilité de reprendre. L’un après l’autre jusqu'à 10 h. du soir. Et bien le message ! Grand étonnement. Il n'était connu de personne. Molé,Thiers, Changarnier, tout le monde pris au dépourvu. Le renvoi en masse des Ministres, la nomination des nouveaux ils ont tout ignoré. Montebello a parlé avec chacun d'eux. Tous surpris, & mécontents. On ne sait que dire. Moi j’aime toujours ce qui est ferme, & il y a dans le message des paroles très fermes. Ceci me parait la préface de l’Empire. Arrivera-t-il ? Puisque le Moniteur ne parle pas, les Ministres ne sont sans doute pas nommés. Il faut du courage pour se mettre à cet ouvrage. Morny hier était rayonnant. Flahaut moins, mais aussi un peu dans l'enchantement du président. Grande amitié de la part de celui-ci pour Flahaut. Il retourne à Londres lundi. Thom est arrivé hier de Vienne. Il me dit que l’affaire des réfugiés est complètement réglée. La Turquie s’oblige à les interner dans une ville de l'Asie mineure reculée, & là de la garder à vue. Cela s’applique à Kossuth Zamansky & & 15 en tout les principaux. Je ne sais pas pour Bem, à Vienne l'affaire est regardée comme finie. Et Pétersbourg a toujours agi d'accord avec Vienne sur ce point. Je suis curieuse de ce que j'apprendrai aujourd’hui, ce sera après le départ de ma lettre. Mes inquiétudes me reprennent. C'est une grosse aventure qui a commencé hier. Dieu sait où elle peut mener. Bulwer à Paris chez moi hier comme un spectre. Une heure après il repartait pour Londres. Il était depuis 5 jours très secrètement à Paris, il dit pour ses yeux. Le public dit, grosse intrigue politique. Moi, je crois, Donna Julia. Quoiqu’il en soit l’ambassade en grand émoi, car il n'y était pas allé. J’ai un une lettre fort intime de lord John qu'il avait recommandé à Brunnow de m’envoyer par courrier. Rien que les affaires de France. Très Président, & poussant au coup d’état. Blâmant Thiers, son rapport. Enfin une lettre assez intéressante. Pas un mot sur ce qui j’ai dit de Palmerston & Normanby. C'est beaucoup qu’il ne se soit pas fâché. Le silence me convient.