Transcription Transcription des fichiers de la notice - Cours privé d'astronomie (séance 1) d'Arago Chastenay, Victorine de 1811-11-10 chargé d'édition/chercheur Beaubois, Francis Projet Chastenay ; projet EMAN, Thalim (CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle) PARIS
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1811-11-10
FRADCO_ESUP378_6 _46-47
Français

Ce 10 nov[embre] 1811

 Ce matin j’ai eu l’avantage de recevoir Monsieur Arrago, et j’ai eu le plaisir bien grand de l’entendre causer sur l’astronomie. Clair dans ses explications, complaisant dans ses réponses, ce jeune savant portait la lumière dans mon esprit. La lumière, il lui appartient de la répandre comme il lui a été donné de l’analyser.

            Il m’a dit de considérer les étoiles, c’est-à-dire leur système entier, comme tournant autour d’un axe, dont notre œil et l’étoile polaire indiqueraient la direction. Ce n’est point relativem[en]t à notre verticale que nous devons considérer ce mouv[emen]t circulaire des astres. Notre œil sur ce globe, et représente le centre du globe. Et en effet, tous les points d’une sphère répondent justement à son centre. Mais notre

perpendiculaire à sa surface n’est rien, et ne saurait être prise en considération.

            Il est facile de concevoir que le pôle étant élevé à 90 degrés [note dans la marge : l’obs[ervatoire] de Paris dans de 48 deg[rés] 50 min[utes] 11 secondes] sur l’horizon, l’axe autour duquel se meut, ou paraît se mouvoir le système des étoiles, est incliné au plan de notre horizon, et comme que par une suite nécessaire les cercles décrits par les étoiles nous paraissent toujours obliques. Les étoiles rapprochées du pôle ne se couchent point et leurs orbites sont pour nous autant de couronnes. Les cercles s’agrandissent à mesure que tous les cercles concentriques en descendant le long de leur axe commun jusqu’à ce qu’à l’équateur, c’est-à-dire au milieu de l’axe, leurs cercles doivent ils soient forcés de rétrécir leurs circonférences, et de se rapprocher de l’autre pôle.

D’après l’inclinaison reconnue de l’axe du monde, relativem[en]t à nous, il est clair que beaucoup d’étoiles doivent se trouver tour à tour au dessus et en dessous de notre horizon ; celles-là se lèvent et se couchent. La courbe qu’elles décrivent nous fait l’effet sur notre horizon de celle d’un arc de triomphe ; mais l’ordre relatif du ciel est si d’une constance absolue. + [note dans la marge : les astres achèvent leur révolution autour de nous en 24 heures moins quatre minutes. La variation à cet égard ne passe jamais quelques secondes et même nous reviendront sur les courbes. Cette période de 23 heures 56 minutes est ce qu’on appelle le jour sidéral. On a réglé sur cette division du temps une pendule de l’observatoire. Le passage des astres au méridien se fait exactement chaque jour à la même heure sidérale mais on conçoit que le retard l’avance journalière de quatre minutes sur le jour solaire ??? doit amener promptement une différence considérable dans les heures du passage au méridien calculées d’après le jour solaire. Elle est de douze heures en 6 mois, et voilà ce qui produit sur notre horizon la différence du ciel d’hiver au ciel d’été. Les astres que nous contemplons sur nos têtes pendant les belles nuits de l’été y passent l’hiver le jour pendant l’hiver, et ceux qui dans les nuits glacées de l’hiver ??? brillent si vivement à nos regards y ??? les étonneraient pendant les jours en été, si l’éclat du soleil n’absorbait leur clarté.] qu’à ne considérer que les objets terrestres, jamais le lever ou le coucher d’une étoile ne pourra nous tromper pour ??? ou pour le lieu, et ce qui trompe nous donne le change à cet égard c’est l’heure différente à laquelle les inégalités du jour nous laissent distinguer les astres.

            Le Soleil ne suit pas cette marche uniforme. Si le Soleil y était assujetti, la longueur respective des jours, ne varierait pour encore

 

point de la Terre. Mais il déroule une spirale, mais et il la déroule lentement. Nous appelons tropique les cercles ou les points qui limitent sa carrière. L’écliptique est la route oblique qu’il parcourt en roulant pour les atteindre. On a de toute antiquité partagé l’écliptique en 12 signes, division arbitraire qu’on a déterminé dans le ciel par l’arrangement fictif de certaines étoiles. Le Soleil, avançant ou rétrogradant chaque jour entre les tropiques, doit aussi se trouver success[ivemen]t en rapport avec chacun de ces groupes d’étoiles, dont la situation est toujours fixe et l’orbite toujours constant uniforme. Ainsi le soleil, dans le cours d’une année, a du parcourir les 12 signes.

            La marche des planètes ne ressemble point à celle des étoiles. C’est L’axe des orbites qu’elles parcourent passe par le centre du Soleil. C’est avec lui, c’est entrainées par

lui en quelque sorte, qu’elles paraissent aussi tourner autour de nous. Aussi Il semble aisé d’expliquer la marche des étoiles dans l’expérience l’hypothèse du mouv[emen]t apparent mais celui des planètes ne saurait y rentrer. Les anciens qui s’y tinrent furent obligés de recourir sans succès à des théories compliquées pour se rendre raison du cours différent des planètes.

            On nomme zodiaque le champ que parcourent les planètes dans leurs révolutions. On confond trop souvent le zodiaque et l’écliptique. L’orient a placé dans le zodiaque 27 ou 28 constellations.

            J’ai dit que les étoiles étaient fixes, mais c’est relativ[emen]t à leur système, et à leurs positions respectives. Tout ce système a une marche insensible, en fait en 24 000 années, une révolution qui seule donnerait l’idée de l’infini dans l’univers. Cette révolution place nécessairement peu à peu le soleil dans un rapport différent avec le milieu des étoiles. Le Soleil, après 2000 ans, a passé

du bélier au taureau, et ensuite d’un autre signe à l’équinoxe du printemps. Mais ce n’est point relativ[emen]t à nous que sa courbe change, et nos climats n’en peuvent être altérés.

            Rien de si beau que l’idée des astres. Celle de la lumière, celle de l’ordre, celle de Dieu s’y rattache, et notre âme s’élance vers la toute puissance céleste, avec tout le bonheur qui naît de l’admiration et de la confiance. Plus de bornes pour sa portée, elle jouit du plus grand spectacle et comprend encore au-delà plus de crainte de sa faiblesse, elle jouit de tout ce qui l’étonne, tout ce qu’elle contemple est parfait et la bonté ne dans notre intelligence ne peut se séparer jamais de la souveraine sagesse.

            Nos pères ont lu dans le ciel leur origine et leurs destins. Ils ont élevé leur cœur en élevant leurs yeux  ; et si l’inspiration n’est pas seulement un délire,

s’il lui est accordé de gonfler le cœur de sentiments, en le pénétrant de vérités, c’est en regard la vue du firmament que l’inspiration a dû naître.

            La vertu est l’inspiration céleste sublime. Elle est religieuse quand elle nous saisit, quand son enthousiasme nous ravit de délices. C’est le ciel qui l’enseigne au jour, c’est le ciel qui l’enseigne à la nuit. Et les premiers des sages, les premiers des poètes, ont chanté l’univers, que les premiers sages c’est dans les astres que s’est placé l’idée instinctive de Dieu. L’orient Les astres ont été les dieux, et quelques dieux encore, et quelques anges du moins ont toujours animé leur cours ! La vie respire pure, dans cette immensité, le silence y est harmonie, le calme y est exaltation, le repos y est une extase !