A.2.949
Ms 25 001
bre 1788
Répondu le bre 1766
Tourmenté cette nuit, Monsieur, par une colique d’estomach
affreuse, je n’ai pas la force de sortir. – Je me hâte de vous
mander, que hier au soir j’ai vû la personne, qui peut nous
assurer 3 et même 400 souscripteurs ; – qu’elle m’a demontré qu’il
falloit bien se garder de donner une forme périodique à un ouvrage
nationnal ; il y a plus : le privilège étant obtenu, elle
feroit les fondre ; – Mais point de journal ; – d’ailleurs des
raisons que je ne puis confier au papier s’y opposeroient.
Il faut voir
Il faut rédiger un précis a mettre sous ses yeux.
Il faut signer les conventions préliminaires.
J’attendrai votre réponse, mais d’avance je vous garantis
un succès certain ; – mais il faut avoir le privilège, et
pour l’obtenir, il faut presenter l’ouvrage comme entreprise littéraire
et patriotique, comme ouvrage de bibliothèque ; – cela leve toute
difficulté.
J’attends les ordres de l’amitié.
À monsieur
Monsieur
avocat au Parlement, n° 20 :/:
a 2 t
8 avril 1788
À monseigneur, ………
pair de France, etc, etc
Monseigneur,
Vous avez lû avec quelque intérêt cet ouvrage, dont
le premier mérite est de rendre hommage à la mémoire
d’un des guerriers le plus vertueux que la
produits : vous avez èxigé, que je fisse paraitre
l'édition que j’avais préparée, pendant les répétitions ;
vous m’avez rassuré sur le jugement que le public
porteroit de ce drame héroïque : j’ai dû cèder
à vôtre opinion, et sur tout avoüer, que ce
n’est pas sans quelque plaisir.
Le suffrage de MM. les comèdiens, celui
d’un nombre infini de personnes, dont le jugement
pouvoit faire autorité pour moi, le sujet surtout
m’avoit fait concevoir de cet ouvrage quelques
espérances flatteuses au moment, où Bayard
la grâce de son rival. J’avois vû plus d’une fois les
larmes couler dans des lectures particulieres ; il me sembloit
que je pouvois, sans me tromper moi même espérer,
que l’effet théâtral ajouteroit encore à l’intérêt du
sujet.
Mais lorsque j’ai vû le rôle de Laure
maniere, qu’à peine on a entendu un seul vers ; lors
que le rôle d’ Octavio, dont la sombre douleur et la
Un compositeur, qui joint à une connaissance
la
” et que méconnaitra l’œil même de son père. ”
Mais j’avois entendu réciter le rôle de Bayard
par cet acteur dont la diction brulante est une
emanation de cette âme sensible qu’il reçut de la
nature. Il me sembla, que ce rôle suffisoit
de Clinchetel ; le titre d’heroïque sur tout y
Il y a plus. Les acteurs eux
de cette maniere de composer et de dire, qui caractèrise
un genre dont ils se defient. Aussi dans le rôle de
Laure
parce qu’ils sembloient avoir une teinte trop héroïque.
Cet ouvrage avait été reçu dès
mélée d’arriettes ; alors elle êtoit ècrite en prose.
Dèpuis je la mis en vers ; reçüe de nouveau sous
cette forme, on suspendit sa représentation, et l’on
me demanda d’en faire une comédie héroïque ; dans
laquelle je ne conserverois que quelques intermèdes.
J’y consentis encore. La pièce fut reçue pour la
troisième fois, mais au moment des rèpètitions
on èxigea des coupures, et toujours dans ce malheureux
rôle de Laure
J’avois, par exemple, pensé, que Laure
au 3e acte èxhaler sa douleur aupied de la tour
où son amant est renfermé, dans le moment
où elle ignore, que Bayard
pouvoit offrir un tableau intèrèssant. Octavio
à qui sa reconnaissance fait un devoir de ne point
voir Laure
amante l'amour ce silence èffrayant doit nécéssairement
eE
parce qu’en èffet elle paraissoit incohérente et froide,
mais que Sainval
Du Gazon
de parler aux cœurs, et d’attirer à elle l’ame du
spectateur, eussent donné à cette scene tout l’intérêt
qu’elles répandent sur les moindres détails, quelle
difference pour moi ! Artistes des deux sexes,
fées enchanteresses, ou magiciens créateurs, dont
l’ame s’unit à notre âme, il n’est que trop vrai,
que notre déstinée est entre vos mains. Peres
adoptifs de nos enfans, vous leur donnez une seconde
naissance. Le moment même où nous les engendrons,
est celui où le feu du génie nous ègare quelquefois,
en nous embrasant ; remis entre vos mains, une
création nouvelle assure leur èxistence. Je crois voir le
fils de Sémélé qu’un dieu renferme en lui même ; après
que sa mere a été consumée par le feu celeste, et ce fils
conservé par une faveur si grande, est par la suite un conquèrant.
Je vous laisse à juger Monseigneur, combien
je dus souffrir en secret, lors que je vis
que l’effet de plus d’un rôle étoit perdu pour moi : mais ce que je dus
trouver bien extraordinaire, c’est que le soir même de la
1re reprèsèntation, on eût sans mon aveu
décidé de ne point afficher la seconde. Il est de
regle au théâtre que toutes les fois qu’un ouvrage
est achevé, on en donne la seconde représéntation
à moins que l’auteur ne s’y oppose ; et jamais
M.M. les comèdiens français ne manquent à cette
loi du théâtre : mais aussi point de principes
parmi eux, qui n’annoncent que c’est le théâtre
de la nation ; il n’est point chez eux de cœur
qui ne soit pas français.
Le
le plus de pretention : mais malheureusement on les laisse maitres absolus ;Le rôle de BayardBourbon
et plus encore celui d'
par le **
la même injustice. La premiere fois ce fut lors que je donnai
au théâtre ma Clemence de Henri IV, ou la
de joie et de reconnaissance avec lesquels les habitans
de la campagne vinrent s’unir aux habitans de
du moment où le siège avait eût été levé par les Espagnols.
J’avois saisi ce trait historique, et nècèssairement ce
tableau remplissoit bien l’espace de temps qu’il falloit
pour que Laure
pieds de Bayard,.oO
les habitans de
n'arrivassent qu'à la fin ; àlors les deux airs chantés
par l'une des femmes et par deux des guerriers se
trouverent trop rapprochés. oOqu’en ce moment
**
d’avoir honoré la mémoire du preux chevalier ; vous
avez ètè d’avis que l’on m’avoit rendu service en
ne joüant plus l’ouvrage : mais il en est un
certain public, qui ne juge que par l'èvènement ;
mais j’avois enfin le droit le plus incontesttable
à rèclamer. Il est donc de certains hommes,
avec lesquels, il y a toujours quelque loi pour faire
du mal, et jamais pour faire du bien. On m’a
depuis opposé certaine raison, dont l’énigme est
encore inèxplicable pour moi ; mais on n’avoit pas
cette raison le soir même de la premiere reprèsentation
mais ce qui est juste doit l’être indépendament
des circonstances ; un corps ne doit jamaisr aux loix
qui font la base de son ètablissement, que même en supposant
qu’il eût à se plaindre de quelque offense particulière ; sa gloire doit pouvoir plus sur lui, que ses ressentimens.
Messieurs les journalistes ont cependant trouvé
quelque talent, des vers heureux, et des sentimens s
dans cet ouvrage perdu pour moi, après tant de travaux ;
je ne puis trop les remercier de leurs suffrages. pP
que jamais ils sentent la nècèssité de soutenir
l’homme de lettres contre les degoûts, qui èteindroient
en lui jusqu’á l’amour du travail. oO
leur rendre grace de lutter contre la préférence
exclusive donnée aujourd’hui à ces caricatures
plus ou moins brillantes qui se succèdent sur l’un
de nos théâtres. Il y a quelques années dèjà, que
l’auteur profond, ènergique, èloquent du comte de Comminges
masque de Moliered’Ésope
conservent et propagent le vérittable caractere et la
tradition premiere de la haute comèdie, tel que
les avoit conçus l’inimittable auteur du
Puissiez vous, Monseigneur, trouver quelque
plaisir à relire l’ouvrage, dont je vous hommage !
J’avois resolu de garder le silence sur les plaintes
que j’avois a faire : mais j’ai crû me devoir cette
sorte de justification au moment, où MM. les comèdiens
vont remettre au théâtre ma tragèdie de
C'étoit pour des hommes tels
que vous, que le Pindare
principibus placuisse viris non ultima laus est
et moi, j’ai pris pour devise, avec vous, Monseigneur,
ces vers du même Poëte ;
ô et praesidium et dulce decus meum. /:/
_____________
_____________
bre
à
Préface.
Je ne retracerai point ici tous les exploits, et
surtout les actes de bienfesance et de vertu qui
ont rendu la mémoire du sans reproche et sans peur
Je n’extrairai donc de la vie de Bayard
que ce qui est relatif à l’ouvrage que je donne
aujourd’hui, et je placerai dans quelques notes
historiques tout ce qui tient à l’histoire des guerriers
qui ont combattu à ses côtés.
Bayard
pique dans le haut de la cuisse à l’assaut de
retranchement, fut porté ensuite dans la maison
d’une dame qui lae
ses biens, son honneur, et celui de ses filles. La
ville avoit été bien tôt forcée par les Français ;
mais la présence de Bayard
garde assurée pour cette mere sensible, qui de ce
moment prodigua au bon chevalier, ainsi que ses
files, les soins les plus touchans. On sçait quel
combat de reconnaissance et de générosité signala les
Bayard
a renduë immortelle.
Dans un autre moment, Bayard
CesarAlexandre
bon Henri IV
lequel la gloire même perdroit tout son prix, vo[it]
arriver chez lui une jeune fille, qu’on lui avoit amenée.
Le chevalier esperoit ne trouver dans ses yeux que le
caractere brillant du plaisir et tous les charmes de la
volupté. Des larmes coulent au contraire des
yeux de cette jeune victime. C’est une mere que
l’indigence force à sacrifier l’honneur de sa fille ;
c’est la mort d’un père tué dans un combat, qui a
ruiné cette mere si peu èxcusable. Il y a plus :
elle aime cette jeune infortunée ; et dès ce moment
elle alloit être indigne de l’amant dont elle esperoit
faire un èpoux. Essuyer ses larmes, l’envoyer à
nom, la doter après l'avoir réunie à son amant,
voila quels plaisirs délicieux et durables Bayard
èchangea contre l’instant de volupté passagere,
qu’il avoit crû gouter, et dont le sacrifice lui valut
tant d’autres joüissances.
De l’ensemble de ces deux traits de la vie de mon
heros, j’ai formé l’intrigue de la piece, ou d’ailleurs
je me suis plu à peindre toujours Bayard
lui même ; je n’ai changé que peu de circonstances
et j’avais au moins cette liberté.
En ajoutant l’epoque du siége de
le fait d’armes le plus glorieux du bon chevalier
je dus nècéssairement le représenter dans le même tableau
comme guerrier, et comme amant.
une faible garnison et de mauvais remparts
pouvaient-ils tenir longtemps contre deux armées
formidables ? Mais Bayard
chevaliers du plus grand nom se firent un honneur de
combattre à ses côtés.
Un Clermont-TonnereDurasMontmorenci
un SassenageMonteynardLa Tour du Pin
Malessie
la caisse militaire des Espagnols. – Les habitans de
firent des prodiges de valeur sous les yeux du heros,
et j’ai crû devoir consacrer cette anécdote si glorieuse
pour eux au moment de la levée du siege, par la
fête même qu’ils donnent à Bayard
Chaque année, le jour de la délivrance de
est un jour de fête publique pour ses habitans. Le
nom de Bayard
tant de gènèrations. Puisse mon ouvrage y être
représenté à l’un de ces anniversaires, et devenir
un des tributs payé par la reconnaissance d’une ville
dont chaque citoyen avait mérité d’être un des
compagnons d’armes de Bayard
Le trait, que j’ai consacré dans la scène 6e de
mon premier acte est encore une des anecdotes de la
vie de Bayard
Celui des guerriers, qu’il nourrissoit dans
leur vieillesse, dont il avoit doté les filles, et placé
les fils au service, est peut être la leçon de bienfesance
la plus touchante, dont l’histoire et l’art dramatique
puissent consacrer le souvenir : à la mort de Bayard
on trouva dans ses papiers des notes reservées pour
lui seul, sur un nombre infini de vieux guerriers
de veuves, ou de filles d’officiers, qu’il soutenoit par
ses bienfaits, et son testament justifioit ce que je lui fais dire :
En consacrant sa volonté derniere pour vous servir Bayard se survivra.
Une seule partie de mon ouvrage merite d’être
discutée ici, et j’avouerai, qu’elle est celle à laquelle
j’ai attaché le plus d’interêt en travaillant ; c’est
le moment où j’ai mis en scene le connetable de
Bourbon, et Bayard. Mais plus d’un motif m’a
déterminé à placer cette scene, qui semble episodique
mais qui rappelle un trait si touchant de Bayard
mourant, et sur tout une anecdote de la vie du
connettable, qui est trop peu connuë.
Dans des Mémoires particuliers, que j’ai lûs, et
qui détaillent les malheurs et les exploits de ce
prince si coupable, mais d’ailleurs si grand et si
cruellement pérsécuté, il est dit que le connètable
avoit eû le desir de s’expliquer avec Bayard
traité qu’il avoit fait avec Charle Quint
dans un moment, il avoit èté frapé de l’idée d’associer
le bon chevalier aux projets de sa future grandeur
et de la possession de ce trône dont l’adroit souverain
avoit sçu présenter à Bourbon
Je n’ai pû, et je le crois, je n’ai point dû resister au
plaisir d’enrichir mon ouvrage de cette anecdote précieuse.
Si lors que l’on voit paraitre sur la scene Sertorius
et Pompée
frapé en ce nommant ces deux heros de l’ancienne
la plus vive sensation, tout autre intérêt de la
piece à part, de quelle douce èmotion doivent
être affectés des français en voyant Bayard
Bourbon
accablé par les reproches du chevalier lui dire enfin ;
plus te me hais, plus je t’estime.
Les paroles si célébres de Bayard
si digne d’être admiré ne devoient pas être mises
dans une autre bouche que dans la sienne ; c’est
comme si l’on fesoit prononcer à quelque roi où gèneral,
la courte et sublime harangue de Henri IV
pour combattre la Ligue dans la plaine d'Ivry
Enfin si en rapprochant BourbonBayard
j’ai abusé du Quid libet audendi d’ Horace, au moins
dussè-je un jour être vaincu par toi !
Ce que je dis au 3e acte des soins que le
bon chevalier vouloit que l’on prit des blessés, soit
Espagnols soit Français, est encore un de ces traits
caractéristiques, que je n’ai point dû négliger…
Le détail sur le souterrain, qui avoit servi à quelques
fuyards est consacré par l’histoire ; quand aux bandes
piemontaises, dont je parle dans ce même endroit
on sçait comme dès lors le regiment de
Joüissoit
quelle valeur, quelle fidélité irréprochable il a
conservè jusqu’au moment où j’écris le dépôt sacré de
gloires et d’héroïsme, dont un Brissac
le 15e siecle allumé ce foyer qui semble ne devoir
jamais s’eteindre.
C’est ainsi que j’ai rapproché tout ce qui pouvoit
ajouter à la ressemblance du portrait que j’osois
esquisser. Si je regrette bien sincerement ainsi que je
l’ai dit plus haut, que l’on ait appliqué à d’autres
guerriers des mots èchapés a la grande ame de Bayard
comment s’est-on permis de lui attribuer à lui dans
plus d’un ouvrage devenu cèlébre au théâtre des
actions qui n'étoient pas les siennes.
Comment ne pas respecter la verité historique
en parlant d’un guerrier, qui est si cher à la nation
et dont la vie est l’ecole la meilleure pour tout
Français qui entre dans la carriere des armes ?…
Comment a-t-on rendu GastonBayard
et jaloux l’un de l’autre ? Comment a-t-on eû la
pensée de faire présenter un cartel par Bayard
à qui ? À son général, au neveu de son roi,
au prince qui lui êtoit le plus cher ? Et dans
quel temps ?… Au moment d’une campagne, qui
fixoit le sort de cette guerre, à la veille d’une bataille
devenue dèpuis si cèlébre dans nos faites ; – – et pour
qui ce duel ? Pour une femme qui n’est qu’un
personnage supposé ? … sans reproche
commettre une telle faute ! Et les jeunes gens que
vous conduisez au théâtre, et qui ne connaissent point
assez l’histoire pour être en garde contre une telle
fiction, emportent avec eux l’idée de cette scene
que je trouve inéxcusable ! En vain l’auteur a mis
BayardGaston
fait son testament en sa faveur, s’il meurt dans ce
duel si ridiculement imaginé ? Pourquoi
supposer une faute pour le plaisir de créer ensuite
des traits de générosité déstinés à l’effacer ?
Qu’un romancier suppose une intrigue d’amour,
mette en action une belle, dont plusieurs guerriers
se disputent le cœur ; qu’il suppose qu’un combat
dicté par l’honneur, comme celui de Bayard
qu’il ait même la folie de rendre François premier
temoin et juge de ce combat absurde ; que ne pardonne
-t-on pas à un romancier ? Encore ne devroit-on
permettre ces ècarts d’imagination, que lors qu’il
peut en resulter de grandes vérités morales, et
des leçons frapantes, utiles à toutes les classes
d’hommes. Mais il devrait être déffendu de
defigurer les veritables traits de nos heros.AlexandreApelles
fit son portrait : le peuple français devrait
proscrire tout ouvrage, où ses CondésBrissac
ses DunoisTurenne
à ses yeux par les tableaux mensongers que l’on
en feroit. Dans le
orgueil ; dans la nation française, ce seroit
vénération et reconnaissance. Par quel chatiment
assez grand pourroit-on punir l’artiste, qui oseroit
porter une main sacrilege sur la superbe basilique
de
goût seroit de peindre des ruines ? Ceux qui
dénaturent l’histoire, et sur tout lors qu’il s'agit
de ces hommes qui font èpoque pour la posterité
commettent le même crime. Combien d’ecrivains
avec du talent d’ailleurs ne sont en ce genre que
des peintres de ruines !
Je ne dois pas omettre ici des traits précieux
qui ne pourront qu’intérésser mes lecteurs.
BayardTerrails
maison ancienne du
chevalier s'étoient déjà rendus fameux par leurs
exploits et par leurs vertus, avant que le
eût été donné à la Aubert Terrail
cinquieme ayeul du chevalier avoit été tué dans
une bataille à côté du Dauphin viennois
Humbert
l’appannage de l’heritier du trône français,
les Terrailss des
successeurs de Hugues CapetPhilippe 4e
ayeul du
JeanPierre I er
La mere de Bayard
Blanche de Loüis IX, le
modèle de toutes les vertus ; aussi le
l’aimoit-il de l’amour le plus tendre. Aussi bon
père, que fils sensible, ayant eû d’une
demoiselle née d’une maison noble d’
une fille naturelle digne en tout de son père.
Il l’éleva, comme si elle eût été sa fille legitime.
Elle fut richement doté par les freres même du
de vertu ne devoit manquer au chevalier sans reproche
Après avoir lû tant de traits admirables de la vie
de Bayard
si bon regnoit sur un peuple de tigres. Cette
reflexion sur Henri IV ne m’eloigne pas de
Le bon roi se trouvant à
resolut de faire èlever un tombeau digne de la
gloire de Bayard, et digne du monarque qui
guerre de Henri
et beaucoup d’autres èvènemens suspendirent l’effet
d’un projet que le monarque n’avoit jamais perdu
de vuë. uUà la
et le ciel sembla la punir d’avoir pû produire
un monstre capable d’un pareil attentat, en suscitant
contre elle une foule de tirans subalternes.
Cependant en d
rassemblés à
reviendroit à peu près à 2000# de notre monnoie
d’aujourd’hui. Mais cette somme fut dissipée, et
bien tôt employée à un autre usage.
Ce n’est que depuis quelques années que la peinture
et la sculpture se sont disputé la gloire de rendre
ou les traits ou Bayard
Enfin au moment où j’écris une souscription est
ouverte pour concourir à èléver ce même monument
projetté en vain par Henri IV
militaires se sont fait une gloire de concourir à cette
souscription. Un gentilhomme qui par les femmes
descend de Bayard
souscripteurs, et le premier prince du sang a
souscrit lui seul pour une somme quatre fois plus
considérable que celle que les ètats du
avoient accordée en
Jè terminerai ces détails par une observation
bien précieuse pour tout ami de la vertu, pour tout
guerrier sensible, dont l’âme est faite pour sentir
le prix de cette recompense qui tient à l’estime
et à la vènèration de la postèrité.
Bayard
Bayardivré de bataille, n’a pris aucune
ville, et cependant son nom est un des plus cèlébres
de notre histoire, je ne sçai que celui de Henri IV
que l’on ne puisse prononcer sans être pènétré
d’un sentiment ègal a celui dont on est affecté
en nommant Bayard
se trouve-t-il placé à côté du heros, qui gagna
plus d’une bataille, et qui d’ailleurs comme roi,
comme legislateur, comme grand politique èffaça, t
Je ne dirai pas seulement tous les princes ses
contemporains mais encore tous les souverains
qui l’avoient-prècèdé sur le trône françois. C’est
que Bayard
que ce chevalier si intrépide dans les combats fut
d’ailleurs le plus loyal, le plus magnanime, le
plus sensible le plus clement des guerriers, des amis,
des gentilshommes. À ce nom que le bon Henri
adoptoit comme celui qui devoit le rapprocher le
mieux de toute sa noblesse, comment ne pas regretter
que cette même noblesse française ait tant perdu
de se prérogatives ? Sans doute il êtoit affreux
que des milliers de tirans deployentassent
les autres leur banniere, entrainassent au combat
leurs vassaux, et que le souverain, le seigneur
suzerain de tant de petits despotes, fût trop souvent
obligé de les combattre, et plus souvent encore de
négocier avec eux, en s’avouant à lui même quil êtoit
trop faible pour les rèduire.
Mais qu’il y a loin de cette anarchie déstructive
à l’entier asservissement de cette foule de successeurs
de tant d’hommes dont le seul nom donne l'idée
de patriotisme le plus pur et de la loyauté
la plus touchante. En vain on a cherché à jetter
du ridicule sur ces vertus chevaleresques à qui
l'Europe dût tant d’exemples de grandeur, de magnanimitè,
de devouement heroïques. L'esprit de chevalerie
valoit bien sans doute cet esprit de courtisan qui
depuis a dénaturé ce caractere premier de tout
gentil homme français.
Oh ! Combien il seroit digne d’un roi surnommé
Bienfesant
d’heroisme, que l’on n’a pu laisser périr, sans porter
l’atteinte la plus cruelle à la nation elle-même.
Les sciences, les agénie lui même servent aux
plaisirs, à la volupté aux charmes de la volupté
à l’accroissement des richesses fictives, du luxe
et peut-être du commerce. Mais l’ancienne
avoit acquis tous ces avantages, lors qu’elle vit naitre
dans son sein, des TibereSéjanshHéliogabales.
e
connu : lorsqu'èlle eût perdu cet esprit de ses
BrissacCrillonsLa Tr émoille
Plus cet exemple est frapant, plus la
le regarder comme une leçon importante pour elle.
L’époque même où j’écris peut être si favorable
à cette renaissance de la grandeur premiere
de la noblesse française ! Que ce vœu suffise !
Qu’il soit entendu par les dignes heritiers des héros
fondateurs de notre gloire et de notre puissance.
Ce n’est point à la tête d’un ouvrage dramatique
qu’il peut m’être permis de discuter une verité
aussi importante pour tout l’empire français.
Mais comme sujet fidéle et sensible, j’ai pû du moins
exprimer le plus pur des vœux, et tout gentilhomme
digne de ce nom répétera sans doute avec moi
la priere que j’adresse en secret au père, au
souverain, au bienfaiteur de la nation :/:
__________________
__________________
__________________
à
C’est aujourd’hui qu’enfin je justifie ma gloire comme chevalier mes vœux comme sujet.
J’ai déjá donné dans ma préface une idée des exploits
de Bayard
esquisse.
Dès son enfance il avoit été donné pour page à PhilippeBeaugè
gouverneur du
Charles VIII
et ce roi le mena en
du royaume de
cèlébre ; n’ètant âgé que de 19 ans lors de la
bataille de
sous lui, et enleva un ètendart aux ènnemis.
Après la mort de Charles VIII
Louis XII
et de là il fut envoyé à
mis en fuite.
Après la journée dite des Éperons il sauva les det[…]
de l’armée française en arrêtant avec quinze gens
d’armes à la tête d’un pont les èfforts de l’armée
victorieuse. C’est ici que l'on peut dire
Cedite Romani
Il servit encore en
secours de Maximilien
siege de
Mirandole
Il contribua sous les ordres du
la déffaite d’André Gritti
la prise de la ville de
derniere ville qu’il se signala par ce trait de bienfesanc[e]
dont j’ai parlé dans ma préface.
Je ne dois plus penser qu’à déffendre Meziere.
Ce fut en Bayard
contre Charle Quint
de 40,000 d’infanterie et 4,000 de cavalerie, il la battit
avec dix pieces de canon. Bayard
par sa valeur et par sa vigilance. François 1 er
Dès l’année Louis XII l’avoit nommé
lieutenant général de la province du
Ce fut en Bayard
reçut un coup de mousquet qui lui brisa l’épine du
dos ; il mourut de cette blessure agè seulement de
quarante huit ans. Dès l’année
en Boñivet
l’orgueil, et les fautes multipliées causerent les malheurs
de la
et de désastres.
J’ados ici les exploits du bon chevalier au siege
de
pour le rendre immortel.
Moi fidele sujet , vous traitre à vôtre roi & &.
Ce sont les propres paroles de Bayard
Bourbon
comment peut-on mettre dans la bouche d’un autre
guerrier, quel qu’il soit, ces paroles mémorables, et que
la situation même des deux héros rend pus frapantes
encore. Si l’on ne respecte pas de tels traits historique[s]
il faut traiter les hommes comme ils n’aiment que trop
à se voir traiter, ne leur offrir que des fables.
Du fier SottoMaïor tu sçais comme par moi l’audace fut punie & &
L’espagnol SottoMaïor
qui importoit à l'honneur de Bayard
le défia au combat et le tua. Mais il pleura sa
victoire et s’écria ; Si j’avois cent mille ecus je les donnerois pour l’avoir vaincu sans l’avoir tüé. Et l’on a osé d’une affaire d’honneur qui coute des
Duras
des Durfortle cadet de Duras
de Toulouse, pour détailler les services de cette maison
La Tour-du-Pin
on fait remonter son origine jusques aux anciens
Dauphins viennois auxquels les liens de la plus prochaine
parenté l’unissoient. Trois freres de cette maison
servent aujourd’hui avec distinction, et par un choix
ègalement honorable pour chacun d’eux, tous trois
dans une même promotion furent èlévé au même
grade militaire par le feu roi ; epoque rare dans
une famille.
Clermont
dans cette piece êtoit le frere d’armes et l’ami le plus
cher du chevalier Bayard
un tel ami et de soutenir l’éclat de sa maison.
Je placerai ici quelques détails historiques que mes
lecteurs n’y trouveront pas sans plaisir. Ce que
j’ai dit des la Tour-du-Pinà dire
des Clermonts
précis rapide de l’histoire d’une province dont
les titres de gloire se confondent avec ceux de ces
maisons illustres.
Les aA
dès le regne de Tarquin l'Ancien
fondation de
l’aA
eÉ
epoque du regne d’aAugustule ; elle avoit duré
596 ans. pP
viennoise
ville de
devenue la capitale de l’eEoO
Les
dans le cinquieme siecle sous hHonorius
Valentinien troisieme du nom
domination ne dura que cinquante deux ans.
Les rois français de la 2e et de la 3e race possederent
le Boson
êtoit gouverneur se revolta en
de
nom. Rodolphe III
et laissa en mourant par testament ses êtats à
l’empereur Conrad
Dès avant l’année d’Albon
s’étoit établi dans le
descendent les Dauphins. Dèjà les progrés du
gouvernement féodal avoient èté rapides en
Rodolphe III
le Viennois, le Valentinois, et le Diois avoient
leurs seigneurs particuliers. De là cette lutte
continuelle des grands feudataires contre le souverain
et cette foule de bannieres qui s'élevoient pour
entourer et abbattre, s’il êtoit possible, l’étendart
du suzérain. Le
èffets de cette rapide révolution. Le clergé ne
s’oublia point dans un moment, où sa politique
infatigable pouvoit à l’aide des foudres de
recueillir des fruits si prècieux de ses négociations
multipliées. Les seigneurs se partagerent entre eux
des domaines que la faiblesse du souverain n’avoit
plus le courage ou les moyens de leur disputer.
Les empereurs d’
vendre les honneurs de l’investiture en s’en réservant
le droit. Il se trouve toujours au milieu d’une
semblable anarchie quelques guerriers plus braves
ou plus adroits ; d'Albon
guerrier non moins ambitieux que redouttable ;
et Guignes Ier
domaines d’immenses possessions prit le premier
le surnom de DauphinGuignes VIII
le nom de ViennoisHumbert II
avoir sur ses armes d’autres
du Dauphin. Alors le Diois et le Valentinois
êtoient possedés en toute propriété par le
Loüis Aymar
fit don de ces deux domaines au
Ils furent reunis à ceux du Dauphin viennois par
plusieurs transactions dont les èpoques sont consignées
dans l’histoire. Guignes 9 e du nom
Ce fut ce même Humbert
français durent une si riche possession, qui avoit
plus que tout autre Dauphin illustré son pays
par les loix les plus sages et sur tout par les
prérogatives honorables qu’il avoit accordées aux
chefs de toutes les maisons dont les services avoient
bien merités de ses prèdécésseurs ou de lui même.
Les guerriers du nom de Clermont
qu’aucune autre famille signalé leur attachement
au Humberts
1340Clermont sc
en aA
4e du nom trois charges qu’il voulut être à jamais
héréditaires dans sa maison, la premiere fut celle de
capitaine général de ses armées, ou connèttable du
chef de son conseil
la 3e celle de grand maitre de sa maison. Il instala
Aymard de Clermont
On ne doit pas s’étonner de ce haut dégré de
grandeur auquel Humbert
maison de Clermontà l’on sçavait que le
avoit resolu d’abdiquer ses êtats. Le
avoit jetté des vuës sur quelques parties de cette
belle province. Il sollicitoit Aymard de Clermont
Humbert
sçut faire valoir contre lui le motif de la religion,
parce qu’il avoit embrassé l’êtat eclesiastique.
Enfin en
heures les uns des autres et mourut à
il êtoit prieur.
Au moment, où il avoit signé un premier traité
de la cession qu’il faisoit de ses êtats, il avoit eû soin
de stipuler que toutes les prèrogatives, tous les honneurs
tous les titres, et toutes les franchises qu’il avoit accordés
soit aux grandes maisons du
simples citoyens seroient respectés par les monarques
français, et Charles V – ce prince dont la mémoire
est si respecttable par le sur nurnSage que son
siecle lui donna, et que la postérité lui à confirmé,
jura de ne point détruire l’ouvrage des Dauphins et
de regarder comme un dépôt sacré tout ce qui êtoit
un monument de la gratitude et de la munificence
des Dauphins viennois ; ainsi les Clermont joüissent
Depuis l’epoque òu Charles
Dauphin, les Clermont voüerent au monarque
Cette maison a donné des grands maitres
à l’ordre de
clergé de
Les alliances les plus illustres ont perpetué sa grandeur.
Point de siecle òu l’on ne trouve dans les annales du
Aymard
seigneur de Clermont qui fait le voyage de la terre
C’est un de Clermont
C’est un Philibert de Clermont
Montoison
bonheur et la gloire de dégager
mains de l’ennemi et qui renouvelle ce qu’un D’estaing*
publics me sont apportés dans la retraite champêtre que
j’habite. Je trouve dans l’extrait qu’ils donnent d’une piece
nouvelle qu’un jeune homme nomme Sargine sauve la vie au roi Philippe Auguste à la bataille de Bovines.
Je terminerai cet article par cette seule observation
c’est qu’il ni avoit dans tout le
Barrrs d’ancienne création ; c'étoit celles de
Clermont de SassenageBressieuMontmaur
Quel plaisir ne dois je pas goûter en retraçant la
gloire d’une province qui a seule donné tant de deffenseurs à la patrie : Je n’en
exemple, mais aussi glorieux
300 gentils hommes du
bataille de
presque tous y perdirent la vie, et pas un seul n’en
revint sans avoir ètè blessé.
Sassenage
que les seigneurs de Sassenage
des hauts barons de la province. eE, un Henri
baron de Sassenage
Cette famille a donné aussi à l’ordre de
grands maitres, aux provinces des gouverneurs, aux
armeés des gènèraux.
Cette famille forma d’abord deux branches dont la
premiere eût pour auteur Artaud III, comte
d[e Fo]rez et finit en
n[o]mbre infini de guerriers, entre autres Antoine
qui fut proposé par la noblesse du é
succèder en qualité de lieutenant général de la province
à Antoine de Clermont
Henri,
à la bataille de òu 300 gentils hommes
perirent à ses côtés.
FrançoisHenri
champ d’honneur.
Trois guerriers de cette même famille conduisirent
successivement l’arriere ban de la noblesse dauphinoise.
Monteynard
Bayard
maison distinguée du
guerrier à la Raimond
Montmorenci
alors âgé de 14 ans et fit ses
siege de où il portoit l’étendart de
c'ètoit ce même Anne de Montmorenci
depuis connètable et qui mourut des blessures qu’il
reçut à la bataille de
fourni une si longue carriere tantôt dans la
plus haute faveur tantôt obligé de lutter contre
l’insolente prosperité des gG
Du valeureux Beaumont l’intrepide courage &.
Ce Beaumont commandoit en èffet un des postes
si touchant à la mémoire d’Henri IV
a merité d’être couronné par l’academie des
Inscriptions et Belles Lettres. Nul ecrivain plus
digne de recueillir les titres des heros français et de
les faire passer à la postérité.
Tout est historique dans cette scene : il m’est bien doux
de pouvoir encor placer dans mon ouvrage le nom
d’un guerrier dont les descendans existent et dont
j’ai vû par moi même la noble et brulante sensibilité
en apprenant que ce moment de la vie d’un de leurs
ancetres seroit cité au theâtre avec le nom de Bayardpreux dont le
seul souvenir èleve l’âme et pènétre de vénération.
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à
préface et de notes historiques, le tout ayant
trait au