— Pardon de vous recevoir ainsi, dans cette sorte d’antichambre, nous dit
Comme nous le félicitons de sa bonne mine...
— Oui, je vais mieux, poursuit-il. Ces maudits rhumatismes, qui, l’année dernière ne me quittaient pas... d’une semelle, me jouent maintenant de moins fréquentes farces. On m’autorise à recevoir, à causer tant que je veux.
— Et... et le travail ?
— Je n’en suis pas encore (ô jeunesse passée !) à tracer des pattes de mouche, assis au fond de mon canot, le papier posé sur les rames en croix. Mais j’ai la permission de prendre, à droite, à gauche, des feuillets, un encrier, une plume, et, le matin, dans la journée, le soir, au hasard de la fantaisie, d’écraser du noir sur du blanc.
Vous connaissez ma façon de travailler :
le premier manuscrit de mes livres, dont le point de départ est généralement une histoire vraie, s’élabore sous l’influence d’une griserie cérébrale que j’entretiens en contant mon roman aux gens de mon entourage, en essayant sur eux l’effet des incidents et des mots. Ajoutez que je possède de précieux auxiliaires en de petits cahiers que j’appelle « Ma Mémoire », et où j’ai consigné tout ce qui m’est passé par la tête. Une fois le tiret de la fin aligné au bas de ce texte enlevé de verve, la raison survient et m’ordonne de recopier des chapitres, parfois l’ouvrage en entier. C’est, selon moi, le seul moyen de s’apercevoir des imperfections du style ou des lenteurs de l’action.
— Pareille tâche exige un temps énorme ?
— Quand un volume ne m’a demandé que dix-huit mois de composition — et de corrections — je me déclare satisfait.
— Nous ne lirons donc pas de sitôt le nom d’
— Eh ! mon Dieu ! avant peut-être que vous ne semblez le croire. Lorsque la maladie m’a surpris, j’avais terminé le premier jet de