Cher Monsieur,
J’ai bien reçu votre lettre du 6 octobre dernier concernant le règlement annuel qui n’a pas été effectué en son temps. Je ne comprends pas bien les difficultés que présente ce règlement puisque lorsque vous étiez venu me fois le 1er août, vous m’aviez dit que vous n’aviez besoin que de l’autorisation de M. Matsukata pour nous verser les quinze mille francs annuels. C’était, me disiez-vous, sur de l’argent se trouvant en France que vous deviez acquitter la somme.
Or, maintenant, il s’agit d’espèces qui auraient dû être envoyées du Japon et qui ne le peuvent être en cause de l’interdiction d’exportation des devises. Mais quand vous êtes venu au Musée le 1er août dernier, ce régime existait déjà. Je ne comprends donc rien à ces télégrammes et à ces procédés que je regrette d’avoir à trouver dilatoires.
D’ailleurs, les circonstances font que la situation ne se présente plus de même façon. Il ne saurait être question de faire sauter les scellés pour enlever deux ou plusieurs tableaux appartenant à la Collection de M. Matsukata et par ailleurs, je tiens à vous signaler officiellement que jamais le Musée, qu’il s’agisse de moi-même ou de mon personnel, de son Conseil d’Administration ou de l’État français, ne saurait être tenu pour responsable du dommage nouveau auquel se trouve grandement exposée la collection du fait de la guerre et des périls que peuvent lui faire courir les bombardements. Toutes les œuvres importantes du Musée et en particulier les tableaux ont été ou vont être évacués. A vous de voir si vous voulez mettre en des lieux moins exposés les tableaux Matsukata qui se trouvent dans la Chapelle du Musée.
Je vous adresse cette lettre recommandée pour qu’elle ait son plein sens. Vous savez, d’ailleurs, que l’Administration des Beaux Arts avait manifesté antérieurement son désir de vous voir retirer les collections de tableaux de M. Matsukata de l’Hôtel Biron.
Veuillez
Conservateur du Musée Rodin