ration du privilege de la jeunesse à part, Je ne voy point que s'il est permis aux poëtes avec honneur, voire en un aage bien meur, de coucher leurs conceptions amoureuses en vers, pourquoy il ne doive estre aussi loisible aux autres de faire le semblable en prose. Ny l'un ny l'autre n'est bien seant, dites vous : et souhaiterois que l'emploite de vos escrits eut esté faite en œuvre plus meritoire. Comme s'il n'estoit bien seant au paintre de representer que la Viellesse sur un tableau entre les aages ; et l'Hiver entre les saisons. Au contraire il adviendra qu'ayant pourtrait d'un costé la Jeunesse verde, gaye, gaillarde, et assortie de toutes les couleurs à ce requises ; et d'un autre costé la Vieillesse pasle, morne, melancolique et ridée, je m'asseure qu'il n'y a celuy qui ne prenne beaucoup plus de plaisir à repaistre ses yeux du premier tableau, que du second. Partant je ne voy point qu'il y ait eu matiere d'accuser en cecy le temps que j'ay employé en ce subjet, eu esgard à l'aage auquel je dressay ces lettres. Et ores qu'il y en eut eu, je pensois que la faute eut esté couverte par un long laps de temps, et prescription de plus de trente ans. Or pour le vous dire en un mot, je ne sçay si j'ay en cecy failli, mais s'il y a de ma faulte, elle est double. L'une d'avoir failly, l'autre de ne m'en pouvoir repentir. A Dieu. [ZZ3r°]