La Mergote
Cher Monsieur et ami – C'est ici que vient me rejoindre votre lettre de vendredi adressée à la Photoscopie, où l'on a eu l'esprit de la décacheter et d'où l'on m'écrit en même temps que le nécessaire à été fait pour vos appareils. Je pense donc qu'aujourd'hui vous devez avoir tout le matériel – projecteurs et plus – entre les mains. Pour le surplus du crédit – comme la Photoscopie est en pleine période éditoriale au point de vue des films plastiques français, – ne croyez-vous pas qu'il trouvera son emploi au fur et à mesure des "parutions" ? De même si vous vous trouvez avoir éventuellement besoin d'un troisième exemplaire de tel film ou tel conférencier ? Mais peut-être ferez-vous bien de vous munir de lampes 2,6 Amp. en assez grand nombre, et aussi d'un double jeu de porte-vues pour chaque poste. Je ne vois pas d'autres rechanges périssables.
J'ai commencé par m'abattre ici comme un bœuf assommé par l'hiver de réclusion et de travail que m'a valu le Proust. Après quelques jours j'ai entr'ouvert [sic] un œil et je me suis mis à mes notes de 1926 pour en extraire Adam et Eve. J'espère vous le donner bientôt. La chose est abominablement difficle en ce qu'elle est guettée d'un côté par la physiologie, de l'autre par l'abstraction,
et qu'il s'agit de naviguer entre l'un et l'autre écueil en demeurant clair, concret et probant. – Chaque proposition avancée doit non seulement "tomber sous le sens"; mais encore pouvoir demeurer disponible au lecteur pour ses propres vérifications quotidiennes. Je ne me flatte pas de remplir ce programme du premier coup.
Grâce à vous j'ai été il y a huit jours fort aimablement reçu par le docteur Robert Proust. Nous n'avons encore qu'effleuré le sujet mais déjà bâti les grandes lignes du projet d'illustration – iconographie et localités. J'ai trouvé l'homme parfaitement conforme à ce que vous m'en annonciez.
Vos oreilles vous tintent-elles ? Nous parlons souvent de vous ici, et de façon telle qu'il me semble continuer naturellement ces conversations en vous demandant de trouver ici ma très vive amitié.
Je serre la main des deux garçons dont je conserve un si franc souvenir.