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[1929]
Mon cher Jean, il y a dans ta lettre des choses peut-être un peu injustes. Je ne m’en plains pas, car je les sens amenées par une démarche de l’amitié. Par exemple ta question à propos de deux lettres, que tu m’avais envoyées, l’une où tu blâmais M. [Malraux], l’autre où tu le justifiais – de ne pas critiquer ouvertement les surréalistes. Comment peux-tu penser que j’aie, soit à dessein, soit par un « calcul » inconscient, omis de faire part à M. [Malraux] de la seconde ? Par négligence ? Mais M. [Malraux], que j’interrogeais l’autre jour, m’assure qu’aucune impression trouble ne lui est restée, et même ne lui est venue à cette occasion.
Et tu m’accuses d’embrouiller les choses. Si cela est vrai, c’est malgré moi. Je me rappelle pourtant que jadis je poussais jusqu’à la manie le besoin de réconcilier les gens. Il ne me semblait pas que j’eusse tellement changé.
Tu ne dois pas penser douter que j’aurais eusse agi pour toi tout comme je l’ai fait pour Malraux.
Je me suis demandé si tu n’avais pas été un peu gêné par le fait qu’après avoir décliné ton offre de nous tutoyer, je l’aie prise
- Tes pages sur Valéry me semblent solides, d’une grande portée, et conduites sans défaillance. Mais j’y reviendrai après une nouvelle lecture.
J'eus un jour une querelle avec Malraux. - Il faut accepter ses amis tels qu’ils sont, disait M. [Malraux] - Je répliquais qu’un des grands points de l’amitié me semblait pouvoir être un perfectionnement mutuel. Je ne nie pas que cette réponse ne comporte de la naïveté et entraîne quelques heurts. Cependant...