Transcription Transcription des fichiers de la notice - Lettre de Marcel Arland à Jean Paulhan, 1928 Arland, Marcel (1899-1986) 1928 chargé d'édition/chercheur Société des Lecteurs de Jean Paulhan, IMEC, Université Paris-Sorbonne, LABEX OBVIL ; projet EMAN (Thalim, ENS-CNRS-Sorbonne nouvelle) PARIS
http://eman-archives.org
1928 Fiche : Société des Lecteurs de Jean Paulhan ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
Français
[1928]Mon cher ami,

C'est Malraux qui parlait de coquetterie. Il le faisait en plaisantant, et vous n’avez pas à vous fâcher de ce mot. « Paulhan, voulait-il dire sans doute, parce qu’il a à se plaindre des surréalistes, se pique de coquetterie de leur faire la place belle à la nrf. » – Vous me dites : Il a refusé d’écrire une note sur B. ou sur A. « pour un motif, dont vous avouerez qu’il ne pouvait d’aucune façon l’empêcher de dire ce qu’il pensait de B., à bien plus forte raison d’A. » Je suis de votre sentiment, beaucoup plus vivement, et beaucoup moins gaiement, qu’il ne peut sembler. – Peut-être serai-je amené à vous en reparler.

–Je reste toujours confus d’être allé, un beau matin, à une heure impossible, dans une maison que je connaissais à peine – vous éveiller, – et pour quelle cause ! Si j’ai une excuse, c’est que je l’ai fait sans réfléchir.. mais ma démarche me paraît si gauche et si peu décente, que j’espère que vous en avez été assez étonné pour ne pas prendre d’animosité.

A Varennes, il y avait depuis 6 mois un nouveau médecin. Il faisait des merveilles ; tout le canton chantait sa louange. Parmi les nottables, c’était à qui se lierait avec lui, et avec sa femme. On vient de l’arrêter : c’était un étudiant en médecine sans diplôme, et sa femme, qui n’était pas sa femme, une infirmière. –  Depuis lors, on se souvient qu’il allait était toujours fourré au café, ou chez une fille, la Blandine, dont la famille, depuis trois générations, sert au village de maison publique. Cette fille a recueilli la compagne du « médecin » (on la montrait à présent au doigt), l’a fait vivre pendant un mois, puis lui a donné l’argent nécessaire pour revenir à Paris. Il y a aussi, mêlée à cela, une histoire d’auto non payée. Les nottables sont furieux ; mais les paysans, les vieux surtout, parlent avec attendrissement de « ce jeune docteur, si intelligent, si allant »

–Si vous avez la revue hollandaise : Le Stern de juillet, voulez-vous me l’envoyer ? Elle contient, m’a-t-on dit, une étude de Dirck Coster sur moi.

Europe m’avait demandé qqche [quelque chose] ; je lui ai donné le premier chapitre de mon roman. Pour que je leur indique une date de publication, il faut que je connaisse celle du livre, et, pour

celle-ci, d’abord, celle du fragment dans la N.R.F. ?

–Envoyez-moi votre récit dès que vous le pourrez. J'ai hâte de le lire.

–A propos de mon roman, G.G. [Gaston Gallimard] accepte de faire paraître en même temps les 3 vol [volumes].. Mais, me dit-il, si on les vend séparément, il faut leur donner des titres séparés. Cela m’ennuie ; qu’en pensez-vous ?

–En attendant de lire Tristram Shandy, je l’ai parcouru. Je n’aime pas ça.

–Je vous ai reporté l’autre jour les livres de Malraux, parce que je ne pouvais le voir avant mon départ.

–Voulez-vous dire à Mlle Gras qu’elle veuille bien m’envoyer les épreuves des 6 premiers chapitres du second volume de l’Ordre ? Je ne les ai pas reçues.

–Varennes est vraiment beau, et sans banalité. Vous qui avez toujours habité dans une ville, vous vous rendez peut-être mal compte de ce que peut être une promenade dans un cimetière dont on connaît toutes les tombes. –Je viens d’atteindre l’âge de mon père ; cela me trouble beaucoup.

affectueusement

m.a.