[1927] Jeudi
mon cher ami. Je vous remerciais hier de m’avoir indiqué Port-Cros. Que dirai-je aujourd’hui ? Je suis couvert de blessures, les vêtements en lambeaux et fatigué « pour des mois ».
Je me suis perdu. Votre île n’a même pas de chemins qui « aboutissent ». Ils donnent en pleine broussaille. Parti à 1 heure, à 3 heures j’étais complètement perdu et entouré de buissons. Pour faire un pas, je devais lutter, me déchirer, m’écorcher. J'ai fait 4km ainsi. Jugez comme j’étais quand enfin j’atteignis le rivage. Mais mes aventures ne faisaient que commencer. A quel point du rivage me trouvais-je ? J'ai marché le long de la mer. La nuit est venue. Je sautais de rocher en rocher (Vous pouvez rire!). J'avais une jambe de mon pantalon complètement emportée. Ma chemise était en loques. J'ai dégringolé 3 ou 4 fois du haut des falaises, cassé mes lunettes, les pieds tordus. Je ne sais comment
[Carte postale: La Plage d'Hyères. Les Pins parasols]
B. [bernardin] de St Pierre revu par Melle de Scudéry : j’avais le « sentier de la Solitude ». Voilà où cela m’a mené !
Au revoir. Je vous garde rancune.