Transcription Transcription des fichiers de la notice - Lettre de Gabriel Bounoure à Jean Paulhan, 1951 Bounoure, Gabriel (1886-1969) 1951 chargé d'édition/chercheur Société des Lecteurs de Jean Paulhan, IMEC, Université Paris-Sorbonne, LABEX OBVIL ; projet EMAN (Thalim, ENS-CNRS-Sorbonne nouvelle) PARIS
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1951 Fiche : Société des Lecteurs de Jean Paulhan ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
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Beyrouth

Samedi Saint

[1951] Mon cher ami

Je me permets de vous envoyer un travail dont l’auteur est un de mes étudiants, Pierre Coat, garçon à l’esprit distingué & farouche, subtil et abrupt. Il a traduit le cocktail d’Eliot & sa traduction, - sans que je puisse en apprécier la fidélité, - m’a paru d’une très bonne langue et d’une excellente tenue. Estimez vous qu’elle pourrait être communiquée à l’auteur ? Vous êtes très certainement en relation avec Eliot. C'est Mesures, jadis, qui a été une des premières revues à nous faire connaître ce poëte anglo-américain. Je serais très heureux de rendre service à ce petit Coat qui a beaucoup de dons et de richesses dormantes. Il nous appartient, maintenant, me semble t-il, de mettre les jeunes gens sur les rails. Je vous aurai beaucoup de reconnaissance si votre providentielle influence s’exerce en faveur de mon petit étudiant.

Je suis écoeuré des « ambassadeurs de la pensée française » qui nous sont envoyés de Paris pour révéler notre littérature à ces marches asiatiques. Le comte Louis Gautier-Vigual (sic!) succédant à Emile Henriot, c’en est trop ; Il faut que vous veniez l’année prochaine. Ne me dites pas que vous avez horreur des conférences. Vous ferez autre chose que des conférences. Vous ferez des séances d’affutage d’apories ultra provocantes, des expériences de laboratoire mental... Il s’agit, en effet, de détruire la conférence (qui est une grossièreté) et d’inventer, à la place, une technique capable d’électrifier le cortex des Phéniciens. Dites moi que vous acceptez et je tenterai d’arranger la chose avec Lucet et Joxe.

J'ai vu, il y a peu de temps, Pierre David. Il m’a donné des nouvelles peu rassurantes de Jules Supervielle.

Mais notre ami a toujours été de santé délicate. Je veux croire qu’il ne s’agit que de cette fragilité particulière aux poètes et qui affecte chez eux la jointure de l’âme et du corps.

Donnez moi de vos nouvelles, mon cher ami. Et recevez les amitiés affectueuses & de très fidèles de G. Bounoure