Je vous remercie mille fois de votre amicale lettre. Le silence de l’Orient est chose bienfaisante, mais parfois oppressante comme l’air qu’on respirait au fond des abris-casernes par gros temps de bombardement.
Je suis très en retard avec vous. J'ai beaucoup voyagé ces temps derniers. J'ai passé récemment une semaine en Chypre. Essayé d’avoir quelques renseignements sur Rimbaud par le consul de France. Il ne savait pas son nom. Le gouverneur anglais, administrateur de Cocteau, de Max Jacob sait il que sa résidence du Mont Olympe fut construite pas l’auteur
Je voudrais vous recommander un jeune peintre catalan, Francese Domingo (95, rue de Vaugirard). Je lui crois les dons les plus rares. Il est farouche et timide (oui, un peintre, en ce siècle!) Je serais heureux de savoir ce que vous pensez de ses toiles, si jamais il vous arrive d’en trouver sous votre regard et si son art vous semble le mériter, je serais très heureux que vous parliez un peu de lui à ceux qui aiment la peinture.
J'écrirai volontiers quelques pages sur Fargue dès que je serai sorti du labeur absurde de cette fin d’année. Pourriez vous me faire envoyer « Poème, suivis de Pour la musique ». Je suis très démuni de tout livre , - ma bibliothèque est restée là-bas dans le plus perdu des villages bretons, où je la retrouverai Dieu sait quand. Je voudrais bien aussi recevoir Paulina 1880 et le journal métaphysique de Gabriel Marcel. Mon indiscrétion me fait honte.
Je vais vous envoyer une étude sur Suarès – et prochainement une note sur Hoppenot et les poètes de Haïti pour qui Morand a écrit une préface.
Beyrouth est un cuveau d’eau chaude, un hammam sâle et poisseux, le lieu le plus impur de l’Asie. Il m’y faudra passer l’été. Je n’irai vous voir que l’année prochaine, hélas !
Bien Cordialement