nrf
Paris, 43, rue de Beaune – 5, rue Sébastien-Bottin (VIIe)
nous partons dimanche pour embarquer lundi 30 à Marseille. Nous serons mardi matin à Cargèse.
J'ai ta lettre à l’instant ; j’y réponds sans tarder.
J'espère que tu n’as pas attribué une minute mon silence en réponse à ta première lettre comme une marque de mauvaise humeur. Mes mauvaises humeurs « littéraires » ne durent jamais plus de quarante-huit heures, et plus souvent seulement vingt-quatre. Je ne dis pas que j’oublie. J'ai assez bonne mémoire. Mais je ne suis plus « troublé ». Dès qu’une nuit a passé sur l’ingestion du crapaud.
J'ai pourtant (je ne veux rien te cacher) fait part à [Ramon] Fernandez, rencontré à la revue, La Gerbe d’or d’Henri Béraud, Les Annales politiques et littéraires, Les Annales politiques et littéraires, 1er avril 1928, pp. 13-14.
Maintenant que je regarde les choses sans passion, il est certain que tu aurais dû pu refuser la phrase sur Béraud parce qu’elle énonçait un fait erroné, qui n’avait rien à voir avec l’affaire Siegfried et qui était de nature à me « diminuer » moralement aux yeux des lecteursLa Nouvelle Revue Française, juillet 1928, p. 98-103.SiegfriedLa NRF, juin 1928, p. 867-869.ordre général à moi adressées.
Mais c’est assez là-dessus. Ma décision est un
Seulement si tu voulais être vraiment chic, tu m’enverrais le premier texte « impossible » de P. ou tout au moins le reconstituerais. J'ai absolument besoin de savoir ce que peut dire contre moi quelqu’un qui est en colère et qui n’est pas un imbécile. J'ai beau me critiquer, je ne puis imaginer comment les autres me voient quand ils me regardent avec malveillance.
Tu me demandes un article sur le théâtre. Si, comme je l’espère à moitié, je mets en ordre pendant ces vacances mon Essai sur le théâtre, il y aura peut-être quelque chose à y prendre. Nous verrons.
Tu m’as souvent demandé si je ne prendrais pas une rubrique. Je voudrais que tu me gardes (mais je ne l’occuperai pas tout de suite, peut-être dans six mois ou un an) la rubrique Revue des Revues en lui donnant un peu plus d’extension, afin que j’aie la liberté de parler de tout à propos d’articles, nouvelles, roman politique, etc... paraissant en revue. En somme faire un peu Temps.
Si mes chroniques des Annales te déçoivent un peu, c’est précisément que je n’ai pas toujours le temps de les méditer, d’en « faire une affaire », comme je faisais de mon feuilleton des Nouvelles littéraires au début. Je les improvise presque toujours, surtout depuis mon quelques mois avec mes voyages. Pourtant il faut que tu me rendes le service de faire l’effort nécessaire pour préciser la nature et l’étendre de ta déception. Je vois bien l’ironie amicale que tu mets dans ta constatation que je deviens le 1er des Annales, comme je dans celle que je m’acheminais à devenir le 1er de la N.R.F., mais je ne comprends pas au juste ce que tu veux dire.
Veux-tu dire que je m’acclimate trop au ton de la maison, ce qui serait terrible, s’agissant des Annales ? Ou bien est-ce ton vieux, ton éternel reproche que tu reprends contre moi, contre cette façon d’être « glorieuse » (vaniteuse) qui me fait mener une note critique, une étude, un roman comme une « action d’éclat », qui me pose sans humilité
Car c’est au fond là ton grand reproche : je manque du sens du mystère des choses, je m’en approche sans assez de pudeur, de précaution, je les viole ou je les réduis à leur plus simple expression ; je traduis le vivant en le pre l’analysant comme un mécanisme.
Est-ce cela que tu veux me dire en m’appelant « le 1er des Annales », ou bien est-ce autre chose ? Tu le sais. Une des choses que j’apprécie le plus dans ton amitié, ce sont ces brusques attaques, ces soudaines intransigeances.
Je réfléchis depuis longtemps à tes reproches, à ma [mot illisible barré] manière « active d’éclat ». C'est encore elle qu’on retrouve dans mon PanoramaPanorama de la littérature italienne contemporaine, 1928.Une Conspiratrice en 1830 ou Le Souper sous le Belgiojoso, 1928.
C'est une manière qui correspond à quelque chose de spontané, de profond, de « juif » (peut-être) en moi. Mais j’en suis tellement maître, de cette manière, que travaillant vite comme je travaille, je ne puis en changer.
J'aspire à dépasser mes diagnostics immédiats, à pousser mon analyse plus loin, plus vrai, à me rien schématiser, mais pour cela il me faudrait du temps ; il me faudrait me résoudre à ne plus m’éparpiller. Dans les notules que je te donne, dans les bouts de critiques qui forment le dernier tiers de mes articles des Annales, j’ai l’impression de me gaspiller, de me galvauder, comprends-tu ?
(Je ne sais pas si je pourrai te donner t’expédier des notes avant dimanche. Je tâcherai de t’en faire de Cargèse. Ne rattache pas ce que je te dis au paragraphe précédent. Non, il faut que je liquide mes lectures de mss pour les éditions d’ici vendredi, que je fasse samedi mon article des Annales et deux papiers pour la Gazette de Francfort
– J'en reviens aux Annales. Je serais content que tu me dises comment tu aimerais que fût mon feuilleton, comment tu le concevrais si tu avais à le rédiger (choix des auteurs, groupement, directions).
Je reprends mes derniers feuilletons : le dernier sur Benjamin Constant, fait à la diable, sans voix, superficiel (je te l’abandonne)Les Annales politiques et littéraires, 15 juillet 1928, pp. 11 et 12.L’Enfant de Vallès reste le livre précurseur de tous les romans d’enfant […]. », Les Annales politiques et littéraires, 15 juillet 1928, p. 12.er juillet) écrit à la va-vite le 14 juin avant de prendre le train pour Oslo : le début sur MooreLes Annales politiques et littéraires, 1er juillet 1928, p. 17.Europe NouvelleL'Europe nouvelle, 11 novembre 1922, p. 1419-1420.Les Annales politiques et littéraires, 1er juillet 1928, pp. 11 et 12. B. C. oppose à R. Martin du Gard J. de Lacretelle, « amateur d’âmes » plutôt que « vérittable romancier ».cette croix ce feuilleton parce que mal composé). En revanche je trouve très bien (je veux dire : correspondant à un programme) mon feuilleton sur les Thibault-DorgelèsLes Annales politiques et littéraires, 15 juin 1928, pp. 11-12. me Campan (15 juin). Bien aussi le précédent (1er juin) sur DurtainLes Annales politiques et littéraires, 1er juin 1928, p. 11.Les Annales politiques et littéraires, 15 mai 1928, p. 11.
J'espère que tu n’éluderas aucune de mes requêtesCorrespondance 1920-1959, éd. C. Dalet, M. Lioure, A.-M. Lauras, Gallimard, 2019, pp. 100-101.
Voici les vacances ; faisons notre examen de conscience.
Nos amitiés aux Supervielle
Bien affectueusement à vous deux
Marianne nous envoie ses grandes amitiés et Francis vous embrasse.
– Je t’adresse les poèmes d’une femme qui n’ont été remis par un collègue du ministère, Naggiar (sous directeur d’Asie)Cahiers du Sud.