Voici la première lettre que je puisse écrire depuis quinze jours d’une grêle d’événements accablants ou accaparants.
Bien sûr, je me rends compte que ma note sur « Lautréamont et la critique » était bien près de paraître déplacée dans la N.R.F. [Nouvelle Revue Française] Mais elle représente sûrement ce que je pourrais écrire de moins choquant pour les lecteurs de votre revue. Si je vous envoyais un nouvel article, vous le trouveriez insupporttable, et pourriez croire à une réaction méchante de ma part ; alors qu’au contraire, essayant, par amitié pour vous et avec une entière bonne volonté, d’imaginer de quel livre je pourrais parler, et de quelle façon,– je voyais, entre autres, « 10 C.V. » d’Ehrenbourg – j’ai constaté que je n’en pourrais parler sincèrement qu’avec des professions de foi telles, et un ton de polémique tel qu’alors vous ne voudriez pas risquer une indignation générale de vos lecteurs.
S’il ne s’agissait que de la N.R.F. [Nouvelle Revue Française] je vous aurais envoyé
Si vous le désirez toujours, je puis vous envoyer quelques poèmes ; puisque vous me les avez demandés en toute connaissance de cause. Mais, comme vous êtes plus familiarisé que moi avec les réactions des lecteurs, si vous pensez que la publication de poèmes après cette note, a, pour des raisons quelconques, des inconvénients, dites-le moi : je puis comprendre toutes vos raisons, (sachant qu’elles seraient bonnes) sans aucune arrière-pensée. Ainsi je suis votre
P.S. Je m’étais proposé de vous porter un exemplaire du Grand Jeu, depuis longtemps. Renéville m’avait dit que vous en étiez impatient ; au reste, votre service de presse a été fait avec beaucoup de lenteur. Mais j’ai demandé à André Delons, qui devait vous voir, de vous porter un exemplaire ; j’espère qu’il l’a fait.
Je n’ai pas reçu le n° [numéro] de la N.R.F. [Nouvelle Revue Française] où ma note a été publiée. Je serais très heureux si vous pouviez me le faire parvenir. Merci.
3, rue de la Fraternité
Arnouville-les-Gonesse
(S. et O.)