Votre mot de la Vallée aux Loups a croisé (ou presque) celui que je vous ai écrit aux Arènes, et qui vous suivra sans doute.
Qu’y ajouter ? Nous aurions été heureux que vous veniez vous reposer ici, mais ce n’est que partie remise (cela dépend du plombier). Nous allons essayer de rendre plus conforttable la chambre d’ami, qui n’est encore qu’un « dormoir » (un lit, et c’est tout).
Si Châtenay-Malabry était plus près, j’irais vous voir, à mobylette. Mais par temps froid ou pluvieux, c’est un peu téméraire, et j’hésite déjà à pousser jusqu’à Estampes (13km) ou Arpajon (9km). La vie à la campagne rend très sédentaire. Ce n’est pas pour me déplaire.
Je suis sans nouvelles de Lo Duca – qui doit être au Mexique (où il s’occupe aussi de cinéma). Où en sont ses projets avec Pauvert ? Je l’ignore.
Je viens d’achever la traduction d’un ensemble de nouvelles d’Angus Wilson. Une ou deux, à mon sens, conviendraient très bien à la nrf [Nouvelle Revue Française], et j’en ai dit un mot à Dominique, qui aime A.W. [Angus Wilson] Mais 1°) la nrf [Nouvelle Revue Française] ne publie guère d’écrivains étrangers, n’est-ce pas ? 2°) je n’ai guère de chance, avec elle… (pas Dominique, bien sûr, la nrf [Nouvelle Revue Française]).
Golo, sous ses apparences de bonne brute joviale, a un instinct, une sensibilité qui me frappent. Deux fois, en quinze jours, il nous a évité de graves ennuis 1°) en attirant mon attention, une nuit, sur un chauffe-bain qui, resté allumé par suite d’une fausse manœuvre, menaçait d’exploser (sans qu’il y eût fuite de gaz ou bruit quelconque) ; 2°) aujourd’hui même, en nous avertissant par des grondements bizarres d’un imminent court-circuit électrique qui eût pu provoquer un incendie (un fil dénudé, sans baguette, commençait à « chauffer » ; Golo avait remarqué cette chaleur insolite, imperceptible, dans un coin où nous ne pouvions nous en aviser).
Hors quoi, il nous donne bien du plaisir. Je ne sais pas si je vous ai dit que chaque jour, à 7h¼, je passe ¼ d’heure à jouer avec lui. Le rituel est toujours le même : je vais m’asseoir en bas, près de la radio, commence à le taquiner avec une vieille pantoufle, et nous finissons par nous battre comme des chiffonniers. Ces derniers soirs, ayant du travail, je laisse passer l’heure. Alors, à 7h¼ précises, il monte dans ma chambre, sa pantoufle dans la gueule, et vient la poser sur mes genoux. Si je ne donne pas suite à ses avances, au bout de cinq minutes il redescend en soupirant et, un peu plus tard, il faut que j’aille lui présenter mes
Les boxers ont la réputation paraît-il, d’être extrêmement « comédiens ». Elle me semble fondée, si j’en juge par la diversité des expressions dont il disposes pour traduire ses sentiments, de l’air faussement contrit qu’il prend pour se faire pardonner quelque sottise (qu’il recommencera dix minutes plus tard) à la manière dont il feint un profond sommeil quand il n’a pas envie qu’on le dérange (tout en vous suivant du coin de l’œil), en passant par certains soupirs excédés, reniflements dédaigneux, etc.
Nous l’adorons, tous les deux. Moucky, à son grand étonnement (elle croyait ne pas aimer les bêtes et avoir peur des chiens…)
Reposez-vous.
Et donnez-nous de vos nouvelles.