Transcription Transcription des fichiers de la notice - Lettre de Claude Elsen à Jean Paulhan, 1958-09-30 Elsen, Claude (1913-1975) 1958-09-30 chargé d'édition/chercheur Société des Lecteurs de Jean Paulhan, IMEC, Université Paris-Sorbonne, LABEX OBVIL ; projet EMAN (Thalim, ENS-CNRS-Sorbonne nouvelle) PARIS
http://eman-archives.org
1958-09-30 Fiche : Société des Lecteurs de Jean Paulhan ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
Français
30/9/[19]58 Mon cher Jean,

Comme prévu, G.G. [Gaston Gallimard] (ou plutôt Claude G. [Gallimard?], qui a dicté la lettre) refuse de me laisser publier ailleurs une nouvelle édition de l’Homo eroticus . Je vais donc me mettre à un autre ouvrage sur le(s) même(s) thème(s). Ce n’est peut-être pas plus mal : je me rends compte, en relisant ce livre, 1°) de ce qui lui manque, 2°) de ce qui l’encombre.Cela fait nous verrons comment, avec votre complicité, le faire refuser par G.G. [Gaston Gallimard].

Vous avez manqué les plus beaux jours de l’année, à Janville : les trois premières semaines de septembre. À présent, nous entrons dans l’automne maussade. J’y entre, pour ma part, sans ennui, tout à fait « assimilé » à mon nouveau pays, dont je bouge à peine. J’y travaille mieux et plus qu’à Paris. Comme disait le comte Molé (je crois) [Royer-Collard] à Vigny : « Je ne lis plus, je relis. » Il me semble que, depuis cinq ou dix ans, on publie de moins en moins de livres dignes d’attention. Me fais-je des idées ? Il me semble aussi que la littérature tend à devenir une manière d’archéologie, que nous assisterons à sa mort (en tant que « langue vivante »).Je crois que je n’aimerais pas naître en 1958…

Si j’en crois la rumeur publique, Nourissier serait entré chez Grasset ?La Table Ronde va (une fois de plus) changer de direction. Nouveau rédacteur en chef : J.M. Créach (?). Elle deviendrait une revue d’esprit « journalistique » (??)

J’ai été bien content de ne pas avoir à voter. Je n’aurais pu dire ni « oui » (avec les gaullistes et les « dupés » de mai) ni « non » (avec les communistes et la gauche rêveuse). Tout de même, ces 80 %, c’est beaucoup. Il me semble que 55 ou 60 % auraient suffi.Au reste, je n’arriverai jamais, je crois, à voir dans le suffrage universel autre chose qu’une énorme imposture. On ne se refait pas.

Bien affectueusementClaude

J’espère que vous avez reçu mes Deux Don Juan . Le Livre-Club du Libraire serait très flatté si la nrf [Nouvelle Revue Française ] pouvait leur consacrer deux lignes.