Transcription Transcription des fichiers de la notice - Lettre de Roger Martin du Gard à Jean Paulhan, 1953-11-01 Martin du Gard, Roger (1881-1958) 1953-11-01 chargé d'édition/chercheur Société des Lecteurs de Jean Paulhan, IMEC, Université Paris-Sorbonne, LABEX OBVIL ; projet EMAN (Thalim, ENS-CNRS-Sorbonne nouvelle) PARIS
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1953-11-01 Fiche : Société des Lecteurs de Jean Paulhan ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
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- 1er novembre 53 -

Cher ami, en rangeant les livres de cet été – tâche d’automne … - je suis bien confus de me souvenir tout à coup que je ne vous ai pas remercié du Sade, ni de l’Etymologie ! (Toujours un peu paralysé devant vous, je remets la « comparution » au lendemain, et le trimestre s’écoule... Tenez-moi compte de la tardive bonne volonté que j’apporte aujourd’hui à [comparoiz?] - furtivement...) Au vrai, pourtant, j’ai passé, avec ces deux livres, quelques soirées bien savoureuses ! (J'ai remarqué que pour goûter un franc plaisir à vous lire, il faut que je me tienne, non sur la défensive, mais en dehors du jeu, dans une attitude de spectateur : moins je me laisse convaincre, et mieux je me divertis à suivre vos raisonnements : plus me ravit votre maîtrise.) Ainsi, le goût que j’ai pour l’étymologie est sorti indemne du débat. Car j’ai du goût, ne vous en déplaise, pour l’étymologie. J'en ai fait beaucoup jadis, aux Chartes, avec le père Longuon, avec Elie Berger, à la Sorbonne avec Brunot. J'ai continué depuis. Avant d’employer un mot, j’aime retourner aux sources, retrouver son origine, son sens premier, savoir d’où il sort. Avant d’introduire quelqu’un chez moi, j’ai la même sorte d’exigence. Vous ne m’avez pas guéri de cette manie – peut-être illusoire ) mais qui me donne, en écrivant, bonne conscience, confort moral. Cela n’empêche pas que je je me sois fort amusé à suivre les délicats méandres de votre controverse, et que j’en aie tiré, pour mon instruction, grand profit. On revient toujours enrichi, d’une rencontre avec vous !

Je lis chaque mois votre N.N.R.F. De A à Z, avec une inaltérable sympathie. Je m’y sens chez mi, j’y respire l’air natal...

Je vous serre bien affectueusement les mains,

Roger Martin du Gard