Reims. 43 rue Ruinart de Brimont. (marne)
Voici des nouvelles. Suis en famille depuis 10 jours. Au départ, c’était merveilleux : quitter Paris, où règne mal une dame occasionnant chez moi maux de tête et bien plus, pour aller reprendre vie, refleurir dans le sein des miens. Riche idée ! … Maintenant j’en doute. La dame devenue invisible avait pris place dans le wagon, à Reims elle m’a aisément retrouvé. Je souffre de ne point voir son visage, et d’être encore sous son joug. Ni l’un ni l’autre ne nous sommes écrit. Il n’empêche que je l’aime .. mais elle ? Etc ….
Mon cher Paulhan, vous savez que souvent j’agis et vois maladroitement. Mes dernières visites à vous m’ont fait croire que peut-être il y avait froid (un certain froid). Sans doute il n’en est rien, et vous me trouvez ridicule. J'ai toujours regretté beaucoup n’être qu’un visiteur-ami, ça gêne l’expression. C'est l’histoire : à l’amitié il faut une alcôve, etc...
Vous me renseignerez sur cela et en rirez, dans votre lettre. J'y vois mal, car je suis
Il y a des avantages à être ici. Une sœur Simonne institutrice et bien, en somme, m’apprend la grammaire. Pas à dire, je fais des progrès. Je lis beaucoup, Sophocle, de l’histoire, des Romans Balzac, etc... Pour mon propre travail …..... enfin ! Commencé une pièce de théâtre, ça débute très bien, mais que sera la suite ? : je n’en sais à peu près rien. Des doutes m’assaillent, en grand nombre, même ; ça n’a rien d’extraordinaire, tout le monde en est là, etc...
Soyez assez aimable pour m’envoyer la NRF de février ici, voulez-vous ? Je serai très heureux de recevoir votre lettre, mais moi ai tout le temps, au contraire de vous. Mon père est devenu tolérant, nous avons eu une seule petite discussion : il ne croit guère à la vénalité de la presse française, il est à peu près impossible qu’un français se tienne mal, etc... Vous voyez !
Mon cher Paulhan je vous envoie toute mon amitié ainsi qu’à madame Pascal, et je suis toujours le votre.