Transcription Transcription des fichiers de la notice - Lettre de Jean Paulhan à Marie-Anne Commène, 1952-05-03 Paulhan, Jean (1884-1968) 1952-05-03 chargé d'édition/chercheur Société des Lecteurs de Jean Paulhan, IMEC, Université Paris-Sorbonne, LABEX OBVIL ; projet EMAN (Thalim, ENS-CNRS-Sorbonne nouvelle) PARIS
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1952-05-03 Fiche : Société des Lecteurs de Jean Paulhan ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
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nrf

[Cachet du 3 mai 1952, rue de l’Epée de bois, adressée à]

Madame Marie-Anne Comnène

40, rue Henri Barbusse

E.V. (5)

Samedi 3.5.52, date d'une autre main.

Oui, c’est bien ainsi que l’on voudrait mourir. (C’est ainsi que l’on meurt parfois, en rêve.) Evidemment, il était, au sens des juges, coupable.

Comment sont morts mes amis russesDans une lettre à Claude Roy, Jean Paulhan écrivait : « Des trois amis russes (rouges) que j’avais, l’un (Mirsky, vraiment un type de génie) semble être en Sibérie depuis dix ans — ou mort peut-être. Les deux autres (Babel, Pilniak) ont vraisemblablement été exécutés. » (lettre du 5 décembre 1949 in Jean Paulhan, Choix de lettres, Paris, Gallimard, 1996, vol. III, 1946-1968. Le Don des langues, p.  73).  : MirskyDimitri Petrovitch Svyatopolk-Mirsky (1890-1939) fait partie de la génération des poètes les plus talentueux du début du XXème siècle avec Akhmatova, Mandelstam, Pasternak ou Tsvetaïeva. Mirsky fut publié en septembre 1931 dans la NRF (n°216, pp.384-397, « Histoire d’une émancipation »). Déporté en Sibérie à la suite des grandes purges de 1937, il mourra en juin 1939 dans un camp proche de la Kolyma (cf. Bernard Dandois, « Un prince ténébreux : Dimitri Petrovitch Svyatopolk-Mirsky », Les Temps Modernes 2012/1 (n° 667), p. 165-187)., BabelConnu en France pour son roman Cavalerie rouge et par les Contes d’Odessa, Isaac Babel (1894-1940) avait été arrêté en 1939 et fusillé à Moscou un an plus tard., PilniakBoris Pilniak (1894-1938), auteur de La Volga se jette dans la Caspienne publiée en 1930, est arrêté lors des grandes purges de 1937 et fusillé un an plus tard. (pour ne parler que des célèbres – de ceux que j’aimais le moins) ? J’ai peur que cela n’ait été plus sombre : sordide. Il est affreux de mourir dans un fond de cave.

Un petit essai de sortie ne m’a guère réussi (bien que très timide). Je n’aurai mon lombostat – c’est un corset – que dans cinq joursDepuis son retour de Guinée en janvier 1952, JP souffrait régulièrement de crises de sciatique.

La Corse doit être merveilleuse. Faites un beau voyage, et à bientôt.

Amitié

Jean P.