Merci, ô merci ! J'ai trouvé hier soir ta lettre sur mal table... (Tu as reçu la mienne, j’espère ?) Quel bonheur que la petite Claire s’en soit tirée à si bon compte !
Un mot sur René : son accès d’humeur à l’endroit de Maurice Garçon. Je connais René depuis assez longtemps pour t’assurer de la manière la plus formelle que son propos n’est entaché d’aucune médisance. Pour ma part, je ne vois là-dedans qu’un simple abus – imputable à l’inquiétude où le jette l’affaire en question.
René a toujours eu pour toi une grande dévotion. Si léger qu’il se montre parfois dans le train ordinaire de la vie, il ne relâche jamais rien de sa fidélité – dès qu’il s’agit, par exemple, de St. Ex, d’Honegger ou de toi-même.
C'est dire qu’en cette occurrence, je le crois seulement victime de son impatience. De là qu’il se laisse entrainer par son imagination.
Quant à mon ROMANCERO, c’est quelque chose à quoi je tiens terriblement.
Ce n’est pas du tout une simple plaquette comme celui de [Lorea?]. Mais un long poème d’environ deux mille vers (58 romances). Chacun de ces romances est le fruit d’une expérience personnelle, - en pied de la lettre : mon TESTAMENT dans le domaine de la poésie.
Mais je veux le laisser dormir pendant quelques mois. Car il importe que tout d’abord je te donne PANCHO VARGAS. Si tout marche comme je l’espère, j’y aurais mis le point final environ le premier FÉVRIER.
Quel dommage qu’il me faille oeuvrer dans la plus cruelle pénurie d’argent. Il y a des jours où il me semble que je deviens fou tout de bon ! Tu en as eu, d’ailleurs, la preuve l’autre samedi : oui, j’étais quasiment dingo, ce fameux jour.
Je t’embrasse, et j’irai, si tu me le permets, te voir samedi.