Morillotégia
Erromardie
ST.JEAN DE LUZ
(B.P.)
Ce mercredi,
Je vous remercie de ce que vous avez fait pour MAIE auprès du Comité de « Mesures ». Je m’attriste un peu de voir que l’on trouve la fiancée trop belle. (Depuis 4 ou 5 ans que j’écris pour le théâtre, elle est, hélas, toujours trop belle).
Vous avez la gentillesse de me demander les autres drames courts dont un sot excès de confiance en moi-même m’a fait vous parler à Paris. J'ai, en effet, deux pièces brèves : un drame & une farce outrancière. Seulement, je viens de les relire à l’instant, & elles me paraissent vraiment insignifiantes. Il faudrait que je les récrive d’un bout à l’autre – chose vraiment impossible à l’heure où je vous écris.
Je me trouve pris jusqu’à la nuque dans une tragédie nouvelle assez massive : « Torrès de Quévédo ». (Les Perses, version définitive). Il s’ensuit que ce travail réclame un effort intense & que je ne puis m’en distraire un seul instant ) sous peine de voir tout retomber. J'aimerais, par ailleurs pouvoir y mettre le point final dans le courant du mois d’août.
Je vais sans doute vous paraître indiscret, - mais je voudrais vous demander quelque choses :
Il s’agit de ce « Créon » dont Barrault fit l’hiver dernier plusieurs lectures en son grenier.
J'ai réduit, remanié le texte, etc. Douze épisodes assez courts &, je crois, assez substantiels.
Ne voyez-vous pas le moyen d’en publier quelque fragment, - soit dans « Mesures », soit dans la « Nouvelle Revue Française » ?
Si la chose n’était pas possible, - & c’est le second voeur que je forme auprès de vous ) pourrais-je éventuellement solliciter votre appuis sur la question de l’édition en volume à la « Nouvelle Revue Française »?
Je me permets, à tout hasard, de vous envoyer par même courrier l’unique exemplaire dont je dispose.
Laissez-moi vous dire tout ce qu’une telle chose représente pour moi ; & que vous m’aideriez à sortir de l’espèce d’étouffement moral où je me trouve depuis plusieurs années.
Grand merci encore, cher Monsieur. Croyez, je vous prie, aux sentiments d’un homme qui aimerait un jour pouvoir se dire votre ami.