Transcription Transcription des fichiers de la notice - Lettre de Bertha Rhodes à Jean Paulhan, 1931-02-18 Rhodes, Bertha 1931-02-18 chargé d'édition/chercheur Société des Lecteurs de Jean Paulhan, IMEC, Université Paris-Sorbonne, LABEX OBVIL ; projet EMAN (Thalim, ENS-CNRS-Sorbonne nouvelle) PARIS
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1931-02-18 Fiche : Société des Lecteurs de Jean Paulhan ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
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[lettre en-tête Queens Hotel Kandy Ceylan]

18 février 1931

Je me plais bien à Kandy, il fait beau, il fait chaud le pays est jolie [joli] et les gens sont amusants. Il y a un lac pas très grand, on peut faire le tour dans [en] une heure facilement. Au bout du lac, l’eau sort sous un petit pont on contrôle l’eau [pour] que cela ne vide pas le lac. L’eau descend par un escalier de neuf marches très hautes, sur le plus haut la plus part de l’eau vient dans un [une] espèce de tuyau qui fait bec. Je crois que c’est exquis pour les gens qui veulent se laver. Ils grimpent pour se mettre sous le bec puis ils savonnent les cheveux, les hommes ont les cheveux longs ici, ensuite le bec d’eau les rince bien. D’autres se metent [mettent] sur les autres marches tout à fait en bas, on lave le linge, on le trempe on l’étend sur les grandes pierres ou les rochers on le savonne, on le plie puis on batte bat les rochers avec le linge. J’ai vu une belle robe en soie [cerise ?] étendu [étendue] à sécher sur les rochers. Les prêtres buddist [bouddhistes] sont très chics, ils s’habillent toujours en jaune, depuis l’orange [un mot] jusqu’au citron pâle. Parfois une robe en soie orange est doublé [doublée] de citron, comme ils ont la tête toute tondue ils portent souvent des parapluies noirs, mais il y en a un qui a une ombrelle jaune à bordure orange. Ils ont toujours à la main un morceau de soie de couleur très vive, je ne sais si c’est un mouchoir ou un petit sac. Ils ont souvent un éventaille [éventail] de palme à manche d’écaille et un petit garçon apporte leurs livres ou leur mallette.

Un homme vient de devenir fou, il a poussé de hautes cries [hauts cris], il s’est roulé sur la terrace [terrasse] devant ma fenêtre avec beaucoup de poussière. Une foule l’entourait. Au bout d’un quart d’heure de cries [cris] et d’agitation, l’homme est allé à un rickshaw, il avait tout déchiré ses vêtements. Il enleva les cousins [coussins] et pris [prit] en-dessous un petit couteau, il est parti en courant dans la rue et la foule après lui, il va faire du malheur, on aurait du l’enfermer tout de suite avant qu’il est [ait] pris le couteau.

Les arbres sont très beau [beaux], ils ont des fleurs en quantité et de drôle de fruit, choses comme des courges qui [tiennent ?] au tronc. Connais-tu le « papaw »Sorte de grosse papaye. ? On me l’apporte avec du thé et des toasts le matin dans mon lit.

Il me semble qu’il puisse avoir ici beaucoup de resemblance [ressemblance] à [avec] Madagascar. Le lac est plein de tortoises [tortues] et de petits poissons. Un mendiant à qui on avait donné plus qu’il ne pouvait manger un jour a vidé son sac pour les tortoises, il y avait 6 ou 8 qui ont profité mais le lendemain il est revenu il y avait 25 ou davantage, ils sont difficiles à compter parce qu’ils plongent à [au] fond rapidement. Je vois beaucoup de choses de ma fenêtre. J’ai fait quelques esquisses, je te les montrera [montrerai] n’est-ce pas ?

Il me tarde d’avoir de vos nouvelles, de savoir que vous allez bien tout [tous] deux et de savoir vos projets.

J’ai lu une partie de l’article de M. Benda, le commencement est très obscur je vais persévérerL’article de Julien Benda, « Essai d’un discours cohérent sur les rapports de Dieu et du monde » est publié en plusieurs livraisons dans les numéros de La NRF d’octobre 1930 à janvier 1931.. Je vais à Colombo demain [un mot] pas en revenant. Les moustiques sont très petites mais elles piquent fort.

Les mouettes à Colombo sont les mouettes en miniature.

Il y avait un lézard dans ma chambre pendant quelques nuits dès que j’éteint [j’éteins] la lumière il rampait. Je crois qu’il cherchait des arraignées [araignées] et des mouches, il semblait grimper et tomber, lutter et manger, je suis contente qu’il soit allé ailleurs. Les lézards sont grands ici.

On sera à Marseille le 12 ou le 13 mars.

Au revoir Jean.

Je vous embrasse tout [tous] deux.

Bertha