Transcription Transcription des fichiers de la notice - Lettre de Pierre-André Benoit à Jean Paulhan, 1950 Benoit, Pierre-André (1921-1993) 1950 chargé d'édition/chercheur Société des Lecteurs de Jean Paulhan, IMEC, Université Paris-Sorbonne, LABEX OBVIL ; projet EMAN (Thalim, ENS-CNRS-Sorbonne nouvelle) PARIS
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1950 Fiche : Société des Lecteurs de Jean Paulhan ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
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[1950]

Je ne deviendrai jamais libraire parce que je ne saurai jamais rien faire pas même conduire une automobile. Je me demande pourquoi cette nuit je n’ai pas fait la chose la plus banale : me tuer. J’ai besoin d’être aimé et je ne le suis et ne le serai sans doute jamais. J’ai peur de la solitude et hier soir tous mes espoirs ont croulé. Il n’y a rien à faire c’est terrible. Et terrible d’arriver à trente ans de ne pas pouvoir gagner sa vie, un cœur. « Attendre la fin » me dit Becker mais l’attente est pour moi une angoisse profonde. Je me reproche de vous écrire ceci. Maintenant q [que] tout est perdu je regrette de n’être pas comme tout le monde, j’envie la puissance pour exercer ma tyrannie, l’argent car si Robert part c’est faute de situation avec de l’argent j’en faisais mon secrétaire et j’étais sauvé, q [qui] plus est lui aussi, j’envie l’abjection q [qui] me sortirait de moi. Dire qu’il suffirait d’un rien pour être heureux. J’ai peur de la solitude parce q [que] je ne suis ni sage ni créateur. Toutes les fatalités pèsent sur moi. Je suis fou, Ah ! q [que] ne suis-je comme tout le monde.

[mardi?]. La vie recommence peut-être. Ce q [qui] est promis est promis voici les cartes, les jeux sont faits malgré la mort dans l’âme. Je serais content si vous donniez un ex [exemplaire] à Dubuffet, à J. [Jouhandeau?] si cela l’amuse.

De tout cœurPA