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Paris, 43, rue de Beaune – 5, rue Sébastien-Bottin (VIIe)
Je n’ai pu vous adresser comme je le croyais un « programme » idéologique pour la revue que je projette : en effet j’ai passé plusieurs jours à discuter séparément avec Daumal, Lecomte et Michaux. Dans ces discussions résulte ceci :
Daumal et moi prendrions la direction d’une revue dont le but serait l’étude des conditions d’apparition de la Poésie, sa définition, le but vers laquelle la Poésie nous entraîne. La Poésie serait étudiée sous toutes ses formes et dans tous ses rapports. Nous ne désirons documentaire où nous publierions des textes poétiques peu connus, des traductions de textes orientaux.
Nous pensons que nous devons abandonner le titre du Grand Jeu. Nous projetons en effet q. q. [quelque] chose de bien différent de ce que nous avions fait avec le Gd Jeu (1).
Je pense qu’il reste actuellement à 1° établir le sommaire du 1er n° que nous pourrions consacrer à l’étude de l’Inspiration par exemple, ou de tout autre problème selon les suggestions que vous voudrez bien me fournir. 2° Trouver une subvention pour l’impression de 2 numéros au moins. Je pense que chaque n° coûtera 5 000 frcs.
Si vous voulez bien m’apporter votre appui, tout en me donnant un article et des conseils, qu’en
Je regrette fort de ne pas vous voir avant votre départ. Voulez-vous me tenir au courant par lettre de ce qu’auront donné vos démarches auprès de ce Mr. X qui pourrait, m’avez-vous dit, nous aider à payer le 1er n° ? Merci beaucoup à l’avance.
Je vous souhaite d’excellentes vacances mon cher ami, ainsi qu’à Madame Paulhan.
33 rue Delambre ; Paris (14°)
P. S.
Si vraiment il vous faut les 6 pages de chronique sur le Surréalisme pour le n° de septembre,veuillez me le dire par retour du courrier, cela m’ennuierait de l’écrire pour rien.
(1) autrement dit, une revue du genre, extérieurement, de « Documents », mais dont les collaborateurs auraient derrière (ou au-dessus de) la tête la Grosse Question, manifestée seulement par les absences angoissantes de la réponse. Aucune tentative d’ « exprimer notre pensée » en un programme, publiquement, ne serait tolérée. Ce serait faux toujours et toujours dangereux pour les malentendants.
et moi aussi, désolé de ne pouvoir descendre à Port-Cros (qui devient une île mythique pour moi, avec ses iguane en verre souple et ses lianes) je vous souhaite, et à Madame Paulhan, ce que vous désirez.