MINISTÈRE
DE LA JUSTICE
BUREAU
N°
J’ai adressé le 9 août à l’imprimerie Paillart une chronique sur le Surréalisme, en y joignant le petit mot que vous m’aviez adressé à cet effet. Je n’ai pas encore reçu d’épreuves, bien que nous soyions le 17. Si cette chronique passe dans le prochain n° comme vous l’avez dit, je voudrais en revoir les épreuves, car je désire modifier q. q. lignes du passage de mon texte Vases communicants. Voudriez-vous me faire savoir si je puis compter recevoir les épreuves à temps. Dans l’affirmative, devrai-je vous les renvoyer avec les corrections, ou les retourner directement à Paillart ?
J’ai par hasard rencontré avant hier soir Breton à la terrasse de la Coupole. Nous avons échangé quelques mots. Il s’est dit désemparé au point de friser « l’internement pour confusion mentale ». Sa position serait intenable. On ne le tolère pas à gauche. On le déteste à droite. Je lui ai répondu que tout cela me paraissait naturel et prévisible. Je n’ai pu d’autre part le décider à revenir vers le N.R.F. Il semble éprouver vis-à-vis de vous une grande gêne. J’aurais aimé mener
Cassilda et moi somme presque seuls à Paris. Tous nos amis sont absents. Cassilda a pu mener à bien une toile, et j’en suis heureux. De mon côté je travaille un peu – moins que je ne le voudrais sans doute – mais à peu près régulièrement.
J’espère que vous passez d’agréables moment de repos à Port-Cros, et que les insectes ne vous rappellent pas fâcheusement les littérateurs, ni les coups de bec des oiseaux sur les arbres les touches des machines Remington.
Veuillez transmettre l’expression de ma respectueuse amitié à Madame Paulhan et me croire mon cher ami bien cordialement vôtre
33 rue Delambre
Paris
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