Gide est bien évidemment l’un de ces assez rares écrivains qui deviennent « classiques » de leur vivant, c.à.d. [c’est-à-dire] dont l’œuvre cesse d’offrir prise à la critique que j’appellerai « active », tout en ne l’offrant pas encore à la « re-découverte » (comme, par exemple, et pour prendre un cas qui nous est familier, celle d’un Laclos). Il me semble que c’est ce qui ressort de votre introduction aux Caves . Gide n’est déjà plus un auteur « vivant », un contemporain, et n’est pas encore entré dans ce qu’on pourrait appeler l’actualité éternelle. Position ambiguë, un peu décourageante pour le commentateur.
(Ceci n’a rien à faire avec l’article que je vous ai promis, bien sûr, et dans lequel il ne sera pas question de porter jugement sur son œuvre, de quoi je serais bien empêché.)
Je n’ai pas osé vous dire le plaisir que j’aurais, assurément, à avoir chez moi un Fautrier.
Vous avez – nous étions trois à le penser, hier soir – admirablement réussi à ne pas répondre à la question « Qui êtes-vous, Jean Paulhan ? », rappelant avec une discrète opportunité que c’est le type même de la question à ne pas poser à quelqu’un devant un micro, c.à.d. [c’est-à-dire] devant quelques millions de personnes.
Auditeurs familiers de la radio et – malgré nous – de cette sorte d’émissions (qui sont généralement la vanité même
de cette vanité, le portrait physiognomonique de Catherine Gris, qui les introduit, donne tout de suite le ton : j’ai beaucoup aimé, en effet, vos « oreilles politiques »...
, quand elles ne sont pas indécentes), nous avons goûté le malaise de vos questionneurs, et le plaisant embarras dans lequel les plongeaient vos réponses.