Oui, bien sûr, je suis d’accord pour remanier tous les ms. [manuscrits] que l’on voudra ! Merci d’avoir pensé à moi.
J’attends donc des nouvelles de vous, de Queneau, de [Wermand?].
Vercors : on ne songe pas à lui reprocher de poser la question (tout de même, il n’est pas le premier…), mais de lui proposer des réponses à la fois simplistes et néfastes par leurs prolongements actuels . Je suis chaque jour un peu plus convaincu que l’intégration (cœur et esprit) au « social » est la pire des duperies, la plus dangereuse des démissions. Toutes les positions que l’on peut adopter, sur ce plan-là, sont à la fois stériles et vaines, toutes aboutissent à quelque trahison (de soi-même).
Je reproche aussi à Vercors de se prendre au sérieux avec une naïveté assez ridicule. A-t-on idée d’intituler son discours « Postulat apodictique » ? De se vouloir « un écrivain responsable devant les hommes » ?
Je n’ai pas parlé – par pudeur – du Silence de la mer . Mais entre nous soit dit, je trouve ce livre (et plus encore la pièce et le film qu’on en a tirés) passablement ridicule(s).
Pour ce qui est de la question, telle que vous la posez : « Comment se sentir chez soi dans le monde et pourtant n’avoir de cesse qu’on ne l’ait changé ; comment en être à la fois dégoûté et ravi ? », ne croyez-vous pas
1° que ce n’est pas du tout sous cet angle que V. [Vercors] voit les choses ;
2° que n’importe lequel des écrivains ou des peintres que nous aimons la pose de manière beaucoup plus aiguë (même si c’est implicitement) par le seul fait qu’il écrit ou qu’il peint.
Que pensez-vous du tour que prennent les affaires internationales ? Il me semble que l’on en est arrivé à une impasse qui n’a plus d’autre issue que la guerre, et que la date de celle-ci dépendra uniquement du désir soviétique : ce peut être aussi bien demain que dans 3 mois ou un an. Il m’étonnerait que les Russes attendent que les « atlantiques » aient tant soit peu organisé leur défense.