Encore un mot avant d’aller retrouver Pilotaz.
Les nouvelles mesures de contingentement du papier-journal ne vont-elles pas contrarier les projets « Comœdia » ?
Pour reproduire, en appendice à mon livre, les quelques textes que je vous ai dits, ne convient-il pas d’en demander l’autorisation aux auteurs ou aux éditeurs ? Il s’agit de :
- Don Juan le satisfait , de Montherlant (extrait de Sur les femmes , Éd. [Éditions] Palimugre)
- Le dernier visage de D.J. [Don Juan] , de Fabre-Luce (extr. [extrait] d’Intermèdes , Éd. [Éditions] Gallimard)
- D.J. [Don Juan] et Sade , de Rougemont (3 pages de l’Amour et l’Occident , Éd. [Éditions] Plon)
- quelques pages du Mythe de Sisyphe de Camus
- quelques pages du Casanova de Zweig (Éd. [Éditions] Attinger, réédité par Stock)
- un article de Th. Maulnier sur le D.J. [Don Juan ] de Molière, paru dans le Figaro littéraire .
J’aime assez le livre de Lionello Venturi : Pour comprendre la peinture (de Giotto à Chagall). Son parallèle entre Picasso et Braque me semble pertinent.
La « Gazette des Lettres » - pour faire comme tout le monde – va sans doute prendre, en octobre, la forme d’un « digeste » mensuel.
À notre retour, je sais deux personnes qui aimeraient (séparément) vous voir avec moi : Laudenbach – et un jeune Américain de ma connaissance, charmant garçon, fidèle lecteur de Jean Paulhan… et de Claude Elsen. Il se nomme Robert J. Donohue. J’aime beaucoup sa curiosité, son sérieux, et sa naïveté.
Mais je sais que vous me manquez encore bien davantage.
J’ai eu des éclaircissements sur les deux arrestations dont je vous avais parlé (et qui m’avaient été « annoncées » par le curieux être prémonitoire dont vous vous souvenez peut-être).
Aucun lien entre elles. Le premier des deux garçons en cause a été banalement dénoncé. Il est toujours emprisonné (à Rouen) mais ne semble pas devoir être extradé. Le second a été victime d’un étrange hasard : au cours d’un séjour à Paris (il venait – clandestinement – d’Espagne), il a été pris pour un gangster que la police recherchait et dont il était, paraît-il, le sosie. Il a été relâché et renvoyé en Espagne.
Ces quelques beaux jours du 15 août nous , ce courage tranquille. Et je garde un souvenir enchanté de la longue matinée que j’ai passée, seul, avec ma fille, au Jardin des Plantes : ce reflet de moi-même (nous avons, paraît-il, et me semble-t-il en effet, d’étranges et profondes ressemblances), comme épuré de tout ce qu’il peut y avoir en moi d’impur, de pesant, de marqué…
Ma femme m’a apporté le manuscrit d’un roman que j’achevais en 44. Il s’intitule Le Regard de Méduse . Il m’amuserait que vous le lisiez : c’est moi, avant . (Mais on change, au fond, si peu.)
Il paraît que j’ai gardé, là-bas, de bons amis. Marcel Lecomte, notamment.
Écrivez-moi en Savoie, n’est-ce pas ?
G. Delsenne
chez M. P. Pilotaz
GILLY-SUR-ISÈRE
(Savoie)