Transcription Transcription des fichiers de la notice - Lettre d'Alain Robbe-Grillet à Jean Paulhan, 1957 Robbe-Grillet, Alain (1922-2008) 1957 chargé d'édition/chercheur Société des Lecteurs de Jean Paulhan, IMEC, Université Paris-Sorbonne, LABEX OBVIL ; projet EMAN (Thalim, ENS-CNRS-Sorbonne nouvelle) PARIS
http://eman-archives.org
1957 Fiche : Société des Lecteurs de Jean Paulhan ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
Français
Jeudi [1957]

Hier soir, en rentrant de la N.R.F.? J'ai trouvé votre lettre sous ma porte. Toutes ces bonnes paroles (écrites et orales) m’ont fait un bien immense. J'ai besoin de beaucoup plus d’encouragements qu’on ne croit.

L'inquiétude (qui demeure toujours) concerne donc maintenant la seconde moitié du livre : N'allez-vous pas la trouver moins bonne ? (D'autant plus qu’elle n’est évidemment pas faite pour être lue trois semaines après la première.) mais, sauf imprévu, j’aurai fini l’ensemble à la fin du mois. (Il me reste une quinzaine de pages à écrire et je sais avec précision ce qu’elles doivent contenir.)

Mon deuxième sujet d’angoisse est, dans un autre domaine, l’appartement de la rue Laffite. Je vous ai dit à quel point mon existence en dépend. Or ce M. Pierre avec qui je suis en rapport ne veut toujours pas me donner d’assurance formelle, ni me désigner l’étage éventuel, à plus forte raison. Je l’ai rappelé après vous en avoir parlé, la semaine dernière, mais sans pouvoir lui dire la cause précise de mes inquiétudes : à savoir qu’un autre de vos protégés semble beaucoup plus avancé que moi dans une affaire concernant le même immeuble.

Or je n’ose plus, maintenant, en appeler à la direction générale, craignant de sembler me plaindre de M. Pierre qui est, en réalité, très aimable et fait sans doute ce qu’il peut, selon des règles qui ne dépendent pas de lui...

Alors je vais encore vous demander quelque chose – puisque vous avez déjà tout fait pour moi. Un jour que vous auriez au téléphone où vous rencontreriez M. Fourque, pourriez-vous lui raconter mes tourments ? J'ai une peur terrible que, tout à coups, l’on me fasse savoir que mes espoirs étaient vains et qu’il soit trop tard, à ce moment-là, pour tenter d’arranger les choses.

Il y a aussi cette question d’étage : serait-il possible d’avoir un des plus élevés ? Cela aurait une très grande importance.

Pardonnez-moi, je vous en prie, de vous ennuyer avec ces histories. Vous devinez tout ce qu’elles représentent pour moi.

Je suis votre dévoué, fidèle, reconnaissant

Robbe Grillet

Je reçois à l’instant (vendredi matin) votre seconde lettre. Merci encore de votre gentillesse. Mais pourquoi Barthes va-t-il être furieux ? Bien sûr il y a des choses qui ne collent pas – qui ne collent pas non plus avec mes propres théories – mais je compte sur Barthes, justement, pour me trouver des excuses de « situation » !

J'ai pensé à une de vos objections : « A. . . » Cela passera bien plus inaperçu avec le caractère d’imprimerie : « A... ». Ne croyez-vous pas ?

Alain