Après-demain, le Jeudi soir, nous serons à New York, je reprendrai ma vie américaine, je parlerai anglais, je lirai et j’écrirai en anglais, en américain.
Le voyage est parfait, monotone à souhait, reposant. Je dors beaucoup, j’ai participé jusqu’à maintenant aux manifestations, au programme de la Armand Line pour distraire les clients.
Je ne fais pas de connaissances – par timidité, par méfiance (on me conseille tellement de me méfier – je me méfie, sans excès) par paresse – en plus, je ne vois personne qui vaille un effort – je me trompe sûrement.
Je suis avec Suzanne qui s’occupe de moi, qui est avec moi toute la journée – et la nuit – nous partageons la même cabine, spacieuse, au milieu du bateau. Suzanne est quelqu’un de très bien, nous nous entendons.
Il y a du cinéma tous les jours, 2 heures sans pensée aucune, je lis l’Exegèse des lieux communs qui m’amuse. Suzanne lit André Maurois, les Romantiques Anglais que vous m’avez donné, je l’avais lu à Ville d’Avray.
Mon été cette année, comme toujours – un succès – peut-être plus – vous y avez contribué pour une grande part. Le gardenparty et le déjeuner ont été un plaisir pour moi, bien sure, mêlé d’un tas d’idées et de souvenirs d’autres gardenparties, d’autres déjeuners ) plus complets, plus insouciants – je recommencerai en 1954 et j’espère que vous m’aiderez, me soutiendrez.
Aussi mes voyages, à Munich, à Genève, à Dublin, à Londres et surtout à travers le Sud-Ouest de la France que je connaissais peu m’ont donné ce que j’en attendais.
L'automne en Amérique est la meilleure saison et se prolonge souvent jusqu’à Noël – je verrai des gens, je sortirai, je continuerai.
Si vous voulez me faire un grand plaisir, écrivez sur vous, ce que vous faites sur Paris, beaucoup de détails – j’ai un côté frivole, romanesque, j’adore les détails, je raffole des ramifications. Et j’aime beaucoup les lettres qui arrivent comme des cadeaux inésperés [sic].
Dites bien des choses gentilles à Germaine – je penserai souvent à elle et à vous