Transcription Transcription des fichiers de la notice - Lettre de Barbara Church à Jean Paulhan (28 août 1958) Church, Barbara (1879-1960) 1958-08-28 chargé d'édition/chercheur Société des Lecteurs de Jean Paulhan, IMEC, Université Paris-Sorbonne, LABEX OBVIL ; projet EMAN (Thalim, ENS-CNRS-Sorbonne nouvelle) PARIS
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1958-08-28 Fiche : Société des Lecteurs de Jean Paulhan ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)<br />
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Français

[Feuille au format « paysage »]

Le 28 Août 1958

Cher Jean,

Les cartes, votre mot sont arrivés hier – merci - autre journée bonne, merveilleuse, cela devient monotone quand de partout on m’écrit qu’il pleut – peut-être ne vois-je que le bon côté - peut-être je deviens insensible aux temps mauvais – le beau temps seul est important.

[en marge, entouré d’un cercle]

Quand je lis le journal je commence par le temps qu’il fait, qu’il a fait, qu’il fera, je suis plus légère bien plus, - plus énergique , quand il fait soleil – et nous l’avons eu souvent. Harry pouvait m’écrire de longues pages sur la température, sur le mauvais temps, même en Italie, il se mettait en colère – quand il faisait beau il ne commentait pas.

Hier soir j’ai vu RosenkavalierDer Rosenkavalier (Le Chevalier à la rose), opéra de Richard Strauss, représenté pour la première fois à Dresde en 1911, puis à Paris en 1927. (Richard Strauss), je suis encore sous l’envoûtement , c’était gai, parfaitement joué, j’y ai retrouvé mon impression d’il y a longtemps, la première fois.

J’étais avec une jeune nièce, Annemarie, 20 ans, elle ressemble à un Lucas CranachPeintre allemand de la renaissance (1472-1553), célèbre entre autres pour sa Lucrèce., très blonde, un teint éblouissant, une timidité [agressive ?] – elle devient rouge, d’un rouge très joli quand elle s’emballe – et cependant elle est d’allure décidée, d’opinion ferme.

Ce matin je dois faire mes paquets, je dois faire mes visites d’adieux, on m’en fera, demain encore un opéra (“ Figaro ” Mozart, Les Noces de Figaro.) dans le théâtre Rococo, avec Maria, ma nièce préférée – je crois même que vous la connaissez – elle est très jolie, très bonne, elle a 4 beaux enfants et un mari que j’aime beaucoup. Nous partirons le 30 Août en même temps, elle à Vienne pour des vacances, moi à Genève pour affaires.

Je serai à Ville d’Avray le 3 septembre – je serai heureuse de vous voir chez moi le 6, un samedi, pour déjeuner et vous resterez le weekend, un long weekend j’espère - Jean vous cherchera le 6 à 11 h 45 chez vous. – Téléfonez [sic] à Paulette. Vous nous raconterez WindermereWindermere, dans la région des lacs, au nord-ouest de l’Angleterre, où habitait Bertha Rhodes. – nous bavarderons -.[Sur la première page, dans la marge gauche, sans doute la suite de cette phrase :] on se taira.

Ou voulez vous faire jouer “Magie” ? Peut-être est-ce quelque chose qui donnera le change à nos inquiétudes de guerre, d’atomes, d’attentats, c’est gentil, juste assez effrayant pour nous déshabituer doucement de la peur habituelle.

Laure Lévèque ma chère pessimiste sera avec moi – mais elle m’a écrit des lettres gaies, elle est contente d’être avec ses petit-fils, Antoine et Henry, qui travaillent avec acharnement pour être prêts à des répétitions d’examens en Septembre à New York.

J’aurai des visites Américaines mi-Septembre, les Minton’s qui viendront d’un voyage en U. R. R. S. en avion – leur dernière etappe [sic] sera Helsinki – Bruxelles – Ville d’Avray.

Peut-être irai-je les rejoindre à BruxellesExposition universelle de Bruxelles entre avril et octobre 1958. pour deux jours - je dinerai [sic] dans l’Atomium, je verrai des tableaux, que je n’ai pas vu [sic] en Juin, j’irai au Cirque russeLe Cirque de Moscou a donné des représentations en juin et juillet 1958 à Bruxelles, où se tenait un festival mondial de cirque. dont tout le monde parle ici.

Et j’aime les cirques. Il y a parait-il [sic] un étonnant hippopotame, qui parle, chante, fait des choses surprenantes.

Mes cousins Américains, les Minton’s partiront en Amérique le 27 Sept. En avion, moi le 10 Oct. sur Liberté.

Je serai tellement contente qu’Edith Boissonas [sic] redevienne bien portante. Comme avant – avec tous ses efforts – d’être soucieuse seulement de poésie, de son succès, elle ne peut s’empêcher d’être angoissée – c’est peut-être un atout dans la recherche, dans l’inspiration, mais son inquiétude est manifeste et se communique.

Je suis contente que vous aimez [sic] les cartes, Wallace Stevens en raffolaitCe grand poète américain (1879-1955) était un ami de Barbara Church (voir les lettres précédentes)..

Je vous embrasse tous deux

Barbara

[quatrième feuillet : panorama ancien de la ville de Munich]