[Rep 3-17-55]
Pardon de nous apporter si tard nos vœux (mais qui bien sûr, vaudront jusqu’au 30 Janvier 56, De sorte qu’ils finiront par être en avance). Mais l’état de Maine s’est aggravé encore. Il est affreux de rester couché, et couché encore : Maine finit par vivre dans un monde qu’elle pense voir, qu’elle pense entendre et qui n’est pas tout à fait le vrai. Ainsi a-t-elle cru voir, par la fenêtre, des acteurs de cinéma conduire dans le jardin des ours, qui se sont échappés – et puis ces ours se jeter, pour les déchirer, sur des enfants qui jouaient. Elle voit bien d’autres choses, mais ses souvenirs sont intacts, et sa raison ferme. Elle lit beaucoup, ou ses infirmières lui lisent.
Je vais vous renvoyer la lettre de Wallace Stevens. J'ai été heureux de recevoir son livre. Je cite, dans la nrf qui va sortir deux très beaux poèmes de lui (d’après Profils ou Dominique Aury a donné son étude sur les Fables de Marianne Moore).
Qui va sortir, à moins que les eaux ne la retardent : notre imprimeur a été pas mal inondé, et les caves de la nrf aussi d’où l’on a dû déménager en toute hâte des milliers de « Pléiade » ; à présent, elles occupent en force les salons de la Série Noire. Elles paraissent s’y sentir à l’aise.
Les deux poèmes sont les Cataractes, et l’étonnante, la merveilleuse Jarre.
Les eaux se sont aussi promenées dans les allées du Jardin des Plantes. Qui a été surpris heureusement ? Ç'a dû être les poissons. Mais aussitôt désespérés, quand ils ont vu installer – quel manque de tact ! - devant leurs aquariums, les plus grandes pompes dont disposait l’Administration.
Autres mauvaises nouvelles du Jardin : les deux paresseux sont morts. Déjà dans ces derniers temps, ils bougeaient plus que d’habitude et parfois même agitaient les doigts. Ce devait être mauvais signe.
J'aurais bien voulu voir votre arbre de Noël multicolore. Bonsoir, Barbara, je vous embrasse.
Mais vous êtes tout à fait bien guérie, n’est-ce-pas ?
J'ai été très ému par le poème de W.St.