À la sérénissime princesse, Marie de Bourbon, princesse de Carignan.
Madame,
J’aurais cru d’avoir fait une faute irréparable, si après avoir donné quelque preuve de mon service à tous mes seigneurs les princes, je n’eusse encore fait éclore à mes veilles quelque fruit, pour vous témoigner la même obéissance. À la vérité, c’est peu de chose, si vous regardez à sa valeur, mais si vous le mesurez à mon affection, je m’assure que vous en ferez autant d’estime que s’il était de plus grande conséquence. J’attends plutôt l’un que l’autre, parce que vous êtes princesse, et d’une race qui tâche toujours d’imiter celui qui ne demande que notre zèle. Mes autres offrandes sont des victoires, et quand votre divin esprit aura bien considéré la présente, je crois que vous y en trouverez aussi. Vous y verrez quatre bergères d’Arménie, caressées par des bergers de diverses provinces : le sort y joue son rôle, et l’amour en qualité de juge y rend à la fin victorieux ceux qui désespèrent de la victoire. Si vous voyez le tout d’un œil favorable, et que j’ai l’honneur de le connaître, j’ose promettre à votre mémoire de si bons ouvrages, que vous aurez occasion de dire, qu’il n’y en a point au monde, qui se peut vanter d’être plus que je serai,
Votre très humble, très fidèle et très obéissant sujet et serviteur,
Borée.