À Madame la princesse de Guéméné.

Madame,

Tant de grands princes et vaillants seigneurs de qui le Ciel vous a fait prendre origine pour mériter le titre de la plus parfaite princesse du monde, relèvent tellement le lustre de votre grandeur que personne ne jette les yeux sur vous que pour en admirer les merveilles. La vertu qui vous a enfantée, les grâces qui vous ont nourrie, et la beauté qui vous a élevée, ont tellement rendu vos actions conformes aux leurs, que vous possédez seule ce qu’elles possédaient toutes ensemble, ce qui fait dire de vous à la renommée ce qu’elle disait de cette sage Artémise : « Que bienheureux seraient ceux de qui elle aurait les vœux agréables. » Aussi cette prophétie, Madame, force les volontés de chacun à désirer la gloire de vous servir, pour mériter par les victimes immolées sur vos autels l’honneur de votre amitié, dont les plus puissants monarques de la terre se tiendraient heureux. Mais ces bergers ayant appris que l’humilité loge où la sagesse fait sa demeure, ils n’ont point appréhendé de paraître ainsi pauvrement vêtus et mal polis devant vos yeux, après l’assurance que je leur ai donnée que vous les verrez de bon œil rendre les devoirs qui sont dus à vos mérites, capables de fermer la bouche des médisants lorsqu’ils verront gravé sur leur front le nom d’une si belle et puissante princesse, de qui j’espère mourir

avec votre permission,

Madame,

Le très humble et très obéissant serviteur,

De la Morelle.