Transcription Transcription des fichiers de la notice - Dédicace de <em>Orante</em> Scudéry, Georges de (1601-1667) 1636 chargé d'édition/chercheur Lochert, Véronique (Responsable du projet) Véronique Lochert (Projet Spectatrix, UHA et IUF) ; EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle) PARIS
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1636_scudery_orante 1636 Fiche : Véronique Lochert (Projet Spectatrix, UHA et IUF) ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
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Français

À Madame la duchesse de Longueville.

Madame,

J’avoue que ce que je présente à votre grandeur est indigne d’elle. Mais si vous ne deviez recevoir que les choses qui méritent de l’être de vous, il est certain que vous auriez droit de refuser tout ce qu’on vous pourrait offrir. Cette faiblesse, qui m’est commune avec tout le reste des hommes, ne me donne point d’affliction. Je sais qu’il est même des fuites qui ne sont pas honteuses aux particuliers, parce qu’elles sont générales, et que ceux qui se sauvent de la perte d’une bataille n’étaient pas obligés d’y mourir. Mais quand ce raisonnement n’aurait pas été capable de me faire hardi, le favorable accueil que j’ai toujours reçu de Votre Excellence m’eût aussi bien obligé de l’être. Oui, Madame, votre bonté fait ma hardiesse, et mon crime vient de votre vertu, mais quoique l’on tienne pour assuré qu’une erreur en appelle une autre, je m’empêcherai bien d’ajouter à la faute que je commets, en vous donnant une chose de si peu d’importance, celle de vous louer de mauvaise grâce. Que s’il faut toutefois que je le fasse, pour suivre la coutume que les autres ont établie, je pense avoir assez d’adresse pour m’en acquitter plus dignement sans éloquence, qu’ils ne feraient avec toutes les règles et toutes les beautés de leur art. Et cela, Madame, en disant seulement que vous êtes de l’illustre sang de Bourbon, si noble et si pur qu’il a moins de taches que le soleil, de sorte que vous auriez plus de peine à faillir que les autres n’en ont à bien faire. Et s’il faut encore ajouter à cette gloire essentielle une qui vous vienne d’ailleurs, après avoir remarqué que vous avez l’honneur d’appartenir au plus grand monarque de la terre, je dirai que vous êtes sœur d’un prince qui possède toutes les bonnes qualités que doit avoir un homme de la sienne, et femme d’un autre, de qui le cœur et l’esprit disputent de grandeur avec sa naissance. C’est tout ce que peut vous dire,

Madame,

Votre très humble et très obéissant serviteur,

De Scudéry.