Transcription Transcription des fichiers de la notice - Dédicace de <em>La Suite et le Mariage du Cid</em> Chevreau, Urbain (1613-1701) 1638 chargé d'édition/chercheur Lochert, Véronique (Responsable du projet) Véronique Lochert (Projet Spectatrix, UHA et IUF) ; EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle) PARIS
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1638_chevreau_suite-mariage-cid 1638 Fiche : Véronique Lochert (Projet Spectatrix, UHA et IUF) ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
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Français

À Madame la duchesse de Lorraine.

Madame,

Après qu’il s’est trouvé des personnes mortes pour avoir connu seulement leurs maladies, et quelques autres qui sont tombées d’un lieu élevé par la seule crainte qu’elles avaient de leur chute, j’ai si peur de n’agréer pas à votre altesse, par l’offre que je lui fais de cet ouvrage, qu’il semble que l’effet ait déjà suivi mon appréhension. Je sais bien, Madame, que comme il y a des vices où la suite est meilleure que la résistance, on voit aussi des vertus que le silence exprime plus majestueusement que les paroles, et la nature a fait sortir de sa main des beautés que toutes les bouches de la renommée ne peuvent publier sans corrompre quelque chose de leur grâce. Il est, Madame, des perfections de votre altesse, comme des choses saintes dont on ne doit approcher qu’avec une crainte religieuse, et s’en proposer le récit, c’est vouloir chercher une occupation bien juste, mais qui demande une longue vie, et un esprit aussi grand et aussi noble que son sujet. L’illustre maison dont vous êtes sortie n’est pas la seule chose qui vous rend recommandable : vos bontés font une partie de cette estime, et toutes ses qualités qui laissent de la honte à votre sexe, et de l’admiration au nôtre en font l’accomplissement. J’eusse bien souhaité de ne vous offrir pas si peu que je vous offre, et je crains que ce présent, qui est une marque de mon indigence, en soit encore une de ma témérité. Mais j’ai forcé toutes sortes de considérations, j’ai voulu être téméraire, et j’ai cru que la honte était un crime lorsqu’elle nous empêchait d’approcher de la vertu. Il y a certains péchés pour lesquels Dieu et les hommes n’ont point fait de châtiment ; peut-être Madame que celui que je fais est de cette nature, et qu’en tout cas vous aurez assez de bonté pour me le pardonner quand vous saurez que ma passion est plutôt aveugle que mon choix. Et si un empereur a dit autrefois qu’aucun ne s’en devait retourner triste après avoir parlé à un prince, je me tiens le plus glorieux homme du monde d’avoir parlé à une des vertueuses princesses de notre temps, et de lui avoir fait agréer les protestations que je fais d’être éternellement,

Madame,

De son altesse,

Son très humble et très obéissant serviteur,

C.