Transcription Transcription des fichiers de la notice - Dédicace de <em>Les Trois Oronte</em> Boisrobert, François de (1592-1662) 1653 chargé d'édition/chercheur Lochert, Véronique (Responsable du projet) Véronique Lochert (Projet Spectatrix, UHA et IUF) ; EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle) PARIS
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1653_boisrobert_trois-oronte 1653 Fiche : Véronique Lochert (Projet Spectatrix, UHA et IUF) ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
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Français

À Mademoiselle Martinozzi.

Mademoiselle,

Si cet ouvrage comique n’était qu’un pur effet de mon imagination, et s’il ne se trouvait recommandable que par ses vers assez enjoués, et par sa disposition assez juste et assez naïve, je vous prie de croire que je n’aurais point été assez hardi pour le soumettre à l’honneur d’une aussi glorieuse protection que la vôtre. Mais comme je l’ai fait par l’ordre et par le commandement absolu du plus grand roi du monde, j’ai cru que cette considération toute seule lui pourrait donner du prix et lui acquérir même quelque estime auprès de vous, et qu’ayant été assez heureux pour divertir toute la cour par sa représentation, il le pourrait bien être encore assez pour ne pas déplaire par sa lecture à celle qui en fait aujourd’hui le principal ornement. Souffrez donc, Mademoiselle, que sur ce fondement je me donne la liberté de vous le présenter et ne condamnez pas la proposition assez hardie que j’ose avancer, qu’il y ait quelque chose dans le monde qui vous puisse plaire. Je sais que l’on voit tous les jours à vos pieds les plus grands de la terre qui n’osent aspirer à cette gloire, mais mon ambition est mieux réglée que la leur, et qui ne songe qu’à vous divertir, quelque téméraire qu’il puisse être, s’il ne trouve de l’agrément auprès de vous, y doit trouver tout au moins de l’indulgence. Je soutiens donc encore une fois, Mademoiselle, que si mes avis ne m’ont point flatté, et s’il est vrai que j’aie aussi heureusement rencontré dans ce petit dessein qu’ils me le persuadent, je puis aujourd’hui plaire aux plus beaux yeux du monde sans blesser leur modestie, mais je ne puis leur déplaire sans me perdre, et sans courre la même fortune des autres ambitieux que nous condamnons. Ne dédaignons donc pas s’il vous plaît, Mademoiselle, de répandre sur cet ouvrage un petit rayon favorable de ces mêmes yeux qui inspirent partout aujourd’hui l’honneur, l’ambition, ou la joie et, comme vous êtes très généreuse, jugez que tout l’avantage qu’il espère dans le monde dépend de l’accueil favorable que vous lui ferez ; je suis,

Mademoiselle,

Votre très humble et très obéissant serviteur,

Boisrobert, abbé de Châtillon.