Transcription Transcription des fichiers de la notice - Dédicace de <em>La Désolation des filous</em> Chevalier, Jean Simonin, dit (16..-1674) 1662 chargé d'édition/chercheur Lochert, Véronique (Responsable du projet) Véronique Lochert (Projet Spectatrix, UHA et IUF) ; EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle) PARIS
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1662_chevalier_desolation-filou 1662 Fiche : Véronique Lochert (Projet Spectatrix, UHA et IUF) ; projet EMAN (Thalim, CNRS-ENS-Sorbonne nouvelle). Licence Creative Commons Attribution – Partage à l'Identique 3.0 (CC BY-SA 3.0 FR)
<a href="https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb39325135p" target="_blank" rel="noreferrer noopener">Arsenal 8-BL-14204</a>
Français

À Mademoiselle C. M.

Mademoiselle,

Vous serez surprise assurément quand vous verrez que je vous dédie La Désolation des filous, ou les malades qui se portent bien, mais que cela ne vous surprenne point, puisque je ne vois pas à qui la mieux dédier qu'à vous, étant aussi grande voleuse qu'ils sont voleurs, et je pourrais même passer plus outre, en vous disant que vous volez tous les jours plus de cœurs, de franchises, de libertés qu'il ne s'est fait de larcins depuis que le monde est monde ; de sorte, Mademoiselle, que je souhaiterais que, comme on a défendu de porter des armes, il eût été aussi possible de vous défendre de porter vos charmes : je ne serais pas si fort à plaindre que je suis, et l'on ne me verrait pas malade dans le moment que vous vous portez le mieux du monde. Encore si mon mal vous pouvait toucher un peu, j'aurais quelque espèce de consolation, mais je crois que vous êtes de ces malades qui se portent bien, et que vous en ferez souffrir encore beaucoup avant que vous en ressentiez la moindre émotion. Toutefois mon mal m'est si doux que je l'endure avec patience et, pour vous le témoigner, vous voyez bien que je ne fais point mentir le commun proverbe qui dit qu'il faut faire le bien contre le mal, puisque je vous fais un présent dans le temps que vous me faites souffrir. Cependant, Mademoiselle, je connais que j'ai tort de me plaindre de vous, voyant qu'alors que je vous aime, je ne fais que ce que je vois faire à toute la terre : pourquoi voudrais-je donc que vous eussiez plus de pitié de moi que de tous les autres ? Non, non, je laisse tout à votre option et me tiendrai trop heureux si vous daignez seulement agréer cette comédie de la part de

votre très humble et très obéissant serviteur,

Chevalier.