À Madame, Madame Anne de Hoorn, femme de Monsieur Corneille de Vlooswyck, seigneur de Vlooswyck, Diemerbroek, et Papekop, consul, sénateur et député en l’amirauté d’Amsterdam.
Madame,
Encore que mon nom ne peut pas être placé au rang illustre des poètes, pour lesquels vous avez tant d’estime et d’amour, j’ose toutefois me présenter devant vous avec ce petit présent, comme un qui sert tant soit peu à l’établissement, et progrès du glorieux règne de la divine poésie. Comme toute autre divinité, de même cette grande déesse n’a pas seulement parmi ses sujets des docteurs pour enseigner sa doctrine, des prêtres pour exercer sa religion, mais aussi au service de son temple des ministres d’un moindre rang, comme des portiers, des sacristains, et semblables, du nombre desquels je m’estime, et avec lequel titre je prends la hardiesse de vous présenter en toute humilité le don que j’apporte. Ce sont les Œuvres de M. Quinault que je vous offre en qualité de celui qui les a ramassés et imprimés. Et encore que le peu que j’ai contribué et qu’il y a du mien en ce don, n’a nul rapport à la grandeur de la personne à qui je l’offre, comme étant non seulement pourvue des qualités extraordinaires des vertus et sciences, et particulièrement, d’un accurat discernement de la bonté des poèmes, mais aussi très digne femme d’un consul et sénateur de cette grande ville. La gentillesse pourtant, que j’ai apportée à la pièce, ne cédant nulle part à ce que peuvent ceux de mon métier et la bienveillance, que vous avez toujours eue pour les pièces de théâtre de M. Quinault, m’inspirèrent une pleine confiance que je ne serai pas rebuté. Certes si les dieux ne recevaient que des offrandes qui égalassent leur haute dignité, tout le monde serait dispensé de consacrer, et personne n’aurait besoin d’aller à leurs temples. Mais leur bénignité a des tendresses plus grandes pour le genre humain, et regardant au cœur de ceux qui font l’oblation, agréent leurs dons selon leur zèle, encore qu’ils soient destitués de la dignité qu’ils devraient avoir pour répondre à leur majesté. De même la confiance que j’ai en votre bonté m’a persuadé que vous ne refuserez pas le don que je vous fais, et que vous aurez égard non tant à sa petitesse, qu’à la grandeur du zèle de celui qui le fait, et qui désire de toutes ses forces de vous faire paraître qu’il est en vérité,
Madame,
Votre très humble, et très obéissant serviteur,
A. Wolfgang.