À la reine.
Madame,
Astrate ne s’est pu résoudre à se consacrer qu’à votre Majesté, et l’avantage qu’il a eu de ne lui pas déplaire, lui a trop élevé le cœur pour chercher une moindre protection que celle de la plus illustre de toutes les reines. Le choix le plus glorieux qu’il pouvait faire, a d’abord été celui où il s’est osé déterminer. Et en effet, Madame, si l’on regarde votre Majesté du côté de sa naissance, où peut-on découvrir plus de grandeur ? Si l’on la considère par le sacré nœud qui l’unit au monarque le plus renommé qui fut jamais, où peut-on voir plus de gloire ? Et si l’on observe jusque dans sa vivante image, c’est-à-dire dans le prince admirable qu’elle nous a donné, où peut-on remarquer plus de charmes et plus de merveilles ? Mais, Madame, pour savoir qu’il n’y a rien dans la nature de plus accompli, ni de plus éclatant que votre Majesté, il n’est besoin que de tourner les yeux sur elle-même, et que d’envisager son propre mérite. C’est un bien et un ornement tout ensemble, pour ce royaume dont il vient de témoigner assez que le prix ne lui est pas inconnu : tant de larmes répandues, tant de cris redoublés. Enfin, Madame, cette désolation publique, et ces frayeurs universelles qui n’ont fini qu’avec le péril dont votre Majesté n’a que trop été menacée, lui doivent être d’assurés témoignages que toute la France la reconnaît pour une des principales sources de sa félicité. Astrate n’a pas manqué de faire aussi son devoir dans une consternation si générale, et quelque impatience qu’il eût de sortir des ténèbres où il était demeuré depuis plusieurs siècles, il s’est bien gardé de paraître au jour, tandis qu’il y avait lieu de craindre pour la plus belle vie du monde. Il est vrai, Madame, qu’il en a été avantageusement récompensé par l’honneur qu’il a reçu d’entrer dans les premiers divertissements qu’il a plu à votre Majesté de choisir après son heureuse convalescence, et si elle a encore la bonté d’agréer l’hommage particulier qu’il ose ici lui rendre, il n’y aura plus rien qui manque à l’accomplissement de son bonheur. Si toutefois il lui peut rester quelque chose à souhaiter, ce sera seulement que celui qui a pris soin de le faire revivre avec tant de succès, puisse prendre quelque part à sa bonne fortune, et qu’il soit permis d’oser publier qu’il est, avec un zèle très ardent, et des respects très profonds,
Madame,
De votre Majesté,
Le très humble, très obéissant et très fidèle serviteur et sujet.
Quinault.