À Madame la maréchale de l’Hôpital.
Madame,
Ma Critique s’est imaginé qu’après vous avoir fait rire deux ou trois fois, elle vous ferait rire toujours. Sa présomption est tout à fait grande, mais Madame, je ne laisse pas de vous la présenter, parce que c’est une occasion de vous donner de nouvelles assurances de mes respects et que je ne veux en laisser échapper aucune. Peut-être me soupçonnerez-vous d’agir par quelque autre intérêt et de ne vous l’offrir que pour mettre adroitement mon coup d’essai sous votre protection ? Je ne m’opposerai point à ce soupçon qui ne me saurait être qu’avantageux et l’honneur d’être protégé d’une personne comme vous est assez considérable, pour ne me défendre pas d’avoir eu dessein de me le procurer. Peut-être aussi craignez-vous que je ne me veuille servir de la même occasion pour vous donner des louanges, mais, Madame, je sais trop qu’aux charmes inévitables de la beauté et qu’aux lumières et à la délicatesse de l’esprit vous joignez une modestie qui ne souffrirait qu’avec peine tout ce qu’on serait obligé de vous dire. Qu’un autre que moi fasse tant qu’il lui plaira votre éloge. Qu’il publie que vous donnez lieu à la Fortune de se plaindre de vous de ce que la fidélité inviolable que vous voulez garder aux cendres d’un illustre époux l’empêche d’élever votre vertu aux grandeurs qu’elle mérite : c’est une vérité qui n’a pas besoin de mon témoignage pour être connue de toute la Terre, et je me contente de demeurer aux termes que la raison me prescrit, de vous assurer que personne n’est avec plus de respect que moi,
Madame,
Votre très humble et très obéissant serviteur.
De Subligny.