À Madame de Harbourg, etc.
Ce n’est point mon dessein de chercher à m’acquitter de ce que je vous dois par l’offre que je vous fais de cette comédie. Je sais que c’est vous devoir encore davantage que de la mettre sous votre protection, et ma joie est si grande de le publier que je suis aveugle sur ce que je vous présente pour prendre une si favorable occasion de vous rendre mes très humbles devoirs avec plus de promptitude. Il est certain, Madame, que si je consultais ma faiblesse, je ne ferais pas une entreprise si relevée, mais mon zèle l’emporte sur toutes sortes de considérations, et cette bonté toute particulière que vous avez, qui vous sait attirer les cœurs de tout le monde, me donne assez de présomption pour croire que vous ne refuserez pas un accueil favorable à cette pièce que je prends la liberté de vous dédier, et puisqu’elle est pour votre divertissement je ne doute point que vous ne la regardiez comme une chose qui vous appartient et qui depuis longtemps vous était due. Votre générosité toute particulière, Madame, me persuade qu’elle obtiendra une protection si avantageuse. Ce n’est pas que je prétende vous l’offrir comme une chose digne de votre mérite, j’en connais trop le prix, je suis assez instruit que vous avez une connaissance parfaite de toutes choses. On voit cette belle union qui se trouve en votre personne des grâces du corps et de la délicatesse de l’esprit, qu’ordinairement on n’a pas lieu d’admirer autre part. Il n’en est point sans doute de plus agréable et qui pénètre plus que le vôtre, et comme votre beauté se trouve sans affectation, votre esprit est de même sans le secours de l’artifice, et sait juger de toutes choses avec un discernement admirable. Mais je ne m’aperçois pas, Madame, où je m’emporte, et que, me voulant défendre de vous louer, j’entreprends votre portrait sans savoir à quoi je m’engage, et que la modestie que vous avez au suprême degré ne veut pas entendre ni souffrir votre panégyrique. Je vous marquerai donc mon respect par mon silence, et si mon zèle s’ose encore échapper ce sera pour publier que je suis,
Madame,
Votre très humble et très obéissant serviteur,
D. C. de Nanteuil.