Aux lectrices.

Il me souvient bien, mes dames très honnêtes et vertueuses, de vous avoir promis que je vous ferais voir bientôt la sainte Tragédie d'Holopherne et Judith. Je dis Le Miroir des Veuves, pour vous y mirer dûment et voir les singulières grâces de Dieu qu'il épand sur les veuves qui se comportent en sa sainte crainte au bien d'une commune. Le voici donc à votre commandement, recevez-le comme vous avez fait celui des Ménagères, et le mettez aussi en vos cabinets. Principalement vous, veuves solitaires et désolées, qui avez le temps propice pour ce faire, d'autant qu'il vous convient de vous tenir à recoi et rencloses en vos chambres secrètes, et vous y verrez clairement si votre maintien et condition ressemble à celle de la veuve mondaine (la curiosité et garrulité de laquelle toute femme honnête doit fuir comme peste et poison) ou bien si votre comportement et vie se rapporte à celle de la virile Judith, laquelle doit être imitée de toute veuve vraiment chrétienne et religieuse. Or Dieu vous en fasse la grâce, Mesdames, afin qu'à la gloire du Seigneur et l'édification de son Église, vous puissiez ici vivre en repos, et avoir au siècle à venir le salut éternel. Ainsi soit-il.